Toutes des garces !...
67 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
67 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Georges Garnier, le détective, est embauché par Anne Porter, une chanteuse à la mode, qui lui demande de la protéger de son ancien amant, un dangereux trafiquant d’héroïne, qui cherche à profiter de son succès récent pour s’enrichir sur son dos. Pour ce faire, il la menace de mort si elle refuse d’emprunter le yacht de son riche mécène pour transporter une cargaison de drogue.


Georges Garnier accepte de tendre un piège au truand en organisant son arrestation au moment de la livraison...


Mais, à l’instant où il arrive sur le bateau pour intervenir, il constate que l’équipage est endormi, que le gangster est mort et que sa cliente a disparu...


Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 0
EAN13 9782373476965
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LES DESSOUS DE L'AGENCE GARNIER - 4 -
TOUTES DES GARCES !...
de J.A. FLANIGHAM
I
Georges Garnier applaudit, puis il regarda la dame de droite, le monsieur de gauche et, dans un sourire sceptique, se leva en s'excusant. Il jeta un coup d'œil nonchalant au parterre d'orchestre, admirant une toilette de ci, jetant un sourire à un visage connu de là, maussade et résigné, se dirigeant vers les coulisses de « L'Empire Théâtre »xé la nouvelle, afin de se rendre au rendez-vous que lui avait fi chanteuse à la mode, Anne Prater.
Il avait reçu le mot, auquel était jointe une invitation pour le spectacle, en fin d'après-midi. Anne Prater avait écrit cette simple phrase :« J'ai besoin de vous, j'aimerais vous recevoir à l'entracte dans ma loge ».
Il prit l'escalier de service, jeta un coup d'œil m orne aux murs d'un rose sale, délavé, rongés d'humidité. Toutes les coulisses de tous les music-halls du monde faisaient sur lui le même effet déprimant et sordide.
Le coup classique du classique envers de décor. Il obliqua à droite, jura parce qu'il avait failli s'étaler sur un rouleau de fils électriques, passa une porte, une autre encore, puis aperçut, en lettres noires sur fond blanc« Anne Porter ». Il frappa, entra et resta quelques instants immobile sur le seuil de la porte. Il y avait foule dans la loge de la jeune artiste. Des hommes très e mpressés, des femmes ravissantes au timbre aigu. Il y avait aussi beaucoup de fleurs. Il y avait surtout Anne Porter.
Elle était à la mode depuis plus de six mois, pas tout à fait un an. On racontait beaucoup de choses — des mensonges, évidemment — sur ses débuts. Peu importait. Anne Porter était très excitante, elle avait un corps voluptueux dont elle savait jouer pour donner de l'esprit au moindre de ses couplets. Elle avait aussi un caractère épouvantable qui faisait la joie de tous les amateurs de potins. En un mot, elle avait tout ce qu'il fallait pour faire un personnage à la mode. Une artiste accomplie, ceci était une autre histoire.
Elle était présentement occupée à se maquiller, répondant par à-coups aux questions sans importance et qui, d'ailleurs, ne nécessitaient pas de réponses — que lui posait son entourage de snobs en folie. Puis, dans la glace, elle aperçut le nouvel arrivant, immobile, adossé contre la porte, sceptique et ironique, et, d'une voix qui vibra étonnamment sèche, elle dit :
— Maintenant, caltez, mes chéris ! J'ai un rendez-vous important. Georges se sentit déshabillé, mis à nu, sous les qu elque quinze regards qui l'examinèrent avec une intense curiosité marquée d'une pointe de dédain. Il y eut encore quelques chuchotements et la voix glapissante de la vedette réitéra : — J'ai dit« Caltez ! »Vous êtes sourdingues, ou quoi ?
Ils sortirent en file après des« à tout à l'heure, chérie ! »,« Bonne chance, mon oiseau », et autres qualificatifs. Georges referma la porte sur le dernier, puis, après un long soupir, il s'épongea le front.
— Ils sont fatigants ! émit-il enfin, en levant les yeux au ciel.
Elle s'asséna un vigoureux coup de houppette sur le bout du nez qu'elle avait très petit, et dont les narines, fortement ouvertes, indiquaient qu'elle ne devait pas être de bois dans un plumard avec un beau gars sur le coup de une heure du matin, et Georges, se reprochant cette constatation, qui n'avait rien à voir avec la gravité du moment, l'écouta répondre :
— Cette bande de noix devient quasi inévitable quand on commence à être à la mode.
Elle croisa ses longues jambes et Jo, au passage, en admira le galbe :
— Vous devriez vous asseoir !
Il s'assit sur un tabouret à ras de terre, ce qui le mit dans l'obligation de lever le nez pour continuer de bavarder avec la belle Anne. Il avait, vu de cet angle, un aperçu panoramique du buste de la belle vedette, et il conclut que si la position était incommode, le point de vue valait la peine de se tortiller le cou. — Qu'est-ce que vous pensez de la première partie du spectacle ? — Euh... dit-il.
