Le Fils caché de la Lune
351 pages
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Le Fils caché de la Lune , livre ebook

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Description

Éric Nataf est médecin, radiologue, auteur de plusieurs livres parmi lesquels Autobiographie d’un virus et Le Mal par le mal, qui ont été de grands succès. Qu’arriverait-il si un être humain naissait sur une autre planète ? Qu’il y passait toute sa vie dans des conditions très différentes de celles de la Terre ? Cet « extraterrestre » mériterait-il encore le nom de Sapiens ? Fin 1972 : malgré le succès technologique d’Apollo 17, l’envoi des missions habitées vers la Lune est abandonné par l’administration américaine. Il reste pourtant, dans les hangars de Cape Canaveral, d’ultimes lanceurs Saturne V flambant neufs. Germe dans l’esprit de Mauser, un personnage au passé trouble, membre éminent de la Nasa, l’idée d’une mission cachée. Le projet est fou. Envoyer dans le plus grand secret, sur la Lune, une tueuse en série promise à la chaise électrique. Détail qui compte : la belle Herma est enceinte. Quel sera le destin de son fils, Abel, qui grandira sur la Lune ? Un thriller scientifique à l’intrigue époustouflante. Une odyssée de l’espace alliant angoisse, horreur, vengeance, inattendu et humour. 

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 19 septembre 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9782738145055
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , SEPTEMBRE  2018 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-4505-5
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
À mes parents.
Prémices

Il m’est difficile de situer le point de départ de cette curieuse expérience qu’est ma vie, aventure insolite en suspension entre deux mondes.
Mon « prélude » trace son sillon bien avant ma naissance officielle. Peut-être tire-t-il ses volutes des conséquences de cette déflagration qu’Ils appellent la « Seconde Guerre mondiale » – je fais bien sûr référence ici à Leur monde. Car de là où j’ai vécu, tout ce tumulte m’a longtemps semblé lointain, dérisoire. Durant la majeure partie de mon existence, je n’ai connu de la planète Terre que son clair, un clair magnifique il est vrai, croissant bleu aux reflets orange suspendu dans le vide, posé dans le noir. Tel un Sapiens dressé par-delà les brumes du paléolithique, j’ai longtemps cru que la boule de couleur était lovée dans la paume de quelque invisible géant.
Ainsi suis-je un humain d’outre-Terre, un colon cosmique. Oui, c’est bien sur ce satellite qui régit les vents, les marées, et les cycles des femmes, que j’ai passé ma plus tendre enfance – tendre est à prendre ici au sens littéral : eh oui ! vu la faible intensité de la gravité à l’œuvre sur mon astre, j’étais tendre, une chiffe molle, un corps flasque et informe. Mais j’interdis à quiconque de se fier aux apparences   ! J’ai été pourvu par mes gènes d’une volonté peu flexible, un farouche désir de vivre affiné par des conditions hostiles. Je suis le fruit malade, le rejeton pervers de la biographie chargée de ma mère et de la cruauté de mon père. Le sentiment d’être un exemplaire unique, un « précieux », m’a sans doute aidé. Ce à quoi il faut ajouter un facteur non maîtrisable et extrinsèque  : la Providence selon certains, la chance pour d’autres, le hasard pour ceux qui restent.
Caressé par l’influence malfaisante des rayons cosmiques, je vécus hanté par la peur des terribles orages météoritiques, caprices du ciel capables de vous déchiqueter le scaphandre le temps d’un battement de cils. Jour après jour, année après année, enfla en mon âme la pulsion de la vengeance, le désir de m’en prendre à ceux qui nous avaient abandonnés à cet exil empli de noir et de poussière soufrée . Les déserts, même d’outre-Terre, forgent les cœurs des hommes, suscitent les prophètes et les mirages.
Ma mère et moi avons été deux bagnards, sans autres matons que les cimes déchiquetées d’un astre mort. Leur administration pénitentiaire nous a exposés à ces impitoyables « conditions techniques », sans autre défense que nos frêles combinaisons. Assis avec Mère sur les bords du cratère qui jouxtait notre base, nous savions bien que nous n’avions aucune possibilité de retour. C’était pour nous une évidence quasi religieuse. La Terre ne nous a jamais été promise. « Ils auraient mieux fait de me tuer là-bas, disait-elle, plutôt que de me condamner à t’élever ici. » Elle donnait des coups de pied rageurs sur le sol, mais l’atmosphère lunaire se moquait d’elle, sa colère se mutait en cabrioles, et la poussière ambiante, ce régolithe à l’odeur de poudre qui nous enveloppait tel un suaire, restait en suspension autour de nous, insufflant une dose de vanité à son courroux.
Elle me disait : « On vient de là-bas », mais elle parlait pour elle-même, car, en ce qui me concernait, mon pays natal, c’était la Lune. La Terre patrie l’avait rejetée et, par voie de conséquence, moi aussi. Un proverbe terrien n’énonce-t-il pas : « Jeter le bébé avec l’eau du bain » ? Le bain, c’était Maman, le bébé, moi, et l’eau du bain, bien sûr, mon propre liquide amniotique.
J’ai pourtant ressenti ma vie durant une nostalgie de cette planète droit devant, une nostalgie d’un genre singulier, une mélancolie à rebours, celle de ne pas y avoir vécu, de ne pas y être né. Je ressentais un étrange sentiment de proximité avec elle. Égaré dans l’espace, déposé là à l’issue d’un mauvais coup de dés, une erreur d’aiguillage, un caprice du destin. Au cours de toutes ces années, la planète bleue est devenue progressivement mon obsession, je suis en exil depuis le jour de ma naissance.
Ce n’est que bien plus tard que j’ai compris que nos deux sphères étaient liées tel un couple mal assorti. Sans celle de la Lune, astre mort installé à la distance adéquate, stabilisé à l’orbite idéale, qui sait si la vie, ce miracle de haute précision, cette convergence d’extravagances, se serait jamais développée sur Terre ? Mon gros caillou s’était sacrifié pour que le vôtre se dote d’un destin. Ne fallait-il pas un juste retour des choses ?
La vie sur Terre
Père

