99
pages
Français
Ebooks
2017
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Ebook
2017
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Publié par
Date de parution
11 octobre 2017
Nombre de lectures
0
EAN13
9782764434574
Langue
Français
Publié par
Date de parution
11 octobre 2017
Nombre de lectures
0
EAN13
9782764434574
Langue
Français
Du même auteur
Fausses notes , Éditions de Mortagne, 2013.
Tempête dans la famille. Les enfants et la violence conjugale , en collaboration avec Isabelle Côté et Jean-François Vézina, Éditions de l’Hôpital Sainte-Justine, 2005.
Projet dirigé par Marie-Noëlle Gagnon, éditrice
Conception graphique : Nathalie Caron
Mise en pages : Pige communication
Révision linguistique : Line Nadeau
En couverture : photomontage réalisé à partir des oeuvres de
SensorSpot / istockphoto.com et Jag_cz / shutterstock.com
Conversion en ePub : Nicolas Ménard
Québec Amérique 7240, rue Saint-Hubert
Montréal (Québec) H2R 2N1
Téléphone : 514 499-3000, télécopieur : 514 499-3010
Nous reconnaissons l'aide financière du gouvernement du Canada par l'entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d'édition.
Nous remercions le Conseil des arts du Canada de son soutien. L'an dernier, le Conseil a investi 157 millions de dollars pour mettre de l'art dans la vie des Canadiennes et des Canadiens de tout le pays.
Nous tenons également à remercier la SODEC pour son appui financier. Gouvernement du Québec – Programme de crédit d'impôt pour l'édition de livres – Gestion SODEC.
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Dallaire, Louis-François Les rêves de quelqu’un d’autre (Latitudes)
ISBN 978-2-7644-3455-0 (Version imprimée)
ISBN 978-2-7644-3456-7 (PDF)
ISBN 978-2-7644-3457-4 (ePub)
I. Titre. II. Collection : Latitudes (Éditions Québec Amérique).
PS8607.A463R48 2017 C843’.6 C2017-941119-5 PS9607.A463R48 2017
Dépôt légal, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2017
Dépôt légal, Bibliothèque et Archives du Canada, 2017
Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés
© Éditions Québec Amérique inc., 2017.
quebec-amerique.com
Pour Lyne, celle grâce à qui les miens se réalisent.
Tout allait comme d’habitude dans ma vie, ni vraiment bien ni vraiment mal. Puis, je me suis retrouvé coincé dans les rêves de Mathieu – ou plutôt dans le rêve de Mathieu – et tout a déraillé.
Au début, je n’en ai pas fait de cas, du moins pas la première fois. L’analyse des songes, les processus inconscients, la représentation allégorique de mes pulsions et désirs latents… Que tous ceux qui vivent de ces salades me pardonnent, mais, pour moi, c’est un charabia d’une inutilité incontestable. Si vous rêvez de votre emploi, c’est qu’il est temps de prendre des vacances. Si vous rêvez de votre grand-mère, c’est qu’elle vous manque depuis son trépas. Si vous rêvez qu’un troupeau d’antilopes gambade dans votre maison, c’est que vos enfants vous ont imposé un soixante et unième visionnement de cet insupportable Roi Lion de Disney. Et si vous rêvez que Kate Bush vous invite à monter sur scène pour interpréter Wuthering Heights avec elle, c’est que vous êtes drôlement mal informé, puisqu’elle n’a pas chanté ce vieux succès sur les planches depuis 1979. Les rêves ne veulent rien dire de plus que ce qu’ils dévoilent a priori , voilà tout.
Enfin, c’est ce que je croyais.
D’entrée de jeu, je dois préciser que je fais deux catégories de rêves. La première catégorie, d’une portée symbolique assez limitée, est celle où je révise mon quotidien, ni plus ni moins. Des futilités reflétant l’affligeante banalité de mon existence. Bon, j’admets qu’il y a bien un ou deux rêves érotiques qui me permettent de faire des trucs que je n’oserais jamais demander à ma femme – et que je n’ai d’ailleurs pas réellement envie d’expérimenter –, mais, dans l’ensemble, j’ai toujours considéré que les rêves avaient la même fonction que la touche Supprimer d’un clavier d’ordinateur : on y liquide le trop-plein de la journée, voire de la semaine en cours, question d’éviter l’encombrement psychique et de passer à autre chose. Un grand ménage d’idées et de sensations accumulées, en somme.
Les rêves de cette première catégorie sont d’une simplicité enfantine, ce qui explique probablement ma capacité à me souvenir d’eux dans leurs moindres détails. J’ai d’ailleurs longtemps supposé que tout le monde possédait cette aptitude, pour réaliser, à ma grande surprise, que ce n’était pas le cas. Certaines personnes ne retiennent qu’une infime fraction de ce qui se passe dans leur tête lorsqu’elles ferment les yeux, tout comme elles ne se rappellent qu’une petite partie des bouquins qu’elles ont lus ou des films qu’elles ont vus au cours de leur existence. D’autres ne se remémorent que leurs cauchemars, et il y en a même qui disent ne pas rêver, que leurs nuits ne sont qu’un fondu au noir, un rideau tombant à l’entracte et attendant le lever du jour pour se déployer de nouveau.
Selon la croyance populaire, l’absence totale de rêves mène à la folie, l’esprit ne pouvant survivre sans ce mécanisme d’autorégulation. Or, dans mon cas, avec le temps, j’en suis venu à me demander si ce n’était pas plutôt l’inverse.
À cause de la seconde catégorie de rêves.
Ceux qui ne sont pas les miens.
Ceux dans lesquels je ne devrais pas me retrouver.
Êtes-vous déjà entré par accident dans la mauvaise chambre d’hôtel ? Vos pas vous entraînent machinalement vers une porte quelconque, que vous poussez sans réfléchir et que vous franchissez, puisque quelqu’un l’a laissée déverrouillée et que vous êtes trop absorbé dans vos pensées pour faire la différence. Il ne vous faut que quelques secondes avant d’être assailli par le doute, par un vague sentiment qui vous indique que les choses ne sont pas à leur place, pour ensuite constater que le décor qui vous entoure n’est pas celui auquel vous vous attendiez, voire – dans le pire des cas – qu’il est habité par des individus qui ne sont pas ceux que vous deviez retrouver. Vous en arrivez rapidement à la conclusion que cette chambre d’hôtel n’est pas la vôtre, que l’on ne vous y a jamais invité, que vous ne devriez pas être là et qu’il y a peut-être même quelque chose de dangereux à errer en ces lieux. Et bien que vous ressentiez un certain malaise à la vue de cette intimité à laquelle vous n’auriez jamais eu accès si votre main s’était posée sur la bonne poignée, votre regard ne peut s’empêcher d’embrasser brièvement ce panorama qui ne vous est pas destiné – une valise ouverte sur le lit, un roman traînant sur la table de nuit, des bas-culottes suspendus au plafonnier pour sécher, une bouteille de scotch à moitié vide, une paire de mains agrippant avec force un postérieur dénudé. Vous refermez la porte en hâte, en marmonnant des excuses polies, et réintégrez vos quartiers, en vous assurant – deux fois plutôt qu’une ! – de ne pas commettre la même bévue, abasourdi par votre distraction et prêt à envisager l’une de ces médications réservées aux gens dont l’inattention est pathologique.
Dans ces rêves – ceux de la redoutable seconde catégorie –, je me retrouve dans des lieux dont j’ignore tout, avec des personnes que je ne connais pas. Je suis un intrus dans les rêves de quelqu’un d’autre, des rêves qui ne m’appartiennent pas et qui n’ont pas été conçus pour être partagés avec moi.
Pour ne rien vous cacher, je dois avouer que ça n’a rien de très excitant. Parce que ces rêves-là me laissent avec l’horrible sensation d’être le violeur involontaire d’une victime aussi inconsciente que non consentante, d’être entré par effraction dans les chambres d’hôtel les plus intimes qui soient, celles qui contiennent des secrets, des remords, des fantasmes, des projections provenant tout droit de quotidiens qui ne sont pas le mien. Certaines des images qui peuplent les cerveaux lorsqu’ils sont sous l’emprise du sommeil n’ont rien d’une sinécure et il n’est peut-être pas si étonnant, au fond, qu’autant de gens ne se souviennent pas de leurs rêves. Les pires ? Ceux où je me retrouve aux côtés de pauvres bougres en chute libre ou qui s’épuisent à chercher quelque chose ou quelqu’un sans jamais mettre