Dans la peau des poètes
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Dans la peau des poètes , livre ebook

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Description

Léandre Mazure quitte la France et émigre au Québec en quête d’une nouvelle vie. Engagé comme professeur dans un cégep, l’aspirant comédien donnera le cours de poésie. Déçu de ne pas être titulaire des classes de théâtre, Léandre décide de se glisser dans la peau des poètes : tour à tour, il devient Hugo, Baudelaire, Rimbaud et Mallarmé. À force de « jouer » à être un autre, il y a danger de se perdre. Est-il un professeur ou un imposteur ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 05 février 2020
Nombre de lectures 2
EAN13 9782896996674
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0650€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Dans la peau des poètes

Du même auteur
 
 
Chez d’autres éditeurs
Les lectures terminales , roman, Ottawa, Éditions David, 2015, 136 pages.
Noir tendre Blanc , poésie, Ottawa, Les Éditions du Vermillon, 1987, 73 pages.

Jean Dumont
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Dans la peau des poètes
 
Roman
 
 
 
 
 
 
 
 
 
2020
Collection Vertiges
L’Interligne

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada
 
Titre: Dans la peau des poètes : roman / Jean Dumont.
 
Noms: Dumont, Jean, 1953- auteur.
 
Collections: Collection Vertiges.
 
Description: Mention de collection: Collection Vertiges
 
Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20190132000 | Canadiana (livre numérique) 20190132019 |
 
ISBN 9782896996650 (couverture souple) | ISBN 9782896996667 (PDF) | ISBN 9782896996674 (EPUB)
 
Classification: LCC PS8557.U5363 D36 2020 | CDD C843/.54—dc23
 
 
 
 
 
 
 
 
 
L’Interligne
435, rue Donald, bureau 337
Ottawa (Ontario) K1K 4X5
613 748-0850
communication@interligne.ca
interligne.ca
 
Distribution : Diffusion Prologue inc.
 
ISBN 978-2-89699-667-4
© Jean Dumont 2020
© Les Éditions L’Interligne 2020 pour la publication
Dépôt légal : 1 er trimestre de 2020
Bibliothèque et Archives Canada
Tous droits réservés pour tous pays

Prologue
 
 
 
 
 
 
1990
La partie centrale de la façade de la bâtisse portait les traits d’un drôle de personnage. En plein centre, au sommet, des lucarnes faisaient office de sourcils en accent circonflexe ; les fenêtres, dont les stores couvraient la moitié des vitres, tenaient lieu d’yeux mi-clos ou mi-ouverts, c’est selon. Il y avait aussi les grandes portes d’entrée en bois qui affichaient bien le caractère vieillot de l’établissement ; quand elles s’ouvraient, pour peu qu’on ait eu de l’imagination, se dessinait une bouche grande ouverte qui avalait les visiteurs.
Posté directement devant l’entrée, on remarquait que le passage asphalté en forme d’U inversé, une sorte de courbe de Kuznets, qui permettait aux taxis de gravir la légère pente, de déposer les clients et de poursuivre leur route en se laissant couler vers la rue principale, eh bien, cet arc de cercle imitait une moue inquiétante. Puis, fait encore plus troublant, les deux immenses ailes qui s’étiraient de chaque côté de cette vieille figure de pierres évoquaient des bras qui tentaient d’agripper tout semblant de vie qui errait dans les parages. N’eût été la très discrète pancarte sur laquelle on lisait «   Centre de santé mentale », quelqu’un qui n’aurait pas été de la place aurait pu croire qu’il s’agissait d’un ancien collège classique.
Sur le trottoir, de l’autre côté de la rue, un homme dévisageait la façade du Centre. Il procédait toujours à une pause avant de franchir la rue et de plonger dans la gueule de la bouffeuse de cerveaux. Il braqua ses yeux dans ceux, mi-clos ou mi-ouverts, qu’on pouvait deviner dans la figure de l’institution et ne bougea pas durant de longues secondes. Cette attente n’était pas causée par l’aversion ou par l’antipathie à l’égard du personnage architectural devant lui, mais il espérait toujours une réponse, un genre de régurgitation qui lui aurait rendu ce qu’il y avait perdu.
Hubert Théorêt, bel homme dans la mi-quarantaine, faisait ce pèlerinage toutes les semaines depuis près de deux ans. Quand il avait fini de scruter la fausse figure, en quête d’on ne sait quel secret, il traversait la rue, gravissait les escaliers au centre du talus bien délimité par l’U inversé, franchissait le passage asphalté emprunté par les taxis. Il montait les quelques marches qui le menaient sur un perron devant les deux immenses portes. Chaque fois, il était étonné que ces portes s’ouvrent aussi aisément malgré leur évidente pesanteur. Toutefois, dès qu’elles se rabattaient sur son passage, la pesanteur ne le quittait plus jusqu’à ce qu’il les traverse de nouveau pour se retrouver au grand air quelques heures plus tard.
Le grand hall avait des airs de salle des pas perdus d’une gare d’où personne ne partait. Il y avait toujours quelques voyageurs sans bagages qu’on aiguillait selon les besoins, soit à la cafétéria, soit à la salle commune, soit à la chambre respective de chacun. Après avoir salué le préposé au poste de garde, Hubert bifurquait sur sa gauche, longeait le mur sur quelques pas et, encore à gauche, entrait dans un corridor percé de tout son long par des chambranles toutes portes ouvertes. Parfois, son trajet était parsemé, au gré des chambres, d’« Allo » qui espéraient une visite, parfois de litanies sans fin qui n’attendaient rien. Hubert se rendit à l’extrémité du corridor. Une jeune femme sortit de la chambre vers laquelle il se dirigeait. Cette préposée, très mignonne, Hubert l’avait remarquée depuis quelques jours. Il avait l’impression de la connaître. Quand elle aperçut Hubert, elle se dirigea vers lui et lui dit :
— Vous n’étiez pas un prof au cégep, il y a quelques années ?
— Oui, en effet. Vous ai-je enseigné ?
— Oui, les mathématiques, je crois. C’est ça ? Monsieur Théo…rêt ( après une très légère hésitation ).
Elle allait parler le langage des années 80 et dire « théorème », car ainsi le nommaient les élèves à cette époque.
Il fit signe que oui, dissimulant à peine un rictus à la Pythagore.
— Oui, Hubert Théorêt.
— Je vous vois depuis quelques semaines… Vous visitez monsieur…
Elle s’arrêta net. Sa main pointait en direction de la chambre. Son sourire s’effaça et laissa place à une sorte d’expression de stupéfaction doublée de désolation. Il venait de se produire dans son cerveau un lien fulgurant. Un observateur aurait pu déceler un éclair de génie, or cela s’apparentait davantage à un éclair de folie. Elle regarda attentivement la petite plaque porte-nom sur le mur et vit que le patronyme avait été escamoté. Le nom ayant été poussé trop au bout de la plaquette, on ne voyait que la dernière patte du M ainsi travesti, une grande ligne verticale que tous interprétaient comme un L .
— Non ! Pas monsieur Mazure, le prof de français ?
Elle avança dans l’encadrement de la porte, incrédule, pour voir l’homme en question.
— Exact, répondit Hubert déjà dans l’embrasure de la porte.
— Mais tous les employés ici l’appellent Lazure. Je n’ai pas fait le lien. Je ne l’ai pas reconnu. Ça fait des semaines que je travaille ici et jamais je n’aurais…
— Oui, il a beaucoup changé physiquement.
— Physiquement ? Physiquement, répéta-t-elle consternée. Mais intellectuellement, il était si…
— Vous vous trompez, mademoiselle. Il est toujours…
Hubert n’eut pas le courage de terminer sa phrase, comme s’il voulait laisser cette tâche au prof de français.
Chapitre 1
 
