Jeu d échecs : littérature et mondes possibles
246 pages
Français

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Jeu d'échecs : littérature et mondes possibles , livre ebook

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Description

Le jeu d'échecs et la littérature ont une analogie de fonctionnement, faisant la part belle à la créativité et à la liberté. Nombreux sont les auteurs qui ont exploité la partie symbolique du jeu d'échec par une stratégie d'écriture où les combinaisons prolifèrent. Nabokov, Perec, Zweig l'ont utilisé d'un point de vue thématique ou structurel : le jeu d'échec est la métaphore même de la création.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2013
Nombre de lectures 53
EAN13 9782296530751
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1050€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
L’Ecarlate
19 années d’édition
Littérature, érotisme, essais critiques, rock’n’roll
Déjà parus
Dominique Agostini : La petite fille qui cachait les tours
François Audouy : Brighton Rock(s)
François Baschet : Mémoires sonores
Georges Bataille : Dictionnaire critique
Jean-Louis Derenne : Comment veux-tu que je t’embrasse…
Louis Chrétiennot : Le chant des moteurs (du bruit en musique)
Jean-Christophe Dollé : Abilifaïe Leponaix
Jean-Christophe Dollé : Blue.fr
Guy Dubois : La conquête de l’Ouest en chansons
Brigitte Fontaine : La limonade bleue
Erwann Gauthier : L’art d’inexister
Erwann Gauthier : Les vivacités silencieuses
Pierre Joinul : Dingoraminoir
Pierre Jourde : La voix de Valère Novarina
Akos Kertesz : Le prix de l’honnêteté
Akos Kertesz : Makra
Greg Lamazères : Bluesman
Marianne Le Morvan : Berthe Weil, la petite galeriste des grands artistes
Jacques-André Libioulle : la déraille
Marielle Magliozzi : Art brut, architectures marginales
Alain Marc : Ecrire le cri (Sade, bataille, Maïakovski…)
Thierry Marignac : Des chansons pour les sirènes
Claire Mercier : Figures du loup
Claire Mercier : Désir d’un épilogue
Pierre Mikaïloff : Some clichés, une enquête sur la disparition du rock’n’roll
André Németh : La Commune de Paris !
Bernard Noël : L’espace du désir
Ernest Pépin : Jardin de nuit
Maria Pierrakos : La femme du peintre, ou du bon usage du masochisme
Enver Puska : Pierres tombales
Jean-Patrice Roux : Bestiaire énigmatique
NathYot : Erotik mental food
Jean Zay : Chroniques du grenier

L’Ecarlate – Jérôme Martin
Librairie Les Temps Modernes : 57, rue N.D. de Recouvrance, 45000 Orléans
ecarlate.jerom emartin@yahoo.fr
Titre
Vera GANDELMAN TEREKHOV






Jeu d’échecs :
littérature et mondes possibles

Perec, Nabokov, Zweig, Lewis Carroll...








L’Ecarlate
Copyright

© L’HARMATTAN, 2013
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
EAN Epub : 978-2-336-66042-4
Introduction
Le jeu d’échecs fascine à tel point qu’il a été l’objet d’attention dans des domaines de la vie intellectuelle extrêmement divers. Il a été notamment exploité sur le plan thématique et structurel dans la littérature et le cinéma. Le jeu d’échecs s’inscrit dans la problématique générale du lien entre le ludique, et l’écriture et la créativité. Ce jeu de compétition intellectuelle représente une des multiples modalités du jeu dans la littérature parmi d’autres tels les jeux de hasard ; l’activité ludique, en général, apparaît dans des littératures appartenant à diverses aires culturelles et linguistiques ; entre beaucoup d’autres œuvres, le jeu de cartes est au centre du récit de Pouchkine La Dame de pique 1 , l’engouement pour la roulette dans Le Joueur 2 de Dostoïevski. Lewis Carroll a intégré les cartes et le criquet dans Alice au Pays des merveilles 3 .
Plus tard, les multiples facettes du jeu ont intéressé les écrivains post-modernes non seulement sur le plan thématique mais encore du point de vue structurel ; on pense à La Marelle de Cortázar 4 ou aux écrivains du mouvement Oulipo, qui dévoilent la variété des jeux et de leurs modes d’intégration dans la littérature. On retiendra l’exploitation du jeu de go dans la poésie de Roubaud 5 ou du jeu de tarot comme embrayeur narratif chez Calvino dans Le Château des destins croisés 6 . Dans la littérature post-moderne, qui met en avant la notion d’auto-référentialité, le jeu s’est révélé comme constituant majeur de l’écriture, traduisant un engouement pour l’application de la règle dans l’espace de la fiction.
Par post-modernisme, nous entendons un mouvement esthétique post-Auschwitz ou post-Hiroshima : certains critères mettent en avant une crise de la représentation due à l’érosion des valeurs face aux massacres à grande échelle élaborés par la rationalité humaine. Ces critères ont été définis par quelques traits essentiels par Ihab Hassan 7 , dont on retiendra quelques caractéristiques qui nous semblent importantes en fonction des paradigmes discursifs que nous avons choisis. Le premier critère essentiel est l’indétermination, induisant le culte de l’erreur ou de l’omission volontaire qui conduisent le lecteur à une interprétation erronée. Un second point doit être souligné : le post-modernisme révèle une esthétique de la fragmentation et du montage. L’œuvre est décomposée et reconstituée à la manière d’un puzzle.
Une troisième caractéristique peut être définie par le refus de la mimésis et de la description. L’auto-référentialité confère au texte une autonomie par rapport au réel. Enfin, le post-modernisme introduit une ironie, qui implique une distanciation et l’instauration d’un univers de pluralités, qui traduit le refus de l’esprit de système.
Ces quatre critères essentiels s’inscrivent dans le fonctionnement du jeu d’échecs, où les effets en trompe-l’œil permettent de leurrer l’adversaire ; les unités fragmentées, constituées par les cases et les pièces, forment un ensemble auquel le joueur, créant sa partie de manière distanciée, instaure son univers : ce monde possible cohabite avec une pluralité d’autres mondes possibles, qui pourraient s’élaborer à partir de chaque embranchement de la partie. Le jeu d’échecs est fondé sur une dynamique de localisation, où les éléments sont disposés de manière significative les uns par rapport aux autres.
La fragmentation et la cohérence des éléments entre eux rapprochent le jeu d’échecs du langage, ce qui explique son utilisation métaphorique dans le domaine de la linguistique. Les pièces du jeu d’échecs renvoient aux différentes unités linguistiques qui forment la langue dans son ensemble. Les unités ne sont cohérentes qu’en relation les unes avec les autres. L’intérêt porté au jeu d’échecs, en effet, ne se limite pas à la production artistique. Au sein de la critique littéraire, ce jeu de stratégie a été utilisé comme un outil, notamment par Saussure 8 qui l’a présenté comme métaphore du système de la langue. Toutes les pièces du jeu forment entre elles un ensemble pertinent et cohérent où les pièces n’ont pas de signification séparément mais en fonction d’une stratégie d’ensemble.
Cet aspect a été conceptualisé par Gilles Deleuze et Félix Guattari dans Mille Plateaux où il oppose le monde strié du jeu d’échecs à l’espace lisse du jeu de go. « Espace lisse du go, contre espace strié des échecs. […] C’est que les échecs codent et décodent l’espace, tandis que le go procède tout autrement, le territorialise et le déterritorialise 9 . » Deleuze met en relation deux jeux de société où les pièces n’entretiennent nullement le même rapport à l’espace : il est fermé pour les échecs, où il s’agit d’occuper l’espace, alors que les pièces du go évoluent par un mouvement perpétuel en un espace ouvert ; un autre aspect les oppose : les pièces d’échecs ont des caractéristiques intrinsèques, représentant chacune une fonction particulière, alors que les pièces du go sont des unités abstraites, plongées dans l’anonymat. Les pièces sont particularisées au jeu d’échecs, alors qu’au jeu de go, elles ont une valeur commune et universelle, ce qui leur enlève toute valeur d’individualisation.

Les pièces d’échecs sont codées, elles ont une nature intérieure ou des propriétés intrinsèques, d’où découlent leurs mouvements, leurs situations, leurs affrontements. Elles sont qualifiées, le cavalier reste un cavalier, le fantassin un fantassin, le voltigeur un voltigeur. Les pions de go au contraire sont des grains, des pastilles, de simples unités arithmétiques, et n’ont d’autre fonction qu’anonyme 10 .

Cette particularisation du rôle bien défini de chaque pièce est liée à la structure politique et militaire que le jeu d’

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