Rôdeuse éblouie de l abîme
139 pages
Français

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Rôdeuse éblouie de l'abîme , livre ebook

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Description

Une liasse de feuilles volantes, dactylographiées, portant ou ne portant pas de dates, ramassait, en pur désordre, les traces écrites et toute la présence de la jeune fille des années soixante-huit. Très loin, à une date incommensurable de l'air de ce temps-là, c'était toute l'intensité de l'expérience intérieure, la contemplation du coeur par le coeur, le recueillement dans la beauté mais aussi le déroulement de fantasmagories insolites et angoissantes.
Claude Louis-Combet

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2010
Nombre de lectures 174
EAN13 9782296714137
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0550€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Rôdeuse éblouie de l’abîme
Levée d’ancre
Collection dirigée par Michel Cassir et Gérard Augustin

Levée d’ancre est une nouvelle collection privilégiant l’écriture poétique. Elle se propose d’abord de publier, au-delà de la division des genres, la poésie sous toutes ses formes ; de la précise ciselure du vent aux nouvelles, y compris le « noyau de prose » par lequel l’œuvre exprime ce qu’il y a de plus actuel, dans sa construction d’un sens de la poésie.
Ensuite, multiplier les accès à cette poésie, tant par les anthologies critiques, les ouvrages collectifs, que par les échanges entre écrivains et lecteurs, les rencontres entre la poésie, les différents arts et la vie.

Dernières parutions
61- Christophe Guyon, La nuit et les spoutniks reviennent toujours, 2010.
60 – Nikos ENGOPOULOS, Le Retour des oiseaux, 2010.
59 – Alain ROBINET, La poésie n’illustre pas la peinture qui n’imite pas ! En 5 théories-fictions prises sur le vif du sujet : contre Horace pour Eros, 2010.
58 – Hiromi TSUKUI, L’eau qui rit, 2010.
57 – Gérard AUGUSTIN, Athènes dispersée parmi les fleurs, 2010.
56 – Antoine SIMON, Re coudre, 2010.
55 – Nora IUGA, Le cœur comme un poing de boxeur, 2010.
54 – Christian CAVAILLE, gravités, 2010.
53 – Alain ROBINET, La poésie n’illustre pas la peinture, qui n’imite pas ! En 5 théories-fictions prises sur le vif du sujet : contre Horace pour Eros, 2010.
52 – Enver ERCAN, Le coquelicot blanc, 2010.
51 – Sebastian REICHMANN, L’Unité a déménagé dans le monde d’en face (photographies de Gheorghe Rasovsky), 2010.
50 – Pierre GODO, Rue, angle et feux, 2010.
49 – Gavin BOWD, Chastellart, 2009.
48 – Catherine LECHNER-REYDELLET, Æternitas. Nasci – Vivere – Mori, 2009.
47 – Christian CAVAILLE, Instances accrues, 2009.
46 – Reza HIWA, Rêve et châtiment, 2009.
45 – COLLECTIF, Dix-septpoètes turcs contemporains, 2009.
44 – Siegfried PLÜMPER-HÜTTENBRINK, Itinerrance, 2009.
43 – Dan STANCIU, Les témoins oraculaires, 2009.
42 – Philippe André RAYNAUD, Innombrables parmi les minuscules , 2009.
41 – Nathalie PICARD, Le Mot Amen ne se prononce pas , 2008.
Anne-Marie Luminet


Rôdeuse éblouie de l’abîme


Préface de Claude Louis-Combet
Édition établie par Michel Falempin


LEVÉE D’ANCRE
L’Harmattan
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-13612-0
EAN : 9782296136120

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
LA RÔDEUSE ET SON ABÎME
Il n’y aura pas d’histoire d’Anne-Marie. Il ne restera que la brassée de poèmes qu’elle écrivit, sur ses vingt ans, à la lumière de l’amour qui la déchirait et de la beauté du monde qui la fascinait. Son existence poétique, si l’on entend par là la période de sa vie où il semble que l’écriture se soit emparée d’elle en toute nécessité d’expression, fut de très courte durée : une flambée de trois ou quatre années, embrasement total de son adolescence au plus haut. Quand l’amour fut déchiré, de part en part, quand le saccage eut cessé et qu’il ne resta plus, pour la suite du temps, que l’immobilité du saccagement, le dernier poème se tint en suspens et béant, et toute l’œuvre fut enfouie dans un tiroir. À quarante années de là, à la mort prématurée d’Anne-Marie, elle fut découverte par ses amis, retrouvée aussi, comme elle eût pu l’espérer, par l’un ou l’autre, ses témoins depuis toujours. Une liasse de feuilles volantes, dactylographiées, portant ou ne portant pas de dates, ramassait en pur désordre les traces écrites et toute la présence de la jeune fille des années soixante-huit. Très loin, à une distance incommensurable, de l’air de ce temps-là, c’était toute l’intensité de l’expérience intérieure, la contemplation du cœur par le cœur, le recueillement dans la beauté mais aussi le déroulement de fantasmagories insolites et angoissantes. L’écriture n’était pas constamment aboutie, elle n’atteignait pas toujours cette perfection d’expression qui tient le poème au-dessus de lui-même, dans le silence au-dedans des mots, mais elle ne manquait jamais son point de fulgurance. Anne-Marie travaillait dans la pression, l’émotion, la pulsion. L’extrême tension des sentiments créait une nécessité qui aiguisait la perception, forçait les mots, arrachait les images, les campait dans la trame par la grâce du souffle et comme par l’urgence du salut. L’éros passait par là, s’imposant comme l’intention fondamentale et la justification existentielle du recours à l’écriture. Il œuvrait au fond, à l’origine, à la naissance du verbe et s’effusait dans toute l’étendue du texte, comme une atmosphère, indissociablement spirituelle et sensuelle, mais toujours dans la pudeur, dans le respect de la langue, dans la ferveur sublimée du désir. Dans cette expression de haute adolescence, une certaine tonalité métaphysique se fait entendre, tantôt comme une adhésion de toute la sensibilité à la dimension panthéiste du monde, tantôt comme une intuition de l’existence même, comme vide, comme néant, comme blessure et perte. Les accents d’une nostalgie éperdue résonnent, à tout moment, au décours d’un poème pour dire l’échec de la rencontre et la frustration du désir d’éternité. Enfin, plus d’un texte opère un retour sur la nature et la destinée de la parole, sur le lien aléatoire ou suspect établi entre le nom et la chose. Le mystère du langage, son ambiguïté, son pouvoir et son impuissance interrogent l’esprit du poète cependant que le poème, en son dépouillement comme en sa somptuosité, s’affirme pour toujours par-delà le doute et la douleur.

Dans sa vie comme dans son écriture, Anne-Marie se voyait en rôdeuse : elle tournait autour des êtres, des choses et du monde, elle tournait autour de son propre centre sans avoir aucune chance de le rencontrer, de le reconnaître. Elle s’approchait, elle gravitait, elle ne s’appropriait rien, elle se donnait sans être reçue, elle aurait voulu se donner encore davantage pour être encore plus digne d’être rejetée et détruite mais que cette dignité-là fût seulement reconnue ! En elle-même, si elle considérait son cœur entier en son désir unique, c’était l’abîme, et jusqu’à la folie, et jusqu’à la mort. Hors d’elle, dans le monde, chez les êtres qu’elle croisait, chez l’homme dont elle attendait l’amour, c’était l’abîme, le même, perte et perdition. Aussi ne pouvait-elle être que poète, le temps d’un éclair, et puis rien. À la vie qui commençait ensuite, elle appartenait sans lui appartenir. Elle n’avait plus à faire un pas jusqu’à ce que la mort la rattrape et poigne ce cœur que la femme avait scellé. Cela eut lieu le 22 mars 2007. Après quoi fut ouvert le tiroir aux secrets où la jeune fille avait rangé tous les mots de sa passion et toutes les visions de son regard au-dedans. Le souvenir des larmes tremblait encore dans le silence et dans la beauté.

Claude Louis-Combet
NOTE SUR L’ÉDITION
Ainsi que l’écrit dans sa préface Claude Louis-Combet, les poésies d’Anne-Marie Luminet se présentaient sous la forme d’une liasse de feuilles volantes dactylographiées. Nombre d’entre elles comportaient plusieurs poèmes et, quelquefois, des ratures ou encore des ajouts manuscrits. Échappait toutefois à ce « pur désordre », un cahier de poésies réunies par ses soins. Comme il n’était pas possible d’opter pour un ordre chronologique puisque quantité de textes n’étaient pas datés et que d’autres ne portaient que la mention du mois sans celle de l’année, il m’a semblé légitime, pour ce choix, de préserver l’unité de ce recueil qu’Anne-Marie avait elle-même constitué et, pour le reste, de séparer, entre les écrits, ceux qui, lyriques, adoptaient une disposition franchement versifiée, des autres, à la tonalité, par ai

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