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Herbert Meurisse est fondé de pouvoir dans une grande bijouterie. Il mène une vie de vieux garçon, mais rêve d’aventures.
Quand il s’éprend de Dolly Matthews, sa nouvelle secrétaire, une jeune femme ravissante fantasmant sur une existence luxueuse, il lui propose, après un dîner au restaurant, de prendre possession des bijoux rangés dans le coffre de son bureau et de s’enfuir ensemble vers un destin doré.
Mais les choses ne se passent pas comme prévu et, alors que le trésor lui tend les bras, un rire résonne dans la pièce...
Le lendemain, Dolly est retrouvée chloroformée sur place, Herbert Meurisse et les joyaux ont disparu. Au sol, du sang ; dans le coffre-fort, la carte de visite de John-le-Balafré, un cambrioleur insaisissable qui sévit depuis quelque temps dans la ville.
Bill DISLEY, qui a déjà écrit plusieurs articles sur le mystérieux voleur, va s’intéresser à l’affaire et, surtout, à Dolly...
AVANT-PROPOS
Pour ceux de nos lecteurs qui ne se seraient pas familiarisés avec BILL DISLEY et son existence trépidante de journaliste détective, nous rappelons que notre sympathique héros est le plus brillant reporter au « Star Express » , grand quotidien londonien dont BOB , dit « le Gros Bob », est rédacteur en chef.
L'habituel comparse de Bill est JEFF , ancien pickpocket notoire, géant à la compréhension lente, mais à la « droite » impeccable, dévoué corps et âme au journaliste qui le tira autrefois d'un mauvais pas.
L'inspecteur MARTIN est, dans la plupart des enquêtes, mêlé aux agissements de Bill. C'est un petit homme ponctuel, bourgeois et sévère, qui professe une grande amitié et une sorte d'admiration pour Bill, bien qu'il soit souvent heurté par la désinvolture avec laquelle notre reporter traite Scotland Yard, ses œuvres et ses pompes.
J.-A. FLANIGHAM.
I
M. Meurisse Herbert écarta légèrement le journal dans lequel il était plongé, il poussa un très léger soupir, ses doux yeux bleus prirent une expression légèrement perplexe, puis il écarta tout à fait le journal pour le poser sur la petite table, à portée de main, sur laquelle un verre de porto voisinait avec un cendrier fumant.
Ceci fait, M. Herbert Meurisse ôta ses lunettes, les tint entre ses doigts à respectable distance. C'est alors que Mistress Dawson fixa Herbert Meurisse, et, une fois de plus, elle fut étonnée du changement qu'apportait dans la physionomie de l'étonnant garçon, le port des lunettes.
Elle songea qu'il était ainsi étrangement rajeuni, et, mon Dieu, presque séduisant. Ses yeux n'avaient plus du tout cette expression amorphe, et par trop quiète, et tout bien réfléchi, M. Meurisse (Herbert), était un tout autre garçon sans ses lunettes.
Mistress Dawson posa sa broderie, et son regard s'adoucit pour questionner doucement :
— En vérité, monsieur Meurisse, que j'aime nos soirées du vendredi.
Une expression malicieuse passa comme un éclair dans le regard de l'homme qui affirma, d'un ton voilé :
— N'est-ce pas !
Mrs Dawson approuva d'un long signe de tête appuyé.
— Encore un doigt de porto ? questionna Herbert.
Elle rougit et dit oui.
Quand le verre fut porté à ses lèvres et qu'elle en eut absorbé une très courte gorgée, elle examina Herbert qui avait repris le journal, et elle songea, qu'en vérité, c'était un bien étrange garçon. Un soupir gonfla son cœur.
Mrs Dawson, veuve depuis quelque dix ans, était voisine de palier de celui qu'on appelait dans tout l'immeuble, avec une nuance de respect légèrement ironique « ce bourgeois de Meurisse » . Elle s'étonna, avec un léger effarement, en se reprochant comme une injure envers son ami, cette opinion qu'elle avait de lui, car, selon toute vraisemblance, il n'y avait rien au monde qui fut moins étrange que le régulier, ponctuel et tranquille M. Meurisse.
Depuis huit ans, il habitait l'immeuble. Depuis huit ans, on le voyait partir chaque matin à heure fixe (invariablement aux alentours de neuf heures, neuf heures un quart), et depuis huit ans, on le voyait rentrer vers dix heures chaque soir. On ne lui connaissait aucun ami. M. Meurisse ne recevait jamais de visites, et très rarement de lettres. Son appartement était meublé avec un goût exquis, on le disait fort aisé. En fait, et Mrs Dawson était une des rares à le savoir, il avait une fort belle situation, étant depuis dix ans, le fondé de pouvoir d'une des plus célèbres joailleries de Londres.
À la suite du veuvage de Mrs Dawson, ils avaient sympathisé tous deux, et, chaque vendredi, Mrs Dawson venait passer la soirée chez le tranquille petit M. Meurisse. Elle apportait invariablement un ouvrage de broderie, il lisait pendant une heure, au bout de laquelle Mrs Dawson posait sa broderie pour écouter M. Meurisse lui faire des commentaires sur sa lecture du jour.
Mrs Dawson poussa un nouveau soupir intérieur en songeant qu'elle aurait bien aimé qu'un jour ou l'autre, ce garçon charmant, qui la recevait chaque vendredi avec une aussi parfaite délicatesse, se déclarât enfin. Elle avait songé à différentes reprises que Herbert aurait été un compagnon tout à fait exquis pour une femme de sa trempe.
Mrs Dawson, délicate, rêveuse, toujours plus ou moins mélancolique, se sentait des foules d'affinités avec ce petit bourgeois timide, un peu timoré, et remarquablement effacé, dont l'imagination était débordante, quand il se laissait aller, et qui rêvait toujours à d'autres vies, d'autres horizons. M. Herbert, que la vie avait obligé à se confiner dans une existence toute droite et toute normale, rêvait, quand il pouvait se le permettre, à une tout autre existence, prodigieuse d'activité, de mouvement, de drames...
C'était, à sa façon, un romanesque.
Mrs Dawson adorait les romanesques.
Elle but encore une gorgée de cet excellent porto, posa définitivement sa broderie. Herbert ayant toussé d'une façon qui annonçait invariablement que l'heure de l'intime causerie était venue.
Il plia son journal, remit ses lunettes avec une sévérité un peu affectée, puis, penchant sa tête en arrière, il la laissa appuyée sur le dossier du fauteuil, pour dire enfin :
— Il n'est pas douteux que ce Bill Disley ait beaucoup de talent...
Un sourire rêveur éclaira le doux visage de Mrs Dawson.
— Vous étiez plongé dans une de ses histoires ?
Herbert approuva d'un hochement de tête prolongé. Il y avait dans ses yeux cette flamme inquiète et mélancolique que Mrs Dawson y lisait systématiquement quand il était question d'aventures invraisemblables. Car Herbert aimait à dire, d'une voix attardée à souhait, qu'il savait fort bien n'avoir pas été fait, à l'origine, pour être le fondé de pouvoir ponctuel et sévère d'une honorable maison de commerce. À vrai dire, il n'avait jamais confié à Mrs Dawson dans quelle branche précise son activité aurait aimé se dépenser. Elle savait seulement que les histoires policières le passionnaient. Souventes fois, Mrs Dawson s'était demandé : « Qu'aimerait-il être, au fait ? Détective, journaliste, bandit ? » Difficile à affirmer à coup sûr. Mais comme Mrs Dawson aimait, de temps à autre, laisser son esprit errer dans des labyrinthes invraisemblables et assez inavouables, somme toute, elle n'était pas loin d'imaginer Herbert Meurisse aux prises avec de furieuses difficultés, jouant du revolver, cassant les glaces et dirigeant une armée de truands.
... Ce qui était totalement loufoque, quand on se permettait de laisser son regard se poser quelques minutes de suite sur l'effacé, tranquille et légèrement ridicule petit bourgeois qu'était le fondé...