Les Malgré Nous
205 pages
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Les Malgré Nous , livre ebook

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Description

Au cours de la deuxième guerre mondiale, trois adolescents, jeunes fuyards poursuivis l’un par la gendarmerie vichyste et l’antisémitisme français, l’autre par la milice française et le troisième par l’armée allemande se réfugient dans une cabane à l’abandon. Roger est juif, Christian est catholique, Samir est musulman. Ils forgent un lien solide en découvrant que chacun d’eux se trouve dans une précarité semblable et que leurs trois religions ont plus en commun qu’ils ne l’auraient imaginé. Ensemble ils parviennent à rejoindre la Résistance, avec laquelle ils participent jusqu’à la libération à des opérations contre les occupants. À la libération, tous trois se perdent de vue. Bien des années plus tard, au hasard d’une rencontre dans un café, deux d’entre eux se retrouvent et font le bilan de leurs expériences. Bien que ce soit un ouvrage de fiction, ce récit est basé sur des faits historiques: la mutinerie d’un bataillon musulman de Waffen SS à Villefranche de Rouergue en septembre 1943.

Informations

Publié par
Date de parution 17 février 2014
Nombre de lectures 1
EAN13 9782312020228
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0012€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les Malgré Nous
Jean-Pierre Angel
Les Malgré Nous
















LES ÉDITIONS DU NET 22, rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes
Vous pouvez contacter l’auteur : jpangel01@gmail.com


© Les Éditions du Net, 2014
ISBN : 978-2-312-02022-8
A Corinne Angel, ma mère qui a su me guider et me garder sa confiance, de près comme de loin.
À Andrea Leers, qui toujours m’inspire, me soutient et étend mon horizon .
Villefranche-de-Rouergue est une bastide moyenâgeuse du XIII e siècle, campée entre Rodez et Cahors, au bord de la rivière Aveyron. C’est une sous-préfecture bourgeoise du sud-ouest qui a su conserver, tout l’attrait de son architecture médiéval. Le centre de la bastide est un réseau d’étroites ruelles en pente qui descendent jusqu’à l’Aveyron
Le cœur de la petite ville est la place Notre-Dame. L’impressionnant clocher fortifié de l’église que l’on nomme la Collégiale domine la place. Il surplombe les toits de tuile de la ville et toute la région environnante. La place est encadrée d’arcades surmontées de demeure de style gothique flamboyant ou Renaissance. Le jeudi, jour de marché, l’endroit résonne des accents chantant du sud, des conversations en occitan des fermiers, et des gloussements de volailles.
Une suite de boulevards sur l’emplacement des anciens remparts forment un tour de ville. Deux ponts de pierres enjambent la rivière pour atteindre la place de la République et la gare du chemin de fer.
La région du Rouergue était alors un pays rural et pauvre, imprégné de traditions rustiques. La mentalité aveyronnaise, bien qu’individualiste et conservatrice, était principalement catholique. Au moment de l’armistice, en juin 1940, on y a choisi de faire confiance au maréchal, puis la vie a repris.
Pendant l’exode, la petite ville de 9,000 habitants s’est vue soudain enfler de plus de 2,000 replacés , comme on appelait alors les réfugiés. Il y avait parmi ceux-ci, des juifs qui se cachaient en cherchant à faire oublier leurs origines.
Avec le gouvernement installé à Vichy, la religion catholique avait retrouvé la place d’honneur d’où elle avait été détrônée par la poursuite de la laïcité. L’enseignement religieux refaisait partie de l’enseignement public. Aux côtés de la photo du maréchal, le crucifix réapparaissait aux murs des classes, et des bâtiments publics. Comme ailleurs, on rejetait le blâme des effets de l’occupation sur les communistes, les juifs et les francs-maçons. On accusait aussi les instituteurs, ces défenseurs farouches de la laïcité. Il n’était plus question de liberté, d’égalité et de fraternité. La nouvelle devise du gouvernement de Pétain, qui voulait imposer ses idées étroites était : Travaille, Famille, Patrie . On affirmait que la principale cause du manque de natalité était l’insuffisance de religion. Les lois sur l’avortement et contre le divorce étaient renforcées de manière outrancière. L’adultère n’était plus un motif qui obligea un juge à prononcer le divorce. On guillotinait les faiseuses d’anges , ces femmes qui pratiquaient des avortements clandestins. Les pères de familles nombreuses étaient cités en exemple, on dénonçait l’égoïsme des couples sans enfants.
C’est à Villefranche que le destin devait occasionner ma rencontre de deux jeunes gens, chacun de culture, de religion et d’origine différentes. Chacun dressé contre les autres ou poursuivi pour en finir à se dissimuler de peur d’être saisis par les autorités et d’être condamnés et peut-être mis à mort.
L’un de ces trois fugitifs était Samir Sul č i ć , jeune musulman Croate enrôlé de force dans la Waffen SS, qui devait devenir mon ami le plus proche ; Christian Pucheu le second, était un jeune catholique français, enrôlé dans la Milice vichyste et deviendrait mon compagnon de misères ; et enfin moi-même, Roger Weil, jeune juif cachant ses origines de crainte d’être arrêté par les polices françaises ou allemandes et envoyé dans un camp de concentration puis vers une destination alors inconnue.
**
*
Samir – Villefranche de Rouergue, 18 Septembre 1943
Au collège de Villefranche où les recrues croates récemment arrivées sont cantonnées, on a entendu au milieu de la nuit des coups de feu venant de l’extérieur. Inquiets, les soldats eurent du mal à se rendormir. Aux premières lueurs de l’aube, un des jeunes soldats s’est précipité dans le dortoir où dormaient Milan, Samir et les autres. Il a annoncé en criant :
– Ils ont tué les officiers ! On est libre ! Faut partir, mais faut faire vite !
Surexcité, le nouvel arrivant explique, que les officiers allemands qui logeaient à l’hôtel Moderne, avaient été assassinés dans la nuit par un petit groupe de soldats croates.
Perplexes, les troufions se regardent, et la tête encore embuée de sommeil, ils s’efforcent d’analyser la situation. Que faire : Attendre ici ? Partir, mais pour aller où ? Les hommes se sentent embringués dans une sale histoire. Ils débattent du pour et du contre. Il y a ceux qui sont d’avis qu’il faut attendre pour voir comment les événements vont se développer. Ils soulignent que portant l’uniforme allemand et ne parlant pas le français, il vaut mieux ne pas bouger.
– D’autres officiers allemands vont venir de Millau pour s’occuper de nous. Raisonnent ceux-ci. Et puis, l’iman, qui loge à l’hôtel est sûr de venir nous dire ce que nous devrons faire.
D’autres veulent se sauver.
– Si on reste, on va payer ! Les responsables sont déjà loin, dit l’un. Il faut s’enfuir.
– C’est vrai, renchérit un autre. De la manière dont ils nous traitent, ils vont s’imaginer qu’on est de mèche avec les meneurs et se venger sur nous. Ils vont tous nous tuer !
Un petit groupe se prépare déjà à s’enfuir.
–. J’ai fait la connaissance d’un français, dit l’un , On faisait des signes pour se parler, il était sympa. Je vais lui demander de me cacher.
Milan et Samir se concertent.
– Tuer un officier est passible de la peine de mort ! Dit Milan. Il suffit qu’un seul officier ait été tué et nous y passons tous. Allez, prépare-toi, on file !
Quelques uns parmi les jeunes enrôlés SS ont déjà gagné la cour. Les deux amis les observent à travers les carreaux. Ils les voient se glisser à l’extérieur par une fenêtre du rez-de-chaussée sans qu’ils ne soient importunés. Il est encore trop tôt pour que la sentinelle de garde ne prenne son poste. Samir et son ami s’habillent en vitesse. Ils n’emportent que quelques effets sous le bras et s’aventurent prudemment jusqu’au dehors du collège. L’avenue est déserte. Ils prennent à droite, la direction opposée à celle de l’hôtel Moderne. Ils pressent le pas en baissant la tête. Leur intention est de gagner la campagne. Ils ont peur. Le jour commence à poindre au dessus des toits.
Les deux garçons s’engagent dans une rue déserte. Ils se mettent à courir lorsqu’ils entendent des pas. Ils se glissent dans une ruelle étroite où les maisons s’agglutinent les unes aux autres. Ils essayent une porte puis une autre. Elles sont verrouillées. Une troisième cède. Ils s’y engouffrent et se dirigent à tâtons dans l’obscurité. C’est une cage d’escalier qui par derrière donne sur une courette. Les deux garçons s’y engagent. Des barils sont empilés contre un mur. Les deux amis s’accroupissent entre les tonneaux. Mais ils ont fait du bruit, une fenêtre s’ouvre à l’étage. Une voix de femme appelle à plusieurs reprises :
– Qu’est-ce que c’est ? Y’a quelqu’un ?
Les fuyards restent muets. Des pas se font entendre dans l’escalier puis quelqu’un frappe sur une porte. On entend des chuchotements. Quelqu’un ouvre la porte sur la rue et sort en courant. Samir a le temps d’entrevoir une femme enveloppée dans une robe de chambre. Un instant plus tard elle revient accompagnée d’un homme. Sans un mot, ils fouillent la cour. L’homme surprend le regard noir et apeuré des deux soldats qui, accroupis au sol, le fixent des yeux.
– Ben qu’est ce que vous faites là ? demande l’homme.
Les deux soldats se relèvent en silence.
– Monsieur, commence Samir en un français maladroit et fortement accentué. Nous sommes Croatie. Pas allemands, il faut des habits, s’il t

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