Jannes
61 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
61 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Jannes
Marc Leleux
Roman de 260 000 caractères, 46 000 mots, le livre papier fait 168 pages.
J’ai rencontré Jannes un soir de printemps. Son regard rieur aux yeux emplis de rêves m’a séduit. Il y brillait une lueur d’amour tendre qui m’attirait inexorablement.
Il s’y reflétait également une part de mystère, un secret terrible. Jannes ne parvenait à se défaire de l’emprise de la drogue. Je me refusais à le voir lentement se détruire. J’allais devoir puiser au plus profond de lui, au plus profond de moi, les ressources d’amour nécessaires pour le sauver.
Tout nous ramènera à ce soleil de Cologne sous lequel, sans dire un mot, nous avons compris que nous serions désormais tout l’un pour l’autre.


Retrouvez tous nos titres sur http://www.textesgais.fr/
Rejoignez-nous sur Facebook
: Éditions Textes Gais


Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 09 mars 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9791029402654
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Jannes
 
 
Marc Leleux
 
 
 
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
 
 
 
 
Für Jannes Horch, den ich mehr als alles andere liebte und der für immer das Licht sein wird, das in meinem Herzen und in den Tiefen meiner Augen scheint.
[Pour Jannes Horch, que j'ai aimé plus que toute autre chose et qui sera pour toujours la lumière qui brille dans mon cœur et dans le fond de mes yeux.]
 
 
 
Chapitre 1
 
 
Ils sont étranges ces moments où nous nous sentons sombrer dans un premier sommeil. Notre corps immobile, encore à demi-conscient, descend comme par paliers avec quelques pointes où, malgré nous, nous reprenons goût à la vie. Étouffant peu à peu, il nous semble que nous nous débattons pour trouver un peu d’air. Puis, soudain, la descente se fait plus lourde, plus brutale aussi. Le corps se lâche sans plus trouver appui contre les parois devenues lisses de ce qui nous apparaît désormais comme un gouffre sans fin. La vitesse vertigineuse de cette microseconde est cependant telle, qu’en proie à la panique, nous trouvons la ressource nécessaire à un bref sursaut. Notre dos, brisé en mille petits morceaux, vient de rebondir sur un sol rocailleux. Notre tête, portée par le choc, s’élance vigoureusement vers l’avant. Trempés et haletants, nous ouvrons les yeux.
Les questions se bousculent. Nous ne reconnaissons plus rien. Nous cherchons des réponses qui semblent vouloir nous fuir. À chaque fois que nous les approchons, elles s’échappent, toujours un peu plus loin. Puis, doucement, notre esprit s’apaise. Nous nous sentons enveloppés d’une douceur rassurante, comme si les éléments qui s’étaient un instant plus tôt déchaînés contre nous retrouvaient maintenant leur place immuable, sans cri, sans heurt. Nos yeux, lentement, se referment et nous nous laissons aller, cette fois pleinement, à flotter sur l’océan serein du sommeil.
Toute la vie tient là, dans ces instants de l’entre-deux durant lesquels notre cœur est projeté dans une expérience improbable. Nous pressentons bien qu’elle est irréelle, mais pourtant, par chacune de nos fibres, nous la ressentons. Le vrai et le faux se fondent. Le plaisir, la douleur se troublent. Tout, peu à peu, nous devient indifférent. Non… pas tout à fait tout…
 
*
* *
 
J’ai rencontré Jannes un soir de printemps, dans des circonstances somme toute assez peu avouables. Depuis quelques jours déjà, nous discutions sur Grindr. Il me semblait gentil. Il me disait que s’il lui arrivait de rencontrer d’autres hommes pour des passades d’une demi-heure sans importance, il rêvait, comme moi, de mieux, de cette autre chose presque inaccessible qui ouvre le cœur en grand. Je le croyais, je me sentais, sans véritablement le connaître, déjà heureux. Il m’avait écrit sa vie, son travail difficile à l’hôpital, d’où il venait, son parcours et l’intérêt, les espoirs qu’il avait fondés en moi dès l’abord. Nous étions mercredi. Nous devions nous voir pour la première fois chez lui le samedi.
Le vendredi soir, j’étais au ExCorner, ce bar cher à mon cœur pour son humanité. Il n’était pas très tard et les habitués commençaient à peine à arriver. Autour de moi, il y avait de la vie. Je me sentais bien. J’avais presque oublié mon rendez-vous de demain soir. Seule importait la douceur de l’instant présent. Je commençais à y connaître du monde. On m’y reconnaissait. Nous étions entre amis, presque en famille. J’avais prévu de passer la soirée et sans doute une partie de la nuit auprès des miens, mais un téléphone qui vibre au fond d’une poche peut parfois en décider tout autrement. Il peut même changer toute une vie. C’est un message de Jannes : « Je suis disponible ce soir. Passe, je t’attends ». Moi, si soucieux des règles et qui ne souffre habituellement aucun changement de dernière minute, je me sens un peu déstabilisé. N’était-ce pas pour demain ? « Oui, mais je me suis libéré. J’ai envie de toi ». Je me levais à peine. Je me rassieds. Je veux autre chose. Je veux bien plus. Il avait pourtant de si jolis yeux. Il m’assure que lui aussi souhaite davantage, qu’il a vraiment envie de me connaître, de voir si l’on pourrait construire quelque chose de solide ensemble. Mais pour ce qui est de l’instant présent… J’hésite et pourtant j’y vais.
La rue étroite est à peine éclairée. Je suis au cœur de la ville, non loin du Rhin et des sites touristiques. J’ai cependant ce sentiment étrange, comme dans un rêve, de ne plus trouver mes repères. Un peu hors d’atteinte, hors de l’espace et du temps. Il me semble être perdu dans un village au sein des collines dont se dégage une atmosphère moyenâgeuse que renforce la dénivellation des rues pavées déjà calmes à cette heure. Une maison à trois étages, un numéro. C’est là. Plusieurs noms s’affichent dans la pénombre. Le brouhaha terrible de l’interphone dans lequel je n’ai versé aucun mot trouble la quiétude de la rue. Je pousse la porte d’accès au bâtiment. Au bout d’un couloir gris et blanc qui me rappelle un peu, entre tendresse et effroi, les écoles de mon enfance, j’emprunte un escalier où les lumières s’allument au fur et à mesure de mes pas. J’avance lentement en m’appuyant lourdement, comme un vieillard, sur la rampe de chêne. Je ressens comme un frisson, un peu pris d’une peur idiote que je ne maîtrise pas. Une peur peut-être d’être déçu, de ne pas trouver ce que j’attends, de trouver ce que je connais trop bien et dont je ne veux plus. Au deuxième étage, une porte est entrouverte. Je reste là quelques secondes, sans bouger, osant à peine respirer. Je n’entends aucun bruit. Par un suprême effort, j’ouvre la porte en grand. Tout est paré d’obscurité. Par le rayon de lumière qui entre du couloir avec moi, je devine au fond de ce petit appartement un large canapé qui envahit la pièce. Jannes y est allongé. Il est entièrement nu.
 
*
* *
 
Nous n’avons presque pas parlé, comme si chacun d’entre nous se contentait d’une unique raison à ma venue. Nous nous sommes contentés de faire l’amour, un amour puissant et charnel dont l’intensité semblait décuplée par la force de son excitation. Il ne cessait, à intervalles réguliers, d’aller s’enfermer de longues minutes dans la salle de bain. Il en revenait toujours plus excité alors que, moi, je me posais beaucoup de questions. Je le trouvais beau. Sans savoir pourquoi, je me sentais sale. Enfin, nous avons parlé un peu, des banalités, d’où je venais, ce qu’il savait déjà, ce que je faisais dans la vie, pourquoi j’étais à Cologne. Je m’appliquais pour tenter de lui répondre du plus clairement que ma pratique de l’allemand le permettait. Il gardait cependant un air détaché, semblant ne pas prêter attention à mes réponses et ne cessant de tapoter sur son téléphone portable. Pire que tout, ses yeux se refusaient à croiser les miens. Puis les questions, peu à peu, se sont espacées, faisant naître de longues plages de silence, un silence qui, rapidement, me devenait insoutenable. Je me demandais ce que je faisais ici. J’essayais à mon tour de combler le vide en lui posant toutes sortes de questions qui ne parvenaient pas à attirer son attention. Fixé sur son I-Phone, il ne détournait pas le regard. Il ne me répondait même plus. J’étais devenu invisible. Il avait eu ce qu’il voulait. Je ne servais plus à rien.
Je me suis lentement rhabillé. Puis j’ai encore attendu, assis sur le canapé à côté de lui. Pas un regard, pas un mot. Je me suis levé. Je lui ai dit que je partais. « D’accord, tu reviens après ? » « Je ne crois pas, non. Enfin, peut-être ». Sa question me faisait sourire. Toujours aucun regard. Je partais comme j’étais venu, simplement un peu plus triste. Lui continuait à pianoter sur son téléphone, sans doute à la recherche de quelques autres hommes. Les espoirs sont ainsi faits qu’ils s’envolent comme ils sont arrivés, sans qu’on s’y attende, sans même que l’on sache bien pourquoi on s’y était accroché si fort avant de les laisser gentiment s’en aller. Je retourne au ExCorner où je veux m’étourdir pour ne plus penser à lui. Son image ne cesse de revenir à mon esprit. Elle est renvoyée d’un côté à l’autre de mon crâne et je ne parviens pas à l’en chasser. Au petit matin, à nouveau un message, « Viens, je t’attends ». J’oscille entre désespoir et colère. Je veux répondre. Je ne réponds pas.
Un jour passe encore. Jannes n’est plus que dans un coin reculé de ma mémoire où je traîne ma vie. Puis à nouveau un message : « Comment vas-tu ? Pourquoi n’es-tu pas revenu la dernière fois ? Moi, j’aimerais te revoir ». Des questions, beaucoup, qui se bousculent et qui éclatent en moi. Non, je sais bien que ce serait idiot. Pourquoi s’entête-t-il à me parler ? Et pourquoi est-ce que je ressens ce besoin de lui répondre ? Je lui écris que je ne crois pas que nous cherchions la même chose. Je ne veux plus de ces relations d’un soir ou d’une heure qu’on oublie vite pour qu’elles ne fassent pas mal. Ce soir-là, il était face à moi sans vraiment l’être et c’est moi qui l’attendais. Juste un signe, un geste, un regard qui ne sont pas venus. Je me suis senti seul, plus seul que jamais. Il me répond, comme avec un peu de détresse, qu’il veut vraiment la même chose que moi, apprendre à me connaître et, espère-t-il, devenir proches et construire ensemble quelque chose de durable. Je suis sceptique. En fait, je n’en crois pas un mot. Tout ce qu’il m’a montré de lui m’invite à ne pas le croire, à ne pas le suivre dans un délire semé d’illusions. Pourtant, il y avait dans ses yeux une faible lueur, quelque chose de triste qui appelait la vie. Sans vraiment comprendre, je lui cède. Nous nous reverrons. Tout ce que je sais, c’est qu’au plus profond de moi j’ai envie de le revoir.
 
*
* *
 
Dans la lumière du jour, tout semble différent. Le mystère se lève pour laisser place à la vérité d’un air doux de printemps. Quand j’arrive chez Jannes, je découvre un appartement qui n’est plus le même.

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents