122
pages
Français
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2022
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Ebook
2022
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Publié par
Date de parution
09 août 2022
Nombre de lectures
10
EAN13
9782312124728
Langue
Français
Publié par
Date de parution
09 août 2022
Nombre de lectures
10
EAN13
9782312124728
Langue
Français
Oubliez tout ce que vous savez sur les assistantes sociales !
Stella Kowalczuk
Oubliez tout ce que vous savez sur les assistantes sociales !
Saison 1
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
Du même auteur
Oubliez tout ce que vous savez sur les assistantes sociales ! saison 2 , éditions chapitre.com, 2018
Oubliez tout ce que vous savez sur les assistantes sociales ! saison 3 , édition chapitre.com, 2018
Oubliez tout ce que vous savez sur les assistantes sociales ! saison 4, éditions chapitre.com, 2019
Oubliez tout ce que vous savez sur les assistantes sociales ! saison 5, éditions chapitre.com, 2020
Un câlin à mon arbre, le bain de forêt expliqué aux enfants , éditions Blurb , 2018
Hug my tree, forest bathing explained to children , éditions Blurb, 2018
Osez l’ISIC pour un espace de liberté et de créativité , édition EHESP , 2018
Site web : https://sylvie-kowalczuk-01.webself.net/
Ceci est une œuvre de fiction. Les personnages et les situations décrits dans ce livre sont purement imaginaires.
© Les Éditions du Net, 2022
ISBN : 978-2-312-12472-8
Avant-propos
Ce livre s’appelle « Oubliez tout ce que vous savez sur les assistantes sociales ! ».
Souvent restreint aux stéréotypes du placeur d’enfant sans cœur ou aux tiroirs caisses dispendieux, l’assistant de service social exerce sa profession, guidé par des convictions profondément humanistes. Il fait souvent au mieux avec des moyens de plus en plus restreints, mais toujours avec une conscience aigüe du respect humain. Soumis au secret professionnel, sa parole est rare. Son métier est mal reconnu. A travers cette fiction, je souhaite rendre hommage à tous mes collègues courageux, sincères et consciencieux, à ces travailleurs de l’ombre toujours optimistes, qui ne lâchent rien.
Ce livre aurait aussi bien pu s’appeler « Oubliez tout ce que vous savez sur les cas sociaux ! »
Par cette fiction, je serais peut-être à contre-courant d’un mouvement de pensée qui se propage dans ce vingt et unième siècle, qui veut nous faire croire que les pauvres le sont par leur faute, qu’ils sont « passifs », « ingrats », « fraudeurs », « à la charge de l’Etat », « qu’ils coûtent chers et ne rapportent rien ».
Avec ce roman, j’invite le lecteur à faire connaissance avec celui qu’on appelle le pauvre, le cas social , l’usager du service social. Je propose une autre vision des choses, une proximité, qui manque dans cette société individualiste. J’offre la possibilité de faire connaissance avec ces personnes, et faire appel à son humanité profonde.
Non le pauvre n’est pas passif. Si les gens qui côtoient le service social peuvent paraître résignés, c’est parce que la vie est dure. La dureté de la vie se définit par le caractère sévère et rude de l’existence ou du comportement de ses congénères, une sorte d’intransigeance. Elle fait appel à la notion de ce qui est pénible à supporter et au degré de résistance pour y parvenir.
Alors quand on fait référence à cette définition, les personnes que l’on côtoie dans le cadre de notre travail prennent le visage de vaillants soldats. Ce sont des personnes pleines d’espoirs et de potentiels, de lumière qu’il faut rallumer, des personnes d’une richesse humaine infinie, comme si plus on s’éloignait d’une certaine richesse matérielle, plus on se rapprochait de sa propre humanité.
Par cette œuvre de fiction, je veux rendre hommage à toutes ces personnes que j’ai rencontrées et accompagnées. J’ai choisi de mettre en scène Gwendoline, une assistante sociale complètement givrée pour éviter l’autobiographie, le documentaire ou le témoignage. Elle est juste là pour vous guider, vous, lecteur, à travers des situations de précarité, qui bien que s’inspirant d’une certaine réalité de terrain, restent totalement fictives.
« … enseigner la compréhension entre les humains est la condition et le garant de la solidarité intellectuelle et morale de l’humanité. »
Edgar Morin, Les sept savoirs nécessaires de l’éducation du futur .
Hugo
H UGO
Il faisait froid ce matin-là. Je n’avais pas envie de sortir mais j’avais un rendez-vous. Moi qui ne voyais plus personne depuis des années, j’avais eu deux rendez-vous en moins de trois mois ! Mazette ! Est-ce que la chance tournait ? Bon, le premier rendez-vous il y a trois mois était pour me rendre à la maison du département afin d’instruire une demande de revenu de solidarité active. J’avoue que ça manque de prestige mais bon Dieu, je suis sorti de chez moi et j’ai croisé plusieurs personnes ! J’ai dû m’obliger à me laver. J’ai recherché dans mes vieilles fripes quelques habits pas trop démodés qui pouvaient faire l’affaire. J’ai fermé la porte derrière moi. L’air dehors me semblait tellement lourd que j’ai cru m’enivrer d’abord par la surprise de cette rencontre, puis par les odeurs qu’il soulevait dans son sillage, par des parfums de terre et d’herbe mouillée, puis par des effluves de gazole poursuivant les véhicules affairés. Mon cœur battait fort. J’imaginais les secours diagnostiquer une tachycardie. Le petit verre de Gin avalé cul sec avant de partir, n’avait rien anesthésié du tout et ne m’avait donné de l’élan que pour aller de ma cuisine au pas de ma porte.
Mais je savais qu’il fallait que j’y aille. Je n’avais plus d’allocation chômage depuis plus de quatre mois et mes économies avaient fondu au fond des bouteilles d’alcool. Il fallait que j’aille demander ce putain de RSA ne serait-ce que pour financer ma dose de carburant. Deux ans de chômage, le départ d’Irène même pas pour un autre, mon déménagement dans cet appart pourri près du périph et ma vie comme un quotidien aux journées semblables, le même ennui, le même sommeil agité, entrecoupé d’ingurgitation du même tord boyau, des allers et venues entre le lit et le canapé, le canapé et le lit.
Je n’ai rien compris à ce que la secrétaire m’a dit : une histoire de RSA, d’activité, de contrat, de droits et devoirs. Moi, tout ce que je voyais c’est que dans moins de trois semaines je pourrai fêter ça avec moi-même, éventuellement j’inviterai Georges, mon voisin de palier. Georges est un vieux monsieur qui me sert de papa parce que le mien… Je ne lui ai jamais dit. Je n’aime pas trop parler. Tout ce que je veux, c’est picoler avec lui, c’est tout. J’ai signé sa foutue feuille. La secrétaire est sortie du bureau le temps de faire des photocopies de mes justificatifs que j’avais eu mille peines à trouver : ma carte d’identité était sous la panière du chien mordillée par ses soins, ma carte vitale était restée au fond de la boîte à gants de la caisse que j’avais garée là voilà deux ans lorsque consciencieux, j’avais choisi de boire plutôt que de conduire. Je ne sais pas si elle roule encore, en tout cas elle est dans un sale état, garée sous un saule, pneus dégonflés, recouverte de chiures de moineaux. C’est un peu comme ça ma vie, une belle époque recouverte de merde. Bref, la secrétaire est revenue en m’expliquant que je serais convoqué dans deux mois pour un entretien avec l’assistante sociale. Pff, je n’en avais rien à battre et je cherchais déjà le moyen d’éviter cette contrainte. Ça a dû se voir sur ma tronche car à ce moment-là, la secrétaire m’a répété qu’en mon absence, le RSA serait suspendu. J’imaginais alors ma bouteille de Gin pendue sous une branche à deux centimètres de mes doigts. Même sur la pointe des pieds, je ne parvenais pas à l’atteindre. Putain de RSA. Putain d’administration. Putain de gouvernement. Putain de vie de merde !
G WENDOLINE
Il gelait ce matin-là et je devais encore gratter le pare-brise avant d’espérer partir embaucher. Raphaël dormait, mais ce serait lui qui se préoccuperait d’emmener les enfants à l’école. C’est dans ces moments-là que je me demandais pourquoi j’acceptais de travailler si loin alors même que des postes d’assistante sociale avaient tourné récemment tout près de chez moi. La route glissante, les périodes de neige et de verglas n’avaient pas réussi à me convaincre. Oui, c’est vrai que la route était longue mais l’équipe du centre social de l’ouest est sympa, l’environnement rural très rural, les usagers majoritairement attachants. En milieu rural très rural, il n’y a rien à des kilomètres à la ronde ! Faut-il être maso pour vouloir s’y enterrer comme on dit ? Ou bien faut-il y trouver une pulsion supplémentaire ? Depuis toute petite, je suis pour les perdants. Lorsque je regardais un match de foot, j’encourageais systématiquement ceux qui étaient en train de perdre. Il m’arrivait même régulièrement de changer de camp pendant un match, lorsqu’il y avait retournement de situation. Je suis émue par les gens qui pleurent. Je suis admirative des gens qui luttent. J’aime les battants. Et si les personnes que je reçois au bureau peuvent paraître indolents à certains, moi je sais qu’ils combattent pour survivre et que le moindre effort doit être calculé pour ne pas griller toutes ses billes dès le départ et aller plus loin. Plus loin, c’est demain et ce n’est déjà pas si mal. Être assistante sociale en milieu très rural, ce ne peut être que pour des professionnels battants aussi, des éternels optimistes, des drogués aux défis de toutes sortes. Et ça me plaît de penser que moi aussi je combats en quelque sorte comme les personnes que je reçois. Tout n’est pas tout cuit ici.
Les permanences des administrations ferment les unes après les autres, les associations caritatives s’échinent à couvrir les territoires reculés, les cars ne passent plus ou une fois par-ci par-là sans réelle satisfaction pour les usagers, le numérique peine à faire une percée parce que pas de réseau, ou pas de finance pour s’acheter un ordinateur, ou aucune compétence en lecture et écriture… C’est dur ici mais c’est sain aussi. Les personnes sont authentiques et respectueuses. J’aime être au cœur de cette humanité. Elle se cache souvent et j’aime aller la chercher.
Aujourd’hui, il faut que je me dépêche car j’ai trois rendez-vous, des entretiens d’orientation. Cela consiste à recevoir les nouveaux e