Dans le ciel, des oiseaux et des étoiles
258 pages
Français

Dans le ciel, des oiseaux et des étoiles , livre ebook

258 pages
Français

Description

Posant un oiseau sur sa tête, un enfant rêve de voler. Mais, par temps de guerre, les rêves ne se réalisent pas. Par temps de fausse paix, les rêves se brisent. À travers le regard de cet enfant qui porte fièrement l'idéal de son père mais qui chancelle sous le poids d'un passé chargé de trahisons et de reniements, se dessine la mémoire tragique d'une Algérie meurtrie et incertaine. Ravivant des douleurs tues qui font tâche dans la version glorieuse de l'Histoire, ce roman montre comment des traitres deviennent des maitres, des héros sont déterrés pour servir de trophées... et la cupidité assassine les espoirs.Dans le ciel, des oiseaux et des étoiles est un roman poignant où Ali Mouzaoui, confrontant innocence et cruauté, espérance et déchéance, passion et indifférence, nous peint ce qu'il y a de plus vrai et de plus beau en l'humain : sa fragilité.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2021
Nombre de lectures 1
EAN13 9789931572930
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait



































1


































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Dns le ciel,
des oiseaux et des étoiles
Roman























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4
Ali MOUZAOUI













Dans le ciel,
des oiseaux et des étoiles
Roman















EDITIONS FRANTZ FANON
5




















Dépôt légal : Avril 2021
ISBN : 978-9931-572-93-0

© Editions Frantz Fanon, Boumerdès, 2021
Département éditorial de Métis Média
12, Bt A, résidence Benbrahim,
49, Boulevard Aliliguia (RN° 24)
35000, Boumerdès,
Algérie
Tel: 00(213)552397136
www.editionsfrantzfanon.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation ou de
traduction réservés pour tous les pays.


6










À toi qui n’as pas su attendre le printemps…
Je me jure de ne plus cueillir de roses.

À mon cher ami, Farid Mohammedi,
avec lequel nous reconquîmes l’Espagne pour
prolonger l’été.


















