Noces rebelles
43 pages
Français

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Description

Noces rebelles
Jesse Devereau
Roman de 154 000 caractères, 26 000 mots, le livre papier, 128 pages en équivalent papier.
Thomas n’opposa aucune résistance. Et non seulement il se laissa embrasser, mais, en outre, il embrassa : il passa ses deux mains derrière sa tête, comme pour être sûr de ne pas perdre l’objet de son incandescence soudaine. Car il était question de cela, d’un brasier en train de gagner du terrain sur des certitudes bien mal acquises.
De son côté, Morgan fut étonné par ce geste. Il était presque déçu, il s’attendait à devoir lutter pour obtenir le cœur de Thomas. De nature sauvage, un peu aigle, le fils de Lapatelière aimait les défis. Las, sa proie lui tombait tout cuit dans le bec. L’expression se trouvait fort appropriée à la situation présente. La langue du jeune homme avait fait irruption dans la sienne avec passion, pour ne pas dire violence. Nouvel étonnement ! Cet homme était aussi brûlant que le goût du jeune aristocrate pour la provocation. Quelle aubaine !


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: Éditions Textes Gais


Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 10 mai 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9791029402791
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Noces rebelles
 
 
Jesse Devereau
 
 
 
Romance gay
 
 
La passerelle tremblait. C’était la seule chose qui préoccupait Gabrielle. Se savoir amoureusement couvée du regard bleu de son époux n’y changeait rien. Gabrielle était ce que l’on pouvait nommer une femme pragmatique. En arrivant, son premier coup d’œil ne fut pas pour la merveille architecturale sur laquelle elle allait passer quelques jours, mais sur les canots et les bouées. Elle aurait aussi pu être excitée à l’idée de la vue qui allait s’offrir à elle ; la rade de Cherbourg en cette douce fin d’après-midi printanière, malgré sa fine carapace nuageuse, avait tout d’une photo de carte postale. Non, le plus important était cette passerelle qu’elle devait emprunter et qui tremblait. C’était son obsession. Sa frayeur.
Sur un quai, tout aurait été plus stable. Hélas, le paquebot avait dû rester en rade, car il n’avait pu atteindre le port, le fond n’y étant pas assez profond. Deux transbordeurs s’étaient vu confier la mission d’embarquer les passagers.
— Est-ce réglementaire toutes ces personnes en même temps sur la passerelle ?
— Je ne sais pas, répondit Thomas. J’imagine que ce doit être prévu pour…
— Et si la tôle cédait sous le poids ?
La jeune femme donna un coup de pied au plancher métallique pour jauger sa solidité. Comme si ses quarante-cinq kilos pouvaient avoir un impact face aux centaines que l’appontement supportait à cet instant. Thomas se colla à elle et referma ses mains sur son visage diaphane. Il la dévisagea, mais sa femme lui sembla translucide. Il n’y avait plus de chair, plus ces petites noisettes qu’il adorait baiser, ce rouge à lèvres trop vif, ses pommettes adorables. Non, il n’y avait plus rien d’autre que l’effroi sous ses brunes boucles. Mais était-ce réellement la passerelle qui affolait Gabrielle ? Était-ce la traversée ? Le jeune homme savait qu’il y avait une appréhension autre et qu’il ne parviendrait à calmer qu’une fois arrivés aux États-Unis. Une fois installés, leur commerce ouvert, leur vie promue à un bel avenir. Quelle belle idée d’ouvrir une boulangerie dans un pays si peu touché par la grâce de la gastronomie ! Et puis, il y avait cette croisière qu’il ne voulait pas voir gâchée par la peur, si légitime était-elle ! Il s’agissait de leur lune de miel, tout de même !
— Vous comptez faire du surplace combien de temps ? vociféra une voix de femme, derrière le couple qui bloquait la progression des passagers.
