Vortex
104 pages
Français

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Description

Vortex, ou les garçons perchés
Maxime Fulbert
Roman de 443 000 caractères, 75 000 mots, 370 pages en équivalent papier.
Été 1971, deux adolescents d'une Cité en Normandie bâtissent une cabane à la forêt proche. Ils prennent plaisir à se percher sur Vortex, leur chêne, qui protège la cabane de sa ramure.
Là, Jean-Luc initie Guillaume au sexe entre garçons, tout en lui disant cependant que cela ne fait pas d’eux des « pédés », bien évidemment...
Guillaume, intelligent, sensible, pas du tout attiré par les filles, tombe amoureux de Fahrid Fassi, un Marocain, né à Casablanca, comme lui. Mais Fahrid, même s’il voue une très forte tendresse à Guillaume, aime Rita da Cruz, une jeune portugaise. Guillaume souffre, il essaie d’ébaucher une nouvelle relation en espérant qu'elle sera la bonne.
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: Éditions Textes Gais

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 janvier 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9791029403309
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Vortex ou les garçons perchés
 
 
Maxime Fulbert
 
 
 
1re partie
- 1 -
- 2 -
- 3 -
- 4 -
- 5 -
2e partie
- 1 -
- 2 -
- 3 -
3e partie
- 1 -
- 2 -
- 3 -
- 4 -
- 5 -
- 6 -
- 7 -
- 8 -
- 9 -
- 10 -
- 11 -
- 12 -
- 13 -
- 14 -
- 15 -
- 16 -
- 17 -
- 18 -
 
 
 
 
1 re partie
 
 
 
- 1 -
 
 
Cette histoire se déroula dans une petite ville de la Rive gauche de Rouen, à Petit-Villerville, en 1971. C’est assez éloigné dans le passé, puisque nous sommes au seuil du XXI e siècle, mais ce récit relève d’une nature humaine qui change peu, malgré le défilement des décennies qui se sont écoulées. Non, pas grand-chose ne semble changé chez les adolescents, hormis l’apparition des Smartphones, des tablettes ou des ordinateurs portables, qui seront eux-mêmes soumis, très bientôt, à une obsolescence qui les rendra ridicules. Et si les Smartphones n’existaient pas, autant dire que les réseaux sociaux étaient dans les limbes de l’avenir, sans que personne à Petit-Villerville pût imaginer qu’ils existassent un jour. Non, personne n’aurait pu l’imaginer. Surtout Guillaume.
Dans La Nivernaise, immeuble d’habitations à loyer modéré, au quatrième et dernier étage, sans ascenseur, logeait un couple d’ouvriers, ayant deux enfants. Le fils, âgé de treize ans, Guillaume Loisel, faisait ses devoirs de vacances. L’ampoule à abat-jour vert clair brûlait au plafond gris, illuminant crûment la chambre, et particulièrement, le petit bureau sur lequel reposait, bien ouvert, son cahier d’anglais, à côté d’un globe terrestre que Guillaume allumait toujours, car il aimait considérer la planète bleue et ses vastes continents, éclairée de l’intérieur. Cela lui était comme un porte-bonheur. Si un observateur eût bien regardé le globe, il eût remarqué que Guillaume avait tracé une croix au feutre rouge sur le Maroc.
Dehors, une suite d’immeubles gris, formant une cité grise, découpait ses cubes ou parallélépipèdes grisâtres dans le ciel gris d’un gros orage d’été normand. Les enfants qui jouaient au bac à sable, en bas de La Nivernaise, s’étaient réfugiés dans le hall, et, assis sur les premières marches des escaliers, ils se disputaient encore les billes qu’ils s’étaient gagnées, plus ou moins honnêtement, les « grands » profitant de la faiblesse des « petits » selon madame Morin ; ou alors ils parlaient de mobylettes qu’ils auraient aimé chevaucher ou encore de vélos Solex, qui n’allaient pas tarder à disparaître, au début des années 1980, du moins à peu près.
La concierge était sortie de sa loge pour toiser les enfants et les adolescents du hall, dans un terrible regard circulaire. Elle leur enjoignit de quitter les lieux, menaçant l’un ou l’autre d’aller trouver ses parents et de leur faire payer une amende parce qu’ils avaient, en « sales gosses », rayé les battants des boîtes aux lettres ou « beurré » la rampe des escaliers de graisse de chaîne à vélo. Ou encore avaient jeté du pain, des boules de pâte à modeler, des billes de verre usées, des annonces publicitaires déchiquetées, d’une fenêtre.
La concierge s’en retourna dans son antre, non sans avoir méticuleusement frotté ses pieds sur son paillasson, en maugréant dans son double menton plissé quelque insulte à l’égard des « petits va-nu-pieds sans éducation ».
 
— Ils sont toujours dans la rue ou dans le hall, ces gosses-là ! Qu’est-ce qu’ils y font ? Du mal ? Du mal, tout le temps et toujours. À quoi qu’elles s’occupent les mères pour laisser traîner comme ça ces graines de bousilleurs, de voleurs, de petits drogués p’t’être bien ! Parce que ça fume, mais oui. Et pas que du tabac, ils disent à la télé. À cet âge, mais oui ! Voleurs, drogués, quand ce ne serait pas des bandes d’assassins juvéniles en préparation», qu’on voit à la télé ! Mais qu’est-ce que je suis venue faire dans cette Cité des roses, en pleine zone industrielle ? Qu’est-ce que je suis venue foutre à Petit-Villerville ? Ah ! si ma fille pouvait me prendre avec elle, dans sa belle maison fermière de Bourgtheroulde !
Il convient de dire que la concierge ignorait tout des « phénomènes de jeunes » dont elle parlait et que ses dires lui étaient dictés par les « émissions très vraies de la télévision ».
Les enfants et les adolescents, debout dans le hall et assis sur les escaliers montant aux étages sans ascenseur, de sourire. De sourire seulement, et non de rire, car ils craignaient la concierge dragonne. Ses jérémiades les faisaient sourire. C’étaient toujours les mêmes plaintes. Sa fille, si sa fille pouvait la prendre chez elle, dans la belle maison fermière, une longère retapée par le mari de ladite fille. Comme elle se serait sentie bien, entourée, aimée, enfin. On ne savait si elle avait été bel et bien mariée, si elle était veuve dans ce cas-là. Ou si son mari s’était échappé de son emprise. De méchantes langues disaient qu’elle n’avait pas été mariée officiellement, qu’elle avait vécu en concubinage seulement, peut-être sur la demande du concubin qui ne voulait pas s’engager avec elle. Personne ne le savait, c’étaient donc de pures conjectures, de la malveillance. Dans La Nivernaise, on l'ignorait en tout cas : C’étaient toujours les jérémiades sur son sort, ou pêle-mêle, c’étaient aussi les mêmes insultes basses et méchantes sur les graines de voleurs, rayeurs de battants de boîtes aux lettres. Les battants étaient en verre et elle les astiquait au chiffon mouillé d’alcool de ménage. C’était un travail dur et pénible pour elle. Les adolescents et les enfants de l’immeuble « salopaient » son « boulot exténuant ». Elle en avait marre.
Sans madame Morin, sans Mauricette Morin, car elle portait le doux prénom de Mauricette, La Nivernaise n’aurait pas été ce qu’elle était. C’était l’immeuble « le plus propre de la Cité des roses », mais aussi le plus retentissant d’insultes et de lamentations, dans les senteurs d’eau de javel améliorée par un parfum qui couvrait les remugles de pipi de chat s’exhalant de la cave. Estimant que le parfum de lavande ne suffisait pas, elle aspergeait le sol de la cave de grésil. Elle disait que ça faisait partir les rats.
Caroline Loisel remonta ses socquettes blanches et resserra l’élastique de sa queue de cheval. Elle ne voulait pas monter à l’appartement. Sa mère n’étant pas là, elle s’ennuierait et ferait sans doute du bruit, lequel réveillerait son père, Martin Loisel, toujours endormi après sa nuit chez Werner Paper.
