Le règne de la nuit

Sanga Isidore

Description

Victime d’une machination circonstancielle, Salifou (diplômé sansemploi) père de trois enfants est arrêté par les forces de l’ordre. Sonexistence misérable gangrenée par l’extrême pauvreté et l’injusticesociale, la mort prématurément injustifiée de son dernier enfant etl’infidélité insoupçonnée de sa femme furent des événementsindépendants les uns les autres qui le transformèrent en véritablerévolutionnaire. Au bord du désespoir, il épousa une cause étrangère àses convictions, et devint l’un des fervents héraut du Comité Central dela Révolution, une organisation mise en place par un type sans nom quiambitionnait de renverser le régime en place.Son séjour carcéral est suivi d’un simulacre de procès au cours duquel,il est accusé d’être le principal instigateur de l’infâme complot ourdicontre le régime autoritaire instauré dans son pays. Ses conditionsinhumaines, rudes et humiliantes de détention l’avilissent et ledépérissent. Et c’est perdu dans ses souvenirs que Salifou respiraitprofondément les précieuses dernières minutes de sa vie balbutiante.

Sujets

• Littérature africaine
• Littérature Africaine
• Littérature africaine
• Roman
• Littérature Tchadienne

Informations

• Publié par: Toumai Editions
• Date de parution: 01 novembre 2021
• Nombre de lectures: 79
• EAN13: 9782376701620
• Langue: Français

Extrait

LE RÈGNE DE LA NUIT

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SANGA Isidore

LE RÈGNE DE LA NUIT

Éditions Toumaï L’éditeur de nouveaux talents

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Premi è re é dition: Novembre 2021 à N ’ Djam é na

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Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation reservéepour tous les pays.© By Toumaï Editions, Avenue Taiwan, B.P: 5451 N’Djamena- Tchad, Tél. [phone] Email :[e-mail] ISBN : 978-2-37670-162-0

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« Faire du mal à autrui,c’estfaire du mal à tout le monde. Et faire du mal à tout lemonde, c’est se faire du mal àsoi-même ».

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I Il est des lieux, en des terres, à des heures et des saisons précises en ce bas monde quemarcher relève d’un stoïcisme suicidaire. Au matin, il faut marcher, marcher, et encore marcher telle une obligation ininterrompue, les pieds écorchés par les morceaux de graviers qui, échappésde l’asphalte, pénètrent insidieusement avec dédain et une pugnacité sans pareil dans ce qui peut rester d’une chaussure. Cette chaussure était trouée par le martellement continu de ses pieds sur une longue et interminable route indomptablement. Une fois dans la semaine, et selon le jour arrêté par le service dans lequel il se rendait, Salifou sortait de chez luiavec l’espoir de voir sa peine s’estomper bientôt, et parcourrait ardûment ce trajet coutumier pour atteindre son but. Son but était de trouver dans l’immédiatun emploi. Un emploi pour redonner goût et vie à son être pressé des sensations bienheureuses d’antan. Il se recroqueville, lecœur lourddouleur, de lorsqu’il lorgne ses voisins perdus dans une grâce existentielle. Il voulait trouver une activité légale rétribuée, peu importe laquelle, car la situation dans laquelle il végète est insoutenable. Et aujourd’huiplusieurs années déjà, il sortit de la comme maison avec la conviction inébranlable de happerd’une traitece trajet fantomatique. Il marchad’alluremécanique tel un automate déglingué actionné par une main invisible. Il habitait le quartier Raton, et se rendait au Ministère de la Fonction Publique situé au quartier Allal Li.Pour l’atteindre, il parcourait quinze kilomètres à pieds. Il avait quitté la maison après avoir avalé une pauvre bouillie préparée à la hâte par sa femme, Nafi. Comme de coutume, il entama son pèlerinage en arpentant une route de terre battue qui s’étalait sur trente mètres, avant d’affronterun asphalte chaud couvert de mirages fumants en cette contrée sahélienne semi-désertique. 9

Autant que le paradoxe paraît, il entame le trajet avec une teinte d’appréhension et de frustration dissimulée.En y martelant fébrilementses pieds, il a l’impression qu’à mesure qu’ils’avance, ce trajet se moque de lui, de la forme fourchue de ses pieds, de son haleine puant la sueur, de la constante humeur maussadequi l’accompagne. Et sous l'effet de cette chaleur brulante, opaque, douloureuse, et farouche narguant ses victimes de ses rayons drus et acérés comme une lance en acier jetée par un méchant lutin, vous transperçant le corps de bout en bout. Un corps assaillit par une multitude de ces rayons ne se maintient en éveil et ne se laisse point détourner du but que par un engagement solidement sérieux et un effort constant, considérable. Malgré les efforts déployés, les circonstances désobligeantes de la vie siéent mieux certaines personnes, alors, Salifou ne pouvait aucunement se permettre le luxe imbécile et insolant d’être distraitet emporté un temps soit peu par quoi que ce soit. Fut-ce merveilleuse et émouvante, joyeusement et distrayante, et ou même simplement ennuyeux et éphémère. Mais après avoir parcouru cinq kilomètres, tout devenait en lui et autour delui d’une sérénité harmonique, etl’asphalte moins menaçant. Les mirages composant se soumettaient au rythme des pas qui les martelaient d’une vigoureuse assurance. Les arbres en bordures du trottoir plus reposant et accueillant se disposaient à son allure. Malgré cette chaleur torride, il arrivait à dompter son ardeur par un esprit stoïque d’abandon en se laissant submerger par ses rayons enflammés. C’étaitun trentenaire, père de trois enfants,issu d’une large et pauvre famille villageoise. Comme dans toute communauté, sa famille avait espoir en lui. Un jour, il pourra la sortir de la pauvreté séculaire insupportable qui la tenaille depuis belle lurette. Avant le chamboulement économique, on leur avait dit dans leurs huttes; « pour qu’un enfantdevient un grand homme, 10