E-Love , livre ebook

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Avoir 50 ans dans quelques semaines, se faire plaquer par son mari qui a rencontré une Capucine de 28 ans, refuser une fois de plus les avances d’un collègue prof en pantalon de velours côtelé, s’inscrire sur un site de rencontres, faire l’amour avec de parfaits inconnus, tomber enfin sur un homme qui vous plaît vraiment et vous emmène dans une boîte à partouze, s’évanouir dans le métro, oublier la date de son propre anniversaire, cauchemarder un plongeon dans une piscine vide, pleurer devant « La Peau Douce » de François Truffaut, ne plus avoir de Kleenex… Ce sont des choses qui arrivent.
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Nombre de lectures

79

EAN13

9791022000178

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

1 Mo

E-LOVE

Scénario : Anne Villacèque, Sophie Fillières Réalisation : Anne Villacèque
Production : AGAT Films & Cie - ARTE France
Version : juillet 2010

© Presses Électroniques de France, 2013
1. MÉTRO. INT-SOIR
Le passage rapide d'une rame de métro.
Un couple, à l'intérieur du compartiment, dans la chaleur d'un soir d'été. Pressés l'un contre l'autre, ils s'embrassent. Ils ont tous deux entre quarante et cinquante ans, plus tout à fait de jeunes amoureux.
L'homme est large d'épaules, séduisant, des cheveux encore bruns.
La femme a le visage fin, les cheveux tirés, elle a l'air heureuse.
Ils sont bien assortis, comme un couple de longue date.
Les baisers se font plus langoureux. Ils se désirent, et ils se le montrent.
Le métro arrive à quai. Les portes s'ouvrent.
Une bousculade, quelques cris : la femme au visage fin s'est évanouie.
2. MÉTRO QUAI STATION. INT-NUIT
Elle ouvre les yeux. Combien de temps a-t-elle perdu connaissance ? Sa jupe est relevée très haut sur ses cuisses. Elle a froid.
Devant elle, le visage d'un jeune homme, cheveux coupés très courts, qui lui sourit. Il rabat la jupe sur ses jambes, pose une veste sur elle pour la réchauffer.

Lui
Ça va mieux, non ?

Elle
Oui… Tu fais une drôle de tête. Tu dois me trouver ridicule.

Elle le regarde fixement. Il sourit toujours, calme et rassurant.

Elle
Excuse-moi, hein. Tu m'en veux pas, au moins ?

Elle essaye de se redresser mais l'homme la maintient gentiment allongée.

Lui
Restez allongée, restez allongée…

Elle regarde autour d'elle, la station, les voyageurs qui passent ou s'arrêtent un instant devant elle.

Elle
Mais ce n'est pas ma station là.

Lui
C'est possible, en effet.

Elle
Oh… ça tourne. On est où ? Et vous êtes qui ?

Lui
Tout va bien, restez tranquille. Je suis le pompier, Madame.
Elle
(De plus en plus perdue)
Je comprends, je comprends…

Le pompier prend son poignet pour vérifier son pouls. Elle se laisse faire passivement.


Lui
Vous avez pris de la drogue ? Des médicaments ?

Elle
De la drogue ? Quelle drogue ?

Il a pris le sac à main de la femme.

Le pompier
Vous permettez ?

Le pompier fouille dans le sac de la femme, en sort un portefeuille, des kleenex, et une boîte de pastilles.


Le pompier
(Il agite la boîte de pastilles)
C'est quoi, ça ?

Elle
Où est Alex ? Des nicorettes.

Le pompier
Qui ça ?

Elle
Ben Alex, mon mari.

Le pompier
(Rassurant)
Ne vous en faites pas. Il va revenir.
3. QUAI MÉTRO. INT-NUIT
Plus loin, dans un recoin du quai invisible aux yeux de la femme, un autre pompier interroge l'homme séduisant qui accompagnait la femme évanouie.

L'homme séduisant
Je ne sais pas.

Le second pompier
Son prénom, au moins.

L'homme séduisant
Je ne sais pas.

Le second pompier
Vous étiez avec elle, quand même.

L'homme séduisant
Je la raccompagnais chez elle, voilà.

Le second pompier
Chez elle où ?

L'homme séduisant
Je ne sais pas.

Le second pompier
Vous ne savez pas grand-chose.

L'homme séduisant
Non c'est vrai.

Le second pompier
Bon… Pensez-vous qu'elle soit droguée ? Diabétique ?

L'homme séduisant
Diabétique ? Heu, non, non.

Le second pompier
Vous ne connaissez pas son prénom mais vous savez qu'elle n'est pas diabétique ?

