L étrangleur
86 pages
Français

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Description

L’Étrangleur

Maxime Fulbert

446 000 caractères, 55 200 mots.

Rouen, ville plutôt calme habituellement. Un tueur en série s’en prend à des jeunes gays de la ville. Il opère toujours de la même façon. Il étrangle les jeunes gens avec des gants noirs. Le commissaire Wastings, quarante-cinq ans, portant beau, doit retrouver l’assassin. L’enquête est difficile et comporte des embûches. Le fils du préfet est l’une des victimes. Par ailleurs, le capitaine de la scientifique part à la retraite. Le lieutenant Garnier lui succède. À sa vue, Wastings ressent un coup de foudre. Ce n’est pourtant pas son genre. Est-ce que ces deux hommes vont pouvoir travailler ensemble, dans une ville de province où tout se sait, dans un milieu professionnel fortement machiste et homophobe ?

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Publié par
Nombre de lectures 3
EAN13 9791029401619
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L’Étrangleur
 
 
Maxime Fulbert
 
 
 
 
 
 
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Éric Wastings avait tout juste quarante-cinq ans. Il venait de les prendre au début du mois de mai, au tout début du mois de mai, le 1 er . Sa mère disait de lui qu’il était son enfant des clochettes . Elle voulait signifier par là qu’il était son enfant du muguet. Cela faisait rire tout le monde dans la famille, sauf la mère d’Éric et Éric lui-même. Sa mère ne plaisantait pas, parce qu’elle ne voyait rien de risible à ce que son fils soit né le jour de la fête de ces fleurs immaculées et parfumées. Eric, quant à lui, dès le début de son adolescence, trouvait que ça faisait fortement « pédé ». Pour sa mère, c’était charmant, tout au contraire. Les fines grappes sortent de terre et éclosent au centre de feuilles hautes et protectrices. Madame Wastings devait sans doute se comparer à ces feuilles hautes. Elle protégeait ainsi Éric dans un élan d’émotion maternelle et poétique.
Cela ne faisait pas se dérider Éric. Pourquoi ? Simplement parce qu’il avait connu très tôt son orientation sexuelle. Très jeune, il avait été attiré par les garçons. Si jeune qu’il ne s’en souvenait pas clairement. Plus les années passaient, moins il supportait l’expression sucrée du garçon associé au muguet. Cela faisait totalement inverti, pétri de féminité qu’il fuyait. Plus tard, seulement plus tard, il rapprocha les clochettes des testicules, de ses testicules. Cela faisait de lui un petit garçon, puis un homme aux testicules blancs. La métaphore sexuelle lui convenait mieux. Les clochettes étaient devenues des couilles. Des couilles blanches relevaient de la réalité. Il était très clair de peau et possédait assurément des couilles blanches.
Il avait pourtant fini par accepter l’expression enfant des clochettes parce qu’il nourrissait une extrême affection pour sa mère et que cela faisait se gausser la famille proche. Il estimait que mieux valait faire rire le clan plutôt que de le faire pleurer. En effet, son métier ne lui fournissait que très rarement un motif de gaudriole. Surtout à ce moment-là.
Pour rester dans les jeux de mots familiaux, complètement idiots pour les étrangers, mais qui faisaient sens au sein du clan, son frère avait poursuivi la métaphore. Comme Éric était entré dans la police, son frère aîné lui avait dit que cela lui briserait les clochettes. Qu’est-ce que cela voulait dire ? Tout simplement que l’hôtel de police de Rouen était sis rue Brisout de Barneville. Il y avait risque de brisout des clochettes . Bref, les deux frères se gondolaient encore et toujours à la pitoyable bouffonnerie sur la brisure des clochettes.
Éric se disait que si son frère aîné l’avait vu nu, il aurait constaté que ses testicules étaient assez clairs, en effet, mais tout de même un peu plus pigmentés que le reste de son corps blanc, délicatement rosé. Et si son frère avait utilisé, en écartant les poils, une loupe pour observer les génitoires au plus près, il y aurait vu plein de taches de rousseur. Aussi Éric Wastings avait-il fini par apprécier ses couilles piquetées de roux. Ses amants, lorsqu’il était étudiant, avaient admiré cette caractéristique avant de lui gober les clochettes.
Éric Wastings avait un long visage présentant un très grand front, un front haut, un front large, censé être un signe d’intelligence ou de disposition à la méditation, aux réflexions métaphysiques. Rien de semblable chez Éric Wastings. Il était intelligent, certes, mais à défaut de pensées métaphysiques sur l’origine de l’homme et son rôle sur terre, il était porté à aimer ce qui est beau. C’était un amateur d’art et de musique. Le dessin général de sa face venait se resserrer au niveau des oreilles, puis repartait, en s’arrondissant aux joues. Le front était dégagé du fait de l’implantation de cheveux haut placés, drus, d’une raideur de hérisson, accusant une légère chute, puisque les épis étaient plus courts au bord et que le reste poussait en abondance au fur et à mesure que l’œil s’aventurait vers le dessus du crâne. Lesdits cheveux se disciplinaient derrière les oreilles, lesquelles étaient écartées à la partie supérieure du lobe. La chevelure descendait et rejoignait une barbe entretenue par une tonte tous les trois jours. L’ensemble était châtain clair à reflets légèrement roux, le bout des cheveux franchement roux.
L’homme était rose de peau. Celle-ci était sensible. Il ne fallait pas qu’il l’expose au soleil trop longtemps. Sous peine de rougeurs douloureuses nécessitant l’application de crème ou l’absorption de gélules recommandées par son dermatologue. Ses arcades sourcilières étaient proéminentes, mais sans pilosité excessive. Ses yeux, petits, logeaient dans les creux sous les arcades, qui rendaient la joue très légèrement saillante, mais on ne pouvait parler de pommettes hautes. Les yeux, petits, donc, étaient bleus, mais du bleu d’une mer agitée, c’est-à-dire un peu sombre, au point que quelquefois on croyait ces yeux-là noirs, très noirs quand on était fixé par eux.
Le regard était franc et bon cependant. Enfin, le menton partait en triangle, mais n’était pas aigu, après des joues douces, couvertes de taches de rousseur du type de celles qui constellaient ses testicules. Les lèvres étaient épaisses et sensuelles. L’ensemble faisait d’Éric un homme très séduisant. Il était bien bâti, charnu plus que musclé. Si on l’observait et que l’on fit le compte de tout ce qui composait ce visage attrayant et ce corps bien taillé, il était difficile pour un homosexuel de ne pas bander. Mais quand on n’était pas en phase lubrique et que l’on restait dans le strict domaine professionnel, quoiqu’on fût homosexuel, de telles pensées ne venaient pas à l’esprit.
Éric Wasting était commissaire à Rouen. Il était apprécié du doyen, le commissaire divisionnaire, dit le Pacha, qui n’avait que cinquante-cinq ans cependant. Les autres étaient partis à la retraite. Les hommes s’étaient beaucoup renouvelés. Ce qui faisait qu’à quarante-cinq ans Éric Wastings était vice-doyen. Au surplus, comme il était doué et parfaitement investi dans sa mission, sa hiérarchie l’avait remarqué. Elle voulait le remercier de ses brillants états de service. Elle le ferait passer contrôleur général, la nouvelle appellation du divisionnaire. Peut-être pas tout de suite. Mais cela était dans son dossier. Sans qu’il en sache rien. Pas plus que les autres, ses collègues de même rang que lui : cinq commissaires, dont Quintel, qui se détachait nettement des autres. Certains allaient tirer une mine de déterré. Ils allaient se consumer de jalousie. Qu’il puisse leur donner des ordres allait les incommoder, les empêcher de bien travailler, peut-être. Mais c’était ainsi, ils allaient devoir composer avec la réalité.
Éric Wastings était fils d’un professeur d’histoire et d’égyptologie, ayant tenu une chaire à la Sorbonne, à la retraite au commencement de ce récit. Georges Wastings était une sommité dans son domaine. Il continuait à briller en écrivant des ouvrages savants. La mère d’Éric Wastings avait été professeur de Lettres au lycée Reine Mathilde de Rouen. Un excellent lycée, refuge des gosses de la bourgeoisie industrielle et du commerce pour la plupart. Éric avait tenu à suivre son parcours lycéen ailleurs qu’à Reine Mathilde, car il trouvait très gênant, vis-à-vis de ses condisciples, d’être le fils d’une des profs du lycée. Il ne voulait pas que ses camarades imaginent que ses notes étaient gonflées par sa mère. Aussi fut-il lycéen à François-Adrien Boieldieu, autre refuge d’élèves de la bonne société locale.
Ce fut une réussite puisqu’il avait obtenu son bac avec la mention très bien. Il avait été excellent en lettres, en histoire et en philosophie. Ses parents avaient imaginé qu’Éric opterait pour le professorat, pour suivre la voie familiale, mais il préféra l’histoire de l’art. Son père possédait une sublime collection de peintures de toutes époques, des primitifs italiens, et des objets égyptiens antiques, dont deux sarcophages, rangés debout, de part et d’autre d’un canapé haut, dans des vitrines verticales. C’est de la proximité de pareils chefs-d’œuvre que le goût de l’art lui était venu et qu’il avait souhaité le cultiver au cours de ses études supérieures.
Et puis patatras, pendant l’écriture de sa thèse portant sur la peinture du gueux et du vagabond chez Le Caravage, lesdits gueux et vagabonds l’avaient entraîné vers un intérêt pour les marginaux et délinquants modernes. Il avait souhaité vidanger la lie du tonneau. Il avait souhaité remettre les hors-la-loi plus ou moins coupables dans la bonne voie. Pas de concours de conservateur de musée qui tient, de ce fait. Il avait voulu entrer dans la police. Quelle était cette folie ? Qu’arrivait-il à Éric ? s’étaient demandé le père et la mère.
Sa mère avait beaucoup pleuré. Elle se demandait pourquoi Éric avait ainsi bifurqué vers ce métier difficile et dangereux. Elle s’était forgé des scénarios plus dramatiques les uns que les autres : elle le voyait mourant sous les balles d’un « gangster » dévalisant une banque avec une effroyable cruauté. Ou poursuivi et tué par le même une fois qu’il serait sorti de prison, dans une vengeance noire et violente. Elle s’en voulait. Elle avait laissé la bride sur le cou à son fils bien qu’il fût pour elle son cher enfant des clochettes du 1 er mai. Son mari et elle-même n’avaient pas bien encadré ce fils un peu distant de sa fratrie et qui avait toujours fait preuve d’une grande autonomie. Pourquoi n’avait-il pas suivi l’exemple de ses frères et sœurs : ses deux frères aînés étaient notaires et sa sœur cadette antiquaire. C’étaient là des professions enviables, car calmes et sûres.
Madame Wastings s’était tourmentée les premières années d’exercice d’Éric, puis le temps avait érodé ses craintes. Elle s’était rendu compte que son fils était un excellent policier, d’une grande rigueur et surtout d’une abs

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