Les pliures du temps
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Les pliures du temps , livre ebook

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Description

Les pliures du temps
Suivi de : Nous n'oublions jamais
Jean-Jacques Ronou
Roman de 130 000 caractères, 21 300 mots, 108 pages en équivalent papier.
Comment Jean-Michel aurait-il pu savoir, en recevant un e-mail de Paul, son ex, qu’il ouvrait sur une nouvelle dimension, à travers le temps et lui permettrait de rencontrer ceux et celles qu’il avait toujours rêvé de connaître ?
La solution est-elle dans cette fontaine de la rue du trésor du quartier gay du Marais ?
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Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 19 juin 2021
Nombre de lectures 0
EAN13 9791029404559
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0015€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les pliures du temps
 
 
 
Jean-Jacques Ronou
 
 
 
 
Le temps est un système de pliure que la mort seule peut déplier.
Jean Cocteau, La fin du Potomak
 
 
 
1
 
 
En mai 2021, depuis un an, la situation en France était absolument catastrophique. Tous les bars, les restaurants et les saunas gays étaient désespérément fermés. L’isolement était devenu la norme et les homosexuels le ressentaient encore plus fortement, car ils n’avaient plus aucun moyen de se rencontrer : un couvre-feu à dix-neuf heures empêchant toutes les parties de jambes en l’air du soir. Un virus mortel venu de Chine, en décembre 2019, paralysait toute l’économie, et Paris était désert, triste et sale. Le chiffre effarant de cent mille morts avait été dépassé et le bilan s’alourdissait de jour en jour. Le pouvoir, aux mains d’incompétents banquiers et assureurs, avait raté, à peu près, toutes les étapes nécessaires pour contrôler l’épidémie ; le pays avait d’abord manqué de masques, de tests ; puis un déconfinement précipité avait déclenché une explosion des contaminations en septembre, suivie par une volonté politique ultralibérale de privilégier l’économie sur les vies humaines, en forçant les gens à s’entasser dans des métros bondés, des bureaux contaminés, les caissières au contact de clients contagieux, les conducteurs de bus, de taxis, les éboueurs, les techniciens de surface, les enseignants ; tous avaient été contaminés en premier. Les banlieues populaires nord de Paris avaient été ravagées par la promiscuité, les logements surpeuplés, les foyers d’immigrés vétustes. La moitié de toutes ces victimes était d’origine étrangère souvent sans couverture médicale. La presse, aux ordres du pouvoir, semblait censurer toute critique de ses politiciens incompétents, au point que l’on se demandait parfois à quel moment un pouvoir soviétique stalinien s’était emparé du pays. Des élections présidentielles étaient programmées et les sondages préemptés prédisaient la victoire absolue du président sortant ; ce qui relevait plus de la Science-fiction que de la propagande, sachant qu’il avait passé le premier tour avec à peine vingt-quatre pour cent des voix et grâce à un scandale orchestré touchant le candidat de la droite, poussant une partie des électeurs à voter pour lui afin de se débarrasser de l’autre.
Les laboratoires avaient mis au point des vaccins contre cette pneumonie mortelle bien qu’ils manquassent partout dès le début de l’année. Il fallait passer des heures sur Internet afin d’obtenir un rendez-vous. Alors que le Royaume-Uni vaccinait sa population à toute vitesse, les autorités françaises ne délivraient les injections qu’au compte-gouttes : à peine seize millions ici, en mai 2021, pour trente-quatre millions là-bas. Ce qui permit au pouvoir politique de faire passer les lois scélérates les plus iniques de l’histoire de France : une destruction de l’aide au chômage ; une loi interdisant de filmer les forces de police comme au pire temps de la Stasi (par chance censurée par le Conseil Constitutionnel) ; des amendes démesurées pour tous ceux et celles qui osaient braver les interdictions de sortie, de déplacement ; des procès sommaires de gilets jaunes révoltés depuis des années et éborgnés par les forces de l’ordre. Pendant que les violences policières explosaient et que celles commises à l’égard des forces de « l’ordre » se multipliaient, la France sombrait dans le désastre économique le plus affligeant.
Les entreprises ne survivaient que grâce à des milliards de subventions qui retardaient leur faillite inéluctable et les déficits atteignaient des niveaux stratosphériques que jamais la France ne pourrait supporter sans une inflation bientôt inévitable et des impôts astronomiques. L’avenir radieux promis par le parti du président, composé en grande partie d’incapables ou de recalés des partis officiels prêts à voter les lois les plus iniques, inapplicables et liberticides de la République, se transformait en cauchemar malsain et répressif.
C’est dans ce climat délétère qu’il m’arriva la chose la plus bizarre et la plus étrange de ma vie.
 
 
 
2
 
 
Je cuisinais une de mes spécialités ; des spaghettis à la carbonara avec de la crème fraîche et des gros lardons fumés au lieu de guanciale, ce qui est totalement interdit par le code culinaire italien et ferait enrager un gastronome, lorsque je reçus un e-mail déroutant : « Ça va ? ». La cuillère crémeuse me tomba des mains et je faillis lâcher un œuf en voyant l’expéditeur : Paul.
Depuis dix ans, je n’avais reçu aucune nouvelle de mon ex. Sur le coup, je crus à une mauvaise blague. Comment avait-il eu mon e-mail ? En fait, en réfléchissant un peu, je n’avais pas changé d’adresse numérique depuis au moins trente ans, rien d’étonnant. Non, ce qui l’était bien plus, c’était qu’il avait décidé de me quitter sans garder le moindre contact avec moi et que des lustres s’étaient déjà écoulés.
J’avoue que ma réaction fut de conjecturer un canular :
@ C’est toi, Paul ?
@ Qui d’autre ?
 
C’était bien son style ; un peu mordant et légèrement mufle viril.
@ Je suis très heureux de recevoir de tes nouvelles. Cela fait drôlement longtemps.
@ Moi aussi. J’espère que tu es vacciné ? ne demanda-t-il gentiment, en retour.
@ Oui, ça y est, c’est fait depuis un mois et toi ?
@ Moi aussi.
 
Quelque chose n’allait pas dans nos échanges, comme s’il s’agissait d’un autre homme que celui que j’avais connu durant dix ans de 2000 à 2010 ; Paul était moins cassant, plus réfléchi et surtout plus gentil. Il est vrai que les e-mails donnaient une certaine lenteur à nos échanges. J’eus droit à des regrets de m’avoir quitté, des louanges sur nos souvenirs, des réminiscences de nos bons moments qui ne correspondaient pas du tout à l’homme qu’il était ; celui qui refusait le moindre engagement, hurlait de rire à l’idée de mariage gay et adorait me rabaisser au rôle de son mâle soumis et surtout passif.
Cette première prise de contact m’avait pris de court, mais au fond j’étais plutôt flatté qu’il se souvienne de moi. Je l’avais rencontré dans un parc public, très tard, un soir d’avril 2000 alors que je me promenais pour draguer en m’amusant. Et puis je l’avais suivi dans un bosquet d’où il me présenta un sexe si gros et démesuré que je crus voir celui d’un pornstar dans un film des années 70. Comme d’habitude, un homme mince et grand affublé d’une bite géante ne me laissait plus aucune chance de m’enfuir. Nous fîmes merveilleusement l’amour sous un ciel noir d’encre, et puis après une petite pause, il se remit à bander en me pelotant les fesses et je compris vite que j’allais subir le bonheur d’une seconde sodomie.
 
@ Tu as un mec ? me demanda-t-il abruptement, par e-mail.
@ Pourquoi ?
@ Pour savoir.
@ Oui, Gabriel, un gentil garçon, d’une trentaine d’années, que j’ai rencontré il y a deux ans.
@ Moi, je suis resté asexuel depuis ton départ. Quand on n’a pas ce que l’on veut, on s’abstient.
@ Toi ? Asexuel ? Arrête ton cirque ! Si je te caresse la braguette, tu jouis en cinq minutes.
@ C’est fini maintenant, je suis un autre homme.
@ Ah oui ? Eh bien, je suis très heureux d’avoir de tes nouvelles. Envoie-moi d’autres e-mails, je prépare des pâtes à la carbonara. À bientôt.
 
Je crois que je raccrochai d’une manière un peu cavalière, mais je n’étais pas certain d’avoir envie de le revoir.
 
 
 
3
 
 
Sur l’aire de parking, aujourd’hui détruite, à quelques kilomètres de Paris, il y avait une zone de drague gay en 2000. C’est là, à quatre heures du matin, par une nuit noire magnifique, que je rencontrai Paul. Il n’y avait que trois voitures stationnées à côté des toilettes publiques, mais il fallait grimper une petite colline, devenue inaccessible par la construction d’un mur de séparation, pour atteindre une zone boisée où les homos se regroupaient.
Je me rappelle la peur délicieuse de l’interdit, et du danger, que je ressentis en gravissant le monticule. On entendait le bruit des voitures qui filaient sur l’autoroute en direction du nord, et les hululements d’une chouette.
Le bosquet permettait d’être pratiquement invisible d’en bas, du parking. J’avançai doucement en repoussant les feuilles des bruyères, lorsque j’entendis des soupirs à ma droite. Un gay accroupi semblait trouver beaucoup de plaisir à sucer un camionneur en treillis, en rut, adossé à un marronnier, mais un second voyeur me regardait assez fixement pour que je décidasse de quitter ma place.
Je partis vers la gauche afin de l’éviter tout en continuant mon exploration de ce lieu si captivant, lorsque le second type me rejoignît dans une clairière abritée. Entouré d’arbustes, un peu pris au piège et incapable de revenir sur mes pas, je restai figé ; l’homme descendit sa braguette et sortit un sexe démesuré, digne d’un film pornographique, rubrique : très bien monté . Je vis son visage après son membre turgescent et il était assez beau, très viril, barbu et jeune. J’avais alors une quarantaine d’années et lui m’en apparut à peine trente. Évidemment je ne pus résister.
— Viens ! m’ordonna-t-il d’une voix autoritaire.
— Salut, répondis-je, très bêtement, tout bas.
Je commençai par le masturber très doucement, puis reçus sa queue dans la bouche et me retrouvai, quelques minutes, plus tard, avec le short sur les pieds et son membre déployé dans ma partie la plus intime.
J’ai depuis un souvenir très délicieux de ce moment-là, car j’avais sur moi, le préservatif et le tube de gel nécessaire en cas de grave dépassement des tailles de sexe normalisées ; ce qui fit que j’eus le plaisir de la sodomie, sans la douleur.
Je sentis sa jouissance assez rapidement, le contenu blanc et crémeux du préservatif me le confirma, à la sortie. Je nettoyai son membre avec un mouchoir en papier, mais cela ne semblait pas le calmer, il m’attira de nouveau vers lui et me caressa les fesses doucement d’une main en se masturbant de l’autre.
— Tiens, recommence, me dit-il en me replaçant son sexe protégé dans la bouche.
Ce

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