Jeu et enjeux
145 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Jeu et enjeux , livre ebook

-

145 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

Laszlo P. Horvath est un poète et dramaturge hongrois. Né en 1930, il vit à Budapest. Cette anthologie est le témoignage d'un homme qui a traversé les vicissitudes de la deuxième moitié du XXème siècle et qui est comme une vigie à la proue du XXIème. Ce qui nous touche ici, c'est le dialogue avec un dieu auquel il ne croit plus, la désespération du poète qui voit que le monde n'est qu'économique et qui se demande ce qu'il vient faire sur terre, la relation amoureuse qui le soutient jusque par-delà la mort, l'inquiétude sur l'avenir de la planète.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juillet 2010
Nombre de lectures 248
EAN13 9782296698338
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Jeu et enjeux
 
László P. HORVATH
 
 
Jeu et enjeux
 
Poèmes
 
 
Traduction de Edith Illés-Euverte et Nicole Laurent-Catrice
 
Préface de Georges Kassai
 
 
L'H ARMATTAN
 
 
© pour l'édition hongroise : Laszlo P. HORVATH
 
© L'H ARMATTAN, 2010
5-7, rue de I'École - Polytechnique ; 75005 Paris
 
Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
 
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
 
ISBN: 978-2-296-11773-0
EAN: 9782296117730
 
Eloge du jeu
 
Synonyme de liberté, ce mot est polysémique : il désigne aussi bien, si l'on en croit le Petit Robert, une « activité gratuite » qu'un « défaut de serrage », une « marge ». Mais il implique aussi la contrainte : les règles du jeu. Chez László P. Horváth, il est symbolisé par le son de la cithare, qui, monté de la terre, complète la création d'un Dieu fatigué et distrait. C'est ce son que fait entendre notre poète, quitte, comme son grand prédécesseur hongrois, Endre Ady, à mentir pour introduire dans la vie un peu d'harmonie. « Si je ne joue pas je suis perdu », s'écrie-t-il. Il joue donc avec la mort, avec « l'instant présent qui est éternel », avec le passé et avec l'avenir, « pourvu que la règle soit le changement aux doigts soyeux », et avec la langue, dont, en vrai poète, il cherche à reculer les limites.
Ce faisant, il suit sciemment quelques grands poètes de la littérature hongroise : Attila József, dont il pastiche un poème célèbre, qui craignait l'homme qui ne sait pas jouer, qui demandait à la liberté -en l'occurrence, politique -de « laisser jouer son enfant beau et sérieux », ou Dezsö Kosztolányi dont les jeux virtuoses constituent l'essence même de sa poésie, et qui, tout comme Horváth, invite à jouer à la vie et à la mort.
Ce même Kosztolányi affirmait que traduire, c'était « danser pieds et poings liés ». La différence entre le français et le hongrois interdit, certes, aux traductrices du présent recueil de rendre intégralement les sonorités de l'original, et, en particulier le rythme des « Hexamètres pour Eva », mais les invite à « danser », c'est-à-dire à chercher, par les moyens mis à leur disposition par la langue française, à suggérer ses effets. A cet égard, leur travail constitue une belle réussite.
 
Georges Kassai
 
Chemins de traverse
 
1965-1983
 
La ballade de l’honnêteté
 
Si elle est jolie, mieux, si elle est belle
s’il n’y a pas quelque mauvaise langue
pour dire qu’elle est ceci ou cela
mais néanmoins qu’elle peut changer,
quoiqu’elle connaisse de l’amour
si elle n’a pas de protecteur
si elle s’offre à tout venant
elle ne peut être qu’une putain !
 
Quand elle marche, usée, dans les rues
seuls brillent ses rêves.
Le plus souvent elle se demande
à quoi ça sert l’amour,
Avec les autres c’est différent. Pourquoi
aller raconter ça ? ! ...
A la fin elle aussi va croire
qu’elle est née comme ça -une putain !
 
Que ce soit ainsi, c’est regrettable
mais ne le regrettons pas.
Une putain est une putain !
Mais s’il s’agissait d’autre chose ?
De vérité, d’honnêteté... ?
Cela ne peut être singé !
Aucun doute là-dessus, n’est-ce pas ? ..
C’est tellement évident ! ..
 