L'homme séduisant
(Qui soupire)
Je n'ai pas dit ça exactement. Je voulais dire… Non, pas que je sache.
4. MÉTRO QUAI STATION. INT-NUIT
La femme est maintenant assise sur un banc de la station, la veste du pompier sur ses épaules. Elle paraît frêle et fragile mais est nettement requinquée.
Le pompier détaille scrupuleusement sa carte d'identité.

Le pompier
Paule. Paule Zachmann.

Paule
Oui, avec un Z.

Le pompier
Et vous habitez toujours à cette adresse ?

Paule
Oui. Je suis mariée et j'ai une fille de quinze ans. Je peux y aller s'il vous plaît. Je vous assure que ça va. J'ai dû faire un peu d'hypoglycémie, c'est tout.


Le pompier
(Imperturbable)
Ce n'est pas la question.

Elle enlève la veste du pompier.
Il la prend et l'enfile.
Paule fouille dans son sac et en ressort une photo de petit format un peu écornée.

Paule
Tenez, c'est lui, c'est Alex.

Le pompier regarde la photo et fait signe que non, désolé, mais non, il ne voit vraiment pas.
Il lui signifie de rester là, il revient de suite.
Paule reste seule sur le quai, sa photo à la main.
La photo tombe à terre sans qu'elle paraisse s'en apercevoir.
5. SALLE DE BAIN. INT-JOUR
Un écran flou où l'on devine plus qu'on ne voit des fragments de visage de femme, sous un flot de lumière blanche, neigeuse.
Des yeux, une bouche, des mèches de cheveux.

Paule
(Voix off)
Je m'appelle Paule, Paule Zachmann, et je suis professeur de philosophie. Pour être plus exacte, je suis spécialiste de ce mouvement de pensée, fin XVIIIème, qu'on appelle si joliment « Les Lumières ». J'aime les Lumières et pourtant je n'ai jamais vu très clair. À douze ans, je portais déjà des lunettes affreuses, avec des verres très épais. En 5 ème , nous avons disséqué une grenouille et un crétin a fait une blague sur Paule la grenouille. Alors j'ai décidé que plus personne ne me verrait comme ça. Le matin, je me lève toujours la première et je mets tout de suite mes lentilles de contact. Et le soir, je me couche la dernière. Jamais un homme ne m'a vue avec mes lunettes.

L'image redevient nette. On voit le visage de Paule, son regard derrière une grosse paire de lunettes. Elle est face à un miroir de la salle de bain, épaules nues, et se regarde fixement.

Un homme
(Off)
Paule ?

Paule enlève ses lunettes précipitamment.
6. STATION MÉTRO. INT-NUIT
Paule se lève de son banc, elle vient de remarquer la photo tombée à terre. Quelqu'un marche dessus en passant.
Paule se jette sur la photo pour la récupérer.
La photo est abîmée, comme une photo qu'on a beaucoup manipulée. On y voit le visage d'un homme encore jeune, très brun, au visage ouvert et souriant.

Paule
(Elle appelle, en off)
Alex…
7. CHAMBRE D'UNE MAISON DE CAMPAGNE. INT-JOUR
Un homme au corps élancé – l'homme de la photo – se rhabille à la hâte dans une chambre aux fenêtres ouvertes sur un paysage verdoyant et ensoleillé.

Paule
(Elle répète, toujours en off)
Alex !

Elle est encore pelotonnée dans le lit. Manifestement, ils viennent de faire l'amour.

Paule
(Qui sourit)
C'est quoi ce short ?

Alex
Mon short de tennis. Il me va pas ?

Paule
Viens te rallonger un peu… Tu ne vas pas faire un tennis maintenant.

Alex
J'ai promis au voisin.

Il se penche et l'embrasse.



Paule
Celui que tu trouves si bourge, si coincé, et dont tu ne supportes pas qu'il dise « tu vois ce que je veux dire » toutes les deux secondes ?

Alex
En fait, il est plutôt moins con que ce que je pensais. Et puis ça fait toujours du bien de faire un peu de sport.
(Un temps)
Tu vois ce que je veux dire ? !

Paule lui balance son oreiller.
8. SENTIER À TRAVERS CHAMPS. EXT-FIN D'APRÈS-MIDI
Un groupe de personnes marche le long d'un sentier à travers champs, sous la lumière chaude et brillante d'un après-midi de juin. Ils sont tous chargés de sacs et de paniers.
On reconnaît Alex dans son short de tennis, et Paule, en robe légère.
Devant eux, Fanny et Gilles, les parents, encore très alertes, de Paule.
Plus loin derrière, Rachel, la jeune sœur de Paule.
Et puis, fermant la marche, Nina, tout juste quinze ans, qui tient deux garçons jumeaux de cinq ou six ans par la main, un jumeau de chaque côté, et les aide dans les passages plus étroits ou difficiles du chemin.
Alex rayonne. Il est beau, léger

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