Le RODEUR DE NUIT
148 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Le RODEUR DE NUIT , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
148 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Affectée par le départ de sa mère, Tiffany, une jeune Anishinaabe, cherche à prendre en main son existence, entre son père et sa Mamie Ruth, sur la réserve de Lac-aux-Loutres, dans le centre de l’Ontario.
Alors qu’elle compose déjà difficilement avec l’autorité de son père, les exigences de l’école et le début d’une relation amoureuse avec un garçon non autochtone, Tiffany voit sa vie bousculée par un mystérieux personnage, Pierre L’Errant, que son père a décidé de prendre comme chambreur.
Celui-ci, qui dit débarquer d’Europe, fait une drôle d’apparition dans ce village où jamais un touriste ne met les pieds. Mamie Ruth, qui en a vu d’autres, n’est cependant pas dupe de ses histoires et devine qu’il camoufle d’épouvantables démons intérieurs.
Auteur de nombreux romans et de pièces de théâtre, Drew Hayden Taylor, lui-même Anishinaabe, a voulu écrire un « roman gothique autochtone » où il aborde les défis de l’adolescence, la transmission de la culture et, surtout, la nécessité de ne jamais abandonner.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 octobre 2020
Nombre de lectures 11
EAN13 9782895977964
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0400€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le rôdeur de nuit
DU MÊME AUTEUR
Livre traduit en français
Le baiser de Nanabush , Prise de parole, 2019 (traduction de Motorcycles Sweetgrass par Eva Lavergne).
Drew Hayden Taylor
Le rôdeur de nuit
UN ROMAN GOTHIQUE AUTOCHTONE
Traduit par Eva Lavergne
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada

Titre: Le rôdeur de nuit / Drew Hayden Taylor; traduction d’Eva Lavergne.
Autres titres: Night wanderer. Français
Noms: Taylor, Drew Hayden, 1962- auteur. | Lavergne, Eva, 1982- traducteur.
Collections: 14/18.
Description: Mention de collection: 14/18 | Traduction de: The night wanderer.
Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20200313266 | Canadiana (livre numérique) 20200313363 |ISBN 9782895977711 (couverture souple) |ISBN 9782895977957 (PDF) | ISBN 9782895977964 (EPUB)
Classification: LCC PS8589.A885 N5314 2020 | CDD jC813/.54—dc23


Titre original : The Night Wanderer. A Native Gothic Novel. Publié originalement en anglais en Amérique du Nord par Annick Press Ltd. © 2007 Drew Hayden Taylor (texte) / Annick Press Ltd.

Nous remercions le Gouvernement du Canada, le Conseil des arts du Canada, le Conseil des arts de l’Ontario et la Ville d’Ottawa pour leur appui à nos activités d’édition.

Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Programme national de traduction pour l’édition du livre, une initiative du Plan d’action pour les langues officielles — 2018-2023: Investir dans notre avenir, pour nos activités de traduction.



Les Éditions David 335-B, rue Cumberland, Ottawa (Ontario) K1N 7J3 Téléphone : 613-695-3339 | Télécopieur : 613-695-3334 info@editionsdavid.com | www.editionsdavid.com

Tous droits réservés. Imprimé au Canada. Dépôt légal (Québec et Ottawa), 4 e trimestre 2020
PROLOGUE
Un jour, assis au pied d’un arbre sur le bord d’une rivière au lent débit, un vieil Anishinaabe donnait des leçons de vie à ses bien-aimés petits-enfants.
Il disait :
— En moi, il y a un combat qui fait rage. Une lutte terrible entre deux loups. J’ai, d’un côté, le méchant loup — celui-là incarne la peur, la colère, l’envie, la tristesse, le regret, l’avarice, l’arrogance, l’apitoiement, la culpabilité, la rancune, le sentiment d’infériorité, le mensonge, la fausse modestie, la compétitivité, l’arrogance et l’égo. Et j’ai de l’autre côté le bon loup — qui incarne la joie, la paix, l’amour, l’espoir, le partage, la sérénité, l’humilité, la bonté, la gentillesse, la sagesse, l’amitié, l’empathie, la générosité, le soin, la vérité, la compassion et la foi. Et ils se livrent la même lutte en chacun de vous et en chaque personne que vous rencontrez.
Ses petits-enfants réfléchirent quelques instants à cette histoire, puis l’un d’eux demanda :
— Grand-père, lequel des deux loups va gagner ? C’est lequel, le plus fort ?
Le vieil homme sourit avant de répondre :
— Celui que tu nourris.
1
Du rose. Du violet. Un peu de rouge et un soupçon de vert. L’homme les avait vues vaciller et danser à l’horizon de plus d’une dizaine de pays au gré de ses sempiternelles errances. Bon nombre de ces pays n’existaient plus, ou avaient changé de nom et de forme, tout comme lui. Mais cette fois, quelque part au-dessus de l’Atlantique Nord, les aurores boréales semblaient lui faire signe de rentrer au bercail.
Il prit place dans la partie de l’avion d’où l’on voyait le nord, mais dans un siège côté couloir, comme il l’avait exigé. Le hasard faisant bien les choses, il avait la rangée à lui seul, et tout son champ de vision pouvait plonger dans la « danse des esprits », comme l’appelaient les Inuits. Les Ojibwés, eux, appelaient ce phénomène wawa-tei , et la légende disait qu’il s’agissait des torches de pêcheurs géants qui éclairaient le ciel en pleine nuit pour attraper des poissons au harpon. C’était de bon augure, et l’homme croyait en ce genre de signes.
Il y avait bien eu quelqu’un — quelqu’une — côté hublot au moment du décollage : une dame menue, à l’accent irlandais. Une dénommée Irene Donovan. Mais une fois l’avion stabilisé dans les airs, en route vers l’Amérique du Nord, la dame s’était installée plusieurs rangées derrière. Irene avait prévu profiter du vol pour se détendre. On faisait jouer un film qu’elle n’avait pas vu et qui la tentait bien, elle ne voyait pas d’inconvénient au menu offert en vol, et espérait pouvoir faire un somme et se réveiller de nouveau juste à temps pour l’atterrissage. Elle adorait rendre visite à sa fille au Canada.
Sauf que son voisin de rangée avait un je-ne-sais-quoi qui était venu perturber son humeur. L’homme assis côté couloir avait une allure… sombre. C’était le mot. Comme s’il couvait en lui un orage menaçant. Ça allait bien au-delà de sa couleur de peau — et d’où pouvait-il être ? s’était-elle demandé. Du Moyen-Orient ? Se pouvait-il que ce soit un terroriste ? Peut-être un natif d’Espagne ou d’Amérique centrale. Ces gens-là avaient la peau basanée. Un Égyptien, possiblement.
Mais par-dessus tout, c’était un sentiment de solitude ou, plus exactement, de détachement affectif qui était parvenu à cette femme par-dessus l’accoudoir qui les séparait. Comme toute bonne Irlandaise digne de ce nom, elle gardait toujours un pied fermement planté dans la tradition de l’Église catholique et l’autre pied enraciné dans le terreau des superstitions. Sa famille racontait de ces vieilles histoires, à propos de gens dont l’aura était si puissante qu’ils pouvaient pratiquement vous déposséder de vos moyens. Irene, qui avait toujours ouvertement dédaigné ces croyances, commençait à se demander s’il n’y avait pas un peu de vrai dans tout ça. Quelques instants plus tôt, elle s’était réjouie, pleine d’optimisme à l’idée de prendre l’avion. Et voilà qu’elle se sentait submergée dans une humeur beaucoup plus morne. Une humeur qui semblait émaner de l’homme assis à ses côtés, lui barrant tout accès au couloir.
Elle avait essayé d’ignorer cette impression, mais l’impression ne voulait pas la quitter. Une demi-heure à se tortiller d’inconfort, ça avait suffi pour qu’enfin elle demande à l’hôtesse la permission de changer de siège, plaidant une phobie des hublots.
— J’ai le vertige. Vous savez ce que c’est.
Et elle s’était éclipsée.
L’homme assis côté couloir n’était pas insulté. En fait, il était content. Il se savait différent des autres et s’était habitué à ce que ceux-ci l’évitent. Ça lui allait. Il était un étranger parmi les étrangers. Car si les passagers de cet avion avaient su à quel point il était différent… eh bien, c’était une bonne chose qu’ils ne le sachent pas.
Les aurores boréales continuaient de luire dans les hauteurs atmosphériques : un orage cosmique d’ions et de vents solaires qui lui souhaitaient la bienvenue chez lui. Lui et ces aurores étaient de vieux amis. Enfant, il avait dansé sous leur lumière. Elles avaient éclairé ses chasses une fois qu’il était entré dans l’âge adulte. Et c’est vers elles qu’il reprenait le chemin du pays natal. Après beaucoup, beaucoup de temps.
* * *
Il avait mis des semaines à planifier ce voyage à la perfection. Au contraire des autres passagers du vol Air Canada 859, l’homme à qui l’on avait assigné le siège 24 H n’aurait pas pu se permettre la moindre erreur. Il devait à tout prix planifier le moindre détail afin que tout se déroule dans le bon ordre, même si cela prenait un temps fou. En situation de survie, il faut parfois mettre les bouchées doubles. Il s’était montré catégorique auprès de l’agence de voyage en ce qui concernait l’itinéraire. L’avion devait décoller la nuit et atterrir la nuit. Comme c’était un vol en partance de l’aéroport de Heathrow, à Londres, à destination de Toronto et sans escale, l’avion se déplacerait d’est en ouest en synchronie avec la Lune. On avait effectué le décollage à 22 h 30, et l’atterrissage dans la plus grande ville du Canada était prévu pour 1 h 25 du matin. Si aucune complication ne survenait, tout irait comme sur des roulettes. Les vols qui suivaient ce genre d’horaire portaient, chez les Anglais, l’étiquette « yeux rouges ». Une ironie qui l’avait fait sourire. Et encore une fois, c’était bon signe.
Mais pour se prémunir de tout pépin — délai, atterrissage forcé, ou quoi que ce soit de cet ordre —, il avait été très spécifique dans son choix de siège. Au cas où le soleil viendrait effectivement saluer ce grand oiseau métallique, l’homme avait pris autant de précautions qu’il avait pu. Son siège était du côté nord de l’avion, loin des hublots qui feraient face au sud, où le soleil risquait de pénétrer l’habitacle. Il se trouvait près des cabinets de toilette, s’il avait besoin de s’abriter. Il avait décidé de faire le voyage en automne, un moment de l’année où le soleil se faisait plus paresseux. L’homme était nerveux, mais s’était préparé du mieux qu’il pouvait. Rien ne dépendait plus de lui, à présent. Son sort reposait entre les mains du pilote, du vaisseau et du Créateur.
* * *
C’est en Irlande qu’avait débuté son périple. Il n’y a pas si longtemps, il s’était arrêté sur la côte ouest du pays, dans une péninsule aux environs de Cap Erris, le point le plus rapproché de l’Amérique du Nord. Là, depuis la falaise calcaire battue par des rafales violentes, il avait contemplé la vaste étendue d’eau bleue. C’était par un soir froid et humide, mais les intempéries ne l’atteignaient pas. Il était perdu dans ses pensées. Quelque part, à plusieurs milliers de kilomètres vers l’ouest, se trouvait un lieu qu’il avait un jour appelé chez soi. Le lieu qui l’avait mis au monde. Qui l’avait nourri enfant, puis jeune adulte. Mais auquel il avait tourné le dos depuis si longtemps, fâché contre le destin auquel l’avaient relégué les divinités. Honteux de ce qu’il était devenu. Bien qu’il s’était juré de ne jamais retourner en terre natale dans la peau du monstre qu’il était désormais, il vivait encore et toujours avec la honte ; il la gardait enfouie au plus profond de son âme. Tapie, comme un souvenir gênant. Ou comme une cicatrice : on pouvait la

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents