La cible
286 pages
Français

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Description

Amour, fidélité,assassinat politique,trahison.ŠDans l'interminable guerre civile européene (1914-1945), comment, par quels sacrifices, se construire une famille et un avenir français, quand on est Russe, immigré et qu'il faut s'affranchir d'un passé lourd de menaces mortelles ?

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Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2011
Nombre de lectures 78
EAN13 9782296811348
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0950€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© L’Harmattan, 2011 5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-296-55181-7 EAN : 9782296551817
La Cible
Discours
Du même auteur
Malesherbes, in Le bicentenaire du procès du roi, Editions F.-X. de Guibert, Paris, 1993.
Le dernier visage de Malesherbes, in Malesherbes, Actes du colloque, Centre culturel du Panthéon, Paris 1994.
Traité
French Arbitration Law and Practiceédition, en (2ème collaboration avec G.H.Pointon et Jean Rouche), Kluwer Law International, The Netherlands, 2009)
Jean-Louis DELVOLVE
La Cible
Roman
L'Harmattan
Pour Claudine,Dominique, Anne, Béatrice
Chapitre I
ous aimions, Michel et moi, descendre tôt le matin, à l’abri Ndes regards, jusqu’au fond du jardin, tout près du bord de l’Indre dont le méandre dessinait là un trou noir qui nous faisait un peu peur. Un remous en emportait les eaux chargées de mousse vers le batardeau derrière le mur d’enceinte. Nous n’imaginions pas que notre jeu eût un rapport quelconque avec cet endroit, si ce n’est que nous étions sûrs d’y d’être tranquilles, loin du remue-ménage de la maison. Peut-être aussi un désir inavouable nous attirait là, celui de conjurer un mauvais sort que nous prêtions à ce trou d’eau, dont nous ne savions pas trop dire s’il nous repoussait ou s’il allait nous aspirer. Nous ne l’évoquions jamais sans que je ressentisse un frisson intérieur que je me reprochais, en lui tournant le dos. L’émotion de Michel transpirait dans son regard qu’il embrumait en rougissant. Alors, nous effacions ce trou de notre vue en interposant la cible entre la rive et nous, calée bien droite sur un chevalet que nous plantions entre deux saules. Nous nous donnions du jour en embrassant leurs branches basses entre des bouts de corde à linge que nous allions chercher dans le cagibi attenant à la buanderie. De loin, cela nous donnait l’illusion d’une scène de théâtre pour une comédie qu’il restait à inventer. Le jardinier prenait grand soin de remiser les cordes quand nous oubliions de les rentrer. Notre arme était une carabine de foire. Absolument inoffensive à dix pas, elle me permettait tout de même, en visant
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LACIBLE
bien et en appuyant le canon sur le rebord de ma fenêtre, d’ajuster l’œil de l’imprudent pigeon qui osait souiller le balcon de ma grand-mère et de l’abattre, au bénéfice du chat qui l’emportait. Je m’en veux aujourd’hui du cri de victoire, impudente et lâche, que mes minuscules succès m’incitaient à pousser d’un corridor à l’autre et qui ne me grandissaient pas aux yeux des miens : non pas qu’ils eussent à blâmer ces actes de salubrité nécessaire, mais parce qu’ils imputaient mes réussites au hasard, tant se multipliaient mes coups manqués. A coup sûr, ces pigeons-là devaient être malades. Pouvais-je seulement prouver que j’avais abattu celui-ci ou celui-là et que le chat ne s’était pas emparé de lui sans mon aide ? Et après tout, ce pigeon, pouvais-je le leur montrer ? Je maudissais leur mauvaise foi et tâchais de prendre ma revanche sur la cible, en francs concours avec Michel. Je n’avais jamais vu de cible pareille et n’en revis jamais. Nous l’avions trouvée soigneusement dissimulée dans un coin du grenier, entre une pile de vieux câbles électriques gainés de chanvre et une accumulation de 78 tours dont les titres évoquaient, entre leurs enveloppes brunâtres, déchirées et poussiéreuses, des gravures antédiluviennes d’opérettes danubiennes et de chansons lestes. Aucun gramophone n’était là pour en restituer les sons et les voix. Les cibles sont rondes. Celle-ci était ovale. Elles sont de carton ou de toile. Celle-ci était en bois parqueté, enserrée dans un cadre à doucine dont le rebord avait été doré. Elle pouvait bien avoir un mètre vingt de hauteur, pour soixante-quinze centimètres de diamètre. Avec des manques et des repeints passablement éteints, elle constituait un vrai tableau qu’on avait sans doute cherché à
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