Le secret de la mère
199 pages
Français

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Le secret de la mère , livre ebook

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Description

Des jumeaux monozygotes sont séparés à la naissance de façon mystérieuse. Leurs chemins se croisent quelques quarante ans plus tard de façon inattendue sans qu’une rencontre ait lieu. Ils vont s’efforcer de se retrouver et de reconstituer leurs passés respectifs. Avec l’objectif de comprendre pourquoi ils en sont arrivés là.

Informations

Publié par
Date de parution 13 septembre 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9782312046730
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0017€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le secret de la mère
Yves Benoit
Le secret de la mère LES ÉDITIONS DU NET 126, rue du Landy 93400 St Ouen
© Les Éditivns du Net, 2016 ISBN : 978-2-312-04673-0
Chapitre I
Leciel était chargé comme un sac à dos de terroriste : il allait exploser d’un moment à l’autre. Cette année, la saison des pluies était plus longue et dense que d’habitude. Assis à l’une des deux tables de la terrasse du « Roi Belge », à Elibo, sur les bords de la rivière Kasaï, en République Démocratique du Congo, Henri buvait un coca cola tout en lisant « Le Figaro » datant de quelques jours. De temps à autre, il posait son regard alternativement sur les eaux turbulentes de la rivière et sur le ciel menaçant. Le passage du fleuve s’annonçait mouvementé, mais il fallait bien que ce soir, il soit absolument de l’autre côté, au village. « Je m’accrocherai à la vieille barcasse et j’espère surtout qu’elle tiendra le coup », pensa-t-il en jetant un coup d’œil au bateau que l’on était en train de charger. Il lui semblait qu’à chaque colis supplémentaire, il s’enfonçait davantage. « À ce rythme, ils vont finir par le faire couler… J’espère qu’il restera un petit coin pour moi et mon collègue parce que je n’ai guère le choix, il faut que je sois là-bas ce soir ». Il se replongea dans la lecture du journal. Il n’achetait jamais de journal français chez lui, à New York, mais lorsqu’il voyageait, il s’en offrait un quand, au hasard d’une halte dans une agglomération quelque peu occidentalisée, un distributeur multi produits en proposait à la vente entre quelques fruits et légumes, des bibelots de toutes sortes et de toutes origines, neufs ou usés, et un nuage de mouches qui souvent recouvrait le tout. Cela lui suffisait pour se tenir informé de l’évolution du monde en général et de la France en particulier. Il considérait cependant qu’il y avait beaucoup trop de sujets récurrents, « comme si rien ne change sur terre ». Par dérision, il accordait donc une attention toute particulière aux faits divers, aux potins mondains, à la rubrique nécrologique. Et au sport bien entendu, « pour rester en forme ! ». Tout en surveillant d’un œil de plus en plus inquiet le chargement de la « Flèche d’argent », il tournait les grandes pages du journal en parcourant les petites colonnes lorsque, brutalement, il s’arrêta net de lire, leva les yeux un instant, les rabaissa et fixa le visage qui était imprimé : le sien. La coupe de cheveux était différente, un peu plus ordonnée que sa tignasse, mais il ne pouvait avoir aucun doute : à cinquante ans, il s’était suffisamment regardé dans un miroir pour se reconnaître au premier coup d’œil. La photo eut-elle été en couleur, qu’il aurait vu les mêmes yeux bleus que les siens. Il plia le journal, tout en fermant ses beaux yeux bleus, et resta ainsi quelques secondes. Il rouvrit le périodique et les yeux en même temps. Aucun doute, c’était bien lui. Mû par un vieux conditionnement, il se pinça fortement : « aïe ! ». Il ne rêvait pas, c’était sa photo qui était là, au milieu de la douzième page. Il regarda la date du journal : huit août. On était le vingt-deux du même mois. Il était tout aussi certain qu’il