ENVOI
 
Et si n’importe quel créateur,
avait des doutes là-dessus
ou n’importe quel chercheur
de vérité, d’honnêteté,
ça, mon prince, sois en bien persuadé,
c’est tellement évident,
que la vérité et l’honnêteté
ne peuvent être singées !
 
 
Etrange
 
En plein jour
il a trouvé un brin de lune.
Il a joué avec
toute sa vie.
 
 
On va bien voir
 
Ne dis rien, absolument rien
sur le noir de crasse,
le manque d’espace, d’air,
ce qui t’angoisse.
 
Dis seulement ta joie ! ...
Un logement encore assez neuf.
Du blanc qui repeint l’hiver.
Où est le trop ? le trop peu ?
 
On va bien voir, du noir
ou de ta joie, ce que tu arrives à faire !
 
 
Jouets
 
Ici il n’y a rien pour jouer à la guerre
que des nounours rigolos
des locomotives, des autos.
Peut-être qu’ici l’enfant
fait des rêves calmes et bleus.
 
 
Embauchoirs
 
On emporte le cordonnier
au cimetière
neuf formes
le suivent.
 
Neuf petites formes
avec les petits vieux
pleurent des larmes de bois
de leurs yeux de formes en bois.
 
Jusqu’au bout du Boul’Mich’
elles claquent et claquent
pour rendre au mort
les derniers honneurs.
 
Dans leur tête de pieds en bois
s’agite une question :
pauvre cordonnier,
pourquoi est-il parti ?
 
Que va-t-il faire là-dessous
sans ses formes,
et elles, les formes,
sans leur cordonnier ?
 
En claquant des talons
à la fin elles rentrent chez elles.
Sur l’atelier du cordonnier
elles clouent un écriteau :
 
PAUVRES FORMES ORPHELINES
CHERCHENT CORDONNIER
RESPECTUEUX DE L’ORDRE
ET PRÊT À RÉSISTER JUSQU’À LA MORT !
 
 
Rien que l’instant
 
Désormais rien que l’instant ! ...
Une ombre sur la neige,
le dessin noir du corbeau,
l’éclair d’une boule de neige,
un rayon de soleil affalé sur un banc,
des flocons sur un buisson, des traces
de pas dans la neige.
Moment de légèreté...
 
 
Sur le pont
 
De sous le refuge des arches
se lèvent des écharpes de brume. Danger.
Mon ombre doucement se penche sur l’eau.
Ici aussi je pourrais me perdre.
 
Quelqu’un m’évite,
quelqu’un arrive en face,
quelqu’un se retourne,
quelqu’un me salue.
 
 
Magie
 
Quand nous nous taisons le réel s’estompe
et les objets perdent même leur ombre.
La lumière peu à peu perd sa force,
notre chemin suit des passages sombres.
 
Quand nous parlons nos mots sont pleins de piques,
sur scène des nains font de la musique.
Nos racines poussent, comme à des plantes,
notre couronne aussi, mais comme aux arbres.
 
 
Approche
 
Ton bâton a deux extrémités,
le pont aussi a deux extrémités.
Regarde,
déjà notre ombre tombe dans l’abîme ! ...
 
 
Enfance dans la première moitié du XXe siècle
 
Mon fils, on nous raconte toujours
des boniments comme à des fous,
comme à des enfants,
comme à des ivrognes.
 
Le fou dit :
je suis ceci et cela.
L’enfant le dit aussi
et l’ivrogne le grommelle.
 
On nous applaudit,
on nous parle le langage des nourrissons.
On nous dit : oui, tu es vraiment ceci et cela !
Jusqu’à ce que le fou se mette en colère,
jusqu’à ce que l’enfant devienne insolent,
jusqu’à ce que l’ivrogne agresse un passant.
 
Nous sommes fous,
mon fils
nous sommes toujours des enfants, souvent des ivrognes.
Nous entendons la vérité, donc nous la disons.
Nous la crions, nous ne la comprenons pas,
nous la disons, nous l’oublions.
Puis nous l’entendons à nouveau, de nouveau nous la crions.
 
A nouveau nous ne la comprenons pas,
nous l’oublions encore une fois
comme les fous comme les enfants
comme les ivrognes.
 
Cependant
nous jouons à des jeux meurtriers
qu’ont mis entre nos mains les vieillards du monde,
les vieillards à face de vieillards,
les vieillards à face d’adulte,
les vieillards &#

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents