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Description

Insiste
Anor
Roman de 265 000 caractères ou 45 500 mots. Existe au format papier : 200 pages.
D’ailleurs cette nuit là je m’étais abandonnée. Antonin m’avait fait l’amour pour la première fois. J’ai ressenti l’orgasme si fort en moi que j’avais eu l’impression qu’il s’agissait de ma toute première fois. Lorsqu’il enfonça son sexe dans ma vulve j’ai perçu toute sa force, tout son poids, toute sa présence. Antonin était entre mes jambes comme un coup de couteau en plein ventre. Le plaisir était si intense qu’il en devenait douloureux.
Je sentais de la paume de mes mains les muscles de ses fesses et de son dos en action. Son souffle, ses gémissements rauques mêlés à la nuit, me perdaient dans la vie. Elle n’existait plus. Je ne la sentais plus. Je disparaissais tout entière dans une sensation de plaisir extensible à l’infini.
Tout de mon être se disloquait, se dissipait. Rien de charnel n’existait plus. Seule, et seulement, la sensation de jouissance me faisait moi, me définissait, me rappelait ce qui comptait. Lui et moi.
Cette nuit là, Antonin m’avait aimée. Fort. Il m’avait attendue. Il ne s’était jamais offert à ce point. Il n’avait jamais cherché à ce point le plaisir de sa partenaire. Lui aussi pour la première fois il avait fait l’amour.

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Informations

Publié par
Nombre de lectures 1
EAN13 9791029402272
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Insiste
 
 
 
Anor
 
 
 
Première Partie
 
Si l’Homme n’est pas au-dessus des lois,
l’amour ne saurait être au-dessus de la vérité.
 
 
 
1
 
 
Je ne savais pas qu’il s’agissait de mon demi-frère. Il ne savait pas que j’étais sa demi-sœur. Nous savions que nous étions faits l’un pour l’autre.
D’ailleurs cette nuit là je m’étais abandonnée. Antonin m’avait fait l’amour pour la première fois. J’ai ressenti l’orgasme si fort en moi que j’avais eu l’impression qu’il s’agissait de ma toute première fois. Lorsqu’il enfonça son sexe dans ma vulve j’ai perçu toute sa force, tout son poids, toute sa présence. Antonin était entre mes jambes comme un coup de couteau en plein ventre. Le plaisir était si intense qu’il en devenait douloureux. Je sentais de la paume de mes mains les muscles de ses fesses et de son dos en action. Son souffle, ses gémissements rauques mêlés à la nuit, me perdaient dans la vie. Elle n’existait plus. Je ne la sentais plus. Je disparaissais tout entière dans une sensation de plaisir extensible à l’infini.
Tout de mon être se disloquait, se dissipait. Rien de charnel n’existait plus. Seule, et seulement, la sensation de jouissance me faisait moi, me définissait, me rappelait ce qui comptait. Lui et moi.
Cette nuit là, Antonin m’avait aimée. Fort. Il m’avait attendue. Il ne s’était jamais offert à ce point. Il n’avait jamais cherché à ce point le plaisir de sa partenaire. Lui aussi avait fait l’amour pour la première fois.
Dans cette petite mort je revis ma vie. Tout est arrivé par mère. Tout venait de là. Elle ne m’avait jamais rien dit à son sujet. C’est quand je lui ai annoncé que je souhaitais lui présenter Antonin, le fils des Meunier-Delaunay qu’elle s’y opposa. Avec brutalité. Comme un corps rejetant un greffon. Avec tout autant de brutalité, elle me demanda si nous avions fait l’amour. Ma réponse la dévasta. Je ne comprenais toujours pas sa réaction. Ma mère ne pouvait plus parler, dire un mot. Elle s’enfermait dans un silence qui dans ma tête faisait un bruit continu et puissant. Je la questionnais. Cherchais à l’entendre. En vain. Elle n’était pas parvenue à me donner d’autres éléments de réponse qu’un « parce que » creux, sans signification particulière. Un « parce que » du même acabit que l’on donne aux enfants. Mais je n’étais plus une enfant. J’étais devenue une femme. Une femme avec ses désirs, ses craintes. Ce besoin de se sentir aimée. Une femme simple et complexe à la fois, tentant de composer avec son intériorité.
J’observais ma mère. Son attitude parlait pour elle. Nerveuse. Croisant et décroisant les jambes. Tordant une mèche de cheveux dans tous les sens. Puis serrant avec force ce pendentif au bout de ce sautoir qu’elle avait pour habitude de porter.
 
