La dernière vision de Maä
112 pages
Français

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La dernière vision de Maä , livre ebook

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Description

Pour renforcer la foi vacillante d'Anzy en Maä, sa mère lui raconte une nouvelle fois l'histoire de celle qui sauva les hommes.


Différente des autres, car née du ventre de sa mère, Maä dut se mettre en quête de l'Outremonde pour découvrir le secret du monstrueux Tantacle.

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Publié par
Nombre de lectures 2
EAN13 9791097570491
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

À ma femme, Cécile
À mes filles, Zoé et Mona
À toutes celles, insoumises,
qui œuvrent à un monde plus juste.
 
« Dans la vie, rien n’est à craindre, tout est à comprendre. »
Marie Curie
Prologue
 
Edena eut bien du mal à tirer son fils du lit. Quand elle le décida à se débarbouiller et à rejoindre la cuisine, Anzy s’y dirigea en traînant les pieds. Le jeune adolescent s’assit pour prendre son petit déjeuner, sans un bonjour ni un baiser, les yeux encore tout embrumés d’un sommeil agité. Les cheveux en bataille et l a mine revêche , il s’accouda à la table, le visage dans les mains. Cela avait le don d’exaspérer sa mère qui ne manquait jamais de le gratifier d’un « tiens-toi mieux ! » ; pas ce matin-là. Elle sentait que quelque chose n’allait pas.  
– Tu ne bois pas ton chocolat ?
Il grommela une vague réponse en repoussant son bol.
Edena observait son fils. Anzy grandissait ; plus vite maintenant que durant ces trois dernières années, lui semblait-il. Elle darda son mari d’un regard inquiet, en quête de soutien. Malvyn dont rien ne semblait pouvoir entraver l’appétit n’avait pas encore remarqué l’humeur morose de leur fils. De toute manière, il lui servirait à coup sûr sa sempiternelle rengaine sur l’âge. Pour cet homme placide et pragmatique, l’âge expliquait tou t. À trois mois comme à treize, sa théorie permettait de ne jamais vraiment se faire de soucis. « C’est l’âge, disait-il, ça lui passera avec le temps. »  
Le temps était précisément ce qui préoccupait Edena. Elle dut le pousser du coude pour qu’il daigne lever les yeux. Elle décocha aussitôt un vif coup du menton en direction d’Anzy. Sans surprise, Malvyn émit un soupir et haussa les épaules. Elle insista d’un coup de pied sous la table. Il prit alors une profonde inspiration et consentit, d’un air détaché, à interroger son fils.
– Alors, fiston, c’est pas la forme, ce matin ?
Nouveau grognement inaudible.
Malvyn se retourna vers sa femme, pas vraiment décidé à pousser plus avant ses investigations.
Edena éclata :
– Si tu ne parles pas, on ne peut pas t’aider !
Le garçon sursauta, vaguement ahuri, puis ses yeux se teintèrent de défiance. Edena, peu habituée à lui voir cette expression, en fut décontenancée quelques instants. Elle reprit d’un ton plus calme.
– Tu as quelque chose à nous dire, à ton père et à moi ? À nous reprocher peut-être ?
Pour toute réponse, Anzy se décida à prendre son bol de chocolat et à le porter à ses lèvres.
– Tu ne peux pas rester à faire cette tête sans rien dire. Tu peux nous faire confiance et nous parler…
– Vous faire confiance ? Vous m’avez menti !
Edena en resta sans voix. Même Malvyn se montra perplexe.
– Explique-toi, mon fils. Quel est le problème ?
Une boule s’était formée dans la gorge du garçon. Il tremblait et n’osait pas regarder ses parents en face.
– Les copains… à l’école…
Il hésita à poursuivre, les yeux sur son bol.
–  Nous t’écoutons, parle.
– Les copains… ils disent que… qu’on approche… c’est ce qu’ils disent… on y est presque…
Le couple échangea un regard embarrassé. Combien de fois avaient-ils eux-mêmes entendu cela ? Combien de fois y avaient-ils cru ?
– C’est peut-être vrai, répondit Edena.
– Seule Maä sait, renchérit Malvyn. Nous devons avoir foi en elle.
Il y avait si peu de conviction dans leur voix qu’Anzy en parut encore plus chagriné.
– Et si Maä n’existait pas ? Les copains, ils disent que c’est une histoire inventée par les parents.
Edena se souvint qu’elle s’était également, vers l’âge de douze ans, posé la même question.
À cette époque, sa mère lui répétait qu’il fallait avoir confiance en Maä, qu’elle seule connaissait le sens de leur destinée, car elle se trouvait dans le cœur de chacun.
C’était ce que Malvyn et elle rabâchaient à longueur de temps à Anzy, mais le garçon arrivait à un âge où ces simples affirmations ne pouvaient suffire. Et s’ils étaient honnêtes, ils devaient bien avouer qu’ils n’y croyaient plus tout à fait eux-mêmes. Devenus adultes, ils évitaient d’y penser, ils ne posaient plus la question de l’ après. La vie était ainsi faite. Ils ne nourrissaient plus vraiment d’espoir. Pour autant, ils refusaient qu’Anzy perde la foi. Pas encore, pas si jeune.  
Le garçon scrutait attentivement ses parents, à l’affût d’un geste, d’une parole, d’un mot. Rien ne venait. Rien d’autre que l’exhortation à la foi.
Tout le monde croyait en Maä, ou faisait semblant d’y croire. C’était bien commode, songeait Anzy, d’invoquer la volonté de Maä pour éviter de se poser des questions auxquelles personne n’avait de réponse.
– N’écoute pas tes copains, lâcha son père, ce sont des idiots.
Il n’émit aucun autre commentaire et reprit son petit déjeuner, estimant le sujet clos, au grand désarroi d’Edena.
– L’esprit de Maä est parmi nous, expliqua-t-elle à son fils, elle veillera toujours sur nous.
– Toujours ? s’écria Anzy. Ce sera toujours comme ça, alors ?
–  Non ! Bien sûr que non !
– Alors, on arrivera ?
–  Bien entendu !
–  Quand ?
Edena ouvrit la bouche, mais ne sut que répondre.
– Ha oui, je sais, dit Anzy avec ironie. Quand Maä l’aura décidé, c’est ça ?
–  Tu dois y croire, Anzy. Nous devons tous y croire.
– Et si c’est un mensonge ?
– Une histoire qui s’est transmise de génération en génération ne peut pas être un mensonge. Ma mère me la racontait, comme sa mère avant elle, et la mère de sa mère.
– Il y a bien eu un commencement, non ?
– Maä s’est adressée en personne aux premiers hommes, puis sa parole s’est répandue à travers les âges.
– Alors pourquoi est-ce que Maä ne parle plus aujourd’hui ?
Malvyn avait terminé son petit déjeuner, il pouvait se concentrer plus sérieusement sur les problèmes familiaux.
– Elle nous parle, mon fils. Son esprit est toujours là. Il est tout autour de nous, et il nous guide. Tu n’as jamais rêvé de Maä ?
– Ce ne sont que des rêves, ça ne prouve rien.
– Ne prends pas tes rêves à la légère ! Ils sont la vie derrière les apparences, c’est sa manière à elle de communiquer avec nous.
– De toute façon, rétorqua Anzy, je préfère qu’elle n’existe pas.
–  Pourquoi dis-tu une chose pareille ?
– Parce que tout est sa faute ! C’est bien ce que raconte l’histoire, non ?
Ses parents devaient bien en convenir, cependant leur fils oubliait une chose :
– C’est grâce à elle, à ce qu’elle a sacrifié, que nous sommes en vie.
– On est tous des prisonniers ici !
– Le monde est ainsi fait, mon chéri.
Edena ne savait plus quel argument opposer à l’angoisse existentielle de son fils. Ferait-il partie de la première génération à atteindre la Lumière ? Certains pensaient voir des présages dans leurs rêves, toutefois personne n’avait de certitude.
 