À vrai, dire, Anne Porter ne l'enthousiasmait pas. Enfin, pas outre mesure. Elle restait normale à la troupe des filles, bourrées de sex-appeal qui essayait, dans les revues à grand spectacle, de démontrer que Mistinguette avait enfi n trouvé un successeur digne d'elle. Bernique, allez toutes vous rhabillez, mes mignonne s, jusqu'à présent, la Miss est irremplaçable, se dit Jo, après avoir constaté que le costume, qu'Anne porterait dans le tableau N° 10 était capable de flanquer une apoplexie aux vieillards portés sur la chose ! — Pas sensationnel, hein ? insista-t-elle. — Vous n'êtes pas mal, hasarda Jo. Il avait assez l'occasion de mentir dans sa damnée profession, sans s'embarrasser de vaines fioritures aux moments de détente. Mais, au fait, il était là pour affaires. L'expression de son regard changea. — Je croyais que nous avions à bavarder sérieusement, dit-il.
Elle eut un haussement d'épaule plein de fatalisme et, d'une voix subitement changée : — C'est que, d'une certaine manière, ma question avait un rapport, figurez-vous ! Y avait-il de la crainte ? Du désarroi ? Une sorte d'émoi dans son regard vert. Difficile à dire, pensa Jo. Il l'avait déjà cataloguée : fichtrement intelligente, rusée, capable d'arracher le dernier centime à sa pauvre mère, si cela était capable de lui rendre service. Diablement maline, oui, et pas tellement sentimentale. Elle avait dû mener sa barque avec une diable d'adresse, et en se heurtant cependant à pas mal d'écueils, cela se lisait à un petit quelque
chose de dur et d'irrémédiablement mort qui noyait par instants son regard immense. — Quel rapport ? dit Jo.
Il jeta un coup d'œil à son poignet. Dans dix minutes, l'entracte était terminé. Fichue idée qu'elle avait eue là de lui donner rendez-vous dans les coulisses.
— Le rapport qu'il peut y avoir entre une fille qui s'est tirée de pas mal d'enquiquinements et qui veut la paix, fit Anne Porter d'une voix calme. Je n'ai pas toujours été à la mode, Georges Garnier. Je n'ai pas toujours eu de l'argent ni des admirateurs. J'en ai même bavé dans une existence qui a été plutôt rude et difficile, et je croyais bien avoir tiré le rideau une fois pour toutes sur ce fichu passé là. Mais il devait me tenir bon et ferme, imaginez-vous, puisqu'il se manifeste de nouveau. Une grimace amère déforma ses traits, rompit la charmante harmonie de son séduisant visage. — On me menace. Il paraît qu'on veut me retirer de la circulation si je n'obéis pas. Mais je n'ai pas l'intention d'obéir.
Jo alluma tranquillement une cigarette, et, entre deux volutes de fumée, fixa les yeux immenses d'Anne Porter qui le regardaient sans paraître le voir. — Qui,on? — Trop long à vous expliquer, maintenant. Je viens de me mettre hors de moi, ça serait mauvais pour les prochains tableaux. Pourrait-on dîner tous les deux, après le spectacle ?
— Pourquoi pas ? dit Jo. Il se leva. — On vous a vivement recommandé à moi. J'ai confiance en vous, lui dit-elle. À vrai dire, vous êtes maintenant ma seule planche de salut. — Ne croyez-vous pas exagérer les difficultés ? dit-il doucement. Elle eut un sourire ironique :
— Attendez d'être dans le bain. Je crois qu'à partir de ce moment-là, c'est plutôt vous qui me donnerez des conseils de prudence.
Il s'inclina en souriant :
— Je vous retrouve dans votre loge après le spectacle ?
— On ferait mieux de se retrouver directement à laDoréeM aison . Avec toute cette bande de cloches et leurs piailleries, on n'en finit pas. — Je serai à la Maison Dorée à partir de minuit et demi. Il ouvrit la porte et examina furtivement le reflet que lui renvoyait la glace devant laquelle Anne Porter, intensément, se regardait. Ou i, froide, calculatrice, dénuée de vaine sentimentalité, et surtout, surtout, habitée par un problème qui paraissait devoir être
diablement important.
Il referma doucement la porte sans que le moindre m ouvement pût indiquer qu'Anne avait constaté son départ. Georges retrouva les cou lisses, l'escalier, la salle grouillante de monde. Le petit frisson bien connu et tant recherché, que lui procurait toujours les prémices d'une affaire qui se promettait intéressante, l'agitait.
Il s'assit dans son fauteuil, se cala confortablement, décidé à entendre avec beaucoup plus d'indulgence, les couplets que lancerait la curieuse Anne Porter.
***
Elle entra, insolente, royale, et le regard des hommes la suivit des yeux. Elle avait aperçu Georges installé au bord de la barrière de fer forgé, dans l'arrière-salle surélevée qui dominait la première salle, et grimpa lestement les quelques marches. Un maître d'hôtel s'empressa, l'aida à ôter le manteau de renard blanc dont l'éclat chaud soulignait son teint clair.
Sa robe du soir de velours noir soulignait la ferme splendeur de son beau corps. Elle s'étira imperceptiblement, très femme, et Jo se sentit tout guilleret. Il adorait souper avec une jolie fille.
Elle s'assit, bâilla légèrement, cligna de l'œil droit :
— Je les ai tous semés, mon cher ! Ils sont exténuants, je vous jure !
— Oui, approuva-t-il, ce n'est pas une sinécure d'être une femme à la mode.
Elle se tourna vers le maître d'hôtel :
— Foie gras, laitue, champagne. Je verrai par la suite.
— La même chose, dit Georges.
Elle sourit :
— J'ai un appétit féroce.
Il se contenta d'incliner la tête en souriant. Il aurait pu lui répondre qu'elle avait une ligne impeccable pour une qui se prétend douée d'un appétit féroce, et aussi qu'un solide coup de fourchette est en contradiction avec un crâne habité par de furieux ennuis. Il préféra se taire, prêta son oreille attentive à l'orchestre, dissimulé derrière de hautes plantes grasses. — Vous étiez très bien dans la deuxième partie, dit-il. Elle eut un sourire qui remerciait, et scruta le visage de Georges. Il était sincère. Il l'avait trouvée plus humaine, plus sincère dans les deux derniers tableaux, où elle s'était donnée avec une sorte de frénésie qui n'était pas loin de ressembler au talent.
Elle haussa les épaules :
— Quand j'aurai retrouvé la paix de l'âme, ça ira mieux.
Ça sonnait mal dans sa bouche« la paix de l'âme », se dit Jo. Elle paraissait tellement détachée d'une infinité de choses qu'à certains moments, en examinant son beau visage lisse et froid, on pouvait se demander sérieusement si, oui ou non, elle avait une âme.
— Nous bavarderons en soupant, n'est-ce pas ?
— Oui ! dit-il.
Il lui tendit son étui ; elle alluma distraitement sa cigarette, en regardant au loin, quelque chose dans le vague. Le maître d'hôtel apportait la bouteille de champagne, la débouchait, remplissait les verres. Jo leva le sien : — À vos succès ! — Non, à ma tranquillité, dit-elle, en choquant son verre contre celui du détective. Elle piqua distraitement une feuille de laitue, puis, après l'avoir mâchée, avalée, posa sa fourchette dans son assiette, s'essuya les lèvres.
— Maintenant, vous savez tout ! dit-elle. Elle sourit de constater à quel point sa perplexité était marquée de stupéfaction. Il y avait — nota Jo — non seulement de l'ironie, mais aussi comme une sorte d'orgueil dans ce sourire-là.
— Qu'est-ce que vous en dîtes ? insista-t-elle. — C'est faramineux ! avoua-t-il. Il la contemplait maintenant avec des yeux changés. Oui, Anne Porter, la vedette était loin, réfugiée quelque part sur une scène où elle s 'agitait comme une marionnette... Il n'y avait plus, face à lui, qu'une certaine Annie Portier, une fille qui s'était rudement frottée à la vie, issue d'une famille nombreuse où les taloches et le pain sec tombaient plus rudement qu'autre chose, qui s'était enfuie à 15 ans de la m aison familiale pour se mettre en ménage avec un gars du coin. Un gars qui avait quelque cho se dans la tête, puisque, 10 ans après, il était un des rois du trafic de l'héroïne sur le marché mondial. Sa femme lui avait donné un fameux coup de main en diverses occasions. Elle éta it si furieusement excitante, si intelligente, et n'avait pas sa pareille pour savoir plaire et amuser les hommes. Puis un jour, elle l'avait quitté. Un autre homme l'avait remarqu ée un soir où, un peu brindezingue, elle chantait un air à la mode, debout sur une table. Il l'avait enlevée. Il en avait fait Anne Porter. Mais Lucien Rottier, truand s'il s'en fut, se manifestait maintenant. Il exigeait de la vedette qu'elle lui rende un dernier service avant qu'il ne lui fiche définitivement la paix.
Elle fouilla dans son sac, sortit deux télégrammes. — Voilà ! Puis une enveloppe que Jo tourna et retourna dans ses doigts.
L'enveloppe portait le cachet de la place de la Bourse, à Marseille.
Il tira la carte bleu ciel, sur laquelle était inscrite cette seule phrase : « C'est d'accord ou c'est la fin ! »
— Quel est ce service qu'il vous demande ? insista Jo.
— J'ai un ami qui a un yacht, dit-elle d'une voix sourde. Un ami très haut placé. Très connu. Lucien s'est mis dans la tête que ce yacht pourrait lui être très utile pour que, au cours d'une croisière, en croisant du côté des côtes ital iennes, on puisse charger une bonne cargaison de drogue qui doit être livrée quelque part du côté de Fesida.
Jo voila l'éclat de son regard.
— Et si vous refusez, Rottier vous laisse entendre qu'il vous tuera ?
— C'est tout entendu, dit-elle d'une voix tranquille. On voit que vous ne connaissez pas Lucien.
Elle eut un vague sourire :
— Qu'est-ce...
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents