Le Retour du cabotin
139 pages
Français

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Description

Montréal 1979
Investissements Baker et Associés, une société de placements qui connaît un essor incroyable depuis quelques années, ferme ses portes du jour au lendemain. Plus de 300 millions de dollars d’investissement disparaissent, des milliers d’investisseurs perdent tout.
Frustré devant l’absence de résultats, le directeur général de la police de Montréal confie les rênes de l’enquête au lieutenant-détective Henri Patenaude. Quelques jours plus tard, ce dernier découvre avec stupéfaction que plusieurs éléments sont identiques à une fraude dont son père a été victime vingt ans auparavant et qui était l’oeuvre d’un criminel surnommé le Cabotin.
Naviguant entre le passé et le présent, le lieutenant-détective réussit à tisser des liens entre la fraude dont a été victime son père, la mégafraude qui ébranle le Québec et Paul Baker, simple comptable à la Banque Royale.
Son enquête se termine par un coup de théâtre qui surprend le coupable et le lecteur au moment où ceux-ci croyaient que l’enquête était terminée.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 octobre 2021
Nombre de lectures 0
EAN13 9782898310560
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1250€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

1
Montréal, lundi 11 juin 1979. Marc Dupuis venait de débarquer de l’autobus. Il souriait. À première vue, rien ne différenciait le jeune homme qui marchait sur le trottoir de la rue Sherbrooke d’un pas sûr des autres personnes qui, comme lui, se rendaient à leur travail. Un observateur attentif aurait noté qu’à vingt-cinq ans, il était un des plus jeunes du groupe à porter un habit fait sur mesure par un excellent tailleur ainsi que des souliers italiens de très bonne qualité et à avoir les cheveux frais coupés, ce qui lui donnait une allure très professionnelle. Le même observateur attentif aurait été cependant dans l’impossibilité de voir que, ce matin-là, Marc Dupuis était probablement le jeune homme le plus heureux du grand Montréal à se rendre au travail.
Il avait l’immense bonheur de travailler pour une entreprise qui lui offrait ce que tout être ambitieux désirait : un bon salaire, une généreuse allocation de dépenses, un horaire excessivement flexible et une possibilité incroyable d’obtenir des bonis de performance. Son bonheur était amplifié par les mesures incitatives majeures que son employeur versait tous les six mois à ses meilleurs gestionnaires de comptes et il savait déjà que, d’ici quelques heures, il pourrait prendre le volant de cette scintillante voiture sport dont il rêvait depuis toujours. Cette rutilante Porsche 911 rouge était réservée depuis plusieurs semaines et il en prendrait possession le soir même !
— C’est de la pure folie ! l’avait averti son père. Tu devrais garder ton argent pour les jours plus difficiles. Il n’y a pas que l’argent et les possessions qui représentent la réussite ; le bonheur est primordial.
— Tu ne comprends pas le monde d’aujourd’hui. Ce n’est plus comme avant ! avait alors rétorqué Marc.
Son père aurait bien aimé qu’il quitte la grande ville pour prendre la relève de l’entreprise familiale de meubles sauf que pour Marc Dupuis, si ce n’était pas Montréal, ce serait Londres, Paris ou New York, mais il était hors de question de retourner à Saint-Gérard de Magellan, le patelin de son enfance, là où était située l’entreprise qu’avait fondée son père.
Pendant plusieurs mois, il avait attribué son succès à la chance. Il admettait qu’il ne présentait pas le meilleur dossier académique de sa promotion et il n’avait effectué aucun stage au sein de grandes entreprises comme plusieurs de ses confrères. Il avait finalement déniché cet emploi auprès d’une petite société de gestion de fonds financiers après avoir cogné en vain aux portes des grands bureaux. Il considérait que l’expérience acquise au sein de l’entreprise de meubles détenue par sa famille avait fait de lui un excellent vendeur, qualité essentielle dans le monde financier. Aujourd’hui il était convaincu que si le succès était au rendez-vous, c’était uniquement parce qu’il était le meilleur. Il était ambitieux, travaillant et n’hésitait pas à prendre des risques. Bref, il aimait le monde de la finance.
