Car mon péché, moi, je le connais...
133 pages
Français

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Description

L’aube ne se lève pas pour tous. Pas pour une fillette de dix ans... L’inspecteur, Vincent Duval, métis franco-amérindien, a intégré depuis quelques mois l’équipe du commissaire Filipi. Avocat, il voulait connaître l’envers du décors. Et le rideau qui se lève sur cette aube macabre offre un spectacle trop sordide pour que Vincent et ses coéquipiers en sortent indemnes. Car à cette aube succèdera une autre aussi cruelle, et encore une autre... Et les visages des fillettes assassinées viendront assombrir de leurs sourires les jours de Vincent et de ses frères de traque.

Informations

Publié par
Date de parution 04 novembre 2013
Nombre de lectures 2
EAN13 9782312015200
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0012€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Car mon péché, moi, je le connais…
Patricia Bertin
Car mon péché, moi, je le connais…














LES ÉDITIONS DU NET 22 rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes
© Les Éditions du Net, 2013 ISBN : 978-2-312-01520-0
Chapitre I
Aube du mardi 5 août 1997.
« 5 h 49, annonça une voix grave donnant à cette affirmation un avant-goût de sentence. Fin de l’interrogatoire de Régis Verras. Officiers de police judiciaire présents : Fanny Lebel, Paul Fortin et Vincent Duval. »

Le cliquetis sec de la touche du magnétophone provoqua un sursaut chez le prévenu qui, après quarante six heures de joute verbale, s’était, un bref instant, avachi sur sa chaise.
Régis Verras avait prouvé, à ses inquisiteurs, son endurance et sa capacité à rendre coup pour coup. Mais une baisse de vigilance, à l’approche du dernier round, l’avait empêché de flairer la question piège. Une question anodine, balancée par Duval au milieu d’un mitraillage mené de concert par ses coéquipiers, le déséquilibra. Une question qui concernait le contenu d’un réservoir d’essence. Une réponse sans calcul jetée dans la mêlée. Soudain, dans l’espace saturé de fumée, le silence s’imposa.

Lebel et Fortin abandonnèrent la mise à Duval. L’inspecteur, un sourire imperceptible aux lèvres, une lueur de contentement dans le regard, s’approcha. Il s’assit à l’angle de la table, et méthodiquement reprit les déclarations de l’homme…
Verras bafouilla, se contredit, s’énerva et avoua. L’aimable et très respectable fabricant de salle de bains, féru d’art de la Renaissance, reconnut avoir commis six meurtres crapuleux. Dont le dernier sur la personne de son beau-frère qui lui avait refusé un prêt à l’amiable. Mais, vindicatif, l’assassin refusa d’indiquer le jardin secret où reposaient ses victimes.

« Victimes ! se rebella l’accusé, fidèle à une logique toute personnelle. Moi, j’estime qu’ils l’ont bien cherché, leur billet pour l’éternité. »

Duval, suivant aussi sa propre logique, déclara qu’il visiterait volontiers l’ancienne propriété familiale des Verras, en Normandie. L’homicide, multi récidiviste, se défendit d’un rire gras.

« Il y a dix ans qu’elle est vendue cette bicoque.
– Vendue, mais négligée par un promoteur en faillite. Une belle demeure, sur un si grand terrain, quel gâchis ! »

Régis Verras cessa de rire.

Quelques minutes plus tard, installé devant son ordinateur, Fortin relut le procès-verbal et en corrigea les fautes de frappe.


Dans cette équipe de mousquetaires, Paul Fortin tenait le rôle du vieux routier au côté du commissaire Filipi. Il abordait la quarantaine comme un gosse qui, emporté dans un jeu avec les copains, n’avait pas vu tomber le soir.
Le nuage de fumée, qui s’échappait sous ses moustaches soigneusement peignées, le précédait. Son tablier de sapeur était surmonté d’un nez légèrement épaté, d’une paire d’yeux pers riant sous la broussaille de ses sourcils, et d’un front dévoré par une ondulante et indisciplinée chevelure châtain.
Sa figure avenante de petit commerçant surplombant des épaules de déménageur de piano, laissait souvent pantois ses adversaires qui, de prime abord, le jugeaient inoffensif. Le genre fonctionnaire peinard qui attend sa retraite. D’ailleurs, lorsqu’il maîtrisait la situation, il se prêtait volontiers à ce rôle plein de bonhomie franchouillarde. Mais dès que le contrôle de l’interrogatoire lui échappait, il changeait les règles du jeu. Alors, pour l’interpellé, il se révélait redoutable.
Paul, malgré son souffle altéré par une consommation abusive de tabac et sa bedaine alimentée de bière brune, conservait une promptitude à réagir et agir, à en faire baver de jalousie la jeunesse sportive et saine.


