Le Bois des demoiselles
264 pages
Français

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Le Bois des demoiselles , livre ebook

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Description

Sur la place du village, la fête de la Saint-Martin réunit de nombreux jeunes gens : le paysan Micoulaou, qui veut devenir clerc de notaire et rêve d'épouser la belle Emma, une jeune maîtresse d'école ; Guichou, un mauvais drôle placé chez un maître des forges ; Gaston, le colporteur contrebandier ; Mantou, le dompteur d'ours ; Tougne, le conteur qui captive les foules... En ces temps troublés, chacun suivra son chemin plus ou moins agité...

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 6
EAN13 9782812933875
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0029€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Michel Cosem



Le Bois des demoiselles















Originaire de Toulouse, Michel Cosem a tout d’abord fondé la revue Encres vives qui a présenté la plupart des poètes français actuels. Le plaisir d’écrire l’a toujours habité. Il réussit avec bonheur à retranscrire au bout de sa plume son amour de la nature, de l’imaginaire et de l’aventure. Il a publié de nombreux livres pour la jeunesse, romans, essais et autres recueils, dont plusieurs récompensés par des prix littéraires.





Du même auteur

Aux éditions De Borée


Justine et les loups
L’Aigle de la frontière
Les Soleils de la tourmente


Autres éditeurs


À cheval dans les steppes
Ainsi se parlent le ciel et la Terre
Ami de la liberté
Au pays des mille mots
Charlemagne : entre histoire et légendes
Contes de Provence
Contes du Pays basque
Contes traditionnels des Pyrénées
L’Île Pélican
L’or de pharaon
La Colombe et l’épervier
La nuit des naufrageurs
La Patte de l’Ours
La rose rouge du désert
Le Berger des pierres
Le Feu follet de Santa Fé
Le Secret de la déesse Bastet
Les Chevaux du paradis
Les Doigts à l’encre violette
Les doubles territoires
Les neiges rebelles de l’Artigou
Les Oiseaux de la Tramontane
Les Traces sauvages de l’Estelas
Malelouve des terres à brume
Marie Fenoul
Rendez-vous avec Mélusine
Robert Desnos, un poète
Roger de Villerouge









En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage sans autorisation de l’éditeur ou du Centre français d’exploitation du droit de copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris.

© De Borée , 2017
© Centre France Livres SAS, 2016
45, rue du Clos-Four - 63056 Clermont-Ferrand cedex 2









À Robert et Jacqueline Bareille









Nul ne remplacera le cri du corbeau l’appel de l’homme, de la femme le chant de l’alouette parlant à leur pays.

M. C.







Première partie. La fête de Castillon



Pourquoi ces arbres ont-ils ce sourire blanc et cette dentelle sur le ciel de tourmente







I




Ils avançaient tous de front sur le large chemin ouvert par des milliers de sabots de tous les troupeaux de la vallée, à travers les broussailles et les touffes de noisetiers. L’argile un peu humide imprimait maintenant les pas de la jeunesse du pays. Une subtile poussière flottait dans le vent clair. Parfois une chanson, un appel plus fort que les autres, un rire aigu perçaient l’azur de ce beau jour de l’été de la Saint-Martin. Se tenant par le bras, garçons et filles donnaient tout à la fois une impression de légèreté et de puissance, et nul ne pouvait les voir, si rieurs et si heureux, sans avoir la gorge serrée. Quel serait leur avenir ?
Il y avait là les jeunes de Buzan, d’Audressein, d’Orgibet, d’Augistrou, d’Argein : ils couraient tous à la fête de Castillon. Le châle des filles flottait sur leurs épaules, les jupes attrapaient toute la lumière du matin et les garçons avaient d’éclatantes chemises blanches. Ils sentaient tous le rythme des cabrettes dans leurs jambes, et la soif éraillait déjà bien des gosiers.
Le soleil inondait cette bande juvénile et insouciante. Toujours légère et vive, elle se coulait entre les troncs d’arbres, les roches moussues ou les buissons bien taillés par les troupeaux. Comme l’eau de la Bouigane qui jaillissait tout à côté, elle envahissait les espaces dégagés, se resserrait en petites cascades, reprenait souffle parfois pour avancer toujours. Là, il ne s’agissait pas de rejoindre l’Atlantique mais tout simplement la principale ville du canton en fête.
– Vive Buzan ! cria un gaillard plus rapide que les autres, faisant à la manière d’un saltimbanque des sauts de cabri devant tout le monde.
– Vive Aucazein ! répondaient d’autres.
– Vive Argein ! criaient les plus nombreux et les plus turbulents.
– Vive Orgibet !
– Vive Audressein !
– Vive Saint-Lary !
– Vive Bethmale ! cria un grand escogriffe à la peau très brune et aux cheveux droit sur la tête.
Dans les champs en pente, les faucheurs de regain suspendaient leurs gestes ; les bergers ne surveillaient plus leurs bêtes, même les chiens pointaient leur museau et flairaient l’air de la vallée, intrigués par cette joyeuse procession. Un sourire heureux flottait un instant sur le visage buriné des hommes, sur ces fronts quotidiennement attaqués par le gel et le soleil. Oui, la fête, ils l’avaient connue aussi, ils en avaient rêvé, ils s’y étaient battus et enivrés. Les jeunes prenaient la relève, c’était bien normal. Oui, il fallait rire avant de pleurer : c’était ainsi et tous l’acceptaient humblement.
L’automne était bien là. Elle allait donner à la montagne ses plus somptueuses journées. Mais aussi à cause du givre du petit matin, quand le ciel était au plus clair, le bel ordonnancement végétal de l’été était irrémédiablement détruit. Les belles gentianes étaient déjà brûlées et pendaient, lamentables. Le froid s’installerait sur le pays, la montagne du jour au lendemain allait blanchir et cette morsure – les vieux le savaient mieux que personne – allait durer jusqu’à la fin du printemps.
Les jeunes passaient tout près de la chapelle de Notre-Dame de Tramesaygues et, en laissant au pied de la croix quelques petits bouquets, n’avaient guère d’autres soucis que celui d’être le plus rapidement arrivés à Castillon et d’y faire la fête. Il fallait à tout prix s’étourdir, emmagasiner dans le corps mille sensations pour oublier la platitude quotidienne, se saisir des musiques et des paroles à bras-le-corps pour ainsi dire, toute affaire cessante et parfois brutalement, comme si la vie devait s’arrêter juste après. La dureté des jours rendait les jeunes gens tapageurs, goulus, sans mesure. Chacune des fêtes, on le savait bien, se terminait en pugilat, en ivresses scandaleuses, en rancœur, en graine de querelles pour l’avenir. Mais pour l’instant les jeunes de la Bellongue n’avaient qu’une chose en tête : en profiter.
– On va se saouler, chantaient les garçons sur l’air des Sabots de la bergère sont blancs, bleus…
Les filles gloussaient, excitant les plus aventureux, les obligeant à aller encore plus loin dans leur agitation. Congestionnés, essoufflés, certains garçons ne résisteraient pas au premier verre de vin.
– Regardez là-bas !
D’autres jeunes descendaient en courant à travers champs et vinrent se fondre avec ceux de la Bellongue dans les grands prés au pied de Castillon. L’air lui-même était en fête. Des papillons jaillissaient de partout, et l’on entendait toutes sortes de sonnailles, de chants, d’abois de chiens. Un autre groupe venait de Cescau et d’Engomer. Il y eut quelques quolibets d’un village à l’autre et quelques méchancetés ancestrales qui s’ancraient à nouveau dans les mémoires lors de ces rassemblements. Mais pour l’instant la bonne humeur recouvrait tout d’une brume claire et chaleureuse. Il serait temps plus tard de sortir les poings en fer ou les couteaux. Il n’était pas question maintenant d’être triste ou de mâchonner une quelconque rancœur.
Dans les fermes les plus lointaines, au fond des ravines sombres, ou en bordure des prés tout en haut, ces fêtes et ces foires de Castillon étaient attendues avec impatience. Au plus noir de l’hiver, lorsque tout n’était que givre et verglas, on y pensait, on en parlait au coin du feu. Il était bon malgré tout de rêver à ce bruit, à cette chaleur montant de la terre, à ces odeurs de foin et de cidre, à ces cris, à ces rencontres, à ces moments exceptionnels où l’on devait se frotter aux autres et où se ressentaient l’âpreté de la vie, mais aussi les plus suaves plaisirs.
Chacun laissait monter en lui le rythme de la fête et tous se laissaient glisser par petits groupes sur la place un peu bancale qui en était le cœur. On avait tendu entre les platanes des lampions multicolores. Sur les mâts plantés un peu partout, des touffes de houx avaient été accrochées. Contre les maisons, de vastes toiles rouges et jaunes étaient tendues, légèrement gonflées par la brise de la vallée, où étaient regroupés les étals des artisans. Tout en haut la piste de danse, en terre battue, avait été méticuleusement balayée avec des genêts. Tout autour sur des estrades, des tonneaux de vin ou

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