Trophée des Plumes 2021 - Maya
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Trophée des Plumes 2021 - Maya , livre ebook

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Description

Maya ou Adrien Adrien, mon mari. Il marchait droit. Fier. Heureux de fouler pour la première fois de son existence le sol africain. Heureux de me savoir avec lui en Côte-Ivoire et dans son cœur. Heureux de rencontrer, enfin, sa belle-famille. Depuis l’embarcation jusqu’à l’atterrissage, je n’étais pas en verve de mots. Ce qu’il remarqua aussitôt. Quand il avait voulu savoir, j’avais argué que retrouver ma famille me stressait à un point et que toutes ces années sans la voir avaient fini par être pour moi, un joug. Je lus dans son regard que ma famille n’avait pas d’autres choix que de l’accepter, pourtant ses lèvres ne purent me laisser entendre qu’unça va aller. Nous marchions tranquillement vers l’accueil quand je laissai subitement la charrette et d’un mouvement rapide, j’ôtai de mon doigt ma bague de marié pour le fourrer dans ma poche. Adrien désagréablement surpris, ne pouvait s’empêcher de me jeter un regard de braise avant de maugréer : - Tu es sérieux là, Ahmed ? Tu as honte de moi ? Il ne reçut aucun mot en guise de réponse et je continuai mon chemin. Je l’entendais derrière moi pousser des jurons. J’en étais vraiment désolé. J’étais conscient du mal que cela pouvait lui faire et j’en avais le cœur meurtri. Mais il le fallait. Je ne pouvais pas gâcher ces vacances d’été2021 et me mettre les parents à dos, après avoir fait près de quinze ans en France en venant leur annoncer subitement que j’aimais désormais les hommes et que j’étais même marié. Non !

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Informations

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Date de parution 21 juin 2021
Nombre de lectures 16
Langue Français

