Aimez-moi ce soir
50 pages
Français

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Description

Théodore ROUMA, l’aventurier, le cambrioleur mondain, reçoit Claire, la demoiselle qu’il a connue et aimée, quatre ans auparavant lors d’une ancienne affaire.


Trop jeune alors, il ne voulut pas lui faire partager sa vie dissolue.


Six mois après cette séparation, Claire épousa par dépit, un marquis.


Celui-ci est mort il y a quelques semaines dans un accident de chasse.


Accident ? L’enquête menée par l’inspecteur Larbart semble plutôt pencher pour un acte criminel initialement fomenté contre la mariée.


Mais, foi de Théodore ROUMA, personne ne touchera un cheveu de sa belle et douce Claire...


Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 0
EAN13 9791070031964
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

AIMEZ-MOI CE SOIR…

Par
Jean d’AUFFARGIS
CHAPITRE PREMIER
CE FUSIL, C'ÉTAIT LE MIEN...
 
Théodore Rouma entendait mal la jolie Claire d'Elbreuse, ou plutôt les paroles de la jeune femme ne lui parvenaient que d'une façon indistincte, lointaine, comme au travers d'une vitre.
— Vous ne m'écoutez pas, grand ami ?
Sincère, il fit non de la tête.
Elle insista et sa voix eut une inflexion suppliante :
— Mon grand ami ! Je vous en prie... Cette inexplicable menace... M'abandonnerez-vous ? J'aurais cru...
Il prit la main qu'elle lui tendait en tremblant un peu.
— Qu'aviez-vous cru ?
Une légère flamme rosit les joues de Claire. Pourquoi n'osait-elle plus aller jusqu'au bout de sa pensée ?
— Il ne faut jamais croire, Claire, il faut être sûre, toujours... articula lentement Théodore Rouma. Vous n'imaginez pas que je vous aie oubliée... que j'aie pu un seul instant oublier la chère petite amie qui me dit un jour : pourquoi me fuir, pourquoi ne pas m'emmener ?
Une lueur passa dans les yeux azurés de la jeune femme et un imperceptible sourire erra sur ses lèvres.
— Théo... Pourquoi m'avoir refusée.
— Je vous aimais. Vous n'aviez pas vingt ans et moi... Ma vie est un jeu atroce, un jeu auquel je n'avais pas le droit d'associer la jeune fille que vous étiez.
— Et maintenant ?
— Maintenant, rien... répondit Rouma comme dans un souffle.
Elle enleva son feutre, dénoua sa chevelure qui retomba immédiatement sur ses épaules en cascade du blond le plus tendre. La gorge, plutôt menue d'apparence, mais bien modelée, palpita. Il détourna les yeux, mais sentit le frôlement de son regard. Elle vint s'asseoir sur le bras même du fauteuil de Rouma. Lentement, elle passa son bras derrière la tête du célèbre aventurier.
— M'aimes-tu toujours ?
— Claire ! Je vous en supplie, Claire !
Elle se pencha, offrit ses lèvres et lui souffla en plein visage, les yeux brillants :
— Embrasse-moi...
— Chérie, soyez raisonnable, pensez à ce qui vous amène ici. Tout à l'heure nous...
— Non, tout de suite, rectifia-t-elle avec douceur. Embrasse-moi tout de suite que je ne te perde plus. Car je suis libre de t'aimer et voici quatre ans que j'attends cette minute...
Un grand trouble envahit Rouma, qui saisit par la taille ce corps qui s'abandonnait. Ils restèrent longtemps ainsi, blottis dans le même fauteuil. Des braises, prêtes à s'éteindre dans une cheminée à grand manteau, jetaient de petites lueurs dansantes sur le tapis. Et tandis que Claire paraissait suivre le jeu des lumières, c'est au passé de la jeune femme qu'allait la pensée de Rouma.
Claire Falgerolles... L'affaire de Montsalers (1) . Le corps momifié de la grand-tante de Claire retrouvé par Rouma dans un manoir abandonné. Il y avait quatre ans de cela ! Elle avait été conquise par son prestige d'aventurier redresseur de torts, en lutte contre la société. L'avait-elle aimé dès le début ? En tout cas, c'était bien dans cette allée du bois de Boulogne qui longe le champ de courses d'Auteuil qu'il en avait eu la brusque révélation. Mais il venait de le lui répéter : avait-il le droit d'associer ses vingt ans à sa vie de tumultes et d'orages ? Il avait interrompu leur promenade :
— Vous allez me dire adieu ici, petite fille. Sans un mot, sans un geste, rien qu'avec votre regard. Et quand je partirai, vous rentrerez chez vous, sans vous retourner !
Était-il sûr d'avoir eu raison ? Il ne savait plus... Six mois plus tard, les journaux annonçaient le mariage de Claire Falgerolles, petite-fille et héritière du magnat Antoine Falgerolles – textile, finance et politique – avec le marquis Amable d'Elbreuse. Il avait assisté à la cérémonie, noyé dans la cohue élégante et titrée. Mais huit jours après, Claire était chez lui : elle n'aimait pas son mari. Rouma l'avait renvoyée, une fois, deux fois, puis ne l'avait plus revue. Enfin, il y a quelques semaines, il avait appris la fin tragique du marquis survenue au cours d'une partie de chasse. Et ce matin, son coup de téléphone, son affolement :
— Il faut que je vous voie !
Chère petite Claire, son seul grand amour, pourquoi la vie s'acharnait-elle à ce point sur elle ?
Non, les années ne l'avaient pas changée ! C'étaient toujours ce même visage d'une excessive douceur, éclairé d'yeux, dont le bleu splendidement pur paraissait évoquer l'infini des horizons regrettés, ce corps svelte, fier de la plénitude de la chair, ces jambes bien galbées, aux pieds nerveux... Comme elle était belle !
 
* * *
 
Un peu plus tard, Théodore Rouma et Claire d'Elbreuse étaient assis l'un à côté de l'autre, sur un divan, devant une table où, discrètement, Gilbert, le valet de chambre du « patron », avait servi le souper. Théodore était d'admirable humeur. Claire le laissait se raconter, prenant un plaisir évident aux histoires qu'il narrait. Le petit salon lui apparaissait comme le plus séduisant des refuges. À dire le vrai, il était somptueux, boisé blanc et or, agencé avec goût. Des toiles de prix, appendues aux murs, attiraient autant les regards que les vives et chaudes couleurs des sèvres, les émaux de Limoges et ces magnifiques vases étrusques sur fond rouge garnissant des meubles d'ébène à hauteur d'appui. Le parquet était recouvert de tapis de toute beauté, patiemment décorés par des artistes orientaux. Claire savait que son ami était un collectionneur passionné de semblables merveilles... mais elle n'ignorait pas non plus que Rouma, sous l'un de ses nombreux noms d'emprunt, jouait les riches antiquaires. Une saveur grisante, le sentiment du bonheur absolu que procure la certitude de se savoir aimée, l'avait délivrée de ses angoisses. Aussi ne put-elle se défendre d'un léger tremblement lorsque Rouma, passant son bras derrière ses épaules, lui dit comme négligemment :
— À propos, chérie, à quelle chose faisais-tu allusion tout à l'heure ?
En même temps qu'il accentuait la pression de son bras, il la fixait d'un regard aigu. Autant les yeux de Claire semblaient le reflet d'un ciel pur, autant ceux de Rouma, extraordinaires de profondeur et de puissance étaient sombres. De grande taille, le visage net, le pli de la bouche un peu ironique, les cheveux bruns avec un soupçon d'argent aux tempes, Rouma affectait ordinairement une nonchalance trompeuse, destinée à masquer une attention toujours aux aguets. Il n'échappa pas à son œil exercé que sa question avait rejeté sa compagne dans une inquiétude qu'il s'était employé jusqu'ici à lui faire oublier.
Ses doigts pianotèrent l'ondoyante chevelure aux reflets d'or.
— Peureuse ?
Elle s'en défendit mal.
— Non, mais...
Son corps était agité de tremblements convulsifs.
— Mon petit, laisse faire les nerfs. Nous n'avons parfois aucun empire sur eux.
Sa voix, aux tons chauds et graves, avait des inflexions tendres, rassurantes.
Il lui offrit une cigarette, en alluma une autre. Deux longs rubans de fumée bleue montèrent vers le plafond, s'enroulèrent pour ne plus faire qu'un.
— Il s'agit, n'est-ce pas, de la mort de ton mari, le marquis d'Elbreuse ?
— De son assassinat, rectifia-t-elle, dans un souffle.
Elle avait eu le temps de se ressaisir.
— Amable, poursuivit-elle, n'est pas mort dans un accident de chasse. On l'a tué ! Et maintenant, c'est sans doute à moi que vont s'en prendre ses meurtriers.
— Et quels sont ces gens qui ont si furieusement envie de me voir passer à l'action ?
Claire se détendit tout à coup. Pouvait-elle encore craindre, dès lors que Rouma se plaçait délibérément entre elle et ses tourmenteurs. Lui jouait toujours avec les blondes ondulations, laissant parfois glisser ses doigts sur les tempes, le long des joues, sous le menton de la jeune femme, en lui faisant redresser la tête comme à une fillette que la maman interroge.
— Il ferait beau voir que l'on touchât un seul de ces cheveux-là ! dit-il encore.
Le ton était bas, mais il y avait une menace subtile dans la voix. Mais seuls ceux qui avaient déjà vu...

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