ISRAE Elle
160 pages
Français

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Description

Israe et son mari, un jeune couple de brillants journalistes, sont à deux doigts de la célébrité et de la fortune. Il ne leur manque pas grand-chose : un simple objet historique à retrouver pour achever leur recherche sur l’exode des juifs marocains vers Israël. Mais Israe ignore que cette quête, bien plus difficile qu’il n’y paraissait au départ, va détruire son couple et bouleverser toute sa vie. Manipulée, menacée, acculée malgré elle aux pires mensonges, pourrait-elle malgré tout trouver l’amour dont elle rêve tant, et surtout, retrouver sa dignité ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2021
Nombre de lectures 1
EAN13 9789920607179
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

ISRAE,
Elle...
roman© Editions Marsam 2021
Collection dirigée par Rachid Chraïbi
15, avenue des Nations Unies, Agdal, Rabat
Tél. : (+212) 537 67 40 28 / Fax : (+212) 537 67 40 22
E-mail : marsamquadrichromie@yahoo.fr
Conception graphique
Quadrichromie
Impression
Imprimerie Afrique Orient, 2021
Dépôt Légal : 2021MO0280
ISBN : 978-9920-607-17-9 MOHAMED OUISSADEN
ISRAE,
Elle...
romanCouverture
Composition QuadrichromieÀ toutes les appartenances,
À Sidi Bouaissa Ouslimane,
à toutes les cultures… le marabout commun des juifs et musulmans…
À toutes les femmes qui ressemblent à Israe…Première partie
Ils s’étaient mariés suite à une erreur, il y avait de
cela deux ans.
Cette nuit-là, alors qu’il pleuvait encore, ils
arrivèrent très tard à ce village lointain. Ils garèrent
leur voiture et en descendirent. Monsieur, aux aguets,
leva la tête et lut à la faible lumière d’un lampadaire
« Le S », le nom de l’auberge en gros caractères sur
l’enseigne, pour vérifer la destination. Madame était
assommée de fatigue au bout d’une longue journée
de voyage. Elle s’emmitoufait dans un manteau de
cuir et s’inclinait sous un parapluie noir.
Juste au-dessous de l’enseigne, le portail de
l’auberge était fermé. Comme la sonnette n’était pas
visible, l’homme frappa d’abord à tapes légères et
saccadées, puis il donna de grands coups de poing
contre la porte. Tout fut malheureusement couvert
par le grand tumulte de la pluie. Il s’éloigna de
quelques pas de son épouse et regagna la voiture,
composa le numéro de l’auberge sur son portable et
attendit. Personne ne répondit encore.
Il recomposa le numéro pendant que cette fois-ci
ses mains tremblaient.
7 Personne encore à l’auberge ne décrocha le
combiné, à se demander si tout le monde à l’intérieur
hibernait, comme les bestiaux en hiver, se terrant.
Distinguant à peine un grognement amorti par le
bruit de la pluie, il ouvrit la portière et voilà un gros
chien qui aboyait. La femme mourait de peur car elle
était désarmée contre cet animal auquel la lumière
du lampadaire donnait une forme de lion rouge et
barbu. Il n’était pas arrivé près d’elle qu’on entendit
grincer le grand portail ; le chien aussitôt se tut,
comme si le dernier grincement l’eût siffé. C’était
le maître de l’auberge qui sortait ; il se présenta. On
voyait la majorité de ses dents, ses pommettes étaient
renfées vers les yeux qui s’étiraient, car il souriait.
Comme ses dents claquaient de froid, son sourire,
tout à coup, comme l’atmosphère, se refroidit.
─ N’ayez pas peur, entrez ! Mon chien m’a juste
avisé de l’arrivée de quelqu’un. J’étais au courant
de votre réservation et je vous ai attendus jusqu’à
minuit. Soyez à tout moment les bienvenus !