Il ne fallait pas faire de bruit, mais marcher sur la pointe des pieds, il fallait presque se coller aux murs, raser les meubles, en vrai fantôme. Papa avait travaillé toute la nuit pour gagner le salaire mensuel qui faisait vivre la famille. Bien sûr, il y avait aussi celui de la mère, mais il était nettement inférieur. C’était quelque chose quatre mille cinq cents francs – les euros n’étaient pas encore en vigueur et ne le seraient pas avant longtemps – ça permettait de vivre. Pas la Romance de Charles et Diana, le téléfilm (la dramatique disait-on à l’époque) qui était passé sur les écrans de tout l’immeuble et ceux de toute la Cité des roses. On vivait, certes, mais pas sur le même train que le prince et la princesse de Galles. Le salaire de Martin Loisel permettait de vivre chichement, de supporter bien petitement l’écoulement des jours. Un référendum avait renvoyé le général de Gaulle à sa Boisserie tandis que le président de la République était Georges Pompidou. Malgré les mesures du ministre des Finances, Valéry Giscard d'Estaing, les discours du président qui parlait d'assainissement de l'économie de nature à accroître le pouvoir d'achat des Français, les Loisel ne voyaient rien sur leur feuille de paye qui indiquât qu'ils puissent être des acheteurs supérieurs par rapport aux années précédentes.
C’était la fierté de monsieur et madame Loisel, Martin et Lucette Loisel, que leurs enfants fussent habillés décemment, que Guillaume « marchât si bien en classe ». Il repassait à l’instant sa leçon d’anglais alors que Caroline Loisel « perdait son temps », assise dans le hall ou jouant à la marelle sous le nez, sous la fenêtre de Mauricette Morin, la concierge. Ils étaient fiers que Guillaume « fût une tête » capable de « tirer la famille vers le haut» plus tard.
C’était leur orgueil, bien placé et non une espérance outrecuidante, pensaient-ils. Aucun doute ne mettait son ombre au tableau enchanteur que monsieur et madame Loisel peignaient mentalement de leur Guillaume.
Il travaillerait dans un bureau, un beau bureau, dans une entreprise, une grande entreprise. Il aurait les mains propres, toute la journée, tous les jours de travail. Il commanderait ses subordonnés avec justice. Il ferait l’admiration de son chef de service, dans une grande administration. S'il ne choisissait pas une grande entreprise.
Cette haute administration ou cette grande entreprise étaient une entité abstraite, tenue pour concurrente de celle de divinité dans l’esprit de Martin et Lucette Loisel. Guillaume exercerait alors ses talents déjà patents.
C’était une fierté portée comme une raison de vivre que le petit Guillaume fut ce qu’il était malgré la modicité du gain paternel, dans l’absolu, même si Werner Paper payait bien. Lucette Loisel travaillait aussi. Elle était femme de ménage (« technicienne de surface » aujourd’hui) chez Propre service. Elle rapportait ses mille deux cent cinquante francs mensuels d'alors, en l'inexistence de l'euro. Elle ne s’ « esquintait pas pour rien » disait-elle parfois. L’intérieur de la famille était reluisant et « délicieusement gentil ». Les enfants étaient bien élevés. Bien mieux que les rejetons des meilleures familles, non seulement de La Nivernaise, mais aussi de toute la Cité des roses. Certes, les Loisel ne partaient pas en vacances. Néanmoins, ils avaient vu du pays. Ils avaient beaucoup voyagé, ils avaient fait « les colonies ». Monsieur et madame Loisel étaient tous deux nés au Maroc, ils y étaient devenus patrons coiffeurs d’un salon hommes et femmes pourvu d’un rayon

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