Je venais de comprendre.
Instantanément, je suis morte.
Le temps de fermer les yeux pour une dernière fois je revécus toute ma vie :
 
Je n’avais aucune idée de ce que plus tard je souhaitais faire, pourtant tout le monde n’avait de cesse de me le demander. Était-ce le plus important ? Ne devaient-ils pas écouter ce que ma liberté me permettait plutôt ? Je suis jeune. Jolie, les garçons me le disent souvent. Cochonne, mes amoureux me le confient. Travailleuse, ma mère le répète aux autres parents, comme mes professeurs au lycée se passant le mot. Je suis ambitieuse. Ça, je le sais. Jusqu’à quel point je l’ignore encore.
Pourtant une chose m’apparaissait comme une évidence : Ne pas avoir la même vie de couple que mes parents. Je pris cette décision tôt. Suffisamment en tout cas pour m’éviter un, voire deux divorces. Non, je n’allais pas me disputer parce que les nouvelles serviettes de bain ne sont pas absorbantes, parfaitement désagréables pour se sécher la peau, « autant se sécher avec une éponge gorgée d’eau» fulminait mon père. Ma mère se défendait avec des arguments semblant sortir tout droit d’un plat réchauffé. Sur le ton de la ménagère offusquée, elle lui répondait :
— Ils sont neufs ! Il faut les passer en machine quelques fois, puis ils auront perdu ce côté déperlant. Ma mère m’avait rapporté cette scène pathétique alors que nous parlions de sa vie avant ma naissance.
Je n’envisageais pas non plus de construire ma personne dans une douce schizophrénie, où je serais la femme, la mère, l’épouse, la maîtresse, ou peut-être même aucune de ces femmes, où je laisserais mon identité se perdre comme une enfant trop tôt livrée à elle-même.
J’avais dix-sept ans, je sortais du bain et regardais dans le miroir mes seins. Ils étaient discrets, comme un film érotique. Ils me plaisaient. Je me disais que tout venait de là. Le monde est au bout de mes seins. Je le tiens. À leur tour ils me maintenaient dans ce corps de femme qui évoluait. Je le sentais. Du bout des doigts, je caressais mes tétons. Ils étaient rugueux, posés chacun sur une auréole dorée. Je pensais à ceux de ma mère qui avaient allaité, qui avaient aimé. Je ne comprendrai jamais pourquoi un tel souvenir nous échappe. La nature est ainsi faite. Mes premiers souvenirs remontent à l’âge de six ans. Avant il n’y a rien, le néant, le chaos. La mort y ressemble à s’y méprendre. Quel souvenir auraient-ils été ? L’allaitement ne devrait s’oublier. Comme aller à la scelle il rend humble et fort à la fois.
Je suis né en novembre, le 16 novembre. En plein hiver. Pourtant dans le ventre de ma mère il n’y avait que deux saisons, le printemps et l’amour. Je la sentais me porter sur d’autres rives, d’autres terres. Je me laissais aller au gré du vent, des vents contraires parfois, quand elle se couchait sur le côté mon corps mou, presque invertébré tant le squelette comme une chrysalide pouvait se déchirer, allait se regrouper en un coin.
Quand d’autres mères conservent le premier bracelet, ou les premiers souliers, ma mère avait aussi gardé la robe de grossesse qu’elle portait le jour de ma naissance. Le tissu avait été distendu par son ventre, par son corps, par mon corps, qui rendait sa peau tendue sur la mienne nue.
Je l’ai aussi portée cette robe, plusieurs fois.
J’avais eu parfois ce besoin de ressentir le volume que je représentais dans son ventre : Alors, à la manière d’un pantalon souvenir après un régime drastique, je tirais devant moi le coton à hauteur du nombril, qui formait désormais un cône. Je prenais la pose devant le miroir. Mon profil racontait une autre histoire. Je ne semblais plus être l’adolescente, ni l’enfant, mais une fille-mère, trouble et attachante à la fois. J’avais mon corps de fœtus, et celui de maintenant, au même instant.
Je m’imaginais bouger, alors je mimais ce geste typique de la femme enceinte : Je portais ma main gauche sur le côté bas gauche de mon ventre, tout en caressant de mon autre main, la face opposée. Je me sentais enceinte ; enceinte de moi. Je ne me sentais pas prête pour vivre cette expérience. Je me demandais si ma mère ne l’avait jamais été ? Que se demandait-elle à ce moment-là ? Je l’ignorais. Peut-être la même chose que moi : Être enceinte c’est un peu accoucher soi.
Je regardais maintenant mes yeux. Ils étaient mes seins. Les hommes allaient volontiers si pencher je le savais. Enfant on me disait au regard malin, adolescent on préféra celui coquin, adulte on cherchera celui de la putain.
Voilà tout ce que j’avais décidé d’assumer nue devant mon miroir de salle de bains comme face à l’autel un pieux sur son prie-Dieu.
C’était le début du Printemps. Les jours devenaient plus longs, plus chauds. Annabelle avait organisé dans le jardin un repas avec quelques voisins. J’étais impatiente d’être avec eux autour de la table, mais surtout face à Nicolas.
De la tenue de grossesse de ma mère, je passais ma robe préférée. Celle à fleurs, étroite à la taille, me mettant en valeur jusqu’à mes reins. Une culotte de coton blanc pour déjouer la transparence de mon vêtement confectionné de voiles et légèreté. Volontairement, les bretelles tombaient sur le creux de mes coudes. Sans soutien-gorge, juste mes seins pour assurer le maintien.
Avant de quitter le miroir je prie garde d’évaluer le décolleté en me penchant. Il était à point, ferme et gourmand. Ni trop, ni pas assez, tout simplement charmant.
Nicolas est bel homme, grand. Il porte toujours une chemise de bureau, même le dimanche. Ce jour-là elle était blanche, rayée de rose. Les manches retroussées jusqu’aux coudes, ce qu’il ne faisait jamais, même en été. Il portait en toute occasion des boutons de manchettes, qui celaient toute probabilité d’ouverture, tels deux cadenas au bout de ses manches, les rendant impossible à remonter. Je ne l’avais jamais vu en t-shirt. Il ne se découvrait pas. Il me donnait presque la sensation de cacher quelque chose. Il a pourtant de beaux avant-bras, puissants, masculins, avec une pilosité discrète moins envahissante que celle qui court sur son torse. Ses bras étaient musculeux. Ses mouvements soulignaient une mécanique précise, fiable, où pour le coup le moindre muscle apparaissait d’emblée comme une nécessité.
J’aurais aimé qu’il me prenne dans ses bras, mais préféré qu’il me porte sur un bras comme il l’avait fait il y a quelques années avec son deuxième enfant, Corentin, alors nourrisson de quelques jours.
Je n’avais pas connu mon père. Je pensais avoir été adoptée. Je ne ressemblais pas à mère. Comment savoir si je ressemblais à mon père ? Maman ne m’en parlait jamais. Comme ma première fois, il était un tabou à la maison, dans la famille.
Pourtant, tout comme au sujet de mon père, tous se doutaient qu’un homme était forcément passé par là pour arriver jusqu’à moi. À moi en tant qu’enfant pour l’un, à moi en tant que femme pour l’autre. L’un m’avait faite enfant. L’autre m’aura faite femme.
 
Ma mère ne me disait rien. Ma grand-mère non plus. Mon grand-père écoutait plus qu’il ne parlait. Chacun allait donc emporter ce secret dans sa tombe. Certains plus rapidement que d’autres, l’idée étant qu’ils me le disent à temps.
Mes grands-parents, surtout la matriarche, Tassameziane, avait tout quitté pour tout

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