Le messager du diamantaire
72 pages
Français

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Le messager du diamantaire , livre ebook

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Description

Jack DESLY, cambrioleur de son état, durant ses moments de repos, s’adonne à une peu ordinaire gymnastique de l’esprit pour se détendre : lire la rubrique des « Petites Correspondances » du journal et imaginer qui et quel drame se cachent derrière les annonces.


Ce jour-là, c’est un entrefilet qui retient son attention : « Prière d’indiquer si les tulipes sont vendues ».


Étrange cette histoire de liliacées, d’autant que la fleur, il en est sûr, a déjà été évoquée dans les éditions précédentes.


Aussi, quand l’auteur des missives répond et donne rendez-vous le soir même dans un hôtel, Jack DESLY, attisé par la curiosité, décide de s’y présenter...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 février 2021
Nombre de lectures 1
EAN13 9791070034286
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

- 1 -

LE MESSAGER DU DIAMANTAIRE
Récit policier

Claude ASCAIN
CHAPITRE PREMIER
SIX MILLIONS DE PIERRES PRÉCIEUSES

M. Jans Kroonen, de la maison Kroonen et C ie , la plus importante taillerie de diamants de Rotterdam, releva ses lunettes d'or sur son front, prit un récepteur téléphonique et commanda :
— Envoyez-moi Deconninck !
— Ya, mynheer (Oui, Monsieur).
Le négociant hollandais se renversa quelques secondes sur le dossier de son fauteuil, examina ses doigts aux ongles taillés avec soin et attendit. C'était une sorte de géant, jadis roux, aujourd'hui grisonnant, gras et débonnaire. Il possédait une curieuse petite voix flûtée qui contrastait avec son corps immense. Ses yeux à fleur de tête, d'un bleu faïence sous les cils blonds, avaient une expression toujours contente.
Un coup léger retentit à la porte. Sur l'injonction de M. Kroonen, un homme entra. De taille moyenne, brun, le regard décidé, Deconninck était dans la force de l'âge.
— Ah, vous voici ! s'exclama le patron. Tout est prêt ? Quand partez-vous, Deconninck ?
— Ce soir même, Mynheer. Je prends le rapide de Paris à 22 heures.
— Très bien... Très bien... Vous me téléphonerez dès votre arrivée, n'est-ce pas... Comme d'habitude.
— Comme d'habitude, Mynheer, confirma l'homme qui ajouta : Et tout se passera, d'ailleurs, comme d'habitude.
— J'y compte, mon garçon, car vous emportez, cette fois, une grosse, une très grosse fortune... Dix millions de diamants, Potferdecke ! c'est quelque chose...
Deconninck ne sourcilla pas. Il articula simplement :
— Dix millions ou dix florins, Mynheer, cela ne fait pas de différence pour moi. Vous savez que je prends toujours les mêmes précautions. Le chargement se trouvera, comme les précédents, caché dans la ceinture de flanelle spéciale que j'enroule sur moi, à même la peau. Impossible de me dévaliser.
— Oui, je sais. Je suis tranquille avec vous, Deconninck. Mais tout de même, hein, ouvrez l'œil...
— C'est facile, je ne le ferme jamais en route.
M. Kroonen se mit à rire de satisfaction et se leva pour serrer la main de son employé qu'il accompagna jusqu'à la porte.
Comme il l'avait dit, le lot de pierres précieuses que Deconninck emportait était fort important. Mais le passager en avait l'habitude, car c'était en cela que consistait sa profession, celle de « courrier » pour le compte de la maison Kroonen et C ie . Les tailleurs de diamants hollandais et belges ont l'habitude de confier à un homme sûr les trésors destinés à leur clientèle étrangère. Depuis cinq ans, Deconninck — qui avait succédé à son père, admis à la retraite — s'acquittait de sa tâche à la satisfaction de tous.
Nul n'était plus régulier que lui. Du moment qu'il allait prendre le rapide de 22 heures, on pouvait escompter que le consortium parisien, pour le compte duquel la livraison était faite, recevrait son bien le lendemain vers midi. M. Kroonen avait fait prévenir les destinataires en conséquence, ajoutant que, de ses trois messagers, il avait choisi Deconninck pour le transport.
Les employés de la maison Kroonen et C ie savaient quel était le rôle du courrier, mais ils ignoraient — de même que pour les deux autres personnages chargés d'une besogne similaire — les dates de départ des envois de diamants. Mesure de prudence qui s'imposait, car il fallait toujours prévoir un danger quelconque et il eût été relativement facile de tendre une embuscade pour s'emparer du butin.
Non pas que M. Kroonen, avec son sourire fleuri, se méfiât spécialement de son personnel, mais la compagnie d'assurances avait exigé que les allées et venues fussent tenues secrètes.
De sorte qu'on ne savait jamais, quand Deconninck s'absentait, s'il partait avec une fortune sur lui ou non, pas plus qu'on ne savait quelle route il allait prendre. Ces choses étaient discutées uniquement entre le patron et le courrier dans le secret du cabinet de travail aux murs recouverts d'un épais capitonnage et dans lequel on ne pouvait pénétrer qu'avec l'autorisation de M. Kroonen.
Ainsi, par exemple, pour le voyage actuel, les employés ne comprendraient que l'homme était en mission que le lendemain matin, en ne le voyant pas apparaître. À ce moment-là, Deconninck serait, pour ainsi dire arrivé à destination.
Le négociant choisit dans une boîte un gros cigare noir et l'alluma avec componction. Il sonna son chef comptable qui travaillait dans le bureau attenant, et tous deux se mirent à travailler sur différentes questions d'ordre général.
Pendant ce temps, Deconninck qui, en temps ordinaire, assumait les fonctions d'employé aux écritures, était retourné à son pupitre où il continuait paisiblement sa besogne. Tout était prévu. À six heures et demie, il quitterait la maison comme les autres. Le soir, à l'heure ordinaire, on le verrait dans le petit restaurant où il prenait ses repas.
Il ferait sa manille comme tous les soirs, puis, la partie de cartes achevée, après dîner avec ses partenaires habituels, se dirigerait vers sa maison. Mais arrivé au bout de la rue, il continuerait à déambuler, comme en flânant, jusqu'à la gare.
Là, il dégagerait le sac de voyage mis en consigne depuis le matin et, toujours sans hâte, s'installerait dans son compartiment. Ainsi qu'il l'avait dit, les diamants se trouvaient déjà dans la fameuse ceinture, bien serrés sur ses flancs. Il sentait même, lorsqu'il faisait certains mouvements du torse, les aspérités des pierres taillées qui s'incrustaient légèrement dans sa peau et ce contact était rassurant au possible.
À vingt-deux heures, M. Kroonen se trouvait chez lui, assis dans son salon en face de sa digne moitié. Tous deux écoutaient en silence la T.S.F. Le négociant entendit sonner les dix coups au cartel, leva les yeux sur le cadran, et se dit intérieurement :
— Allons... Deconninck est en route...
Ce qui correspondait exactement à la réalité. Le rapide de Paris venait de s'ébranler et le courrier, assis dans un coin de son compartiment de seconde classe — toujours se méfier des premières, et quant aux troisièmes, elles étaient vraiment trop bondées — s'apprêtait à passer une nuit sans sommeil.
Nulle appréhension. Il éprouvait à l'égard de la fortune qu'il transportait, la même indifférence que celle d'un caissier de banque habitué à manipuler des centaines de mille francs, chaque jour de sa vie. Doué d'une sereine philosophie, Deconninck n'avait jamais éprouvé la moindre tentation. Il est vrai qu'un penseur cynique a dit : « Il ne faut qu'une fois... », mais le messager de la maison Kroonen et C ie en était encore à ignorer le sens de cette déclaration. C'est pourquoi son patron passa une nuit fort tranquille dans son lit, pendant que le convoi emportant son employé dévorait la route métallique tracée par les deux rails sans fin.

La matinée du lendemain fut, pour M. Kroonen, semblable à toutes les autres. Travail entrecoupé de gros cigares, coups de téléphone, dictée de courrier, entretiens avec des clients, etc., etc.
Ce ne fut que vers trois heures de l'après-midi qu'éclata la bombe. Sa standardiste venait de lui annoncer une communication de Paris. Il prit l'appareil, le visage béat :
— Allô ?... Oui, ici, M. Kroonen... Qui est là ?... Ah, Monsieur Deville, le président du Consortium . Oui... Très bien... Alors, cher Monsieur, vous êtes en possession de... Hein ? Vous dites ?
M. Kroonen, interrompu dans sa phrase, avait jeté ces deux dernières exclamations avec la voix d'un homme qui vient de recevoir un coup de bâton sur la nuque. Il balbutia :
— Je ne comprends pas très bien, M. Deville... Vous... Vous plaisantez, je suppose ?...
La réponse fut brève.
— M. Kroonen, vous divaguez !
— Excusez-moi... Je... Non, c'est invraisemblable ! Mon courrier est un chronomètre vivant. Il n'est pas encore arrivé ? Impossible... Non, je veux dire, fantastique... Il devrait être là depuis longtemps.
Le négociant, tout en écoutant M. Deville, essuya la sueur qui lui perlait aux tempes et brouillait les verres de ses lunettes.
Ce dernier avait téléphoné pour demander l'heure à laquelle Deconninck devait se trouver chez lui. Or, tous les calculs de ce pauvre M. Kroonen aboutissaient à cette constatation : son messager était parti à vingt-deux heures, la veille, il aurait dû avoir accompli sa mission

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