Oui et Non
31 pages
Français

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Description


Un homme, dont l’agréable passe-temps est de visiter des logements afin d’imaginer la vie des anciens occupants, de s’en faire un roman mental et, parfois d’infirmer ou d’affirmer ses hypothèses en rencontrant lesdites personnes, se retrouve, un jour, dans un appartement ayant une vue directe sur un pavillon clôturé par un mur cachant le jardinet. Dès lors, le ravissement des lieux cède la place à l’irritation, à l’idée de ce jardin masqué. L’irritation se mue vite en frustration puis en obsession. Pour en savoir plus, l’homme interroge le concierge afin de savoir si le pavillon est habité. La réponse de ce dernier est laconique et bredouillante : « Oui et Non ! »...



Jean RICHEPIN , né à Médéa en Algérie le 4 février 1849, d’un père médecin militaire, et mort à Paris le 12 décembre 1926, est un écrivain, diplômé es lettres. Plus connu pour ses chansons et ses romans, l’auteur collabore activement au journal « Gil Blas » et s’essaie également à la nouvelle.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 3
EAN13 9782919564675
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

OUI et NON
Nouvelle télépathique
de
Jean RICHEPIN
D’après la nouvelle publiée dans le journal « Gil B LAS » à partir du 15 avril 1903.
I
UNE de mes manies les plus impérieuses, et qui me proc ure un de mes plaisirs les plus vifs, quand j'ai loisir de me pro mener en flâneur à travers mon vieux et cher Paris, c'est de visiter les apparteme nts et les maisons à louer.
Si leslocauxments quesont vides, je rêve, en les examinant, aux aménage j'y pourrais faire, aux décorations qu'il me serait agréable d'y contempler, à la vie que je vivrais dans ces conditions nouvelles. Il m' arrive de m'y voir, installé parmi des occupations qui ne sont pas les miennes, ayant changé, non seulement d'habitudes et de milieu, mais de profess ion et d'âme. Je me donne ainsi, en quelques minutes brèves, la sensation d'ê tre le personnage central autour duquel se déroulerait, là, un long roman tou t à fait différent de celui qui est mon existence ordinaire.
Si leslocauxner, d'aprèssont encore garnis de meubles, je me plais à imagi ces meubles et leur disposition, la psychologie des gens qui avaient ici leur habitacle. Je constate leurs goûts. Je subodore leu r métier. J'acquiers la certitude qu'ils ont telle vertu ou tel vice. Leur âge, leur fortune, leur état social, j'y conclus à la suite d'observations rapides et in génieuses. Et rien ne m'amuse comme de contrôler les résultats de mon enquête et la sûreté de mes imaginations par les bavardages du concierge, que j 'interroge alors adroitement sur ses locataires, lui faisant souvent croire que je les connais, tant je les ai bien devinés.
La difficulté à s'offrir un régal et la rareté de c e régal en décuplant le prix, on conçoit sans peine que le choix de mes visites va d e préférence aux appartements et aux maisons dont j'augure, par avan ce, que j'y trouverai quelque chose d'original.
C'est dire que je n'aime guère à flâner du côté des quartiers neufs.
Lesimmeublestages ou qui en font l'ornement, pompeuses bâtisses à six é prétentieux hôtels, y sont tous construits sur des modèles uniformes, dont la banalité implique celle des habitants eux-mêmes. Re constituer la vie de ces habitants, ou rêver dans ces demeures le roman d'un e vie qui ne ressemblerait pas à la mienne, voilà qui ne saurait m'allécher ic i. Il n'y aurait point, dans le premier cas, assez d'effort à faire pour mon imagin ation. Dans le second cas, je risquerais de trop perdre au change.
Aussi je fuis loin des rues, des boulevards et des avenues où s'étalent, sur les devantures, des écriteaux annonçant l'ascenseur, le calorifère, l'électricité, le téléphone, et tout ce que comportent le confort et le luxe modernes dans le décor prévu de l'invariable blanc et or.
Les quartiers où il m'est doux d'égarer ma flânerie , et où je visite curieusement et fructueusement les appartements et les maisons à louer, ce sont les quartiers de mon vieux et cher Paris qui s ont les derniers vestiges de ce vieux et cher Paris.
Là se rencontrent encore des demeures d'autrefois, qui ont gardé leurs physionomies particulières, chacune la sienne. Et d ans ces demeures on a chance qu'il y ait des habitants ayant aussi des ca ractères particuliers, chacun le sien.
Pour avoir, en effet, élu domicile en ces demeures, et non pas en d'autres, il faut que ces gens aient eu un désir spécial, un goû t à eux, qui n'était pas le goût de tout le monde. Leur choix, à lui seul et de prim e abord, est un indice qui les dénonce comme des originaux.
S'imaginer leur existence, d'après l'ambiance où ce tte existence a voulu expressément se dérouler, l'y redérouler en hypothè ses d'une savante et magique évocation, rêver là un roman au cours duque l on est soi-même un de ces originaux, cela est difficile certainement ; ma is cela promet, en revanche, d'être exquis et délicieux.
Et ce l'est, en réalité, presque toujours. Que de r andonnées j'ai faites, à cette chasse d'un nouveau genre ! Et je n'ai pas so uvenir d'en être jamais revenu complètement bredouille.
Sans compter que, parfois, le hasard heureux de la quête vous fait lever sous les pas d'étranges découvertes, vous met sur l a piste de fabuleuses aventures, et vous conduit jusqu'au gîte d'un mystè re, comme ce fut précisément le cas dans la singulière et véridique histoire que voici.
Il y a environ trois mois, je flânais, en proie à m on habituelle et impérieuse manie, dans l'un des quartiers où elle me procure m es joies les plus rares, dans le faubourg Saint-Germain.
Outre les anciens et superbes hôtels aristocratique s dont se glorifie encore le noble faubourg, on trouve toujours là, et jamais , je crois, on ne cessera d'y trouver, ces vestiges de mon vieux et cher Paris, c es vestiges dont je suis si friand.
Là, même à quelques pas des grandes voies rectilign es qui ont éventré le quartier, même au cœur des rues les plus grouillant es de mouvement moderne, même dans la rue du Bac, par exemple, il y a de quo i satisfaire et régaler ma manie. Derrière des façades de maisons récentes, au fond de cours très vastes, au bout de couloirs très longs, parmi des jardins d onnant sur d'immenses parcs, il y a des appartements d'autrefois, des restes de demeures seigneuriales, des ailes d'hôtels, des...
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