n’était pas allé en France depuis belle lurette, dix à quinze ans, peut-être, il ne se souvenait plus très bien. Il lut les quelques lignes écrites sous la photo : « Le professeur Charles de Lastre, astrophysicien de renommée mondiale, a été décoré hier Grand Chevalier de la Légion d’honneur par le Ministre de l’industrie ». Son sosie – toute confusion s’était maintenant dissipée dans son esprit et il avait fini par admettre que ce n’était pas lui – était donc une sommité scientifique. « Il a l’air bien jeune pourtant… environ mon âge… autour de la cinquantaine lui aussi, peut-être un peu moins. » Il ne pouvait détacher son regard de la photo. « Je n’en reviens pas… Ce n’est pas possible une telle ressemblance. Mais j’y pense… » Il approcha le journal de ses yeux : « j’en suis pour mes frais, c’est le mauvais profil. » Depuis sa naissance, le lobe de son oreille gauche était entaillé sur la moitié de la largeur, entaille qui pouvait laisser penser qu’un jour ou l’autre il allait tomber. Et la photo montrait le profil droit, l’oreille gauche étant cachée. « À moi aussi, mon meilleur
profil, c’est le droit », murmura-t-il à voix basse. « C’est incroyable, il faut que j’en sache davantage ». Il regarda l’heure, il lui restait encore un peu moins d’une heure avant le départ du bateau. Il décida d’aller à « l’Internet house », qui se trouvait au milieu du village. « Si c’est quelqu’un de connu, je dois pouvoir trouver des informations le concernant ». En le voyant entrer, le propriétaire du local l’interpella : – Avec tout ce sale temps qu’il fait, je sais pas mon ami si tu vas pouvoir te connecter maintenant. D’autres clients n’ont pas pu depuis ce matin. Mais essaie toujours. Si tu y arrives pas, c’est gratuit. Alors, tu risques pas grand-chose. Henri s’installa devant un appareil qui datait des toutes premières générations d’ordinateur de bureau. Sa première bonne surprise fut lorsque l’appareil s’alluma. – Fais attention, des fois y a des coupures de courant trop fortes et tout part », lui dit le spécialiste en informatique, confortablement avachi dans un vieux fauteuil recouvert d’une toile de Jouy anciennement rose. Les minutes passaient sans que la moindre connexion n’apparaisse possible. Au loin, la sirène du bateau se fit entendre : le départ était imminent. En se dépêchant, il ne lui faudrait guère plus de cinq minutes pour rejoindre l’embarcadère. « Le bateau aura sans doute un peu de retard, comme d’habitude et Ron se débrouillera pour que le rafiot ne parte pas sans moi ». Dix minutes plus tard, un deuxième coup de sirène sembla vouloir lui indiquer que ce jour-là, malheureusement, le bateau partirait à l’heure. C’est alors que la connexion se fit de façon tout à fait inattendue. Il passa sur Google le plus vite qu’il put, inscrivit « Charles de Lastre » et lança la recherche. Quelques secondes passèrent et apparut une liste de plusieurs références. Compte tenu du peu de temps qu’il lui restait, il ne pouvait les parcourir toutes et en choisit une, au hasard, qui lui semblait très générale. Elle tardait à venir. Retentit alors le troisième et habituellement dernier coup de sirène. Il ne pouvait plus attendre. Il tapa sur la table pour faire avancer les choses et, apparemment, cela marcha puisque la page recherchée s’afficha à l’écran. C’était bien la même personne que celle qui était en photo sur le journal. Il déroula la page web, en lisant en zigzag et vit une nouvelle photo, cette fois-ci du profil gauche : le lobe de l’oreille était bien entaillé, comme le sien. Parfaitement identiques. « Incroyable ! » . De la biographie, il retint que c’était un grand scientifique. Il ne referma pas l’ordinateur, prit son sac et partit en courant après avoir posé à la va-vite un billet de dix dollars sur le comptoir de l’« Internet House ». Il fut le dernier à passer le pont précédé de Ron qui l’avait attendu au pied de la passerelle.
Chapitre II
Lelendemain, on pouvait lire en page quatre du « Le Figaro » : « Tragique naufrage en République Démocratique du Congo. Selon un bilan provisoire des autorités locales, cent trente-huit personnes ont trouvé la mort mercredi dans le naufrage d’un bateau sur la rivière Kasaï, dans l’ouest de la République Démocratique du Congo (RDC) . Le bateau transportait des marchandises ainsi que des passagers. Les naufrages sont fréquents sur cette rivière, le plus souvent à cause de la surcharge des embarcations et de l’inexpérience des pilotes. D’après les premières informations, il n’y aurait aucun survivant. Un américain et un français seraient parmi les victimes. »
Chapitre III
Charles était tout seul à la table du petit déjeuner, dans le bow-window du salon de son hôtel particulier de Neuilly-sur-Seine, face au bois de Boulogne. En cette fin d’été, il faisait un temps splendide à Paris. Il était huit heures. Tout en dégustant les toasts qu’il avait, selon son habitude, largement recouverts de beurre allégé et de confiture de figue, il feuillait « Le Figaro », en tournant les pages à intervalles réguliers, comme un métronome. Brusquement, il ressentit la même douleur qu’hier lorsqu’il avait perdu connaissance. De l’avis de son médecin, cela n’avait été qu’un léger évanouissement, de type vagal, rien de bien grave, – cela lui était déjà arrivé lorsqu’il était plus jeune. La veille, on l’avait assuré que cela ne devait pas se reproduire et, encore moins, laisser de séquelles à condition de suivre scrupuleusement la prescription médicale. Mais là, soudainement, les mêmes symptômes apparaissaient. Il laissa tomber le toast dans son assiette, lâcha le journal et s’agrippa à la table. Son regard continuait à fixer la troisième colonne de la quatrième page du journal : « Tragique naufrage en République… ». Il transpirait abondamment, commençait à trembler, et plus il tremblait plus il s’accrochait à la table jusqu’à en avoir mal aux doigts, aux poignets, aux bras, aux épaules, au corps ! Il était tétanisé. Il ne lâchait pas prise parce qu’il savait que s’il le faisait, il s’écroulerait. Il ferma les yeux, serra les dents et attendit que ça passe. Heureusement, Louise, la domestique, n’était pas là. Il était tout seul dans ce lieu si convoité de Paris, un beau matin d’août. Ses pensées virevoltaient d’un horizon à l’autre, sans ne s’accrocher à rien de concret, comme des bulles d’air mues par un souffle incontrôlé. Il avait vaguement à l’esprit, très vaguement, que ça allait nécessairement passer. Il rouvrit les yeux, lentement, très lentement, en tenant d’abord les paupières mi-closes afin de laisser pénétrer en douceur les rayons de soleil. Il relut l’article de journal : « Tragique… ». Il referma les yeux durant quelques secondes à peine et les rouvrit. Il lâcha la table, posa les mains sur ses cuisses et regarda droit devant lui. Peu à peu, le flou le devint moins, et les objets occupant son environnement familier redevinrent nets. « La bourrasque est terminée. Jusqu’à la prochaine fois ». Après un temps de réflexion, il décida de remettre à plus tard la lecture du journal. Louise apparut : « Monsieur veut-il quelque chose d’autre ce matin ? Des œufs ? Du bacon ? – Non merci Louise, ça ira comme ça. Je termine mes toasts et je disparais aussitôt. J’ai un rendez-vous à neuf heures. Madame est réveillée ? – Je ne crois pas. Pour le moins, je ne l’ai pas entendue. – Merci Louise. – Avec plaisir Monsieur. Si vous n’avez donc besoin de rien, je vais attaquer le ménage. – Tout à fait d’accord Louise, attaquez le ménage. Depuis une quinzaine d’années qu’elle était à leur service, le petit déjeuner se déroulait en semaine toujours de la même façon : un rituel matinal, pratiquement sans exception ni modification. Et Louise finissait toujours par aller « attaquer » le ménage. – Que Monsieur passe une excellente journée. – Je m’y efforcerai, Louise, je m’y efforcerai.
Chapitre Iv
CharlesDe Lastre était Docteur en physique nucléaire, Directeur de recherche au CNRS et astrophysicien. Il représentait la France dans le projet « Voie Lactée ». C’était dans son domaine de compétence un scientifique mondialement connu, mais pas toujours reconnu. Ses découvertes et hypothèses de travail ne faisaient pas l’unanimité dans le microcosme mondial de sa spécialité. Il n’en avait cure et continuait sa démarche scientifique comme il l’entendait. Il pouvait se le permettre, car sa situation familiale le mettait à l’abri de toutes les contraintes financières personnelles, « à condition de rester raisonnable… », ce qu’il était. Seuls le préoccupaient sur ce plan-là, les financements liés à ses propres travaux de laboratoire, mais jusque-là il avait réussi tant bien que mal à mobiliser les fonds nécessaires. Ses recherches le passionnaient. Il y consacrait tout son temps disponible, au détriment – il le reconnaissait bien volontiers – de sa vie familiale. Sa femme, Laure, ne cachait pas qu’elle se considérait quelque peu délaissée et ses deux enfants Julie et Paul – « le choix du roi, fille et garçon » – le voyaient en coup de vent. Il lui semblait cependant que les deux considéraient que c’était même trop tant ils ne tenaient pas en place, menant une vie pleine et intense et, pour ce qu’il en savait, saine et équilibrée. Il ne culpabilisait donc pas. Mais, sans doute, était-ce là un préjugé de confort, puisque, en fait, il n’en savait rien. Peut-être se comportaient-ils en affreux dépravés, sniffant et re-sniffant à tout venant un produit quelconque que leur argent de poche leur permettait de s’acheter. « Je ne crois pas ». Aucun des deux cependant ne semblait vouloir suivre sa trace. Ils souhaitaient s’orienter plutôt vers la filière littéraire et, chacun à son tour, ils lui avaient vaguement reproché en toute ingénuité de jouer avec le feu : sa corporation finirait bien un jour par faire « péter » la terre. « Ça leur passera ». Ce qui était un peu plus gênant, – mais, au fond, guère plus – c’est que son épouse le trompait. Il le savait et ça se savait. Bien entendu, c’était de sa faute, on ne trompe pas quelqu’un sans raison. Et même si le coupable est toujours l’autre, en l’occurrence c’était bien lui. Elle était la victime, passant des instants délicieux de souffrance dans les bras de ses amants parce que son mari – « que j’adore, soyez-en assuré ! » – ne faisait pas ce qu’il fallait pour qu’elle se réalise pleinement, comme Dieu l’avait voulu, dans sa condition de femme. Elle avait des manques, elle en souffrait et elle avait donc de temps en temps recours à des thérapeutes bénévoles : c’était bien le moins qu’elle puisse faire et il eut été indécent de la part de Charles de se plaindre. « À qui la faute ? » lui avait-elle dit un jour. L’argumentation sur ce chapitre étant épuisée depuis la préhistoire de l’humanité, il n’avait pas insisté. Elle n’en restait pas moins pour cela une épouse charmante, une maîtresse de maison impeccable, une amie et une amante remarquables, et enfin une mère attentive dans le peu d’espace que lui laissaient les enfants. « Tout cela n’est pas bien grave… ». Au début, son amour-propre avait été meurtri, sa fierté d’homme bafouée et puis, comme d’habitude, le temps faisant son œuvre, il s’en était accommodé. Tous leurs amis étaient surpris, voire peut-être choqués, qu’une ambiance faite d’admiration, de respect et de complicité partagés, règne ouvertement dans leur couple. Laure avait même trouvé une formule dont elle n’était pas peu fière et qu’elle trouvait parfaitement adéquate : elle ne confondrait jamais la bagatelle et sa bague à elle. Lorsqu’elle l’avait exprimée pour la première fois à haute voix, au cours d’un dîner en tête à tête passablement arrosé, il avait souri alors qu’elle soutenait son regard. « Tu mènes ta vie comme tu l’entends ma chérie, pourvu que tu sois là quand j’ai besoin de toi. » Remarque à laquelle elle avait répondu immédiatement : « tu sais que tu pourras toujours compter sur moi. » Les choses avaient
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