— Viens ! fit simplement Thomas en embrassant la joue de sa compagne.
— Oh, ne crois pas que je ne veux pas faire cette croisière ! murmura Gabrielle, des larmes plein les yeux. Je l’ai tellement attendue ! Mais… Mais crois-tu que nos malles arriveront intactes ?
— Nos affaires arriveront à bon port, la rassura le jeune homme, en passant son bras sur l’épaule gracile de sa femme. Et si ce n’est pas le cas, nous achèterons ce qu’il faut sur place. C’est à ça que doit servir l’argent d’oncle Théodore.
Elle lui adressa un sourire mouillé, ses lèvres s’entrouvrirent, mais aucun son ne sortit. Elle ne voulait pas l’ennuyer davantage avec ses interrogations. Elle ne souhaitait pas se montrer futile alors qu’elle était persuadée être, des deux, la plus proche des réalités. Était-ce bien sérieux de tout plaquer pour l’Amérique quand une vie, certes moins aventureuse, plus rangée, leur garantirait en France un niveau de vie satisfaisant ? Aucun son ne sortit. Avant de regarder droit devant et de ne pas manquer la marche au bout de la passerelle, elle posa son regard sur cet inconnu devenu son mari il y avait seulement un mois de cela. Son homme. Elle ne put réfréner un gloussement en songeant à ces termes. « Son homme ». Ils avaient le même âge, mais il paraissait plus jeune. Il était encore cet adolescent rêveur et naïf que lui avaient dépeint ses parents, qu’elle avait d’abord refusé de rencontrer. « Sa famille est tout ce qu’il y a de respectable. Son oncle a fait fortune aux États-Unis d’Amérique ! ».
Là voilà plongée dans ses souvenirs. Plutôt dans ses rêves de jeunes filles. Le prince charmant, elle l’imaginait à son image, responsable et réaliste, enclin à montrer le chemin, maître d’école peut-être. Pas ce grand garçon, les bras ballants, égaré au milieu du flot de passagers. Elle avait conscience qu’elle se montrait injuste. C’était une belle personne. Une belle personne qui ne demandait qu’à grandir. Il tentait d’héler les membres de l’équipage présents pour que l’un d’eux leur indique l’emplacement de leur cabine, mais personne ne s’arrêtait. Elle allait venir à sa rescousse, mais auparavant elle le contempla encore. Il l’amusait, il ressemblait à un clown avec son bras levé et son chapeau trop grand. Quelle idée lui avait-il pris d’acheter ce chapeau de paille à la boutique de souvenirs ? Elle le préférait tête nue. Sa chevelure était d’un blond doré appétissant. Oui, la voyant, on ne désirait qu’une chose : la dévorer ! Tout du moins la caresser sans fin tant elle paraissait soyeuse. Elle avait cette finesse et cette douceur d’habitude observées au sein de la gent féminine. Mais tout le reste était masculin. Une mâchoire carrée, sans cependant ressembler pour autant à celle d’un boxeur ! Des épaules solides, des muscles qui l’étaient tout autant même si ceux-ci manquaient un peu de finesse. Elle aurait aimé qu’il soit cinq centimètres plus grand. Mais sa taille, néanmoins dans la moyenne, ne l’empêchait pas de voir loin. Certes, il était ce qu’on nommait un rêveur, mais cela révélait une grande imagination et beaucoup d’ambition !
Pourquoi la boulangerie alors qu’il aurait pu être auteur de livres ? Oui, elle l’aurait bien vu, non pas romancier ou poète, cela ne nourrissait pas une famille – famille qu’elle comptait bien agrandir –, mais rédacteur d’ouvrages de géographie ou d’histoire. Thomas était intelligent. Qu’il était désespérant de le voir se mettre dans le pétrin ! Oh, bien sûr, boulanger-pâtissier était un métier fort honorable, elle ne le sous-estimait pas. On avait besoin de ces hommes qui travaillaient les matières essentielles, celles de la vie, le blé et l’eau. Mais…
— Oh, ce que tu es empoté ! fit-elle en courant en sa direction. Pourquoi ne demandes-tu pas conseil au personnel ?
— Mais que crois-tu que j’essaie de faire ?
Elle lui donna un petit coup vif sur la tête, ce qui fit disparaître ses yeux sous la paille du couvre-chef.
— Monsieur ! cria-t-elle en s’approchant d’un steward.
— Une checonde, Madame ! Je dois m’occuper du canisse de la Comtèche.
— De la Comtèche ?
Le jeune homme s’empara d’un panier en osier rembourré d’une étoffe hors de prix et abritant un petit chien blanc aussi frisé que sa maîtresse. Gabrielle sourit et ne perdit pas des yeux cet homme ; son cheveu sur la langue était exquis, elle voulait être renseignée par nul autre que lui !
— Il y a d’autres célébrités, lui confia un garçon surgi d’elle ne savait où. Il paraît qu’il y a une chanteuse d’opéra et un acteur de cinéma !
— Vous êtes bien informé, vous êtes chroniqueur mondain ? le taquina Gabrielle.
— Oh, non ! Juste mondain.
— Quelle belle profession !
— Je suis Morgan de Granville.
— Oh, une particule nobiliaire…
— Non, non !
Il s’esclaffa, et elle trouva ce rire charmant.
— Granville est la ville d’où je viens !
— Je dois vous paraître bien sotte, murmura-t-elle, les joues roses.
— Et avec qui ai-je l’honneur de m’entretenir ?
— Gabrielle. Gabrielle de Vierzon. C’est tout de suite moins séduisant !
— Je mentirais si je disais le contraire !
Ils éclatèrent de rire devant l’air médusé de Thomas qui s’était approché.
— Je vous présente mon époux, Thomas, dit-elle en se serrant contre lui. Thomas, voici Morgan !
— Monsieur de Vierzon, bonjour ! lança le jeune homme en lui tendant sa main.
— Euh, bonjour Monsieur. Nous peinons à trouver la direction de notre cabine.
— Avez-vous votre billet ?
— Oui, le voici.
Morgan s’en saisit et le détailla.
— Votre cabine se trouve sur le pont E. Vous y accéderez par ici ! indiqua Morgan, l’index pointé vers une porte devant laquelle était stationnée une foule compacte.
— Merci beaucoup. Et la vôtre ?
— Eh bien… Elle est par là, fit vaguement Morgan en désignant une entrée plus aérée au-dessus de laquelle figurait un panneau « Première classe ».
— Oh, vous êtes tout là-haut ! s’extasia la jeune femme.
Morgan profita du passage d’un groupe pour s’y engouffrer. Il fit un signe de la main avant d’être avalé par la masse humaine.
— Bon voyage ! eut-il le temps de dire avant de disparaître.
— Quel gentil garçon !
— Et depuis quand parles-tu à des inconnus ?
— À un inconnu de sexe masculin, soyons précis ! sourit Gabrielle en ajustant son chapeau de feutre violet secoué par une brise soudaine.
— Quelle épouse tu fais, tu séduis les hommes dès que j’ai le dos tourné !
— Tu pourrais mettre un peu plus de conviction dans ta jalousie, mon chéri.
— En attendant, il ne nous reste qu’à gagner nos quartiers. Notre modeste deuxième classe…
— Oh, il n’a pas du tout insinué que…
— Il a tout fait pour ne pas montrer que nous n’étions pas du même monde. C’est pire !
Thomas s’engagea vers la porte toujours aussi encombrée. Gabrielle, quant à elle, resta figée quelques secondes au milieu du tohu-bohu.
— Que fais-tu ? cria Thomas à son attention. Viens, ou nous allons finir par nous perdre !
 
 
 
1
 
 
Le couple finit par trouver sa cabine. Une pièce tout en longueur, un peu plus petite que ce dont les jeunes gens comptaient jouir. À vrai dire, Gabrielle et Thomas n’attendaient rien en particulier, les informations sur la brochure étaient sommaires. Bien sûr, dans leur rêve, cette lune de miel allait être idyllique puisqu’ils seraient tous deux, en amoureux, en pleine mer, sur un navire de luxe flambant neuf. Ils allaient fréquenter la haute société, se prélasser sur les nombreux transats à leur disposition, se détendre, faire du sport, assister à des spectacles, savourer les menus concoctés par un chef renommé, bref, tout ce que v

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