La madone de Venise
250 pages
Français

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La madone de Venise , livre ebook

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250 pages
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Description

Grand bal à venise. On s'y presse, on s'y bouscule. Américains, Chinois, membres du G20 et altermondialistes... Tous veulent entrer dans la danse du moment : la folle tarentelle endiablée des hydrocarbures. Attirés par l'odeur de naphte, tous s'avancent assoiffés d'or noir et impatients de conduire la danse, la plupart masqués. Du pétrole sous Venise? Qui sait?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2012
Nombre de lectures 18
EAN13 9782296482098
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0950€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Cet ouvrage a été recommandé à la publication par Daniel Cohen ISBN : 978-2-296-55-741-3 Photo : Venise, prise de vue, Patrice Lagrange. © L’Harmattan, Paris 2012
La Madone de Venise
De l’auteur, chez le même éditeur Blues blanc, L’Harmattan,2002.Le Dégustateur, L’Harmattan,2005.Au-delà des chambres de quartz, L’Harmattan,2009.
Patrice Lagrange
La Madone de Venise
roman
L’Harmattan
À Badette À Noëlle
CHAPITRE I
haque mois, à date fixe, le25, le Trésor américain Cgarnissait l’escarcelle suisse d’Olivier. Les fonds arrivaient comme un salaire sur le compte helvète, travail et effort en moins. Ponctuel, le jackpot dégrin-golait dans les coffres de la banque et venait grossir la manne nette d’impôts. La crise des «subprimes» n’y changea rien, les Yankees ouillaient sans réserve son tonneau en perce continue, ils payaient recta. Fatale-ment, tôt ou tard les versements s’arrêteraient, les pa-trons de Langley ne l’avaient pas réveillé depuis plu-sieurs années, depuis l’histoire du trafic d’uranium à Cannes. Et voilà qu’hier il reçoit de l’Agence Centrale le message cryptique, promesse d’action, mission en Italie. – Hé! Olivier! Reviens sur terre, reviens-nous, dit Alex! Descends de ta lune! Lune italienne, fils, «mer de l’Intranquillité», le devoir m’appelle. À l’ombre des grands peupliers, sur les berges de Loire, Olivier Marrow, attablé au Ligérien, sa taverne ordinaire, flanqués de ses trois «Roués» perma-nents, sirote un sancerre un peu trop vert aux arômes de silex éclaté. À leurs pieds le fleuve sombre, ample et puissant, impassible et sauvage, roule des chapelets de tourbillons inquiétants, ils naissent et se perdent au gré du caprice des nymphes fluviales embusquées
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dans les eaux bourbeuses, toujours à l’affût de quel-que nageur téméraire immolé dans la douceur cuivrée d’un après-midi indolent.
Se retrouver, les quatre, en lumière ligérienne au déclin du jour, pensée au fil des eaux lentes et lourdes, jusqu’aux lueurs incertaines du crépuscule. Colloque sporadique… Longs silences… Tous les quatre envoûtés par leur théâtre de prédilection. La paix furtivement les emporte vers l’avancée bleue de la nuit.
Les trois autres savent plus ou moins qu’Olivier, après quelques années de médecine – ils lui donnent encore du «Doc» –, a joué les taupes à l’occasion et qu’il fricote toujours avec les Américains.
Alex, surtout, qui souvent recueille ses confi-dences, le luthier, passé du violon aux guitares, et maintenant un peu lassé des guitares, qui lorgne vers les vielles à roues et même les cornemuses.
Rik, l’infirmier des enfants déficients à l’institut médico-éducatif. Lui, son affaire du moment: la construction d’une gabarre de Loire, ancienne em-barcation à fond plat des mariniers. Son vœu: navi-guer avec ses protégés des«Tilleuls» sur le Pont Ca-nal de Briare. À ses heures, il ne dédaigne pas non plus de se muer en chanteur des «Trolls Filants», leur groupe de rockabilly.
Bob enfin, vigneron philosophe, abandon de sa chaire tourangelle de philosophie depuis une décen-nie, l’appel irrésistible de la vigne, un héritage venu à propos, il vinifie des crus remarquables et conseille Doc pour la conduite de ses quelques arpents de sau-vignon et de pinot. Désormais, il travaille à son édi-
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fice majeur, non pas l’élaboration d’un énième sys-tème philosophique, mais, dit-il, une incursion désin-volte en comédie humaine, errance facétieuse, voire surréaliste, dans la vie des hommes, exercice cepen-dant rationnel, précise-t-il. À l’évidence, de l’ordre du divertissement à résonance pascalienne, intitulé énig-matique:La Galaxie des Poches. – Important voyage d’affaires, mes gueux, re-prend Doc Marrow après un long silence, à Venise. Dès que je serai un peu établi, quand j’auraimes petites entrées chez le Doge et mes charentaises sur le Bucentaure, que diriez-vous d’une croisière sur le Grand Canal? Loire ou Lagune, une histoire d’eau! Vous y serez chez vous. Les trois esseulés, plus ou moins oisifs, verraient plutôt d’un bon œil une fraternelle bordée de mari-niers en Vénétie. Nul ne les enchaîne, présentement leurs «accolures» avec le beau sexe seraient plutôt distendues, conséquence peut-être de leurs errements imbibés habituels sinon d’une vie entièrement disso-lue. L’épouse d’Alex, souvent loin du bercail, court en permanence par monts et par vaux vendre des machines médicales impossibles; Rik, ses enfants des Tilleuls ne lui interdiront pas une séparation momen-tanée; Bob est veuf; quant à Doc, entre deux aven-tures galantes, aucune bien-aimée ne le retient. Quatre célibataires contraints que rien n’amarre.
Un peu à l’écart de Sancerre, au sud-ouest de la col-line, un village entre vignes et forêt, Olivier gare sa
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vieille Volvo dans l’allée d’une longère berrichonne, ancienne ferme basse tout en longueur. Dans son atelier resté ouvert, dernière toile en cours, il n’aura pas le temps de la finir, il sait qu’il ne la reprendra pas à son retour, perception changée, soif d’autres motifs. Peut-être voudra-t-il continuer une place Saint-Marc entreprise sur le site. Encore qu’il n’emportera pas sa palette à Venise... autant barbouiller place du Tertre. Devant lui, aussi d’autres tableaux, esquisses de plu-sieurs paysages lunaires flamboyants, et d’objets très grossis entremêlés, parfois difficiles à identifier. Il retourne les toiles contre le mur et les recouvre d’un drap.
Il est pour franchir le seuil de la longère, une voix dans son dos l’immobilise, anglo-saxonne, nasonnée au possible, un nasique texan: «Rollmops apportera les hot-dogs». Mécaniquement, malgré des années sans contact,ils’entend répondre:«Fitzgeraldles adore».
– Hello, Olivier! Lemmy Spencer, je dois vous briefer sur «l’Opération Saint-Marc». Vous avez été choisi pour votre maîtrise de la langue italienne. Essentiellement une mission de surveillance. Vous partez dans deux jours. Une chambre vous est réser-vée au Danieli. Durée de la mission non précisée, son terme vous sera notifié plus tard en temps voulu.
– Ne restez pas dehors, Lemmy! Entrez. Pourquoi tant de hâte? Auriez-vous un avion en par-tance? Vous accepterez bien une lampée de sauvi-gnon, je parierais que vous n’en dégustez que trop rarement. Vous autres, de l’autre côté de l’Atlantique, laissez trop souvent filer la grâce de l’instant, tou-jours, vous brûlez les étapes, plein pot sans répit,
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