Extrait

Maya ou Adrien
Adrien, mon mari. Il marchait droit. Fier. Heureux de fouler pour la première fois de son existence le sol africain. Heureux de me savoir avec lui en Côte-Ivoire et dans son cœur. Heureux de rencontrer, enfin, sa belle-famille.
Depuis l’embarcation jusqu’à l’atterrissage, je n’étais pas en verve de mots. Ce qu’il remarqua aussitôt. Quand il avait voulu savoir, j’avais argué que retrouver ma famille me stressait à un point et que toutes ces années sans la voir avaient fini par être pour moi, un joug. Je lus dans son regard que ma famille n’avait pas d’autres choix que de l’accepter, pourtant ses lèvres ne purent me laisser entendre qu’unça va aller.
Nous marchions tranquillement vers l’accueil quand je laissai subitement la charrette et d’un mouvement rapide, j’ôtai de mon doigt ma bague de marié pour le fourrer dans ma poche. Adrien désagréablement surpris, ne pouvait s’empêcher de me jeter un regard de braise avant de maugréer :
-
Tu es sérieux là, Ahmed? Tu as honte de moi?
Il ne reçut aucun mot en guise de réponse et je continuai mon chemin. Je l’entendais derrière moi pousser des jurons. J’en étais vraiment désolé. J’étais conscient du mal que cela pouvait lui faire et j’en avais le cœur meurtri. Mais il le fallait. Je ne pouvais pas gâcher ces vacances d’été 2021 et me mettre les parents à dos, après avoir fait près de quinze ans en France en venant leur annoncer subitement que j’aimais désormais les hommes et que j’étais même marié. Non! Ils m’auraient renié, rejeté, peut-être même maudit. Et si jusque là les choses allaient bien pour moi et que mon séjour en France fut moins pénible, c’était justement à cause de leurs bénédictions. Je ne croyais certes pas vraiment en Dieu, mais je croyais en leur prière, en leur foi en lui.
Ma mère m’attendait impatiemment. Là, en vrai, elle était plus belle que sur ses photos qu’elle m’envoyait constamment sur WhatsApp et des larmes sorties de ses yeux pour courir dans toutes les rides qui ornaient son beau visage. Je courus me lover dans ses bras et je l’entendais bénir le Ciel de m’avoir gardé sain et sauf. Je la sentais tressaillir d’allégresse quand elle me couvrait de caresses tout le visage.
Dans le taxi qui nous conduisait à la maison, maman se réjouissait du fait que malgré toutes ces années, je n’avais pas pris une femme en France. Que pendant notre séjour, avant que je retourne, elle me trouvera une femme. Qu’aura choisi son cœur, qui me fera de beaux enfants, qui à coup sûr, me sera une bonne femme, soumise, conformément à nos coutumes. Telle cette épouse qu’elle a été pour mon père. Je ne faisais que sourire quand elle me disait tout ça, soulagé du fait qu’elle me parlait en Malinké et que mon mari Adrien n’en captait aucun son.
Le taxi gara devant une énorme bâtisse.
-
La voilà, la surprise, me dit maman.
Pour une surprise, c’en était vraiment une. Je venais de comprendre que l’argent que j’envoyais régulièrement afin d’assurer le quotidien de la famille avait servi à la construction d’un fastueux duplex. J’étais en admiration. Adrien aussi. Heureux que l’argent qu’il me donnait eût réalisé quelque chose de conséquent.
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Une autre surprise t’attend dans la maison.
Quoi, mon père avait abandonné son fauteuil roulant et marchait désormais? M’étais-je demandé? Alors je m’empressai de faire irruption dans la cour. Et qui vis-je? Maya! Mon Dieu! Mon sang ne fit qu’un tour et se figea. Mon cœur se mit à battre à tout rompre et un spasme s’empara de moi. Maya, mon amour de jeunesse était là, plus belle et plus mature qu’avant. J’avais envie de courir vers elle, la décoller et la couvrir de baisers, mais la voix d’Adrien qui s’exclamait devant la beauté de la maison me ramena à moi. On se fit une simple accolade, Maya et moi, tandis que toute la famille nous observait, heureuse de nos retrouvailles.
Maya, cette belle âme. C’était grâce à elle que je pus me rendre en France. En effet, après l’obtention de mon BAC, j’avais décidé d’étudier les sciences politiques et mon père avec son modeste salaire de garde-pénitencier ne pouvait pas me permettre ce luxe. Mais Maya, fille d’un homme politique du régime qui gouvernait dans le temps mis en jeu ses économies et usa des relations de son père pour m’octroyer le voyage. À l’aéroport, on s’était juré de ne jamais se laisser et que quand j’obtiendrais mes diplômes, je rentrerais en Cote d’Ivoire travailler et l’on se marierait! Aucun jour ne passait, sans qu’on ne se parlât, jusqu’à ce que survienne la crise poste électorale en 2010 qui a vu le régime auquel appartenait son père être renversé. Contrainte à l’exil, elle avait tout perdu, mes contacts aussi. Le bonheur que c’était de la revoir en ce moment-là.
Adrien et moi avions depuis la France réservé une résidence où passer nos nuits durant le séjour, mais mes parents exigèrent que je dorme à la maison avec eux. Ce que je lui fis comprendre difficilement, car lui aussi avait besoin de passer ses nuits avec son mari. Je l’accompagnai tout de même à l’hôtel. Une fois là-bas, il voulut qu’on fasse l’amour. Mes sens ne purent le permettre et c’est frustré, que je l’y laissai.
Quand je retournai à la maison, au cours d’une réunion qu’avait convoqué mon père, il avait été décidé que je me marie à Maya. Ce que j’acceptai.
Maya et moi passâmes la nuit ensemble, et je lui fais l’amour, comme jamais, je ne le fis à personne auparavant, même pas à elle, dans le passé. C’était ainsi toutes les nuits et il faut l’avouer. J’étais en ce moment-là l’homme le plus heureux, et je voulais que ces vacances demeurent une éternité.
Et pourtant un après midi, Adrien ayant remarqué que je m’étais fait de plus en plus distant, vint me trouver dans ma chambre, pour qu’on discute. Il me clama son désarroi et exigeait que nous disions la vérité à mes parents sur notre statut matrimonial. Je lui fis comprendre que cela serait impossible pour moi de le faire. Il éclata en sanglots. Je le pris dans mes bras pour tenter de le consoler. L’étreinte favorisa un baiser et nous nous mîmes à nous embrasser langoureusement. Au même moment, Maya fit son entrée dans la
chambre. Quand elle nous vit, elle s’arrêta, comme pétrifiée face au spectacle qu’on lui offrait. Adrien et moi lâchâmes notre étreinte tandis qu’un objet quitta des mains de Maya pour choir sur le sol. Je me penchai pour ramasser et vis que c’était un test de grossesse, positif.
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Nous sommes mariés, lui et moi, fit Adrien, sur un ton sec. Et il partit à la résidence.
J’expliquai à Maya que les dires d’Adrien étaient vrais. Je tentai de lui faire comprendre que ma relation avec lui au départ était seulement pour de l’argent. Je lui expliquai qu’à la fin de mes études, j’avais été recruté par l’entreprise de Telecom dont Adrien et son défunt mari étaient propriétaires pour gérer l’aspect juridique dont ce dernier avait la charge. Le travail nous avait si bien rapprochés que nous finîmes par tomber amoureux et nous marier. Maya ne trouva aucun mot à me dire et sortit.
Les vacances étaient terminées et nous regagnions Paris. À l’aéroport, maman me demandait fièrement de revenir au plus vite récupérer Maya et le bébé qu’elle accoucherait bientôt. Je lui fis une promesse sans conviction et nous fîmes nos adieux.
Dans l’avion, je tremblais de tout mon être et déblatérais des mots que ne supportait plus Adrien.
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Ahmed, s’il te plaît, maitrise-toi! Je souffre autant que toi. Et ce n’est pas en plein vol que nous allons déballer nos problèmes conjugaux. L’endroit n’est pas idéal. J’en ai marre de cette vie que je t’impose. Je ne t’en voudrais pas, si tu décidais de me quitter.
Adrien jeta son regard contre le hublot et ne me dit mot.
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