Ils le saluèrent puis le suivirent en montant après
lui les marches de l’escalier. Mais ils s’arrêtèrent net
sur le palier d’un salon au premier étage, d’où l’on
sentait venir sur soi un air tiède et parfumé. On entrevit
ensuite, par la porte entrebâillée, quelques braises
faiblement allumées dans l’âtre d’une cheminée.
Puis une ampoule s’alluma automatiquement.
─ Voulez-vous d’abord vous réchauffer ? demanda
l’aubergiste, dont le visage était maintenant éclairé.
─ Le feu est plus cher que l’or dans cette
nuit glacée, répondit la femme dont les dents
s’entrechoquaient encore.
8 ─ Installez-vous donc ici, je vais vous remplir le
formulaire d’inscription.
Les deux clients comprirent aussitôt, ils tendirent
leurs papiers. La femme posa son parapluie encore
mouillé sur une table, enleva son manteau et resta
en chemisier et pantalon serré. Devant la cheminée
ses pommettes avaient déjà rougi. Mais son mari,
accoudé à la table, le menton dans le creux de la
main, semblait encore pris par quelque souci ; l’idée
qu’il n’avait pas encore déchargé ses bagages lui
enlevait la chaleur de la cheminée, lui donnait la
chair de poule et faisait bourdonner à ses oreilles
le bruit de la pluie, qui battait encore fort dans la
grand-rue.
Il laissa sa femme au coin du feu et alla au
rezde-chaussée. L’aubergiste, se demandant pourquoi il
descendait, se précipita vers lui.
─ Quelques bagages nécessaires, je ne les ai pas
encore déchargés, expliqua le client.
─ N’ayez pas de souci, répondit l’aubergiste le
sourire aux lèvres, j’ai y déjà pensé, mais je voulais
attendre que la pluie s’arrête. Alors ne vous inquiétez
pas monsieur, passez-moi la clé de contact, je m’en
occupe.
─ Apportez juste les deux valises, elles sont
visibles côte à côte dans le coffre, demanda le client
qui semblait ravi de la gentillesse de l’hôte.
Ensuite, l’un courut sous la pluie glacée tandis
que l’autre, espérant s’installer rapidement devant la
cheminée, regrimpait l’escalier quatre à quatre.
Arrivé au salon, il s’approcha du feu en
s’appliquant à sécher son pantalon mouillé. Sa femme
9 le surveillait du coin de l’œil. Ils n’échangèrent
aucun mot. Le silence était parfait. Comme s’ils
s’étaient tout dit pendant les huit heures de route
continue.
Ils venaient de Casablanca pour une affaire
importante. Une affaire qui pouvait changer leur
vie. Mais leur silence voilait ce grand espoir d’une
brume sombre. À l’arrivée de l’aubergiste, chacun
des deux époux s’adressa à lui sans qu’aucun lien
ne puisse s’établir entre une question de madame et
un commentaire de monsieur. Un mot fut échangé
entre eux comme une fausse note dans une musique
improvisée, qui bouleversa les humeurs et qui
produisit peu à peu, à mesure que la nuit avançait,
un bruit confus. L’aubergiste avait tout remarqué. Il
adapta son langage à ce cas, un parmi les milliers
qu’il avait rencontrés durant sa carrière de guide de
montagne.
─ S’il vous plaît, dit-il d’un ton enjoué, pourrai-je
vous appeler par vos prénoms afn de m’épargner la
longueur de « Monsieur Hazzani », et de « Madame
Hazzani » ?
─ Bien sûr ! lui répondit l’homme.
─ Kamal et Israe, deux beaux prénoms, faciles à
écrire comme à prononcer ! dit l’aubergiste en leur
retournant leurs papiers.
Il passa aussi du vouvoiement au tutoiement
pour gagner leur amitié. Il poussa un soupir de
soulagement quand un premier sourire fut échangé
entre la femme et son mari. Cela fut pour lui comme
un appel pour les réconcilier. Il se leva pour actionner
un vieux tourne-disque posé dans un coin du salon, et
10 qui passait pour un décor. La musique se ft entendre.
La nuit fut longue encore. L’aubergiste réveilla son
cuisinier qui prépara une collation rapide.
Alors que le disque tournait, les hanches
bougeaient et les mains tournoyaient en l’air.
On dansait frénétiquement. Kamal conduisait sa
femme, et l’aubergiste, dansant tantôt avec Kamal,
tantôt avec Israe, et bien des fois tout seul, se sentit
réconforté. Il venait d’accomplir un premier devoir,
celui de rendre contents les cœurs de ses clients.
La pluie ne tombait plus. On n’entendait plus que
l’assourdissement que produit aux oreilles ce silence
brusque qui suit un grand bruit.
On dîna vers une heure du matin. L’aubergiste
conduisit le couple vers la plus belle chambre de son
établissement, celle qui avait vue sur la casbah. Les
murs étaient orange. Comme elle était douce, cette
couleur ! Un lit confortable, sur lequel des draps
épais étaient repliés, invitait le couple à se jeter à
plat ventre pour dormir sans plus réféchir. Leurs
paupières commencèrent leur rencontre. Et pour
laisser la chaleur qu’avait générée la danse fnir dans
leur lit, l’aubergiste leur souhaita aussitôt bonne nuit.
Malheureusement leur chaleur occasionnelle
retomba avec le départ de l’aubergiste. Ils revinrent
à leur froideur habituelle. Ils souffraient, chacun de
son côté, d’un mariage professionnel, bien loin de
l’amour.
Le matin elle quitta le lit la première. Sa tête
tourmentée par le stress n’avait pas laissé ses pieds
tranquilles sous les couvertures. Elle frémissait de
tout son être et souffrait de tous ses membres. Elle
11 claquait de temps en temps de la langue et faisait
craquer ses doigts, fébrilement. Elle regrettait la
célibataire qu’elle avait été auparavant… elle était
secouée par un vent violent qui n’était ni rafale ni
bourrasque, qui ne venait ni de l’ouest ni de l’est, et
qui ne voulait jamais se calmer. Aussi, un rouge plus
foncé que le teint du crépuscule n’avait plus depuis
longtemps abandonné le tour de ses yeux, toujours
fatigués. Elle venait de consulter un psychiatre. Elle
lui avait fait la confdence de son secret. Cela lui fut
diffcile au début ; elle avait supporté cela comme
une chirurgie sans anesthésie, sans précaution non
plus. C’est ainsi qu’elle imaginait en tant que femme
le fait d’avouer à autrui l’inexistence d’amour pour
son mari ! Le psychiatre lui conseilla de marcher
dans la nature, de faire semblant d’y poursuivre
l’homme qu’elle avait épousé, de penser à lui à
chaque enjambée, de le croire, de l’imaginer entre
les feuilles de tout arbre comme un fruit délicieux…
« C’est vraiment hyper romantique, tout cela ! » se
dit-elle après.
Mais elle le perdait de vue en levant les yeux
vers un corbeau ou vers un moineau déployant ses
ailes. Puis elle l’oubliait tout à fait devant la mer. La
nature le lui chassait des yeux.
Elle avait fait des efforts pour ressentir quelque
chose envers lui, or jusque-là aucun éclair d’amour
sincère n’avait traversé son cœur.
Mais quand elle se l’imaginait en tant que
camarade ─ car tous les deux étaient journalistes ─,
elle était saisie de joie, dans un espoir sans limite.
Il tombait sur sa langue des mots, de vagues mots,
12 elle les lâchait sans même les faire passer au tamis
de sa logique... Le sourire, l’énergie, l’haleine…
tous ces résultants de l’espoir se renouvelaient en
elle et elle en paraissait plus belle. Cette nouvelle
bonne mine séduisait son mari, son camarade. Lui,
à ce qu’il paraissait, confondait l’amoureux et le
professionnel. Mais elle, par contre, savait bien les
séparer. Il n’occupait dans son cœur que la place
d’un ami digne de respect.
E

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