Espaces sociaux, pratiques langagières et mise en scène(s) du travail
188 pages
Français

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Espaces sociaux, pratiques langagières et mise en scène(s) du travail , livre ebook

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Description

Maître de conférences en sciences du langage, Michel Dispagne s'attèle à développer une linguistique de l'intervention, en orientant ses recherches, d'une part sur l'articulation entre "sujet, langage, travail et insertion en contextes plurilingues" et d'autre part dans le champ de la créolistique. Ces contributions visent chacune à leur manière à interroger et à analyser les problématiques qui se tissent entre d'une part "pratiques langagières" et "travail" et, d'autre part, à circonscrire l'agir du sujet.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 décembre 2014
Nombre de lectures 32
EAN13 9782336363332
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Sous la direction de Michel Dispagne
Espaces sociaux, pratiques langagières et mise en scène(s) du travail Contexte européen vs contexte créole
Espaces sociaux, pratiques langagières et mise en scène(s) du travail Contexte européen vs contexte créole
Espaces discursifsCollection dirigée par Thierry Bulot La collectionEspaces discursifsrend compte de la participation des discours (identitaires, épilinguistiques, professionnels…) à l’élaboration/représentation d’espaces – qu’ils soient sociaux, géographiques, symboliques, territorialisés, communautaires… – où les pratiques langagières peuvent être révélatrices de modifications sociales. Espace de discussion, lacollection est ouverte à la diversité des terrains, des approches et des méthodologies, et concerne – au-delà du seul espace francophone – autant les langues régionales que les vernaculaires urbains, les langues minorées que celles engagées dans un processus de reconnaissance ; elle vaut également pour les diverses variétés d’une même langue quand chacune d’elles donne lieu à un discours identitaire ; elle s’intéresse plus largement encore aux faits relevant de l’évaluation sociale de la diversité linguistique. Derniers ouvrages parus Frank JABLONKA,Processus et différence en communication postcoloniale,2014. Fanny MARTIN,Pratiques langagières et basket-ball professionnel en France, 2014. Rada TIRVASSEN,Créolisations, plurilinguismes et dynamiques sociales, Conduire des recherches en contexte plurilingue : Le cas de Maurice,2014. Thierry BULOT, Isabelle BOYERet Marie-Madeleine BERTUCCI, Diasporisations sociolinguistiques et précarités. Discrimination(s) et mobilité(s), 2014. Julien LONGHIGeorges-Elia S et ARFATI(dir.),Les discours institutionnels en confrontation. Contribution à l’analyse des discours institutionnels et politiques, 2014. Sabine GOROVITZ,L’école en contexte multilingue. Une approche sociolinguistique, 2014. Montserrat BENITEZFERNANDEZ, Catherine MILLER, Jan Jaap DERUITER, Youssef TAMER,Évolution des pratiques et
Sous la direction de Michel Dispagne
ESPACES SOCIAUX,PRATIQUES LANGAGIERESET MISE EN SCENE(S)DU TRAVAILContexte européen vs contexte créoleL’Harmattan
Du même auteurDISPAGNE Michel (2013), « Biographisation, discours et accompagnement » dans Sujet, insertion, langages et territoires, ouvrage collectif (Michel Dispagne & Jean Biarnes, dir.), Publibook, Paris, p. 45-63.
1 AVANT-PROPOS
À la suite des conférences de John Langshaw Austin dans les années 50 aboutissant dans les années 60 à l’ouvrage "How to do Things with Words" traduit en français par "Quand dire, c’est faire", une nouvelle doxa a émergé comme l’indique Catherine Kerbrat-Orrecchioni dans "Que peut-on « faire » avec du dire ?" (2004 : 27-43) où il est possible de "faire des choses", d’agir avec du langage ou plutôt avec la langue actualisée en contexte interactif. Autour des années 80 et 90, les réflexions sur les rapports entre champ du travail et champ linguistique se sont intensifiées et des analyses multiples issues de recherches pluridisciplinaires (Filliettaz, 2006) ont mis en exergue ce que Josiane Boutet a proposé d’exprimer ainsi "la part langagière du travail"(2001) ou encore "La vie verbale au travail" (2008). De plus, ces courants de pensée ont une envergure internationale marquée par des travaux autant dans la francophonie que dans le monde anglo-saxon.
Ces diverses contributions, nous entendons les inscrire dans ce que Lorenza Mondala appelle un "tournant praxéologique" (2004 : 269) et Laurent Filliettaz un "virage actionnel" (2002 :16). Autrement dit, ces réflexions se veulent en
1 Michel Dispagne Maître de conférences en sciences du langage, habilité à diriger des recherches et qualifié en 7è et 73è sections du CNU. Membre du laboratoire CRILLASH (EA 4095) de l’université des Antilles et de la Guyane. Il est responsable de la spécialité professionnelle du master Éducation et Formation (Ingénierie des Actions d’Insertion et Développement Local) à L’UFR Lettres et Sciences Humaines, pôle universitaire de Martinique.
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continuité avec ces approches pluridisciplinaires pour à la fois bénéficier des épistémologies et des méthodologies développées dans ce domaine ; partager des réflexions et des outils d’analyses liées à des problématiques interactionnelles de pratiques et d’activités professionnelles articulées sur des formes discursives au sein de la vie sociale, particulièrement dans les espaces sociaux de travail ; proposer à terme quelques pistes de réflexions sur ces jeux de langage comme le dit Ludwig Wittgenstein, dans son ouvrage posthume "Investigations philosophiques"(1953) avec le souci de développer un champ de réflexion peu abordé dans les axes de recherches universitaires mais cependant nécessaire dans les espaces territorialisés pour éclairer les pratiques de travail propres au contexte franco-caribéen.
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1 INTRODUCTIONEspace social du langage au travailLes textes réunis sous le titreEspaces sociaux du travail, pratiques langagières et mise en scène(s) du travailreviennent, à divers titres, sur la relation que la recherche sur le langage, limitée ici à certaines de ses manifestations et à des approches déterminées, entretient avec le monde du travail. Nous ne ferons pas une présentation ordonnée de l’ouvrage, chapitre par chapitre, mais avancerons, en manière d’introduction, quelques réflexions suscitées par la lecture et qui feront écho aux problèmes posés par les auteurs. La recherche scientifique est encore divisée, institutionnellement et pratiquement, entre une recherche dite fondamentale et une autre dite appliquée, avec cette variante qualifiée de recherche-action, marquée par son implication dans des secteurs de la vie sociale et économique, plus particulièrement dans le secteur de l’éducation et de la formation. Il est maintenant demandé par les autorités de tutelle et les instances représentatives du pouvoir politique, chargées de mettre en œuvre des directives et d’évaluer l’activité scientifique déployée par les chercheurs, individuellement ou collectivement, non seulement de produire des connaissances et de diffuser des savoirs ou des techniques, mais encore de valoriser les travaux réalisés auprès de la société civile, de s’impliquer dans la formation à la recherche et d’entretenir des liens avec l’environnement socio-économique et culturel, notamment par des produits destinés aux acteurs du monde social, comme des rapports, études ou expertises.
Si cette vision est depuis longtemps établie en sciences expérimentales, aussi dans les domaines juridique et biomédical, elle est aujourd’hui largement présente en sciences humaines et
1 Dominique Ducard est Professeur en sciences du langage et codirecteur de Céditec (Centre d'étude des discours, images, textes, écrits, communication), Université Paris-Est Créteil.
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sociales, lesquelles sont invitées à passer du poste de vigilance critique de la société et de création intellectuelle qu’elles occupent depuis longtemps à celui d’incubateur d’idées, de soutien à l’innovation ou d’observatoire et d’analyse à des fins de conseil ou de préconisation, dans un esprit de veille, d’alerte ou de management. En un mot elles doivent répondre, comme on dit, à la demande sociale, que cette dernière soit issue de décideurs, dépendant d’organismes publics ou d’entreprises privées, ou d’associations et d’usagers.
Ces questions ne sont pas celles qui sont traitées ici de front mais elles sont évoquées dans ce qui est rapporté de la façon dont « intervient », pour reprendre l’un des termes utilisés, le chercheur en sciences du langage, quelle que soit sa spécialité, dans le champ social, plus particulièrement défini par ce qui est nommé « espaces sociaux du travail ». Il est rappelé que la relation entre langage et travail a donné lieu, dans le domaine linguistique, à de nombreux travaux, depuis les années 1980, et le lecteur trouvera d’utiles informations dans des rappels synthétiques et dans les nombreuses références bibliographiques auxquelles il est renvoyé, avec cette distinction théorique, entre autres, entre le langage comme travail, le langage dans le travail, le langage sur le travail. Il convient également de mentionner la tradition de la recherche en anthropologie linguistique ou en ethnolinguistique, qui nous a habitués à considérer les pratiques langagières comme des pratiques sociales et culturelles, dans des langues particulières, avec des usages réglés, indissociables de rites sociaux et de contextes situationnels, et liées à l’organisation de la société (espace-temps-pouvoir-savoir), à la répartition des tâches et au statut des individus, avec une spécification des usages du parler et des aires discursives de spécialisation. Ce sont ces deux termes que je retiendrai pour appréhender, en adoptant une expression soulignant l’intrication entre activité sociale et activité langagière, cetespace social du langage au travail:spécification etspécialisation. Cet espace n’est pas exclusif de la parole commune et de la communication ordinaire, lesquelles ne sont évidemment pas forcloses du monde du travail, même si certaines situations imposent un format strict (pensons par exemple à des instructions, à des consignes ou à des
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protocoles) ou si l’entrée dans un lieu défini par sa fonction « laborieuse » ou « industrieuse » (l’usine, l’agence, l’atelier, le commerce, etc.) nous plonge dans un univers de discours qui encadre ou englobe la parole des individus.
Disons que l’espace de la parole et de l’écrit au travail est un espace hétérogène, avec des phases, des régimes et des registres variés, pour partie contraint par l’organisation du travail dans sa dimension matérielle (aménagement de l’espace physique, équipement et mobilier, design et ergonomie des objets manipulés) et polysémiotique (écrit, parlé, iconique, audiovisuel, gestuel), sans oublier sa dimension institutionnelle (contractualisation, règlementation, communication). Toute étude s’intéressant au langage sur un lieu de travail pourrait ainsi procéder à une description exhaustive de ce lieu et à un inventaire des textesin situconsignes, notices, (signalétique, avertissements, règlements, annonces, affiches, tracts, dossiers, archives…) et toute étude d’une situation d’échange verbal dans ce même lieu serait attentiveà tout ce qui relève de l’intertexte (texte cité par un locuteur, par exemple la reprise d’une notification ou la consultation d’une notice) et de l’interdiscours (par exemple l’appel au discours syndical, patronal, gouvernemental, ou encore le renvoi à undiscours d’expert, de spécialiste, de technicien).
La lecture de notre ouvrage, qui envisage, sous des angles divers, l’espace du langage au travail, me conduit, après ces premières réflexions, à distinguer des problèmes qui sont d’ordre épistémologique, méthodologique et éthique.
Épistémologique est la question des savoirs scientifiques avec lesquels le linguiste, ou plus généralement le chercheur en sciences du langage, investit, dans son observation et son analyse, les lieux de son investigation, sonterraind’action. Il est évident que tout chercheur a un cadre théorique et opératoire qui lui permet de conceptualiser, de modéliser et d’interpréter, même si ce cadre est souple ou fait l’objet d’un « bricolage » en composant avec plusieurs référents théoriques. S’il y a « transfert des savoirs », dans une conception stricte de l’application, il faudrait aussi parler, en jouant avec la terminologie freudienne,
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