Le Jazz : un modèle pour apprendre
206 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Le Jazz : un modèle pour apprendre , livre ebook

-

206 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

Voici un ouvrage sur les savoirs du jazz transférables dans les champs de l'éducation, de la formation et des enseignements artistiques. Fruit d'une recherche en sciences de l'éducation, il étudie les interactions musicales et sociales des jazzmen et les contingences d'une "sensible" construction de soi. Il s'agit d'envisager le jazz comme un modèle d'apprenance spécifique et différent, à placer au coeur des théories contemporaines de l'apprentissage et de l'action.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2013
Nombre de lectures 107
EAN13 9782336284392
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Terrains sensibles
Collection dirigée par Hervé Cellier
Les terrains sensibles sont ceux que les institutions repèrent et ciblent avec des actions publiques. Ce sont aussi des espaces qui sont sensibles au sens médical du terme du fait des crises qui s’y déroulent. Enfin, les terrains sensibles sont ceux où la difficulté quotidienne amène les acteurs à faire preuve à la fois de sensibilité et d’innovation. Ces terrains relèvent de domaines variés : social, pédagogique, sanitaire, politique, culturel, esthétique…

Terrains sensibles est une collection consacrée à la publication d’études, d’enquêtes, de travaux de recherche qui décrivent ces différents domaines et en abordent les enjeux par des méthodologies multiples, elles aussi innovantes.

La collection Terrains sensibles veut contribuer à l’information, et à la réflexion sur les questions majeures qui affectent les territoires à différentes échelles, du local au global.

Déjà parus

Hervé CELLIER, Philippe POURTIER, Réussite éducative : une expérimentation sociale à Romans-sur-Isère , 2012.
Titre
Charles Calamel





LE JAZZ :
UN MODÈLE POUR APPRENDRE

De la musique à une construction de soi

INSIDERS



Postface d’Alain Vulbeau
Copyright

© L’Harmattan, 2013
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

EAN Epub : 978-2-336-28439-2
Remerciements
Cet ouvrage est le résultat d’une recherche qui s’est déroulée de 2007 à 2010. Je tiens à remercier ici ceux qui ont participé de près ou de loin à l’élaboration de ce travail en m’accordant du temps si précieux parce qu’irréversible.
Je pense à Anne Ducros, Hélène Labarrière, Sarah Lazarus, Andy Emler, Antoine Hervé, Jean-Jacques Avenel, Patrice Caratini, qui se sont prêtés au jeu des interviews avec une attention particulière à mes amis Sophia Domancich, Simon Goubert, Bernard Drouillet.
J’adresse un « incommensurable » merci à Sébastien Pesce, Gilbert Longhi, Bernard Bier et Alain Vulbeau, pour m’avoir permis de faire tutoyer Jazz et Sciences de l’éducation.
J’exprime ma gratitude à mon frère et ma sœur pour avoir fait entrer les arts par la grande porte de notre petite maison.
A mes complices, proches et sensibles, Flo, Charlotte, Marie et César, je les remercie pour leur amour et les « dictées de notes ».
AVANT-PROPOS
Le Jazz : un modèle pour apprendre est un livre sur les savoirs du jazz transférables dans les champs de l’éducation, de la formation et des enseignements artistiques. Fruit d’une recherche en sciences de l’éducation, il étudie les interactions musicales et sociales des jazzmen et les contingences d’une « sensible » construction de soi.

Ce livre ne raconte pas la vie privée des musiciens, ni ne fait un inventaire musicologique des chefs-d’œuvre improvisés qui font son histoire. Il s’agit plutôt de donner du jazz une vision de l’intérieur et l’envisager comme un modèle d’apprenance spécifique et différent, à placer au cœur des théories contemporaines de l’apprentissage et de l’action.

Insiders est l’illustration pour désigner ceux qui sont « dedans » ou qui veulent en être, et bien sûr, un clin d’œil à Howard Becker.
PROLOGUE
Je connais la perte, j’en ai fait très tôt l’expérience ; la perte des êtres chers et la résistance qui se met en marche pour combattre ce traumatisme.
Sur un plan climatique, c’était l’automne, il faisait gris sombre et il pleuvait. L’hiver 56 s’annonçait comme l’un des plus froids du XX e siècle. Les canalisations d’eau allaient geler puis exploser, inondant les petits appartements de l’immeuble parisien que nous habitions. Autour de nous, le quartier formait un petit village où les commerçants acceptaient facilement de faire crédit aux familles modestes.
Ma mère était triste et je ne savais pas pourquoi. Sa préoccupation ne semblait pas être le travail, car elle était active sur ce plan là. Pourtant, elle attendait avec impatience le passage du payeur des allocations familiales, à qui elle laissait généreusement, à chaque versement trimestriel, quelques pièces en guise de pourboire. Elle ne pouvait pas faire mieux.
Les enfants de l’immeuble jouaient dans la cour bien que ce soit interdit, mais le concierge ne disait rien ; au contraire du censeur, il nous protégeait des voisins mal lunés et bougons.
Sur cette toile de fond plutôt grise, les rythmes, les sons, les timbres, les mélodies se bousculaient sur le petit électrophone pour harmoniser quelques moments de vie. La musique de Mingus, Miles, Monk, Parker commençait à chanter à mes oreilles. Ils étaient là, déjà, comme les sauveurs de ce Blues ambiant. Ceux-là, quand je les entends encore aujourd’hui, j’ai l’impression que la lumière s’allume dans la pièce où je me trouve. Le jazz est source de vie ; c’est un walking bass permanent.
Mon enfance pourrait se marquer en contrepoints d’événements importants de l’histoire du jazz. Je suis né avec la sortie du dernier disque de Charlie Parker enregistré au Birdland, A Night at Carnegie Hall. Ensuite, le Kind of blue de Miles Davis coïncide avec la mort de mon père. Finalement, le jazz m’a fait passer de l’effervescence à l’apaisement. Il m’excite et me calme tout autant ; le jazz est dialectique.
À la maison, on écoutait beaucoup Charlie Parker et Charles Mingus ; mais ce n’est pas pour ça que je m’appelle Charles. On passait quotidiennement les disques de John Coltrane et de plein d’autres musiciens. Et puis il y avait une composition d’Ornette Coleman intitulée Lonely Woman , enregistrée par le Modern Jazz Quartet (MJQ) : c’était une musique de rebelles jouée par des musiciens noirs en smoking ; la classe ! Ma mère adorait cette version-là. Je l’ai sifflé le jour de ses obsèques. C’était curieux, ma mère et Milt Jackson, le vibraphoniste du MJQ sont partis la même semaine. S’il y a un Paradis, j’espère qu’il lui joue ce morceau, rien que pour elle.
À l’époque, le jazz s’achetait, s’échangeait, se partageait. Nous écoutions les disques avant que mon frère ne les prête ou ne se les fasse piquer. Et puis un jour, bien plus tard, il m’a fait découvrir le pianiste Les McCann qui jouait le thème « Jubilation ». Cela a été le déclic qui donnera à mes ailes, la portance suffisante pour prendre ma liberté. C’était une musique tonique, joyeuse, vivante, sensible. Le contrebassiste Leroy Vinnegard et le batteur Ron Jefferson jouaient simplement, rigoureusement, sans détour, mais avec un swing incroyable. À l’écoute, il semblait qu’il y avait le feu dans la petite boîte de jazz où ce trio avait été enregistré. Tous les morceaux étaient exécutés sur des tempos rapides et parfois, entre deux, le pianiste racontait des histoires qui faisaient rire le public. Aujourd’hui encore, la pochette de ce disque trône sur mon piano. Sur la photo, on y voit l’ambiance, on ressent l’humeur du public, on devine la fumée, la sueur, les rires, les claquements de doigts. Cette pochette est une fenêtre qui m’ouvre toujours sur une vie d’émotions.
À six ans, l’âge de la grande école, Gérard Nassoy, un ami d’enfance de mon frère aîné, qui devait avoir à l’époque une vingtaine d’années, a penché contre moi sa contrebasse. J’étais perché sur un tabouret, et j’ai senti les vibrations de l’instrument dans mon ventre lorsqu’il a fait jouer les cordes. Ma mère assistait à la scène. Dans ses yeux j’ai vu la beauté du tableau qu’elle avait devant elle. Comme l’aurait écrit Pagnol : Je venais de surprendre ma mère en flagrant délit d’émotion partagée 1 . Cet acte simple et tendre allait tracer le sillon central de mon parcours de vie.
1 Allusion à La Gloire de mon Père de Marcel Pagnol: Je venais de prendre mon père, mon surhomme, en flagrant délit d’humanité .
UN MODELE D’APPRENANCE
Le jazz est un cadre pour apprendre de soi. Il est éducation. Cela sous-entend l’identification des savoirs, savoir-faire et savoir-être nécessaires pour pratiquer cette musique. Il s’agit au fond de mettre à jour le mécanisme des apprentissages du jazzman et définir les paramètres par lesquels il joue cette musique, actualise ses connaissances, compétences et comportements. C’est pour le définir autrement que musicologiquement que j’ai eu besoin des sciences de l’éducation : elles m’ont aidé à comprendre ce monde de musique pour expliciter son fonctionnement interne.
Le jazz devient un modèle d’apprenance en ce sens que les jazzmen s’inscrivent dans une autodirection en apprentissage des codes et des formats pour élaborer leur musiqu

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents