Meurtres à Adarassane
128 pages
Français

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Meurtres à Adarassane , livre ebook

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Description

Exilée loin de Casablanca et de son commissariat pour raisons disciplinaires, Assia se retrouve dans un petit poste où, lui assure-t-on, il ne se passe jamais rien. Car ici, ce n'est pas Darbida, lui serine-t-on. Désorientée dans une société rurale si différente de celle de sa grande ville natale, elle tente de s'insérer dans une équipe masculine où son chef ne voit les agents du sexe feminin. Mais voilà qu'une jeune fille violemment agressée disparaît de l'hôpital et que des petits garçons sont portes disparus. Une occasion de prouver son savoir-faire et de gagner une promotion qui lui permettra de retourner dans sa famille et sa ville natale ? Têtue, elle va tout tenter, malgré les ordres, pour résoudre ces affaires.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2016
Nombre de lectures 3
EAN13 9789954214633
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Meurtres à Adarassane
Editions
Du même auteur
• L'Esclave d'Amrus,l’Harmattan 1992. • Fatoum, la prostituée et le saint,l’Harmattan 1998. • Mbark et Juliette, le mystère des colons allemands,l’Harmattan 2006. • La première enquête de Mbark,nouvelle, Editions Marsam,  Côté Maroc tome 6, 2009. • La maison de Mama Ghoula,roman,Editions Marsam, 2010. • Les petites lles et l'oued,roman,Editions Marsam, 2012. • Le mot magique,jeunesse,Editions Marsam, 2015. • L'orange de l'ogresse,jeunesse,Editions Marsam, 2015. • Meurtres à Adarassane,roman,Editions Marsam, 2016.
© Editions Marsam - 2016 Ateliers : 6, rue Ahmed Rifaï (Près place Moulay Hassan ex. Pietri) Rabat Bureaux : 15, avenue des Nations Unies - Rabat Tél : 05 37 67 40 28 - Fax : 05 37 67 40 22 e-mail : marsamquadrichromie@yahoo.fr
Compogravure flashage Quadrichromie
Impression Imprimerie Bouregreg
Dépôt légal : 2016 MO3228 I.S.B.N. : 978-9954-21-463-3
Dounia Charaf
Meurtres à Adarassane
Editions
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Pour Malika et Mohamed qui m’ont fait redécouvrir en profondeur cette magniIque région d’Ouarzazate qui leur est si chère, bien loin des clichés touristiques.
Ce récit, bien que basé sur des réalités sociologiques, est une simple ction dont tous les personnages sont imaginaires.
Couverture
Pour ma tante Fatna, Restée Idèle à cette terre où elle a fondé une si belle famille.
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Meurtres à Adarassane
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La lumière de l’après-midi tomba sur son coude et un rayon de soleil, glissant par la fenêtre du petit commissariat de circonscrip-tion, jeta sur la couverture de son livre un reet aveuglant. Le jeune brigadier en civil repoussa le roman vers l’ombre et considéra avec lassitude les papiers sur lesquels il travaillait. Reposant son stylo, il saisit le livre qui s’ouvrit de lui-même à la page qu’il relisait depuis si longtemps qu’il pouvait se la réci-ter en italien et en berbère. Le« Baron perché »d’Italo Calvino éveillait en lui non pas des images de forêts, mais la sensation de leur ombre, de leur fraîcheur, de la rugosité des écorces de leurs arbres. Et surtout cette lecture abattait les murs obscurs de son bureau, et il se sentait marcher dans la brise et le bruissement des feuilles, dans leur ombrage ensoleillé. Voulant tester une traduction du passage, il se mit à griffonner sur une demi-feuille, une tentative de traduction en berbère tachelhit. A l’extérieur, le bruit d’une voiture ralentissant dans la pous-sière, et celui de son moteur qui rone en s’arrêtant, l’odeur de cette poussière mêlée au gaz d’échappement qui entrait, le tirèrent de sa concentration. Il leva le visage et vit une femme, plantée au milieu du commissariat, le visage à contre-jour. Sans doute venue se plaindre. Ait Hassan regarda autour de lui d’un air absent, cherchant la présence d’un collègue. Mais Assia et Oumoussa étaient partis au café. La femme s’avança en suppliant. Il corna la page de son livre, le referma sans hâte, puis le glissa dans sa poche de chemise, avant de lui demander poliment : — Bonjour madame, que veux-tu ? Encouragée, elle s’approcha jusqu’au bureau. — Bonjour, je cherche ma lle.
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— Tu cherches ta lle, reprit-il avec prudence, pourquoi cherches-tu ta lle ? — Elle n’est pas rentrée depuis deux jours maintenant, depuis lundi. — Et tu la cherches seulement aujourd’hui ? — Oui, mon ls, répondit-elle, ayant jaugé l’âge du policier à présent qu’elle le voyait de près, je t’en prie. Je suis terriblement inquiète, j’ai peur pour elle. Le brigadier se redressa et recula sa chaise qui grinça sur le vieux carrelage. Il tapota sa poitrine, caressa la tranche du livre dont le papier très sec était devenu rêche au toucher. Puis il saisit un épais cahier qu’il ouvrit. Le travail est bien rare à Adarassane, si rare que le jeune homme dut se secouer pour accomplir la procédure régle-mentaire. La femme, en face de lui, lui parut âgée, mais en l’obser-vant, il décida qu’elle n’était pas si vieille, en tout cas pour l’état civil. Une femme comme elle pouvait avoir une lle mariée ou une llette tout juste en âge de fréquenter le jardin d’enfants. — Quel âge a ta lle ? — Son âge... hésita-t-elle. — C’est une petite lle ? précisa-t-il pour l’aider. — Non...Non... C’est une jeune lle.
L’expression qui passa dans les yeux du policier l’affola. Elle comprit intuitivement sa pensée. Lui, bien qu’elle soit à contre-jour, sentit physiquement son angoisse. Il racla à nouveau le carrelage blanc moucheté et se déplaça de façon à la voir. Elle était transie de frayeur. — Ta lle est... raisonnable ? continua-t-il, plein du désir d’être loin d’ici, de laisser cet interrogatoire à quelqu’un de moins émotif que lui, quelqu’un d’endurci, qui, sans état d’âme, poserait des ques-tions gênantes, sans gêner. Il se demanda, en la regardant, ce qu’il faisait dans cet endroit sordide… que n’avait-il passé le concours d’instituteur ou d’inrmier ? Que n’était-il devenu garagiste ? Mais elle répondit : — Oui mon ls, c’est une lle sérieuse. Zohra est au lycée, à Ouarzazate. — Et elle n’est pas rentrée depuis lundi ?
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— Elle va en vélo là-bas. Et comme il y a plus de vingt kilomètres ou plus même, elle ne revient que le mardi. Elle n’a pas le temps. Elle ne va pas faire tout ce trajet pour deux heures. Même si c’est des mathématiques. — Même pour des mathématiques, reprit-il en écho. La plaignante était trop troublée pour relever. Elle se taisait, comme si le policier avait tout compris, et elle xait le grand cahier en attendant de le voir écrire. Il joua à déboucher et reboucher son stylo sans se décider à le faire. Une silhouette trapue se prola à l’entrée, accompagnée d’une forte odeur de thé sans menthe. Un po-licier en tenue beige s’approcha de leur bureau, un verre fumant à la main. Il jeta un regard surpris à la femme qu’il n’avait pas vu rentrer, déposa le thé sur la table bancale et repartit. Curieux, il s’attarda sur le seuil, adossé à la porte largement ouverte du commissariat. Le brigadier se ressaisit, reposa son stylo et sourit pour la pre-mière fois. Sans même toucher à son verre, il demanda : — Si tu m’expliquais depuis le début ? ta lle est allée au lycée lundi. Pourquoi ne rentre-t-elle pas le soir ? La femme aussi était plus à l’aise. S’il lui posait les questions une par une, c’est qu’il était prêt à l’écouter. Il n’y avait ni morgue, ni mépris, ni même indifférence dans son attitude. Elle décroisa les bras, posa les mains sur le bord du bureau et répondit : — Le lundi, elle n’a que deux heures de cours. Alors, elle reste dormir chez une amie à Ouarzazate. Et elle rentre à Adarassane le mardi à midi. — Je vois. Comme cela, elle ne fait pas trop de trajets. — C’est ça, mon ls. Le policier en tenue, bien que cette histoire lui parût très pro-saïque, resta sur le seuil, masquant ainsi la lumière vive. Il était sur-tout intéressé par les réactions de son collègue. — Et toi, mardi, tu ne l’attendais pas à midi ? — Non, je ne l’attendais pas. Je n’étais pas là. — Et où étais-tu ? Le policier questionnait à présent par réexe. La femme répon-drait ou pas. — Je suisdelala, je vends chez les gens. Et le mardi, je pars jusqu’au soir.
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— Tu vends chez les gens... Se retenant de lui demander ce qu’elle vendait – après tout, c’était sûrement de la lingerie – il continua : — Ta lle n’était pas revenue mardi soir ? — Non. — Tu l’as cherchée ? Tu as demandé à son amie ? à tes voisins ? ta famille ? — Pourquoi ? — Elle avait peut-être perdu sa clé, continua le brigadier, un peu estomaqué. — Non, on n’a plus qu’une clé. Mon ls Saad a perdu la deu-xième dans un égout. Je ne l’ai pas refaite. Les clés sont chères. — Alors, comment fait-elle pour rentrer ? La femme était assez confiante pour expliquer à un policier les secrets de sa maison. C’étaient des renseignements pratiques faciles à donner, et elle ressentit une confiance maternelle pour lui. — On cache la clé sur le bord de la petite fenêtre des toilettes, sous une pierre, dit-elle en exhibant une pauvre clé plate. Le brigadier se retint de lui rétorquer que cette clé, elle pourrait autant la jeter dans un égout ! La pauvreté et le voisinage la proté-geaient mieux que n’importe quelle serrure. Il songea plus concrète-ment, que cette femme avait raison d’être inquiète. Ou bien sa lle était une écervelée qui s’était attardée chez son amie... — Elle a un portable ? — Non. Moi, j’en ai un. Son amie aussi en a un vieux. ...Ou alors, elle a fugué... — Elle a de l’argent ? — Non, juste pour le bus au cas où. Elle revient à vélo, et prend les courses chez Tayeb, à côté, on a un carnet chez lui. ...Ou elle a été enlevée... — Elle est timide, prudente ? Il eut l’impression désagréable de lui avoir écrasé le cœur entre ses mains. Elle hoqueta, se rejeta en arrière, morte de crainte et de honte. Il décapsula son stylo et commença à noter la date, d’une écriture serrée et soignée. — Comment t’appelles-tu ?
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Khedouj, chuchota-t-elle en larmes, Khedouj Hamou ; et ma lle, c’est Ait Brahim. Pendant qu’il notait son identité, celle de ses parents, celle de sa lle, qu’il reprenait ses propos, le policier écrivit sans la regarder. Reposant enn son stylo, sans refermer le cahier de la main cou-rante, il songea à la suite. — Continue de la rechercher, elle est sûrement chez son amie. Ou en train de s’amuser, de fêter un anniversaire… Ton portable est toujours allumé ? — Oui. — Ou alors, elle est bloquée là-bas ; son vélo est peut-être abîmé. — Elle a toujours quaranteréalspour prendre le bus. C’est déjà arrivé, elle avait crevé. — Ou alors, elle a eu un accident. As-tu pensé à aller à l’hôpital ? Elle secoua la tête, horriée. Il se retint de lui dire que mieux vaudrait un accident qu’un enlèvement. Pour l’instant, il ne pouvait rien lui proposer de plus. Mais il ressentit de la compassion pour son inquiétude. Sortant un téléphone portable d’un tiroir, il t déler des noms, puis appela. Elle l’écouta parler à quelqu’un avec déférence, insister, puis raccrocher. — Va à Ouarzazate, à l’hôpital Sidi Hssayne, mon chef t’y re-trouvera et t’aidera. C’est l’inspecteur Jedidi. Attends-le. Si tu ne la trouves pas là-bas, reviens, nous ferons une déclaration de dispari-tion. — Oui, mon ls ; Dieu te garde, aide-moi ! Je ne suis qu’une pauvre femme. — Mon chef a l’habitude, vas-y. Il demandera aux inrmiers si une jeune lle a été trouvée sur la route. Elle se leva, un peu hébétée, et se traîna vers la sortie. L’agent, sur le seuil, lui expliqua brièvement quel bus prendre, où descendre en ville. Puis, un peu surpris, alors que Khedouj s’éloignait, il de-manda : — Jedidi est là-bas ? — Il est parti réparer lefargo, grogna le brigadier avec humeur. — Encore ? Il est tout le temps en panne ces jours-ci… Son collègue referma la main courante avec brusquerie, t un geste d’indifférence, puis tira son livre de sa poche. Sans penser à
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remercier, il saisit son verre froid et l’avala d’un trait. L’agent ne s’attarda pas davantage.
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