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Description
Sujets
Informations
Publié par | L'Harmattan |
Date de parution | 01 mai 2011 |
Nombre de lectures | 78 |
EAN13 | 9782296805453 |
Langue | Français |
Informations légales : prix de location à la page 0,0450€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
TESTAMENT
BLEU
DE NUIT
Suivi d’une esquisse
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris
Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN: 978-2-296-54584-7
EAN: 978229654584-7
Jean-François Sené
TESTAMENT
BLEU
DE NUIT
Suivi d’une esquisse
L’Harmattan
Accent tonique – Poésie
Collection dirigée par Nicole Barrière
Maquette de la couverture :
Nicole Barrière
Illustration de la couverture
Marcus McAllister
Greenman , acrylique sur papier, 2004
Préface
Écrire pour un ami, écrire un poète, pour un poète, n’est pas simple. Écrire, en soi, est déjà suffisamment difficile. J’ai toujours eu le sentiment qu’ajouter un texte à un autre, d’une autre nature et d’un autre temps, une préface, ne pouvait se mériter que des années, voire des siècles plus tard. Pour resituer l’auteur et son travail, dans une vie ou dans un courant. De façon évidemment subjective, mais au-delà des liens personnels qui uniraient ces deux artistes, comme des musiciens, dont l’un inviterait l’autre à se produire en première partie de l’un de ses concerts.
Et puis, comment mettre en lumière un auteur qui choisit l’ombre et le silence, le retrait et l’effacement ?
Aussi entrez simplement chez Jean-François Sené. Entrez tranquillement dans son recueil, poussez les pages, comme vous entreriez peut-être dans un cimetière, sachant pertinemment qu’il vous faudra alors croiser ou recroiser votre vie et vos sempiternelles questions, effleurant du doigt telle ou telle croix ou telle pierre, plantée, droite, en terre... juste pour participer de cette verticalité qui nous manque et qui devient, de fait, sans mesure, comme le silence contre qui l’on s’appuie.
Traducteur infatigable, notamment de poèmes de Samuel Beckett, Jean-François Sené a probablement dû se nourrir de cette résignation à vivre qu’était celle de son aîné, pour qui communiquer était si vain, si difficile, et vivre d’aucun remède connu. Pourquoi chercher à embellir le monde ? À quoi bon ? Tout n’est-il pas déjà donné ? À quoi bon changer une virgule, nous crie le poète, avant de devoir s’y résoudre et de donner alors véritablement sens à sa vie.
Habitué à allier la précision du sens à la résonnance de ses mots, Jean-François Sené, nous offre une langue érudite et précise, parfois nerveuse, mais jamais sèche. Peu de mots, pour ne rien retenir, ne rien enfermer et rester disponible à l’attente. Si le présent restait du présent, il ne serait pas présent, il serait l’éternité, écrivait Saint Augustin. Jean-François Sené le sait. Il choisit d’errer dans les marges et l’entre-deux. Il attend. Il attend l’envie de se perdre, nous dit-il. Il laisse à d’autres la palette et les couleurs. Il s’attache à choisir et peser ses mots. Que faire d’autre ? Parfois ses mots s’entrelacent et du coup « alléluyent », le temps d’une virgule, avant de retourner au silence.
Entrer chez lui est facile, même si l’on hésite un peu à ouvrir un testament, selon son éducation, sa pudeur ou bien ses craintes. La cascatelle témoigne ici de la brutalité de ce qui tombe, et là, l’aubier, de la force de ce qui se dresse et fait face, à la vie, à la mort, à cette mort qui souvent condamne la première à l’inachèvement. Entrez donc comme vous entrez au for de la nuit. Quittez la lumière et ses vanités. Laissez vos yeux se dilater jusqu’à lâcher prise et vous tenir sans le moindre ancrage, l’ego fracassé, jusqu’à ce que l’aube enfin pointe, s’incarne et triomphe. Il y aura toujours un jour qui sera le dernier, un jour qui donnera sa couleur à ceux qui l’ont devancé, mais un dernier jour qui, chaque nuit, invite, le poète, à tracer sur les seins de sa compagne de somptueux hiéroglyphes. Comme Baudelaire soupirant à sa passante inconnue « ô toi que j’eusse aimé, ô toi qui le savait » !
À l’heure enfin où l’on sent le tumulte des os qui commencent à peser et qui nous structurent, nous dit Jean-François Sené, on oublie sa douleur et l’on s’interroge : ai-je su accueillir les femmes ? Et les heures ? Ai-je su écrire des mots dans lesquels on puisse vraiment séjourner ? Ai-je su, avec l’âge, apprendre à voir enfin, ce que personne n’entend plus ?
Dans une lettre, un journal ou mieux un testament, on écrit souvent qu’on est seul... On en fait parfois un livre, qui n’est là que pour nous empêcher d’être seul. Mais que faire d’autre ?
Émeric de Monteynard
Émeric de Monteynard aime assembler ses mots, face à la mer et à haute voix, pour que ceux-ci sonnent ce qu’ils disent. En 1974, il croise la poésie de Max Jacob puis il rencontre Guillevic en 1992, avec qui il se lie. En 2001, il publie ses premiers recueils de poésie. Trois ont reçu le soutien du C.N.L. Aux arbres penchés , illustré par Xavier, a reçu, en 2008, le Prix Amélie Murat. Il prépare un récit sur l ville mythique de Pétra, S’égarer vers le ciel , à paraître cet été.
TESTAMENT
BLEU
DE NUIT
Je n’ai plus de mémoire, que des fragments, vieilles douleurs dont j’ai oublié l’origine, lectures sans titre ni auteur, parfums sans ancrages, images brumeuses...
I
d’un pas qui chancelle
j’aborde le silence
le crépuscule des mots
au souffle court
le rêve sans paroles
sans couleurs
sans fin
le vide dépecé
la pensée repliée
simple point
d’un pas qui chancelle
je quitte la lumière
ses mirages ses lucioles
le drame baroque
et clinquant
de la vie factice
d’un pas qui chancelle
je quitte le tumulte
du monde
la parodie de l’être
pour me glisser
dans le néant
et
renaître qui sait
en une parole
moins vaine
une parole autre