C’est dans la grande salle carrée du tribunal de Nuremberg, cité bavaroise de la grande lessive postcataclysmique, que s’enclenche le processus qui devait aboutir à ma naissance… enfin, naissance, je ne sais pas si le mot convient vraiment. Disons conception.
Mon père – c’est faute de terme plus adapté que je le définis ainsi – était, d’après ce que j’ai pu glaner grâce au cerveau détraqué de ma mère, un sale type, un de ces êtres sans scrupule, un adepte de la science sans conscience auquel le III e Reich allemand a donné toute sa magnificence. Gerhard Mauser était un des bras gauches du tristement célèbre Josef Mengele, médecin sadique mort foudroyé dans sa vieillesse inquiète, lors d’une baignade à Bertioga, São Paulo.
Josef, l’homme au manteau blanc immaculé, avait – c’est bien connu – une fascination pour les jumeaux, qu’il considérait comme un individu unique sous une forme dédoublée : l’une pour s’amuser, l’autre pour faire souffrir.
Mauser, lui, mon père au nom de flingue, avait acquis une compétence particulière pour les manipulations d’embryons, qu’il recueillait à l’issue d’avortements forcés. Les détenues, dont les pyjamas rayés pouvaient à l’occasion se transformer en déshabillés, se faisaient violer par les lieutenants SS, mon père faisait le reste, assassinait le véhicule, récupérait le passager.
C’est sans doute cette spécialité qui lui valut d’être approché par un certain John Herbert, impliqué dans l’opération Paperclip. Cette vaste chasse aux savants « récupérables » avait pour objectif de mettre la main sur les cerveaux nazis ayant acquis des compétences dans le domaine de l’aéronautique. Les États-Unis avaient vu dans le projet V2 l’ancêtre de leur futur lanceur Mercury. Ainsi, derrière les missiles préhistoriques qui semèrent la terreur sur Londres, se profilaient déjà les emblématiques Saturne V, des fusées capables de décrocher la Lune, d’embarquer des charges humaines et de les transporter au-delà de l’attraction terrestre. D’après ce que j’ai pu saisir de l’histoire des hommes, la guerre a toujours servi de booster à l’ingéniosité de Sapiens .
Alors, dans ce contexte spatial, pourquoi avoir choisi de repêcher mon père, dont le lien avec la propulsion des fusées était tout à fait indirect ? Herbert, en visionnaire du présent, pensait que si un jour la science devenait capable d’envoyer des étincelles d’humanité vers des terres lointaines, il faudrait le faire sous une forme embryonnaire, le cas échéant congelée. Bien sûr, les États-Unis ne manquaient pas de spécialistes en fécondité. Mais il devait y avoir chez mon père un truc, comme une ombre portée qui fascinait Herbert. C’était un personnage transgressif, et son air candide avait quelque chose d’étonnant lorsque l’on connaissait ne serait-ce qu’une once de son passé. Aux dires de ma mère, une experte dans la détection des âmes noires, son regard, franc et rieur, ne gardait aucune trace des nombreuses conceptions, par essence non immaculées, auxquelles il s’était livré durant les années de guerre. Que feriez-vous si vous pouviez agir à votre guise avec du matériel humain, comme s’il s’agissait d’un vulgaire ustensile de laboratoire ? Herbert en avait peut-être rêvé, mais mon père l’avait fait. Il avait franchi le Styx et s’était enfoncé très loin dans les steppes de l’innommable. Le pire était que ces savants qui avaient fait sauter les verrous de la morale étaient parvenus à des résultats, à des découvertes. Que faire de ces avancées obtenues en territoire interdit ? Avait-on le droit d’en faire usage ? Que faire des talents qui en avaient été les instigateurs ? Pour peu qu’on soit un adepte de cette science sans conscience, mon père était le spécialiste tout trouvé. Et Herbert avait deviné qu’il ne s’était jamais repenti, qu’il était prêt à se lancer dans de nouvelles aventures en s’appuyant sur celles du passé.
Ainsi, alors que la majeure partie du « recyclage » nazi avait lieu dans les pays d’Amérique du Sud et, dans certains cas particuliers, dans le monde arabo-musulman, Mauser avait été sélectionné par l’entité yankee pour faire partie de l’aventure spatiale. Il n’était pas le seul. Herbert avait importé par voie transatlantique une véritable arche de Noé nazie, à bord de laquelle les animaux étaient maculés de matière grise. À sa manière, la guerre froide, mâtinée de paranoïa maccartiste, était une raison d’État, et peu importait qu’elle s’alimente des cendres encore chaudes de la guerre sale.
L’institut aux mille ordinateurs qui allait devenir la Nasa, encore nommée Naca, était alors une priorité stratégique. La grande salle fourmillant de scientifiques inquiets, destinée à inonder tous les é

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