7


































8


I

Houria était bloquée à Tikjda. Depuis trois jours,
la jeune institutrice regardait à travers la fenêtre
tomber la neige, infini linceul blanc. Quelques
moineaux transis de froid s’aventuraient sur son balcon
pour picorer des miettes de pain qu’elle leur déposait
sur un petit carré de carton. Dès les premières lueurs,
elle entendait le bruit de leurs becs crépiter sur le
papier comme les touches d’une machine à écrire.
Les oiseaux annonçaient la venue de l’aube et
Houria sautait du lit pour scruter l’humeur du ciel.
Invariablement, un rideau noir planait sur la montagne
qui se transformait en gouffre d’obscure angoisse.
Sans fond. Pas un sommet ne pointait au-dessus des
nues, pas un pic ne perçait le ciel. Tout n’était que
brouillard uniformément tissé aux nuages sombres.
Alors pour atténuer l’oppression qui pesait sur son
cœur, Houria replongeait dans le manuscrit qu’elle
était venue récupérer selon la volonté d’Arezki :
 Je m’en irai demain à l’aube. Ma valise est
bouclée, mon billet dans la poche. À toi, seule, je
peux tout confier. Les oiseaux et le texte. Tu
trouveras Dans le ciel, des oiseaux et des étoiles dans le
tiroir de ma chambre. Lis-le. Tu verras que j’ai parlé
de nos préoccupations mesquines et de nos rêves
absurdes. Tu peux supprimer tout ce qui te paraîtra
superflu et rajouter ce que tu jugeras utile.
L’important est de ne pas brouiller le fil conducteur
du récit et d'en garder la cohérence. Au cas où tu
penserais que notre histoire ne mérite pas d’être
connue, jette-la aux flammes… Après tout, je
cons9
tate, aujourd’hui, que nous ne sommes à l’origine
d’aucun exploit, nous n’avons poussé vers aucune
découverte. Nous avons existé simplement, comme
ça. Malgré nous. Et si quelque part, nous figurons
timidement, à une époque donnée, c’est parce qu’un
événement nous a sollicités de manière superficielle,
passivement. Autrement dit, nous faisons partie du
décor. Un décor que nous n’avons pas planté, auquel
nous n’avons pas participé…
Arezki suivit le vol tremblant d’un milan dans le
ciel et se rappela sa dernière recommandation :
 Tu ouvriras les cages aux oiseaux en prenant
soin de les débaguer. Lorsqu’ils seront libres,
j'aimerais qu'ils ne portent plus mes annotations. Et toi, ne
sois pas triste chaque fois que je te parle de partir.
Tu te rendras bientôt compte, petite sœur, à quel
point tout ce que j’ai fait est inutile. L’Algérie ne
tient pas à s’encombrer de rêveurs comme moi.
Houria avait pris congé de ses élèves et était
montée à Tikjda, juste après l’enterrement d’Arezki. Elle
voulait que le mort se reposât sans se soucier, dans
l’au-delà, de ses oiseaux ou de son manuscrit.
À son arrivée, Houria lâcha les sittelles qui
piquèrent vers des buissons touffus dans de furtifs
battements d’ailes. Les craves, par contre, se lancèrent en
groupe, rapides et nerveux, à la conquête d’une
trouée de ciel bleu. L’air s’emplit de leurs cris aigus
et prolongés.
Houria n’osa pas entrer dans les grandes volières
où des rapaces affamés et paresseux l’observaient,
en toupillant des yeux. Elle ouvrit les grandes cages
et se tint à côté.
10
 Tant mieux ! pensa Houria. Qu’ils gardent
leurs bagues et prolongent ainsi dans le ciel, près de
Dieu, le souvenir d’Arezki qui les a tant aimés.
Un aigle royal l’effraya en quittant son perchoir,
battant des ailes dans un grand raffut. La jeune fille
s’arma d’un long bâton et tapa sur les barreaux des
cages ouvertes. Un gypaète se dandina vers la sortie
et déploya inopinément ses ailes, craignant que la
porte ne se refermât. Il s’éloigna majestueusement,
indiquant la voie des cieux à des colocataires
hésitants.
Les oiseaux de proie ne tardèrent pas à reprendre
leur liberté, l’un après l’autre, sans se bousculer. Du
haut du ciel, le monde devait leur paraître plus vaste
que jamais. Ils tournoyèrent en ronde dans le ciel
puis, obéissant à leurs instincts, ils s’orientèrent,
selon l’espèce, dans diverses directions. Alors la
neige se mit à tomber en gros flocons légers et
cotonneux.
Houria frissonna. Elle remonta le col de sa veste
de toile, contempla les désolantes cages vides dont le
vent faisait grincer les grilles. Des corbeaux, surpris
par l’éclat bleuté des fulgurations, volèrent si bas
qu’ils effleurèrent la cime des cèdres. Toute la
montagne se tassait sous les roulements de tonnerre que
répercutait l’écho en cascades de fracas de plus en
plus lointaines.

Dans la chambre d’Arezki, tout était
religieusement maintenu en place. À l’entrée, au-dessus d’un
sac à dos posé à même le sol, pendaient la vieille
paire de jumelles et son « zénith » – un appareil
photo de marque russe qui semblait naître de son corps,
tellement il ne s’en défaisait pas.
11
Sur la table, à côté d’un volumineux traité
consacré aux échassiers, Arezki avait oublié de fermer son
magnétophone qui lui servait à enregistrer chants et
cris d'oiseaux. Une grande galette de bande
magnétique y était à moitié déroulée.
Dans l’un des tiroirs, entre deux micros et une
grosse loupe, il avait rangé Dans le ciel, des oiseaux
et des étoiles. Le manuscrit était dans une épaisse
enveloppe. Des plumes, probablement d’épervier, en
séparaient les chapitres. Arezki avait toujours été
fasciné par les éperviers sans qu’il n’en perçût les
raisons.
La femme de ménage n’avait rien déplacé pour ne
pas déranger cette impression de présence fragile
que laissent derrière eux les absents de toujours.
Dans la chambre l’air était vicié et il y régnait une
forte odeur de moisissure et d’humidité.
En entrant, Houria tira l

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