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L’amour et la mort , livre ebook

199

pages

Français

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2024

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Si on parlait du Roman de Michel Ducos, ‘L’amour et la mort’ . . Dans ce roman, on retrouve cette quête identitaire qui nous habite tou(te)s. On dit très souvent que l’habit ne fait pas le moine, mais qu’il le présente. Aussi, se confectionner le costume le plus fidèle à notre soi n’est-ce pas la tâche la plus compliquée de toute ? . . Parfois, il suffit d’accepter que la seule chose à notre portée soit la réaction que l’on peut avoir aux retours de l’image que l’on renvoie. . . Et accepter qu’on puisse être aimé sans en comprendre la raison, ni pourquoi ce sentiment peut s’éteindre. . . Œuvre proposée lors de la 3ème édition du Concours d’écriture des Editions La Perle Noire
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Publié par

Date de parution

01 août 2024

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

1 Mo

 ETL’AMOUR
 ET LA MORT
Et l amour et la mort
ET L’AMOUR
1
Et l amour et la mort
I
Le smartphone, posé sur la tablette devant lui, s’éclaire.
Trois lettres majuscules s’affichent sur l’écran.
Le cœur de Camille s’emballe. Il se dépense sans compter et cogne, cogne dans la cage
thoracique comme s’il cherchait à s’échapper de cette prison.
Ces trois lettres ont une charge émotive si intense…
Le compartiment est loin d’être complet et aucune paire de fesses n’encombre les sièges à
proximité. Pourtant Camille n’esquisse aucun geste. Pas question de répondre à l’appel malgré
le charivari dans sa poitrine. Il se refuse à troubler cette atmosphère ouatée. Lui, que les
sonorités de portables émaillées de fragments de conversations sans intérêt, ont déjà perturbé,
à plusieurs reprises depuis le départ, lui qui apprécie tant les songes qu’offre cette bulle de
sérénité, n’importunera pas les autres passagers même distants. Il respecte les codes de la
politesse qui permettent de vivre ensemble. Chacun de son côté!
L’écran s’est éteint. Camille s’empare du clavier et écrit:Je suis dans le train. Je t’appelle
dès que possible.
Dans quelques heures, une fois arrivé à destination.
Le doigt de Camille effleure la touche. Il lit, relit sans cesse le message avant de l’envoyer
comme si une faute d’orthographe imaginaire polluait ses deux courtes phrases. Une faute si
énorme, si évidente qu’il découvrirait évidemment trop tard, une fois les mots envolés à
plusieurs centaines de kilomètres.
Des mots envolés que Camille, cette fois, n’a plus la possibilité de rattraper. Quelle erreur!
Ne sont-ils pas d’une brièveté brutale, inacceptable? Comment n’a-t-il pas vu l’horrible aridité
de ses lignes?
Sécheresse des mots, sécheresse du cœur: voilà ce qu’elle pensera de lui!
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Et l amour et la mort
Pourquoi n’a-t-il pas simplement glissé une infime touche de tendresse? Discrète mais
révélatrice. Par exemple un émoticône souriant aurait suffi.
Il chuchote dans un sourire en se moquant de lui-même:
Toujours tourner sept fois ses pouces au-dessus du clavier avant de répondre, Camille!
Prend-elle son départ pour une fuite? Possible.
Camille ne la connaît que depuis deux jours. Deux jours tellement intenses en émotion que
les heures se sont égaillées dans tous les sens sans avoir la moindre possibilité de les retenir, de
les ordonner. Deux jours si proches et si lointains déjà.
Camille ferme les yeux. Pourquoi ne pas tenter, à présent que ce train l’éloigne malgré lui
de sa belle, d’apporter du calme dans ce tourbillon de sensations, de récupérer un soupçon de
quiétude dans le tumulte de son cœur?
Mettre de l’ordre dans le chaos de ses pensées… Quel boulot! Par lesquelles commencer?
Celles qui se bousculent dans sa mémoire ou celles qui hantent son futur? La joie ou l’anxiété?
Camille préfère songer aux heures passées plutôt qu’à celles chargées d’angoisse qui
patientent dans l’ombre.
Voyons. Comment s’est amorcée leur rencontre, cet amalgame détonnant de péripéties
parfois comiques et d’instants sublimes?
Lors d’une soirée à Montpellier particulièrement fertile en surprises.
3
Et l amour et la mort
II
Découvrons d’abord le charme insolite du décor. Comment ne pas être conquis? Camille
nota le jeu subtil entre l’ombre et la lumière.
Un jeu si subtil que les pierres plusieurs fois séculaires semblaient façonner des murs irréels.
Le jeune homme en pénétrant dans ce sanctuaire devenu profane, qui a su cependant conserver
son aura divine, fut presque intimidé.
Un sanctuaire profane?
Une chapelle désacralisée depuis une cinquantaine d’années. Elle servait d’écrin majestueux
à un vernissage.
Camille était persuadé que certains lieux étaientmagiques et ouvraient des portes vers
l’extraordinaire. Ici, le cadre semblait idéal pour vivre une de ces aventures hors norme, comme
il en rêvait.
Pourtant il n’était pas sûr que le terme aventure fût approprié pour la soirée qu’il allait
passer…
Un foisonnement de lignes aux teintes bleutées, censées évoquer des courbes féminines,
surgissait d’un univers immaculé. Ou en s’exprimant d’une manière moins triviale: l’ascétisme
chromatique donnait vie à travers le prisme vertigineux et sensuel de la lumière à une géométrie
voluptueuse.
Et d’où provenait cette géométrie voluptueuse? D’imposants tableaux de plusieurs mètres
de hauteur qui égayaient les murs sombres. Maud exposait ses nouvelles toiles.
Je compte sur toi, avait-elle déclaré.
Je ne sais pas si…
Je t’en prie!
Comment Camille aurait-il résisté à ce «Je t’en prie!»?
4
Et l amour et la mort
Pourtant il n’a jamais été sensible à ces événements prétendument artistiques. Il apprécie le
talent de son amie, il préfère cependant admirer ses œuvres loin de toutes ces effervescences
plus ou moins mondaines. Il les fuit car il ne se sent pas particulièrement à l’aise parmi les
snobinards qui se gargarisent d’extravagances verbales.
Or il a répondu présent.
Impossible depuis toujours de refuser les invitations de Maud. Une blonde mignonne qui lui
avait tapé dans l’œil dès leur première rencontre.
Leur relation amoureuse s’était éteinte sans qu’il en sache la véritable raison. Avait-il
protesté pour autant? Pas le moins du monde. Il n’avait ni cherché à la connaître par respect
pour la jeune femme ni à comprendre le sens caché de sa phrase:
Je n’éprouve plus de désir.
Amour et désir sont-ils obligés d’aller de pair? Le jeune homme s’était tu.
Une séparation en douceur sans heurt et sans le moindre reproche. Ils avaient simplement
cessé de partager le même lit. Camille s’était alors abstenu de lui prendre la main et de montrer
des signes d’une trop grande affection. Comme elle n’avait jamais été encline à échanger des
termes sirupeux et qu’il respectait son choix, l’absence de mot tendre facilita la mutation de
leur amour en amitié.
Et lui qui pensait être fou amoureux de Maud! Pourquoi alors n’avait-il pas trop souffert?
Depuis neuf mois, il avait cessé d’être l’élu de son cœur ainsi que le sujet principal de son
art. Elle, par contre partageait maintenant sa vie avec une autre blonde, Coralie, dont les courbes
stylisées ornaient les œuvres accrochées aux murs de la chapelle.
Maud, Coralie et Camille, des amis de longue date. Ils se sont connus à l’école des Beaux-
Arts de Bordeaux.
Malgré le délitement de leur relation amoureuse, Camille et Maud étaient donc restés très
proches et, à son invitation pressante, il n’avait pas hésité à prendre le train un vendredi soir.
5
Et l amour et la mort
Les vacances scolaires d’hiver débutaient. Quinze jours de relative tranquillité s’offraient à lui.
Il avait prévenu son grand-père qu’exceptionnellement il ne lui rendrait pas visite ce
dimanche.
Pour l’heure, prisonnier de ses angoisses, il ne songeait qu’à sa fuite, malgré le fameux cadre
magique, et peaufinait son plan d’évacuation des lieux tout en tentant de se fondre dans cette
foule qui s’extasiait sur le génie de l’artiste.
Maud avait été heureuse de sa venue. Elle s’était empressée de le présenter à une multitude
de personnalités, dont il se moquait éperdument –ce qui devait-être réciproque– et dont il avait
sur le champ oublié le nom et la physionomie.
En réalité, si son esprit s’était empressé d’occulter l’extravagance vestimentaire et oratoire
des hommes qui l’avait laissé sans voix car il ne posséderait jamais l’aisance de ces forts en
gueule, son regard s’était attardé quelques secondes sur l’élégance et sur l’éloquence plus
raffinées des femmes avant de les abandonner à leur tour par prudence.
Camille, depuis sa dernière déconvenue amoureuse, se demandait parfois s’il était capable
d’offrir à la gent féminine ce qu’elle attendait véritablement d’un compagnon et évitait de
s’accrocher au charme d’un visage inconnu pour ne pas plonger dans un rêve impossible.
Trop accaparée par ce joli monde, Maud n’était pas demeurée très longtemps près de lui. Le
pauvre Camille, seul, sans sa bouée de sauvetage, s’épuisait à garder la tête hors de l’eau. Aussi
arborait-il un sourire de circonstance, errant sans fin, comme une âme n’arrivant pas à cacher
sa peine, feignant par intervalle d’être intéressé par une œuvre en particulier mais répétant en
permanence le scénario de son repli stratégique.
Repli stratégique qu’il élaborait même avant le départ de Maud.
Il consistait à attendre qu’une place se libère en bordure du buffet, à s’approcher d’un air
détaché, à accepter le verre qu’on lui proposerait, à se diriger ensuite du côté gauche, pour
déguster, s’ils n’avaient pas tous été engloutis par cette bande de crève-la-faim alcoolisés et
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Et l amour et la mort
snobinards, un canapé dont la forme et la couleur prédisaient un régal pour le palais et qui avait
surtout le gros avantage d’être proche de la sortie, à jeter un coup d’œil circulaire pour noter
que personne ne portait le moindre intérêt à ses faits et gestes et à s’effacer insensiblement.
Le bonheur dans la fuite. Quel délice!
Et quelle facilité! Son cinéma n’intriguait vraiment aucun convive dans cette nef de six
cents mètres carrés et sa disparition ne susciterait aucun émoi. Maud et Coralie, trop occupées,
ne se rendraient compte de rien.
La réussite était toute proche. Plus qu’un mètre…
Oups! hoqueta une voix féminine.
Camille resta interdit. Un instant infime. Le temps de l’incompréhension. Puis il ressentit
une certaine moiteur sur sa peau.
Une demeurée, particulièrement imbibée d’alcool, l’avait bousculé.
Le verre qu’elle tenait encore à la main était à présent vide. Le breuvage rouge sang qu’il ne
contenait plus imprégnait les habits de Camille.
Quelques centimètres. Il ne lui avait manqué que quelques centimètres. Quelle horreur
d’échouer si près du paradis! À cause d’une emmerdeuse bourrée!
Plusieurs têtes intriguées se tournaient déjà dans sa direction et s’éclipser discrètement se
compliquait. La contrariété, le découragement mêlé d’une pointe de désespoir s’emparèrent de
Camille. Heureusement tout de suite remplacés par une bouffée d’optimisme. Il songea à un
signe du destin.
Serait-ce un miracle qui s’accomplissait dans cette ancienne église?
En effet pour se nettoyer, il n’aurait pas d’autre choix que de sortir…
La délivrance! Une brusque excitation, accompagnée d’une onde euphorisante s’empara de
lui.
Le bonheur! Enfin…
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Et l amour et la mort
Merci! Mille fois merci à cette fille! Une grande gigasse brune, semblait-il, qu’il n’avait
pas eu encore le loisir d’examiner! Un simple coup d’œil suffirait pour reprendre la situation
en main, jouer les indifférents ou les flegmatiques. Des rôles qu’il maîtrisait à merveille.
Pas cette fois-ci…
Son cœur s’affola. Quelle fièvre dans son corps et dans son esprit! Quel trouble
incompréhensible, expédiant aux oubliettes la vague bienfaitrice!
Et quel regard! Impossible de le quitter une fois qu’il l’eut croisé! Un regard malicieux qui
jouait avec le sien… Un regard doux, tendre, moqueur. Oui… pas de doute! Il se moquait de
Camille!
L’affolement redoubla.
Ce visage ne lui était pas totalement inconnu. Plus exactement il reconnut cette chevelure
noire. Les boucles sombres d’une des personnes que Maud lui avait présentées. Pourquoi cette
fille n’était-elle pas tombée dans l’oubli comme les autres? Son agréable frimousse était
demeurée, par on ne sait quel mystère, accrochée à sa mémoire.
Rien de grave, mentit-il en évaluant les dégâts sur son pantalon et surtout sur sa chemise
neuve qu’il avait achetée pour l’occasion et dans laquelle il se sentait engoncé et légèrement
ridicule.
Il ajouta dans un large sourire et d’un ton qu’il croyait à la fois assuré et ironique:
De toute façon, cette horreur n’a que ce qu’elle mérite.
Je vous l’accorde. Cela n’empêche pas de mettre un peu d’eau.
Le son de cette voix, nimbé d’une douceur veloutée, se posa sur lui et ne le quitte plus depuis.
Même dans ce train, elle vagabonde dans sa tête, dans son corps et joue avec son cœur.
Elle regarda à droite et à gauche avant de lui ordonner:
Venez.
Camille pensait maîtriser la situation. Pourtant, aucun doute, une nouvelle fois elle lui
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Et l amour et la mort
échappait. Comment se sortir de ce guêpier?
Un guêpier, cette fille?
Un adorable guêpier alors…
Venez, répéta-t-elle.
Elle lui prit d’autorité la main.
Camille ne chercha même pas à s’opposer. Elle paraissait si sûre d’elle! Plus exactement, il
émanait de sa personne une aura qui dissipait toute envie de contestation. Il songea à une
tornade et se vit comme un papillon aux ailes bleues emporté par un tourbillon.
Un papillon aux ailes bleues? Où avait-il déniché cette image? Pourtant il n’avait rien fumé.
Il n’avait jamais fumé. Son imagination suffisait à son délire.
Leurs doigts s’entrelacèrent comme par enchantement. Il n’en fut pas surpris. Tout était si
naturel chez cette fille qui le guidait vers l’extérieur de la chapelle. La sensation euphorisante
d’être dans un songe éveillé et de ne plus rien contrôler plut à Camille.
Il s’avoua vaincu et s’abandonna au plaisir de cette bouche moqueuse, de ce regard rieur, de
cette chevelure envoûtante, sans se poser de question. Simplement cette évidence en complète
contradiction avec la prudence qu’il affichait. Il n’existe rien de plus délicieux qu’une fille
inconnue qui vous prend la main pour vous emmener à l’autre bout de vos rêves.
Le lavabo du bloc sanitaire public et préfabriqué…
Passez-moi votre chemise, poursuivit-elle d’un ton péremptoire.
Une fraction de seconde, il hésita. Ridicule, cet infime flottement! Il ne correspondait à rien.
Ni à de la pudeur, ni à de la crainte.
Ce n’est pas très sympa de votre part, remarqua-t-elle pendant qu’elle enduisait de savon
liquide le tissu souillé.
Pris de court, il joua les offusqués, soupçonnant cependant, il en ignorait la raison, que cette
attitude n’était pas celle espérée par la jeune femme:
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