Trains du mystère
302 pages
Français

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Trains du mystère , livre ebook

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Description

Train et roman policier sont issus de la modernité qui imprime une extraordinaire accélération à la marche du monde durant la seconde moitié du XIXe siècle. Ils se développent dans une époque qui invente la statistique criminelle, la médecine légale et la police scientifique. Cette évocation des liens entre rail et polar, faits divers et crimes ferroviaires voisinant avec la fiction littéraire, est soutenue par les principes intangibles du lieu clos et de la rencontre qui structurent la mise en place de l'énigme à base ferroviaire. Le premier est au coeur de l'oeuvre Le crime de l'Orient-Express d'Agatha Christie, et le second s'incarne dans L'inconnu du Nord-Express de Patricia Highsmith.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2009
Nombre de lectures 247
EAN13 9782296925557
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1250€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Trains du mystère
Ilustrations in-texte : collection de M. Chlastacz. Photos de C. Recoura.

© L’Harmattan, 2009
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris
http://www. librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-07667-9
EAN : 9782296076679

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Michel CHLASTACZ


Trains du mystère

150 ans de trains et de polars
Sang Maudit
Collection dirigée par Jérôme Martin

Déjà parus

Fabienne VIALA, Leonardo Padura. Le roman noir au paradis perdu , 2007.
Laurent BOURDELAS, Le Paris de Nestor Burma. L’Occupation et les « Trente glorieuses » de Léo Malet, 2007.
Fabienne VIALA, Le Roman noir à l’encre de l’histoire. M. V á squez Montalb á n et Didier Daeninckx ou Le polar en su tinta , 2007.
Natacha LALLEMAND, James Ellroy : la corruption du Roman noir , 2006.
Train et roman policier : enquête sur une complicité historique
E ntre le train et le roman policier, la rencontre était inéluctable, voire programmée. Car ces deux phénomènes sont issus d’une même modernité qui, durant la première moitié du dix-neuvième siècle, imprima une extraordinaire accélération à la marche du monde. Ce qui a changé totalement, en moins d’une ou deux décennies, les rapports entre l’espace et le temps. Donc la notion de voyage telle qu’elle était auparavant perçue et vécue. Or le roman policier peut être considéré comme une sorte de voyage, un cheminement dans l’espace et dans le temps qui évolue au rythme de l’enquête. Avec l’apparition du train, le récit d’aventures, le récit judiciaire, le roman d’énigme, puis le roman policier -la succession de ces diverses dénominations n’est pas historiquement fortuite – ont pu parallèlement renouveler leurs intrigues et acquérir de nouvelles dimensions. À tel point que l’on a souvent établi un lien entre développement du chemin de fer et vogue grandissante des romans policiers. D’ailleurs ces récits ont été volontiers englobés dans une sorte de nébuleuse de « littérature de gare ». Au-delà d’un ostracisme tenace du monde des Lettres envers le roman policier qui commence à peine à se dissiper aujourd’hui, il faut reconnaître que cette rencontre ferroviaire, et somme toute littéraire, n’est pas non plus le fait du hasard. Historiquement, l’implantation des Bibliothèques de gares gérées par Hachette, ces ancêtres des kiosques, « Relais H » et autres « Relay » d’aujourd’hui, est allée de pair avec le développement du réseau ferré et la diffusion accélérée de la littérature populaire de masse dans laquelle on range généralement le roman policier.
Et si on ne connaît pas statistiquement le nombre de lecteurs de « polars » qui ont parcouru un ouvrage durant les quelques heures de la durée d’un voyage en train, la réalité du lien entre la lecture du roman policier et le voyage ferroviaire pourrait être cependant fermement établie, historiquement comme sociologiquement. Ainsi, Jacques Dubois, professeur à l’université de Liège et spécialiste de la littérature française moderne comme des formes dites de « paralittérature », explique dans Le Roman policier et la modernité la façon dont ce lien s’est tissé au fil des réalités : « il y a cette relation bien connue entre voyage en train et consommation du policier. On ne lisait guère dans la diligence et l’on ne lit pas volontiers en automobile. Minuté avec précision, scandé par le rythme des roues et des stations, enfermant le voyageur dans la coque protectrice du compartiment, le déplacement en chemin de fer est, par excellence, adapté au parcours d’un récit lui-même programmé ». Quelques années auparavant, Walter Benjamin allait encore plus loin dans Images de pensée : il relevait même des affinités entre le frisson du suspense et le rythme des roues sur le rail, estimant que « les frayeurs artificielles et oisives recherchées dans la lecture d’un roman policier » pouvaient aider à surmonter ce qu’il qualifiait de « frayeurs archaïques », qui se trouvaient ressuscitées par l’éloignement et l’absence et qui pouvaient s’apparenter à la mort. Des frayeurs que le voyage pouvait faire renaître, comme le dit la chanson de Charles Trénet intitulée « En quittant la ville », rappelant que « dans le train de nuit, il y a des fantômes… »
Dans le mouvement général de la modernité, ces frayeurs se sont trouvées confrontées à un bouleversement ultérieurement désigné sous le vocable de « science criminelle ». Car ce dix-neuvième siècle, décidément très fécond, a inventé et développé le chemin de fer avec toutes ses possibilités. Mais c’est également le siècle de la création de la police judiciaire, de la statistique criminelle et de la médecine légale. C’est donc le siècle qui a quantifié de façon extrêmement précise l’accident et le crime. C’est aussi celui de l’épanouissement de la presse populaire et d’une littérature de masse qui a fait ses « choux gras » de l’aspect spectaculaire comme inquiétant du crime. Même si, dans le domaine de l’appréhension par la société et les médias du fait criminel, les repères strictement chronologiques sont quelque peu distendus.
Le dix-neuvième siècle, au sens des cycles socio-économiques comme de celui de la société et du vécu, démarre en réalité vers la fin de Monarchie de Juillet et il perdure jusqu’en 1914. Dans les médias de l’époque, la vogue du feuilleton est suivie de celle de l’explosion de la presse à sensation. Tout en continuant à publier des feuilletons, sans doute pour fidéliser ce que l’on appelle aujourd’hui le « cœur de cible » dans le jargon du marketing d’aujourd’hui, elle prendra progressivement appui sur le sensationnel en direct qui lui est offert par le fait-divers criminel rapidement relaté. Ce que rappelle Dominique Kalifa dans Crime et culture au XIX è siècle.
Dans ce contexte qui associe crime et information, le train a totalement bouleversé les notions d’espace-temps qui étaient auparavant admises. Cette évolution de la perception n’est pas non plus sans conséquences sur le rythme et la teneur même du récit d’énigme. Elle implique que, parallèlement, de nouveaux ressorts étoffent l’intrigue policière et que les mécanismes techniques de fonctionnement du chemin de fer puissent aussi entrer dans l’action et le cheminement de la compréhension des faits. D’ailleurs la complexité de l’organisation du système ferroviaire offre au narrateur de multiples occasions pour embrouiller comme à plaisir le fil des énigmes.
Avant tout, intervient le sacro-saint horaire, strict découpage du temps qui règle le cheminement des trains : c’est une notion éminemment moderne qui induit « l’apprentissage de l’exactitude », comme le rappelle Maryse Angelier dans Voyage en train au temps des compagnies, 1832-1937. Car faute de repères horaires précis, cette trame temporelle était auparavant peu évidente à mettre en place dans un monde essentiellement rural qui restait réglé par des repères solaires. Comme le montrent les récits d’énigme antérieurs à la généralisation du chemin de fer et de ses obligations précises de temps. Il faut reconnaître que cette nouvelle donne du crime avait vraiment de quoi dérouter… les criminels eux-mêmes !
Puisque, parallèlement, de nouvelles formes de mobilité et de sociabilité se mettent en place. Les trains se révèlent, selon les besoins variés de l’intrigue et de l’enquête policière, des lieux de rencontres, des sortes de « chambres closes roulantes », comme on les qualifiera ensuite. Ils deviennent aussi une nouvelle « scène du crime », selon le terme que les techniciens de la police scientifique utilisent aujourd’hui pour désigner le lieu de l’événement criminel qui devient celui de l’enquête préliminaire. En outre, ce quadrillage rigoureux du temps par les horaires installe des balises temporelles qui servent de trame de départ pour l’enquête.
Une nouvelle notion du temps et de l’espace se met en place. Alors que la précision du temps ferroviaire entre dans les habitudes du voyage, intervient parallèlement une autre notion, liée aux espaces nécessités par le fonctionnement du système ferroviaire. On sait que, pour les criminels comme pour les enquêteurs, les gares, les trains, comme les lieux ferroviaires en général, restent des endroits parfaitement ambigus : ce sont des endroits publics qui facilitent la fuite en offrant un refuge dans la foule. Mais ce sont également des sites fermés pouvant deve

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