Anzy se rendit à l’école sans que ses parents parviennent à le rassurer.
Edena songea toute la journée à l’incident du petit déjeuner, consciente que son fils se trouvait à un moment critique de son développement. Avant lui, d’autres, qui ne supportèrent plus leur condition ni l’enfermement, pas plus que la hantise d’un avenir incertain, avaient mis fin à leurs jours.
 
À son retour, elle fut heureuse qu’il lui réclame à nouveau l’histoire, comme quand il était un petit garçon.
À l’heure du coucher, comme elle le faisait des années plus tôt, elle s’installa à côté de lui dans le lit. Elle réalisa à cet instant qu’elle ressentait également le besoin de se remémorer la formidable aventure de Maä.
– Et en entier, hein ! prévint Anzy qui craignait que sa mère n’élude le début.
– Même le passage avec les rats ?
– Maman, je n’ai plus cinq ans ! Ils ne me font plus peur, les rats.
Pourtant, quand elle le voyait là, blotti sous sa couette, dans l’attente de l’histoire de Maä, elle retrouvait son petit garçon.
– Bon, tu commences ?
Elle s’éclaircit la voix.
– Maä est une jeune fille différente. En fait, elle ne ressemble à personne d’autre, car elle est née du ventre de sa mère. Déjà, toute petite, on sait qu’un grand destin l’attend, elle est capable de percevoir les sentiments des gens autour d’elle, de les ressentir dans sa chair, ce qui n’est à la portée d’aucun être vivant… aucun, hormis le Tantacle.
Edena fit une courte pause pour se positionner plus confortablement entre les oreillers et passer un bras autour des épaules de son fils.
– Donc, disais-je, au début, on la croit folle. Sa mère s’en est même voulu d’avoir mis au monde un tel enfant. Puis, les membres de sa famille réalisent peu à peu que les chagrins et les joies de Maä sont les leurs. Ils la regardent avec méfiance et Maä s’évertue, en grandissant, à cacher les sentiments qu’elle reçoit d’eux. Elle apprend à connaître son entourage mieux qu’il n’y parvient lui-même, mieux que ses parents et ses frères n’arrivent à se comprendre mutuelleme nt. Avec le temps, Maä sent son don s’épanouir, son champ de perception s’étendre. Ses rêves deviennent de plus en plus étranges, plus intenses, jusqu’au jour où le monstrueux Tantacle se met à lui parler…  
CHAPITRE 1 – LES RATS
 
« Les pensées secrètes
D’une parole intérieure
Par un langage sans mots
Aux images abstraites
Font de moi un rêveur
Et de la vie mon fardeau… »
 
La première fois que le Tantacle communiqua avec moi, je n’étais qu’une jeune fille à peine sortie de l’enfance. Rien ne m’avait préparée à ce que j’allais découvrir. Je ne compris pas tout de suite ce que me voulait la Bête. Je ne réalisais pas encore qu’un monde inconnu s’ouvrait devant moi ni qu’à partir de cet instant l’humanité prendrait une nouvelle direction. Je n’avais pas conscience que j’étais moi-même en train de devenir quelque chose d’incroyable et d’insoupçonné.
Aux yeux de mon mi-homme, je n’étais que Maä, une maîtresse qui s’en allait chasser le rat avec son esclave.
Pungo me suivait d’un pas traînant. Ses lourdes épaules se balançaient mollement et sa tête dodelinait en cadence en explorant les terres inondées des marécages.
– Faut pas qu’elles te prennent au piège, hein ! lui dis-je. C’est drôlement intelligent, ces bestioles-là ! T’en laisses filer une,

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