Le prophète
208 pages
Français

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Le prophète , livre ebook

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Description

Ce livre évoque la grande figure du cheick El Hadj Omar Tal (1792-1863) encore bien présente aujourd'hui dans la mémoire africaine. La personnalité de ce chef religieux et grand conquérant est perçue à travers le regard et la vie d'une femme. Cette femme accompagna le cheick dans son épopée à la fois brillante et sanglante. Son récit passionné, montre l'ampleur des desseins du cheixk : il s'opposa au colonisateur français, voulut un islam mystique et épuré, rêva de ressusciter les grands empires passés du Soudan occidental, et pesa sur la formation du Sénégal actuel.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 décembre 2011
Nombre de lectures 88
EAN13 9782296476738
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le prophète

Récit du Sénégal
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-56701-6
EAN : 9782296567016

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Tristan Chalon


Le prophète

Récit du Sénégal


L’Harmattan
Roman historique
Collection dirigée par Maguy Albet

Dernières parutions

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Prologue. Le déjeuner
Le soleil déclinait. Une poussière d’or nimbait la côte des Almadies, ses falaises, ses récifs. Les pêcheurs de Ngor attelés à leurs pirogues les halaient sur la grève. Bariolées de teintes vives, décorées de croissants, d’étoiles, de chevrons, les pirogues reposaient couchées sur le flanc. A chaque extrémité elles portaient un éperon usé par la vague marine. Les plus grandes avaient été creusées à l’herminette dans un seul tronc de kapokier et il fallait dix ou douze rameurs pour les propulser. Les femmes de Ngor et des villages voisins accouraient acheter un poisson, des crevettes géantes, des oursins qu’elles cuisineraient ce soir. Elles se pressaient, elles se bousculaient en riant autour des corbeilles pleines de soles, de thons, de sardines qui frétillaient. Elles se penchaient sur les nasses où rampaient des homards. Elles examinaient les bourriches d’huitres de palétuviers. Ces huitres – originaires de la mangrove des « Rivières du sud » – étaient élevées dans les parcs de la côte. Les pagnes fleuris des femmes, leurs tuniques brodées de perles en pâte de verre, les foulards noués sur leurs cheveux, l’écharpe qui serrait leur taille composaient un parterre de couleurs contrastées.
Une vieille femme observait l’animation joyeuse de la plage. Assise à l’ombre d’un palmier, Suleïma respirait avec plaisir l’air marin. Elle était en compagnie de Mohammed le lettré. Le jeune homme appartenait à la famille des griots du village. De père en fils les griots étaient porte-parole du groupe et dépositaire de sa mémoire, à la fois hérauts, généalogistes, poètes, musiciens. Auprès de son père, Mohammed veillait à enregistrer les exploits, les traditions, les légendes de la presqu’île du Cap Vert, de la fédération des Lébous, de ses clans et de ses peuples. Il ne se séparait pas de son cahier ni de son écritoire : bien que sa mémoire orale fût excellente, il s’aidait de l’écrit et il avait l’habitude de prendre en notes sur un cahier d’écolier les récits, les contes, les épopées qu’il recueillait de la bouche des anciens.



Mohammed avait fréquenté l’école coranique et l’école française. Aussi loin qu’il remontât dans ses souvenirs, les Français – même invisibles – étaient présents. Il savait bien qu’ils n’étaient là que depuis peu. Mais leur présence lui paraissait plonger dans un passé immémorial.
- Quand tu es née, demanda le griot à Suleïma, les Blancs étaient-ils déjà installés sur cette terre ?
- Mais oui, depuis longtemps.
- Depuis longtemps ?
- Enfant, je le croyais du moins. Mais plus tard j’ai rencontré un homme, celui dont les Blancs n’aiment pas parler, dont ils ont proscrit jusqu’au nom. Cet homme m’a appris que les Blancs n’étaient pas ici depuis toujours, que ces Infidèles n’occupaient que depuis peu ce pays, que cette terre d’Afrique ne leur appartenait pas {1} .
- Qui est cet homme ?
- Je te le dirai un jour.
- Vit-il encore ?
- Il a disparu au monde, il y a bien des années. Il est mort vaincu, désespéré, disent les uns. Moi je l’ai vu monter au ciel sur un cheval blanc dans une lumière éblouissante. La montagne grondait et devant lui les nuées s’écartaient. Oui, de mes propres yeux, j’ai assisté à ce miracle. Et d’autres peuvent aussi en témoigner.
- Tu connaissais bien cet homme ?
- Nul ne saurait prétendre avoir bien connu cette personnalité exceptionnelle de science et de piété. Mais j’ai partagé un peu sa vie. J’ai retenu sa parole, j’ai écouté ses enseignements, j’ai prié selon ses conseils. Il m’appelait parfois sa fille spirituelle et je peux dire que ma vie s’est arrêtée quand il a rejoint l’éternité.
- Mais ta vie ne s’est pas arrêtée.
- Je veux dire que mon cœur est mort et mortes les grandes espérances que ce saint homme avait fait lever en moi.
- Quelles grandes espérances ?
- Je t’en ai dit assez pour ce soir. Il est temps maintenant que je rejoigne ma case et que je prépare le repas.
Mais Suleïma ne bougea pas. Elle regardait l’océan qui palpitait dans l’embrasement du couchant. Un vol de pélicans attirés par l’odeur alléchante de poisson tournoyait dans le ciel. La plage s’endormait. Des odeurs de grillades et d’épices venaient du village où les femmes cuisinaient en plein air. Juché sur son promontoire volcanique, le phare des Deux Mamelles avait allumé ses feux. Plus loin, le phare du cap Manuel lui répondit en lançant son rayon à intervalles réguliers. Venu du large, un cargo se dirigeait vers le port. Une brume de chaleur enveloppait au loin Dakar. La petite ville se préparait au sommeil. Le silence du crépuscule ciselait les quelques bruits attardés qui montaient du port, le cri d’une sirène, le sifflet d’une grue à vapeur, une locomotive qui haletait. Enfin, Suleïma se leva et s’éloigna.
Cette vieille femme étonnait Mohammed. Le jeune griot cherchait depuis longtemps à mieux la connaître. Il était persuadé que sa vie contenait un secret. Elle était différente des autres femmes du village. Elle était venue d’ailleurs, de nulle part. Son teint pâle, ses yeux clairs, des reflets henné sur ses cheveux blancs indiquaient des origines mystérieuses, un métissage. Mohammed avait interrogé autour de lui. Mais Suleïma ne s’était jamais confiée à personne, ni aux anciens, ni aux commères du village. Il y avait plusieurs décennies qu’elle était arrivée comme épouse de Hadji Hossein. Sa beauté était alors éclatante. Cette beauté avait disparu depuis, mais il en subsistait un charme, comme un reste de parfum dans une chambre abandonnée. Le jeune griot rangea son cahier et son écritoire dont il tirait sa subsistance comme écrivain public. Il rejoignit son père qui fumait sur le seuil de la case. Sa mère Khalidja pilait du riz. Sa sœur ranimait le feu en puisant à mesure dans le tas de bois mort. Les chèvres se promenaient en bêlant doucement. Elles avaient soif.
- J’ai obtenu d’elle une demi-confidence, dit le garçon à son père, mais sous forme d’une allusion vague.
- « Elle » est secrète, répondit son père, secrète par modestie

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