Prisons

Djézou Jean-Valère

Sujets

• Costa de Marfil
• Côte d'Ivoire

Informations

• Publié par: Prix Orange du Livre en Afrique 2022
• Date de parution: 22 janvier 2021
• Nombre de lectures: 4
• EAN13: 9782902594603
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 2 Mo

Extrait

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pr is o n sPrisons_04.05.2021_BAT OK.qxp_Mise en page 1 04/05/2021 10:02 Page2Prisons_04.05.2021_BAT OK.qxp_Mise en page 1 04/05/2021 10:02 Page3
Jean-Valère DJEZo U
pr is o n s
Roman
Vallesse Éditions
01 B.p. 2290 Abidjan 01
Côte d'ivoire
e-mail : [e-mail]_04.05.2021_BAT OK.qxp_Mise en page 1 04/05/2021 10:02 Page4
© Vallesse Éditions, Abidjan, 2021
is Bn : 978-2-902594-60-3
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REMERCIEMENTS
La tête encore surchargée du sang déchirant de
mes parents ivoiriens et étrangers sauvagement
massacrés dans cette guerre moins chère payée
très cher, guerre nous ayant volé des tonnes d’êtres
chers, je voudrais saluer avec ferveur mon frère
Toussaint Nolasque Yoboué, qui eut la charge
angoissante d’abriter mon petit manuscrit tremblant,
alors que tout et tous disparaissaient sous nos
larmes, dans notre Côte d’Ivoire sans prix. Alors
en Inde, prisonnier des douleurs des prisons du
continent Mère et de la Mère Patrie, il avait la
douloureuse mission de publier et d’authentifier
ce témoignage, si je n’étais pas l’un des rescapés
de cette science du mal. Gnah-bian m’aurait alors
ressuscité, en publiant ces pensées sur l’une des plus
grandes comédies des temps modernes, la
démo-cra-tie. Je voudrais également saluer mes frères
Malik Koné avec qui je suis sorti de Yopougon la
mort et Romaric Assiè qui m’a aidé, avec mon
petit frère Rodolphe, le bassiste, dans le projet
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DÉDICACE
À tous ceux qui espèrent que la politique et la démocratie
soient autre chose que cette tragédie montée sur fond de
farce et de romance comique.
À tous ceux qui espèrent que la politique et la démocratie
ne soient plus le facteur de leurs troubles de sommeil,
de leurs nuits troubles et blanches, mais leur somnifère.
À tous ceux qui espèrent que la politique et la démocratie
soient l’instrument du réveil des peuples et des
gouvernements.
À tous ceux qui espèrent que la politique et la démocratie
ne soient plus les meilleures amies de la grande faucheuse.
À tous ceux qui espèrent que la politique et la démocratie
ne soient plus une prison, la prison des gouvernants, la
prison des gouvernés.
À la mémoire du Maître et Professeur Séry Bailly, l’Idéaliste
convaincu et assumé, mon Père et Parrain, Pont de liberté
entre les hommes, ultra de la liberté, de la liberté de
pensée, de la compréhension de l’autre…
À la mémoire de Maître Soilé Cheick Amidou et de Maître
Diahou N’Guessan Bertin, mes formidables Aînés, ces
feu imbibé et eau flamboyante de la potion de la passion,
de la sincérité ! Prisons_04.05.2021_BAT OK.qxp_Mise en page 1 04/05/2021 10:02 Page8
À la mémoire de Maître AzuV auguy, Zakwato, la sentinelle
sans paupière oubliée par son peuple, le parolier des temps
immémoriaux.
À la mémoire de Djézou Kouadio Dominique, mon
oncle-Père, la vérité droit au but, le cœur clair de moine
et sans tenue de moine.
À la mémoire de maman Batiman Louise, la merveilleuse,
tristement partie, faute de soins et de médicaments, au
cours de cette belle guerre démocratique entre frères ivoiriens
et étrangers venus tuer des Ivoiriens pour les aider…
À mon ami et frère de classe Kouadio Firmin Noman
amputé d’une jambe dans la lutte pour le triomphe des
urnes. Prisons_04.05.2021_BAT OK.qxp_Mise en page 1 04/05/2021 10:02 Page9
AVANT-PROPOS
Au lever du jour, à l’instant où je saisis une vieille
plume de l’âge de l’humanité, à l’effet de me dire
ce qu’est la démocratie pour laquelle on se bat tant,
je fus pris de vertiges, de violents spasmes et d’une
incontrôlable envie de dégueuler, face à cette avalanche
de souvenirs de révolutions, de dévotions
démocratiques et de paroles en l’air balancées par les politiques,
ces experts en baratins et en promesses fallacieuses,
aux peuples du monde entier, aux hommes de toutes
les races, aux hommes et femmes de tous les âges
et conditions.
Ce qui m’a considérablement frappé, comme si
j’avais reçu une puissante massue de vent dans la
poitrine, ce sont ces images de violences et
d’exactions de toutes sortes trouvées dans le beau paquet
de la révolution, images que j’ai aussitôt dégagées
et repoussées loin de moi, puisqu’elles sont loin de
la pensée de la non-violence pour laquelle j’ai pris
mon bâton de pèlerin. Néanmoins, j’ai logiquement
confessé que tant de violences et d’exactions
inhumaines étaient la réponse prédictible à des années
et à des siècles d’humiliations et de tortures
impuissamment subies et encaissées, et que le sentiment
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et la conscience subits de puissance déchaînent contre
l’oppresseur d’hier toutes les noires animosités.
Mais en même temps, je me suis avoué que de
tels agissements, si justifiés soient-ils — si l’on pouvait
lucidement, sans avoir la mine d’un possédé, d’un
faux Bakounine, trinquer aux abois de l’ennemi, qui
reste tout de même un homme — étaient le gage
évident que les plus forts, les hommes forts du
moment, feront toujours leur loi. Et je ne vois pas lequel
de nos sorciers les plus à l’envers et téméraires
oserait se mettre sur la place du marché pour faire un
plaidoyer et des psaumes à la gloire des massacres
et pillages des biens des innocents, la marque de
fabrique de l’effervescence révolutionnaire. Même en
blessant sa conscience avec une barrique de vodka, le
moins conscient d’entre nous s’y débinerait. Enfin…
Normalement… Bref…
Ces images hallucinantes que j’essayais, tant bien
que mal, d’acculer dans un sac-poubelle, afin que, mes
semblables et moi, nous les fourrions, sans
ménagement, dans le dépotoir le plus éloigné de notre belle
communauté humaine, ce sont aussi ces milliards de
promesses mensongères de dragueur distribuées à
nous autres crédules par les politiciens du monde
10Prisons_04.05.2021_BAT OK.qxp_Mise en page 1 04/05/2021 10:02 Page11
entier, promesses bidon pour lesquelles nous les
portons, au prix de nos vies et du sang de nos êtres
chers, au pouvoir. Ce même pouvoir dont ils se
servent, après, pour nous narguer et marcher sur nos
poitrines, nos corps et nos têtes !
Et là, je pleure toutes les têtes tombées pour et par
la démocratie, toutes les années sacrifiées à une lutte
clandestine. Et là, je me moque de toutes les années
passées dans le maquis à préparer la capitulation
d’un régime dictatorial qui sera malheureusement
bientôt regretté. Et là, je mords toutes les années
passées à louanger et à lécher des programmes de
vengeance et non de gouvernance. Et là, je dédaigne
les années passées à servir des gens versés dans la
science du mal et qui sont, dans la farce politique,
les gens les plus télégéniques et magnétiques. Et là,
je contemple les réunions secrètes d’hommes et de
femmes convaincus, heureux et fiers de se battre
pour la bonne cause, hommes et femmes forcés de
se terrer, à la manière des vers de terre, pour tenter
d’échapper à la fureur volcanique d’autorités se
croyant éternelles et se prenant pour Dieu.
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Et là, ce qui m’emplit l’âme de bonheur, c’est de
savoir que tant de vieillards et de jeunes gens,
d’hommes et de femmes sont capables de s’unir pour
bâtir quelque chose de sublime et de fort ; c’est de
savoir que tant d’êtres différents, de gens de conditions
et d’origines diverses sont capables de s’asseoir autour
d’une même table et autour du feu d’une idée puissante
et magique pour écrire communément leur destin
et sauver leur destinée commune. Et là, mes yeux
étincellent de la lumière de ces rares femmes et
hommes qui ont encore la denrée rare du bon sens
et de l’humanité et qui, animés de la sagesse des
animaux qu’on croyait, à tort, bestiaux, savent éteindre
leurs querelles, lorsqu’il y a feu à la demeure, à la
demeure commune, à