L âme ultraviolette
171 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

L'âme ultraviolette , livre ebook

-

171 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

Comment peut-on être née et se sentir orpheline ? Ressentir tout un pan de sa vie, son enfance, comme un trou noir qui aspire toute son énergie ? Ces questions obsèdent l'auteur depuis tant d'années qu'elles ont fini par prendre toute la place dans son existence. En cherchant la réponse à ces questions, l'auteur élabore une conception à la fois scientifique et philosophique du sens de la vie à travers les questions de nos choix et de notre place dans la chaîne humaine, qui véhicule l'espoir pour chacun d'entre nous de se reconstituer.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2009
Nombre de lectures 44
EAN13 9782296686236
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L'ÂME ULTRAVIOLETTE
ou Orpheline parmi les siens
 
 
Témoignage
 
Nathalie MOUDJOU
 
 
L'ÂME ULTRAVIOLETTE
ou Orpheline parmi les siens
 
Témoignage
 
 
L'HARMATTAN
 
 
 
© L'HARMATTAN, 2009
5-7, rue de l'École-Polytechnique ; 75005 Paris
 
Fabrication numérique: Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
 
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
 
ISBN : 978-2-296-10247-7
EAN : 9782296102477
 
A mon Mari, sans qui je n'aurais pas commencé à écrire ce livre et qui m'a aidée à le nourrir.
A mes enfants, parce qu'ils existent.
Au docteur Bourdineau, qui a su accueillir mon histoire pour qu'elle prenne sa place dans ma vie.
Au docteur Desruelles, fidèle compagnon de conversations riches et qui a su comprendre ce que j'avais.
Au docteur Persoz, qui a détecté une carence vitaminique ancienne et su en évaluer les effets.
A monsieur Ressaire, pour ses séances de kinésithérapie qui m'ont fait redécouvrir les chemins de mon corps.
 
Je remercie madame Casenobe et madame Hamouche pour leur relecture attentive de mon manuscrit.
 
****
 
 
Pourquoi ma mère ne m'aime-t-elle pas ? Ne veut-elle pas ? Ne peut-elle pas ? Questions obsédantes, lancinantes, lovées au creux de mon estomac et qui y séjournent silencieusement mais de façon vivace, tenace, comme un élément radioactif se désintègre en émettant des rayons. Ces rayons irradient dans tout mon corps et engourdissent mon cerveau et chacun de mes membres. J'ai quarante-cinq ans, je suis dépressive, ont diagnostiqué les médecins, et pourtant, je ne me sens pas abattue. Je ne baisse pas les bras. Je vis depuis longtemps d'espoir, d'envie de bonheur et de découvertes infinies, tant humaines qu'intellectuelles et j'ai seulement un passage à vide. Une brèche s'est ouverte dans ma vie et je dois essayer de la colmater. Ces questions, auxquelles je ne trouve pas de réponses acceptables, constituent un obstacle sur ma route pour le moment, m'a dit mon psy, un poids que je porte et qui est bien trop lourd pour mes frêles épaules d'être humain. J'ai bien essayé de vivre avec, puis ensuite de ne plus y penser, puis enfin d'y penser chaque jour pour essayer de trouver les indices d'une réponse vitalement acceptable. Mais rien n'y fait. Le noyau radioactif se réveille régulièrement et je ne parviens pas à le neutraliser définitivement. Je continue à vivre en discontinu. Des périodes de rémission alternent avec des rechutes de plus en plus difficiles à supporter. Le corps enregistre la mémoire des blessures et si la cicatrice s'ouvre de nouveau, la douleur morale est encore plus intense. Et depuis plusieurs années, la plaie suppure une fois de plus. Je sais depuis quand, mais pas exactement pourquoi.
Mes paroles s'écoulent dans le cabinet du psy, les pensées circulent dans ma tête et tentent de s'y organiser, j'essaye de trouver une raison par ma raison. Tout cela est peine perdue. J'ai dû faire quelque chose de grave, c'est certain. Aucun être humain ne s'acharne de la sorte après un autre aussi gratuitement et si elle ne m'aime pas, si elle persiste à m'inonder de reproches, si je ne lui inspire que des propos durs, ce doit être de ma faute. Une mère qui n'aime pas son enfant, ça n'existe pas. Elle dit que je dois me faire soigner. Elle a toujours dit que j'étais malade. Mais de quoi dois-je guérir précisément ?
Depuis des temps que je ne me rappelle plus, j'ai pourtant commencé à chercher des mots, des gestes, des signes de son attachement, des indices de ma valeur à ses yeux. Mais dès que je regarde dans le rétroviseur, que j'évoque mon enfance, je ne vois qu'un trou noir qui a aspiré toute mon énergie et à ce jour, je suis toujours aussi impuissante à me faire aimer d'elle.
Dans mon âme résonnent les pas des violences que j'ai subies. Les violences psychologiques, tout comme les violences physiques, touchent les âmes de plein fouet. La différence, c'est qu'un bleu sur le corps se voit et finit par se résorber, alors qu'un bleu à l'âme est invisible, rend le traumatisme incompréhensible, inexplicable aux yeux des autres et peut persister toute une vie.
« On ne voit pas que tu vas mal, tu es tellement avenante, tu as le contact si facile, quelle gentillesse avec les autres ! Tu sembles avoir tout pour être heureuse. Qu'est-ce qui ne va pas ? Je sens que tu ne perçois pas le monde comme les autres et les richesses que tu as à apporter se heurtent peut-être au mur de la réalité. »
Ma très chère amie B., ma petite fée aux élans de Mamouchka, offrant inlassablement alentour un sourire radieux, son regard pétillant et sa douceur enfantine intacte, malgré une hernie discale qui vrille régulièrement son corps de douleurs aiguës, cherche par ces mots à me remonter le moral.
Le problème, c'est que j'ai moi-même du mal à identifier, comprendre et exprimer l'origine exacte et la nature profonde du malaise qui me terrasse régulièrement, de l'influx paralysant qui envahit tout à coup chacun de mes membres et se déverse dans mon cerveau, comme un Alien qui déploierait ses tentacules à l'intérieur de moi, m'empêchant de réfléchir, d'agir, de ressentir avec suffisamment d'acuité le monde qui m'entoure pour pouvoir réagir naturellement aux diverses sollicitations du quotidien. Je suis pourtant parvenue à vivre sans ce malaise pendant quinze ans. Mais depuis quelques années, il s'installe à nouveau et s'accompagne d'un fort sentiment d'agression. Cette agression vient d'ailleurs autant de l'extérieur que de l'intérieur et englue mon être tout entier. Je me réfugie alors dans un coin reculé de moi-même, cloîtrée dans cette carapace que je me suis construite au cours du temps. J'y sécrète des anticorps contre ce trouble. Je me mets à suer à grosses gouttes sous les bras, mon haleine devient fétide, mes cheveux s'aplatissent, alourdis par une sécrétion excessive de sébum et des pertes blanches s'écoulent. Mes règles se dérèglent et ne suivent plus aucune règle. Je lutte à tous les instants contre les coups de boutoir de ce mal-être qui me ronge, me vide, m'épuise. Je me délite. Je m'essouffle. Je me désintègre.
J'aime les mots, ces vecteurs d'intention, ces passeurs d'âme. La langue française est riche, foisonnante, nuancée, colorée et me fascine. Le talent de l'écrivain ou du poète, celui qui consiste à cueillir les quelques mots qui, tout à coup, assemblés en un bouquet harmonieux vous font toucher l'indicible, me plonge dans des abysses d'enchantement et de plénitude. Mais l'ombre des mots qui blessent, qui humilient, qui désarticulent, que j'entends depuis trop longtemps de la bouche de ma mère à mon sujet et qui ricochent dans ma tête, a obscurci jusqu'à aujourd'hui le terrain de la communication entre nous. J'ai bien tenté à plusieurs reprises d'effacer de ma mémoire le vocabulaire qu'elle utilise quand elle me parle, j'ai espéré lui dire qui je suis et qu'elle le respecte. J'ai choisi les phrases, j'ai ciselé les intentions, j'ai crié ma colère parce qu'elle est sourde de moi, parce que je ne trouve pas les mots qui passeraient de moi à elle et d'elle à moi. J'ai tout essayé, mais je ne parviens qu'à hurler dans le vide. Et une fois encore le souvenir de ces mots vient me hanter. J'ai beau regarder ce fantôme droit dans les yeux, rien n'y fait, mais cette fois, je suis plus déterminée que d'ordinaire à lui tordre le cou. Je dois le faire pour moi, puisqu'il est évident que vivre en essayant d'oublier plutôt que d'affronter les problèmes ne mène à rien. Je dois le faire également pour mes enfants, qui sont entrés sans l'avoir voulu dans une histoire qui a commencé à être écrite bien longtemps avant leur naissance et dont il est important qu'ils comprennent le scénario, sous peine de vivre comme moi, en proie à trop de questions sans réponses, trop de bribes d'explications décousues.
C'est sur les traces des mots déposés en couches géologiques à l'intérieur de moi qu'il faut que je me lance, comme un archéologue perçoit la présence d'un site enfoui par le temps, s'agenouille et patiemment, obstinément et, avec l

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents