Un pois chiche à Damas
134 pages
Français

Un pois chiche à Damas , livre ebook

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134 pages
Français

Description

De 2007 à 2008, l'auteur est en stage à l'ambassade de France en Syrie. Il y observe les arcanes du monde diplomatique, son langage et ses codes, les stratégies employées par l'ambassade face au pouvoir syrien, les coulisses des négociations internationales et la gestion des crises dans l'urgence. Ce voyage raconte aussi un pays dont l'histoire et la culture se révèlent d'une immense richesse. Entre analyse politique et récit plus intime, l'auteur plonge au coeur de la diplomatie française et décrit "sa Syrie", avant qu'elle ne bascule dans la guerre.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2017
Nombre de lectures 30
EAN13 9782140036644
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Récit dʼun voyage diplomatique
Paul Christophle
UN POIS CHICHE À DAMAS
Récit dʼun voyage diplomatique
Un pois chiche à Damas
Paul Christophle Un pois chiche à Damas
Récit d’un voyage diplomatique
© L’Harmattan, 2017 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.harmattan.fr ISBN : 978-2-343-11363-0 EAN : 9782343113630
Pour Bribri Merci à Ania et Christiane
1. La nuit illumine Damas
Dimanche 19 août Je suis arrivé hier soir à l’aéroport international de Damas. Ce matin, il fait beau. Le ciel syrien est d’un bleu profond, sans nuances, comme une étoffe royale. Je me demande souvent à quelle hauteur sont les nuages et le ciel. A Paris, lorsqu’ils s’accrochent à la pointe de la Tour Eiffel, je réalise comme ils sont proches, à portée de main, à portée de tour. Mais dans cette immense étendue bleue, sans repères, impossible de savoir à quelle distance on est du ciel, s’il nous protège ou s’il nous toise. Depuis mon réveil, j’entends monter le bruit des marchands ambulants. Ils passent en criant, parfois avec des charrettes pleines de fruits, parfois avec des bonbonnes de gaz. Les taxis et les minibus vrombissent, klaxonnent, accélèrent et freinent brutalement. Là-dehors, toute une ville, tout un peuple que je ne connais pas, qui m’excite et qui m’inquiète. La petite chambre de l’Institut Français du Proche Orient est mon abri provisoire, j’ai quelques jours pour trouver un logement indépendant. Je n’ai pas encore la moindre idée de la manière dont je vais pouvoir m’y prendre : agences de location, particuliers à particuliers, ou même le téléphone arabe, je sens que cela va être plus compliqué en arabe, étant donné que je sais à peine dire « bonjour » et « merci ». Je me regarde rapidement dans le miroir sans me reconnaître. J’ai à peine vingt ans et je viens d’arriver seul dans un pays dont je ne connais pas la langue et dont j’ignore à peu près tout de la culture et des coutumes. Avant de sortir, je récupère sur la table de nuit mon passeport et l’argent en liquide glissé par mes parents dans une enveloppe marron. Costume sombre,
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indispensables lunettes de soleil, je sors mais je me reconnais à peine, je suis déjà quelqu’un d’autre : un étudiant perdu dans un pays trop différent ou un agent secret en mission.My name is Bond. James Bond. Après une demi-heure de marche en plein soleil, j’arrive à l’ambassade de France : façades blanches au milieu des immeubles grisâtres, drapeau tricolore qui flotte fièrement au fronton. C’est ici que je vais passer les prochains mois, pour suivre la coopération des Etats européens dans les différents domaines de la diplomatie : culturelle, économique, politique. Je suis escorté par un garde jusqu’au deuxième étage, il me demande de rester là pour l’instant et repart. Pas un bruit, sauf celui de quelques pas précipités que je perçois derrière une grosse porte en bois. Le temps passe, et je sens monter la pression : quelles seront mes missions exactes ? Vais-je réussir ? Soudain, la porte s’ouvre brusquement et un homme s’avance vers moi rapidement. J’ai à peine le temps de me lever qu’il m’a déjà dit « bonjour », et a fait demi-tour en me demandant de le suivre. C’est M. Villiers, Premier conseiller de l’Ambassadeur, mon chef. Il s’assoit derrière son bureau. Il est grand, avec de petites lunettes rondes et un regard perçant. Il rompt rapidement le silence qui s’était déjà installé entre nous. – Bien, Paul, j’espère que vous avez fait bon voyage, vous êtes bien installé à l’Institut français ? Je bredouille une réponse positive avec un hochement de tête timide. Il reprend. – Mais vous savez que cela est provisoire, votre activité prioritaire est donc de vous trouver un logement. Tant qu’on n’a pas un chez-soi, on n’est pas concentré au bureau. Véronique pourra vous aider, passez la voir ce matin. – Véronique ?
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– Oui, c’est la secrétaire deSéma. Séma? Le ton reste amical, mais il est pressé et parle vite : – Oui, vous savez : Son Excellence Monsieur l’Ambassadeur, SEMA... Vous connaissez déjà le fonctionnement d’une ambassade, n’est-ce pas ? – Euh... oui… enfin pas vraiment… – De toute façon, ce sont des choses qui s’apprennent sur le terrain. La meilleure manière d’apprendre, c’est de commencer par travailler sur quelque chose de concret. J’aimerais que vous me rédigiez une note d’analyse assez complète sur l’économie de la Syrie, les grandes tendances, un peu de prospective. J’ai le tournis, je me cramponne à mes accoudoirs pour tenir bon en essayant d’en savoir un peu plus : – Sur l’économie syrienne... – Oui, ce sera l’occasion pour vous d’en apprendre davantage sur la Syrie. Tenez, je vais vous donner quelques contacts qu’il faudra que vous rencontriez pour leur demander leur avis, à commencer par le conseiller économique. On frappe à la porte, une petite femme passe la tête et nous interrompt : – M. Villiers, l’ambassadeur voudrait vous voir. – Ah Véronique, parfait ! Voici Paul, notre nouvelle recrue. Il va travailler sur les questions européennes. Je vous le confie. M. Villiers quitte son bureau en même temps qu’il termine sa phrase. Véronique et moi faisons rapidement connaissance, et je lui explique ma première mission sur l’économie syrienne. Elle est souriante et très calme. Tandis qu’elle se met à chercher dans une grande armoire blindée, elle me demande d’où je viens en France, par quel aéroport je suis passé, ce que j’étudie. A chaque réponse, elle m’écoute attentivement et veut en savoir plus. Dans cet univers inconnu, je sens d’emblée qu’elle va être mon guide, monObi-Wan.
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