Régis Verras, dans une ultime fanfaronnade, réclama le dernier cigare du condamné. À sa grande stupéfaction, Duval exhiba de la poche de son blouson en jean un étui métallique qui contenait sa réserve de Robt Burns. Il lui tendit la boîte. Sans quitter des yeux le policier, le futur inculpé saisit un cigare et le colla entre ses lèvres épaisses. L’inspecteur fit craquer une allumette et avança le capricieux feu follet vers le cylindre de tabac. À travers ce fragile rempart d’or, les deux hommes s’affrontèrent du regard. Puis Verras tira rapidement deux bouffées, élevant ainsi entre eux un épais voile de fumée brunâtre.

Fortin consulta le calendrier de sa montre et termina le procès-verbal par :
« Paris le 5 août 1997 ! »

Lebel se pencha vers l’imprimante et attendit l’apparition du document.
« Tu nous relis ça, ordonna-t-elle en remettant la feuille imprimée à l’homme qui, paupières mi-closes, s’adonnait sans vergogne à l’ivresse du puissant tabac. Tes aveux, tu nous les paraphes comme un acte notarial. »


Fanny Lebel, trente et un ans, était la benjamine de l’équipe. Son sang froid, maintes fois mis à l’épreuve, et sa résistance physique de sportive de compétition lui avaient valu la considération de ses collègues. Ses compétences lui avaient permis d’intégrer, au grand dam de postulants plus anciens, la brigade criminelle sous les ordres de l’honorable commissaire Filipi.
Fanny, à la première rencontre, offrait deux grands yeux d’un vert dérobé aux vitraux gothiques. Un vert qui, embrumé de larmes, vous brûlait. Un vert qui, envahi de colère, vous coupait. Un casque de soie rousse protégeait son front, ses tempes et ses petites oreilles sans parure. Ses lèvres légèrement peintes dessinaient, aux instants de trêve, des sourires de petite fille.
De ce visage ovale, qui rivalisait en harmonie avec les effigies des reines égyptiennes, se dégageait une certaine fragilité que démentait son corps en action.


Verras, jouant au bon perdant, obtempéra avec la moue dubitative qu’afficherait un rédacteur en chef gaspillant son temps à superviser la mauvaise littérature de la rubrique des chiens écrasés . Il se permit d’émettre quelques réflexions sur le style, qu’il jugeait plat et alourdi de jargon, avant d’écrire la mention, « lu et approuvé », et de signer d’un geste magistral.

Retranché dans son coin, Duval observait le suspect. Il se remémorait le moment où l’individu avait pris physiquement conscience de sa mise en garde à vue. Tout basculait pendant la scène du dépouillement des affaires personnelles. Qu’il soit par la suite déféré devant le juge, ou qu’il soit libéré, cette expérience traumatisait le justiciable. L’inspecteur suivait toujours avec énormément d’intérêt ce cérémonial. Les objets parlent tant de leur propriétaire !
Les montres par exemple… Les montres trahissent l’appartenance à une classe sociale et témoignent d’un caractère : richesse, goût du pouvoir ou de la performance, esprit de fantaisie ou ludique. La montre à gousset exprime une nécessité d’élégance, celle rutilante exhibe une aisance réelle, celle surchargée d’informations, du calendrier au chronomètre, segmente le quotidien de son porteur.
La manière de consulter cet instrument de mesure fascinait Duval. Régis Verras avait, tout au long de sa garde à vue, cherché et trouvé ce repère temporel sur le poignet de ses adversaires. Ainsi il parait à l’inquiétude d’ignorer le nombre d’heures, de minutes, qu’il lui restait à combattre.
La perception que les hommes ont du temps reflète tant celle qu’ils ont de la fin du temps, de la mort. Cet homme qui venait de signer ses aveux savait que son temps s’était arrêté et qu’une nouvelle chronologie commençait, plus lente, plus lourde…

Durant la lecture de ses aveux, son cigare, aux trois quarts consumé, s’était éteint. Verras l’écrasa sur un coin de la table. Il se mit debout, et, théâtral, avança les mains pour être menotté. Fortin, d’un mouvement brusque, lui replia les bras dans le dos et referma les bracelets d’acier.

« Avez-vous bientôt fini ? demanda un gardien de la paix en surgissant dans la salle d’interrogatoire.
– Le colis est prêt à être expédié a

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