Cercueils et bandits
49 pages
Français

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Cercueils et bandits , livre ebook

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Description

Quand un égoïste aussi égocentrique que richissime se fait enterrer avec faste et avec ses bijoux estimés à plusieurs millions, il n’en suffit pas plus pour attirer les convoitises de bandits.


Mais lorsque l’un des malfrats sombre dans la folie en plein milieu du cimetière, que des cercueils et une dépouille sont retrouvés en pleine nuit dans le bois de Vincennes, que le fiancé de la nièce du défunt est soupçonné du viol de sépulture et qu’un riche auteur de théâtre livre à la police anglaise un des diamants volés en affirmant que quelqu’un l’a abandonné sur sa table, l’affaire devient bien trop embrouillée pour les policiers chargés de l’enquête...


Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 1
EAN13 9782373478235
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

CERCUEILS ET BANDITS
Roman policier
par René Schwaeblé
*1*
UN BEL ENTERREMENT
Dans le quartier, jamais l'on n'avait vu ça. Dans l es autres quartiers non plus, d'ailleurs ! Un enterrement de première class e, le corbillard tiré par six chevaux empanachés que maintenaient des laquais por tant perruque, tout un personnel de valets, d'écuyers, cravache en main, u ne cavalcade de deuil, un défilé de chars porte-couronnes, des sortes de hall ebardiers avec des lanternes allumées et voilées, des pleureurs, tête baissée, d es hérauts, de nobles ordonnateurs aux bicornes fièrement inclinés sur l'oreille, un peuple de figurants cherchant leurs places, guidés par des messieurs en habit noir et cravate blanche !
La compagnie des pompes funèbres avait, évidemment, fait son possible ; mais, en somme, ce cortège d'individus costumés d'o ripeaux trop larges ou trop étroits, mal chaussés, aveuglés par leur perruque, coiffés de travers évoquait la mi-carême.
— Il ne manque que les confettis ! remarqua l'un de s badauds que les sergents de ville, ahuris, empêchaient d'approcher. C'est un vrai carnaval ! On n'a jamais vu ça !
— Si, répondit un autre, j'ai déjà vu la même folie , il y a une quinzaine d'années, aux obsèques d'une dame Rivière, rue de V augirard.
— Regardez la tête des invités ! ils ne savent où s e fourrer !
En effet, les pauvres invités, mêlés malgré eux à c ette mascarade, semblaient plutôt gênés. Beaucoup regrettaient d'êt re venus, sentant les curieux se moquer d'eux. Certains prenaient la chose du bon côté, et s'amusaient franchement. L'un murmura :
— C'est encore heureux qu'on ne nous force pas à no us déguiser aussi !
L'hôtel du défunt disparaissait sous les draperies sombres et les velours lamés d'argent. Ici encore la compagnie s'était ing éniée à dépenser le plus d'argent possible, sans toutefois oser aller jusqu' à étendre des tapis noirs sous les pas des chevaux. Mais, dans la cour qui séparai t l'hôtel de la rue, des torchères s'élevaient où brûlaient des flammes vertes.
Il y eut un mouvement dans la foule, l'on se découv rit : descendant en cadence le perron, huit croque-morts apportaient le cercueil.
— Dame ! expliqua un voisin, la cuisinière m'a dit qu'il y avait trois cercueils, un de plomb, un d'argent et un d'ébène. Ça pèse ça !
— Plus que la mémoire du mort, assurément.
— Il a pourtant pris ses précautions pour ne pas s' en aller inaperçu ! Hein ! croyez-vous ! cet enterrement !
L'on entendit un bruit de glissières, et le cortège s'ébranla entre deux haies de spectateurs se demandant :
— Qui est-ce ? Qui est-ce ? C'est un roi ? C'est un ambassadeur ? Un prince ? Un nouveau riche ?
Derrière le corbillard, après la domesticité et l'o rdonnateur, s'avançaient quelques personnes, amis ou relations, venus les un s pour voir, les autres pour être vus. Certains par devoir professionnel. Parmi ceux-ci, deux journalistes qui s'entretenaient des vertus du défunt.
— Quel homme peu sympathique ! quel égoïste ! quel orgueilleux ! Le fils d'épiciers ! il rougissait de ses parents parce qu' ils étaient épiciers ! d'honnêtes gens, pourtant, de rudes travailleurs qui, grâce à leur maison et ses succursales de Paris et de province, ont pu lui laisser une for tune qu'on évalue à une quinzaine de millions. Mais, encore une fois, lui rougissait de ce nom plébéien, il a pris un pseudonyme !
— Et pour quoi faire ? Pour écrire des vers enfanti ns que personne ne lisait et qu'il faisait imprimer à ses frais. Si seulement encore il avait semé le bien...
— Lui ! ah ouat ! il ne donnait qu'à ceux qui pouva ient lui assurer de la réclame ! il faisait chanter ses louanges, célébrer son talent, publier sa biographie et ses portraits à tous les âges par des petits journalistes véreux, il n'aimait que les flatteurs. Quant à donner cent sou s à un écrivain qui aurait crevé de faim, mais qui n'aurait pu citer son nom d ans un canard quelconque, ça jamais ! Il ne recevait à sa table que des ratés qu i l'appelaient : « Mon cher maître » ou « Mon cher poète », gros comme le bras.
— Aussi mauvais mari, d'ailleurs, que mauvais rimeu r : découchant régulièrement, entretenant une chanteuse de boîte d u boulevard. Ah ! sa Légion d'honneur a dû lui coûter cher !
— Pas si cher que son portrait qu'il a payé cent mi lle francs et offert au Louvre pour être sûr de passer à la postérité ! Mai s, il laisse de la famille ?
— Sa femme est morte. Mort aussi un neveu auquel il refusait vingt francs, mais dont la mort lui a coûté une dizaine de mille francs.
— Tout de même ? Il a donné cette somme à la veuve de son neveu ?
— Vous n'y êtes pas ! il a composé une élégie en so n honneur, et l'a tirée sur papier de luxe avec aquarelles !
— Alors à qui revient sa fortune ?
— D'abord, il possédait...
À ce moment, le cortège se trouva immobilisé. Le ch ar funèbre était arrêté devant l'église, les croque-morts montaient pénible ment la bière, cependant que du portail grand ouvert le ronflement de l'orgue ar rivait en menace sur les badauds. Le cortège pénétra, tandis que le clergé, en grande tenue, robes rouges et noires, surplis blancs, précédé de suisse s imposants avec l'épée et l'épaulette, s'avançait en procession lente pour re cevoir la dépouille.
Cierges, lampadaires, tentures, chanteurs, chœurs, maîtrise, encens : il avait fallu dépenser, dépenser ! Car le mort avait exigé que ses funérailles coûtassent cent mille francs ! Pour atteindre à ce chiffre, on avait engagé des ténors de l'Opéra à deux cents louis le cachet ! Ce s artistes firent heureusement patienter les assistants qui trouvaient la cérémoni e un peu longue.
Elle se termina enfin, et le cortège s'achemina ver s le cimetière. Les deux journalistes reprenaient leur conversation :
— Je vous disais donc qu'il possédait, d'abord, plu sieurs importants immeubles à Paris. Bien qu'il n'en eût nul besoin, il les a hypothéqués en première et deuxième hypothèques, simplement pour l e plaisir de leur enlever toute valeur. L'argent qu'il a ainsi touché et celu i qu'il a touché de la vente de ses valeurs et de celles qu'il avait héritées de sa femme, il l'a placé en viager. Il n'a gardé liquide qu'une somme de cinq millions.
— Ah ! ah ! tout de même !
— Attendez ! et cette somme de cinq millions... il l'a employée à l'achat de bijoux.
— Cinq millions de bijoux !
— Oui. Il a, entre autres, acheté, moyennant deux m illions, le Kho-nan, un diamant bleu.
— À qui a-t-il légué ces cinq millions de bijoux ? Au Louvre, aussi ?
— À qui ? À... personne ! il les a fait mettre dans son cercueil !
— Et on les y a mis ?
— Il a bien fallu ! en vain les héritiers se sont a dressés au président des référés.
— Qui sont ces héritiers ?
— À la vérité, il n'y en a qu'un, plutôt une : une nièce, Marie Sabin, une malheureuse jeune fille de dix-neuf ans qui est emp loyée dans un magasin de nouveautés et qui fait vivre sa vieille mère et son jeune frère. Elle est fiancée, et c'est accompagnée de son fiancé, un brave et honnêt e garçon, Georges Almire, qu'elle a assisté à la mise en bière du corps et... des bijoux.
— Ça a dû lui faire mal au cœur !
— Je vous crois ! Il paraît même que ledit fiancé n 'a pu se contenir, et que, devant le juge de paix, le notaire, les témoins, le s domestiques, il a laissé éclater sa colère.
— L'oncle n'a rien laissé à cette jeune fille ?
— Si. Il lui a laissé quelque chose : des manuscrits !
— Ça lui servira à allumer son feu.
— C'est, évidemment, tout ce qu'elle en pourra tire r. Que voulez-vous, cet homme était un monument d'orgueil et d'égoïsme ! Pa s neurasthénique ni misanthrope ; non ! Il ne haïssait pas le monde, il l'aimait même, pour y briller – à sa façon ! Mais il méprisait tout ce qui ne pouva it servir à sa gloire. Il n'avait qu'une parente : elle était pauvre, sans ressources , sans relations, il ne voulait pas la voir, il avait juré de la déshériter. Et pui s, en se faisant enterrer avec ses bijoux peut-être pensait-il rappeler – d'un peu loi n – le faste des pharaons, peut-être pensait-il se diviniser ! Enfin... Ayant placé sa fortune en viager, comme je vous l'ai dit, il poussait la rouerie, la méchancet é jusqu'à constamment manger un trimestre d'avance de manière à laisser plutôt d es dettes à sa mort.
— Quel triste personnage !
Mais...
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