Iggins & C° détective - Tome 1
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Iggins & C° détective - Tome 1 , livre ebook

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Description

Tout le monde se souvient du « Mystère des trois crimes » qui se sont déroulés dans la demeure du sénateur Eustache Poivrier.


Ce dernier y fut retrouvé mort, une balle dans la tête, après avoir été égorgé, auprès de sa fille, également abattue par un projectile dans le front.


Non loin des deux corps gît celui d’un inconnu, assassiné de la même façon...


Mais ce qui désempara la police officielle fut que toutes les balles provenaient d’armes différentes, dont celle qui tua le père et qui appartenait à son enfant...


Ces meurtres sanglants et ceux qui suivirent seraient demeurés irrésolus si les membres de l’agence de détectives IGGINS & C° ne s’étaient pas lancés sur la piste du ou des coupables avec le succès que l’on sait et que vous allez découvrir maintenant...

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Informations

Publié par
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EAN13 9791070039281
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

IGGINS AND C°

Plus de deux ans se sont écoulés depuis que le sénateur Poivrier, ancien ambassadeur, ancien ministre des Affaires étrangères, grand-officier de la Légion d’honneur, fut trouvé égorgé dans sa villa du Raincy. Je puis donc dire enfin toute la vérité sur ce crime singulier et sur les drames inimaginables qui le suivirent.
Cette vérité entière, je pense être seul à la posséder aujourd’hui, puisque mon ami Paul Dalton n’a pas reparu au jour qu’il avait fixé, et puisque je n’ai d’autres raisons pour ne pas affirmer sa mort, que la foi aveugle qu’il avait su m’inspirer. Donc, c’est de moi qu’on saura tout.
Un mot encore : je ne suis pas un romancier, je suis un témoin qui raconte, au jour le jour, ce qu’il a vu. Et, pendant les deux mois magnifiques que j’ai vécus, après la découverte du crime, aucune journée ne passa sans apporter son mystère. C’est là, si je ne m’abuse, ce qui distinguera ce reportage véritable des récits imaginaires. Sur une affaire qui passionna le monde entier et dont le scandale n’est pas encore éteint, sur une affaire où la loyauté la plus claire se mêla à la plus étrange imposture, et où le plus pur amour faillit sombrer, le public mènera quotidiennement l’enquête, comme je la menai moi-même jadis — avec Paul Dalton, hélas !
I
PAUL DALTON

Il y avait bien longtemps que je n'avais vu Paul Dalton, lorsque le hasard me mit en sa présence, sur le boulevard des Italiens, ce jour de juillet que je n'oublierai plus désormais. Depuis plusieurs années je roulais le monde. La mort brusque de mes parents, la perte d'un frère que j'aimais m'avaient laissé un tel désespoir que la vie monotone de France m'était devenue insupportable. J'étais riche. J'entrepris de grands voyages d'exploration. Nous sommes quelques milliers encore, dans ce pays, qui ne pouvons nous résigner à l'affadissement où une longue paix nous a plongés soldats sans emploi, rêvant aux aventures maintenant interdites.
J'avais parcouru l'Afrique, puis délaissé les nègres pour les Chinois. Puis j'avais risqué ma vie au Transvaal, et par ennui plutôt que par conviction, aux côtés des Boers.
Maintenant, je me retrouvais à Paris, aussi seul, aussi désabusé, aussi indifférent à tout, que je l'avais été avant mon départ. Et sans amis. J'en avais eu. Du moins j'avais cru en avoir. Ils m'avaient oublié, ou bien étaient perdus pour moi : mariés ou morts.
Or, je passais sur le boulevard, avant le dîner. Où dîner ? Ce problème quotidien que doit résoudre le célibataire, je l'envisageais, comme toujours, avec dégoût. Soudain, un homme se dressa devant moi : un homme petit, mince, rasé, en veston, et coiffé d'un chapeau mou, un binaire petit chapeau pointu à bords très courts. Il se dressa, dis-je, devant moi et me tendit la main.
Vallorbe ! Mon vieux Vallorbe !
Je serrai machinalement sa main et puis je le regardai, avec l'air à la fois affable et défiant qu'on a coutume de prendre lorsqu'un inconnu paraît vous connaître.
Allons ! dit-il, je vois bien qu'il faudra me résigner à une présentation. Mon cher Vallorbe, je te présente, ton ami Paul Dalton.
Paul Dalton ! C'était, de tous mes camarades d'autrefois, celui que j'avais le plus aimé. Sorti de Saint-Cyr, il avait, après trois mois de garnison, donné sa démission. Et puis il avait mené la plus fantasque existence. Durant plusieurs années, sa vie avait été une suite ininterrompue de coups de tête, de coups de folie, de coups d'audace, exécutés avec un perpétuel sang-froid. Jamais homme ne s'est analysé aussi parfaitement dans les crises violentes. Jamais homme n'avait aimé aussi complètement le danger et l'aventure, et pour eux-mêmes, pour le seul frisson qu'ils procurent. Jamais non plus personne n'en était sorti avec tant de bonheur, grâce à une singulière maîtrise de soi.
Quoi ! dit-il, ai-je tant vieilli ?
Je dus avouer qu'il n'avait pas vieilli. Il avait conservé son clair visage, où les yeux bleus brillaient d'une flamme aventureuse. Si petit qu'il fût, il donnait l'impression d'une souple vigueur. Il avait su se garder de l'obésité qui guette les ruffians attardés dans les ripailles. Il n'y a plus que dans les tableaux de Roybet que les hommes de force ont une bedaine épiscopale, des yeux injectés, un teint verdâtre et des ongles foncés. Paul Dalton, à quarante ans, mince, élégant, soigné, rasé, larges épaules et hanches étroites, restait jeune et prêt à affronter, pensais-je, de nouveaux périls.
Si je ne t'ai pas reconnu aussitôt, dis-je, c'est que tu as coupé ta moustache héroïque.
Il sourit :
Je te dirais bien que c'est pour obéir à la mode, mais il n'en est rien. Je l'ai coupée parce que c'est plus commode de n'avoir pas de moustache quand on en veut mettre une fausse.
Et brusquement :
Je suis policier, mon cher !
Policier ! Mon ami Paul Dalton était policier ! J'eus un haut-le-corps. Je partageais avec tous mes contemporains un grand et instinctif mépris pour la police. Ce qui ne m'eût pas détourné de l'appeler à grands cris si quelque danger m'eut menacée
Paul Dalton, cependant, fixait sur moi des yeux amusés.
Voilà ce que c'est, dit-il, que d'appeler les choses par leur nom. Je t'aurais dit : « Je suis directeur de la Société Iggins and C° », que tu aurais été immédiatement rassuré. Tu m'aurais demandé simplement : « Iggins ? qu'est-ce que c'est que ça ? ». Et tu n'aurais pas même écouté la réponse.
Au lieu, que, maintenant, je demande : Iggins, qu'est-ce que c'est que ça ? Et j'ouvre mes oreilles toutes grandes.
Et je réponds : Iggins est un homme admirable, un cerveau merveilleux. C'est Iggins. Où est-il né ? Je n'en sais rien. Un Américain du nord, probablement, ou un Anglais.
Comment ! Tu ne connais même pas la nationalité de ton associé ? Car, c'est ton associé ?
Oui, il est mon associé. Ou, plutôt, je suis le sien. Il est Iggins. Moi, je suis « and Co »... Pour sa nationalité, j'ai eu autre chose à faire que de la lui demander. Cela ne me regardait pas, et, à vrai dire, ne m'intéresse nullement. Il m'a sauvé la vie, deux fois, dans les pires circonstances. C'est le plus honnête homme de la terre, je suis sûr de lui comme de moi. Cela me suffit.
Et avec une espèce d'irritation, il continua :
Oui, cela me suffit ! Ceux qui n'ont pas de reconnaissance ne sont pas seulement méprisables. Ils sont stupides. J'avais connu Iggins en Amérique. Je l'ai retrouvé il y a trois ans, à Paris. Il organisait une vaste affaire. Une agence de police privée. Oh ! pas une petite affaire louche, dirigée « par un ex-inspecteur de la Sûreté ». Une grande affaire à l'américaine. Il m'a prié d'être son second. J'ai accepté sans examen. J'ai donné, sans reçu, l'argent qui me restait. Et voilà.
Et tu ne regrettes rien ?
Regretter ! dit-il avec un sourire superbe. Regretter quoi ? Je mène la vie que je rêvais. La perpétuelle aventure !... le danger !... Tiens, il y a huit jours, nous avons arrêté un chantage... une jeune fille... un vilain monsieur... un magnifique chantage... le revolver au poing !
Ah ! dis-je, le revolver au poing !
Touché ! mon cher, dit Paul Dalton. J'ai vu tes paupières battre et j'ai surpris un petit mouvement des narines qui ne trompe pas. Tu es pris. Tu es des nôtres.
Quelle folie !
Non. Tu es riche, tu es indépendant. Tu t'ennuies. Je te prends avec moi.
Et que dirait Iggins ? demandai-je, plaisantant encore.
Iggins ne dira rien. Dans notre association, chacun est libre de choisir le collaborateur qu'il veut et quand il veut. Il te suffira d'être présenté par moi. Tu suivras telle affaire... tu laisseras telle autre... Est-ce conclu ?
Non.
Si. Donne-moi ton adresse. À la première belle affaire, je te télégraphie de venir.
Je ne viendrai pas.
Il m'enveloppa d'un regard ironique :
Tu viendras.
II
LE CRIME

Deux jours après oui, le surlendemain exactement je passais devant l'hôtel du journal La Tempête, boulevard Montmartre. Une foule déjà considérable était rassemblée. Elle regardait un grand diable vêtu d'une livrée bleue qui était soudain apparu à une fenêtre du rez-de-chaussée et qui, trempant un pinceau dans une fiole de gouache blanche, se préparait à écrire sur la vitre les dernières nouvelles.
Le grand diable avait la mine importante qu'il prend toujours lorsque les phrases qu'il va tracer lui semblent particulièrement sensationnelles. Il mettait à nettoyer son pinceau un soin inutile et exaspérant. Enfin, il se décida et écrivit :

« M. le sénateur Eustache Poivrier... »

Et il s'interrompit aussitôt. Il descendit de l'escabeau où il était juché, saisit un torchon, remonta et effaça fort soigneusement ce qu'il venait d'écrire.
De la foule, un murmure monta. On trouvait que le grand diable en prenait bien à son aise avec l'impatience des bourgeois.
Dis donc, le vieux, t'as perdu ton alphabet ? cria un détestable gamin qui ne respectait rien.
Mais le grand diable, avec un zèle minutieux, continuait à frotter la vitre avec son torchon : circulairement d'abord, et puis longitudinalement. Après quoi, il reprit son pinceau et écrivit à nouveau, avec lenteur :

« M. le sénateur Eustache Poivrier... »

La suite ! cria le gamin.
Sans paraître entendre, le grand diable, qui tenait à embellir sa bâtarde, mit les accents et les points, coiffa le « P » de Poivrier avec un petit panache recourbé, retrempa son pinceau dans le godet, et écrivit :

« A... été... trouvé... mort... la... gorge... tranchée... »

Il s'arrêta de nouveau, avec un entêtement diabolique, pencha la tête en arrière pour contempler son œuvre, mit un point final. Cependant, la foule ne songeait plus à protester. Assassiné ! Poivrier avait été assassiné ! Personne n'ignorait le nom de ce haut personnage, ancien ministre des Affaires étrangères, sénateur de la Seine, membre de l'Académie des sciences morales et politiques. Qui l'avait tué ? Crime politique ? Crime passionnel ? En une minute, toutes les suppositions se donnèrent libre cours.
Cependant, le grand diable s'était décidé à continuer. Il écrivait :

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