De Paris au Québec
 
 
 
 
 
 
1984
—  Mazure, tonna-t-il en affectant un air faussement fâché. Pas Lazure, Mazure. M-A-Z-U-R-E. Léandre Mazure et non Méandre Lazure pour les petits rigolos qui se croient bien malins. Si vous n’avez rien de plus original, alors passez votre tour. Je les ai toutes entendues, les blagues sur mon nom.
Ainsi commençait-il son cours depuis deux ans, c’est-à-dire depuis son arrivée au Québec. Léandre Mazure, Français d’origine, avait tout quitté sur le Vieux Continent à l’orée de la trentaine. Famille, amis, collègues faisaient maintenant partie de son passé outre-mer. Une histoire d’amour qui comme bien d’autres ne finissait pas bien. Un couple, puis deux solitudes. Alors que lui éprouvait seulement de la déception, elle, sans doute, lui en voudrait jusqu’à la fin de ses jours.
Léandre enseignait à Neuilly-sur-Seine, petite banlieue de Paris, jusqu’à ce que ses aspirations théâtrales prennent le dessus sur l’enseignement, sur sa vie. Il se voyait comédien, il n’était qu’un prof et encore, même pas un prof de théâtre.
Sur un coup de tête, après une autre interminable période de correction de travaux, pour la plupart médiocres, il en eut assez de l’enseignement. Il décida de prendre un congé sans avoir consulté qui que ce soit. Il ne voyait plus ses collègues ; ses proches ne le voyaient plus. Peu à peu, Leyda et lui se distanciaient. Elle disparaissait sous des piles de travaux à corriger ; il évoluait dans un milieu artistique glauque. Il fréquentait des gens plus paumés qu’artistes. Lui, qui jusqu’alors avait eu une vie plutôt rangée, disait qu’il devait expérimenter plus. Expérimenter quoi ? Tout.
Il avait vraiment des talents de comédien, indubitables, mais il les exploitait mal. On pourrait dire que certaines personnes les exploitaient mal pour lui. Ce nouvel entourage artistique plutôt que de l’amener à un autre niveau d’expertise minait peu à peu ses chances pourtant réelles de percer dans le domaine théâtral. De petites troupes marginales l’intégrèrent à leur programmation et il vogua d’échec en échec. Pourtant quelques critiques, même si elles éreintaient les pièces de façon plutôt brutale, signalaient tout de même que parmi les comédiens, seul Léandre Mazure tirait son épingle du jeu.
Le public n’eut pas cette clémence. Quand les salles n’étaient pas désertes, elles s’emplissaient de chahuteurs qui, littéralement, mettaient fin au spectacle.
Pourtant, on le convainquit que les artistes d’avant-garde ont souvent le mépris du public comme seul salaire. Ses nouveaux amis l’initièrent à diverses substances qui censément lui feraient voir la vie autrement, « sous un autre jour ». Et pour cause ! Cet autre jour aboutit directement à un séjour à l’hôpital à la suite d’une fulgurante crise de paranoïa liée à un petit comprimé qu’on lui avait refilé. Ils avaient au moins eu la décence de le déposer à l’hôpital le plus proche avant de mettre les vo

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