Au cours des vingt-quatre derniers mois, Marc Dupuis avait découvert ce qu’était la « vraie vie » après avoir vécu en mode survie durant ses années d’études. Il avait aménagé l’an dernier dans un superbe appartement de près de 250 mètres carrés au centre-ville de Montréal et l’avait meublé et décoré au gré des recommandations de sa nouvelle copine, designer d’intérieur. Le loyer mensuel était tout simplement indécent, mais la vue imprenable sur Montréal habillée de ses lumières en soirée valait, selon lui, à elle seule les nombreuses soirées et fins de semaine consacrées à augmenter sa clientèle.
En se dirigeant vers les bureaux de l’entreprise, il se rappelait, en souriant, que le salaire initialement offert par Investissements Baker et Associés avait été relativement bas, pour ne pas dire ridiculement bas, mais comme cette entreprise avait été la seule à lui faire une offre, il l’avait acceptée sans même négocier. Le président de la société lui avait martelé l’esprit que les opportunités incroyables qu’offrait la jeune entreprise permettraient à tout bon vendeur de doubler, de tripler, voire même de quintupler son salaire de base.
— Je te fais confiance, jeune homme, lui avait répété maintes et maintes fois Paul Baker.
« Savoir accorder sa confiance aux bonnes personnes est la clé du succès en affaires » était le mantra de son patron. Cette confiance était réciproque. Au début de sa carrière, lorsque Dupuis avait le moindre problème à convaincre un client, il en parlait à Baker qui trouvait les arguments qui lui manquaient. De plus, Baker lui avait même permis d’offrir des avantages supplémentaires à ses clients en acceptant de réduire la commission que prenait l’entreprise.
En l’espace d’un an, il était devenu le meilleur représentant de la société et la direction de l’entreprise l’avait grassement récompensé. Le succès obtenu lors de cette première année n’avait pas été facile. Il travaillait pour une petite société peu connue qui offrait des produits que les gens ne connaissaient pas. Il devait donc fournir deux fois plus d’efforts que ses anciens confrères d’université qui profitaient de l’avantage non négligeable de travailler pour des sociétés avec de solides réputations. Il avait commencé par convaincre ses amis et ses parents d’investir une partie de leurs économies dans les produits offerts par la société qu’il représentait. Comme les rendements dépassaient de beaucoup ceux du marché, son entourage avait accepté d’investir et, par la suite, ses clients avaient parlé à d’autres gens de leur entourage qui étaient devenus eux aussi des clients. Le bouche-à-oreille avait fait des miracles et la clientèle de Dupuis avait dépassé rapidement son cercle de connaissances. Et depuis, chaque jour amenait de nouveaux clients qui, désireux de faire fructifier leur argent, lui confiaient leurs avoirs. Le succès obtenu lors de sa première année avait amené le président de la société à revoir à la hausse les objectifs de son jeune prodige, mais cela n’avait pas empêché Dupuis de les dépasser largement.
Aujourd’hui, il était déjà certain d’être, encore une fois, le meilleur vendeur et, cette fois-ci, le boni serait monstrueux ! Dupuis se disait qu’il n’aurait peut-être pas le choix de suivre les conseils de son père et de mettre un peu d’argent de côté, car il ne voyait absolument pas comment il pourrait dépenser cette somme d’ici à ce qu’il reçoive le prochain boni. Bref, se dit-il, le genre de problème que toute personne aimerait avoir!
* * *
Peter MacAdam était à l’emploi d’Investissements Baker et Associés depuis deux mois. Il était le gestionnaire de fonds avec le moins d’ancienneté, mais le plus expérimenté. Il avait œuvré pour l’une des plus importantes sociétés de placements de la métropole avant de joindre la petite entreprise dirigée par Paul Baker.
« Ma rencontre avec Paul Baker a changé ma vie », se plaisait à raconter MacAdam qui avait profité de l’offre de Baker pour se sortir d’une situation inconfortable. En effet, la société pour laquelle il avait travaillé depuis près de quinze ans avait refusé de le laisser négocier directement avec les gros clients, et ce, même si c’était lui qui les avait trouvés, car ceux-ci étaient réservés aux associés. La promesse d’être nommé associé lui avait été faite maintes fois au cours des dernières années et étant convaincu que cette nomination n’était qu’une question de semaines, il avait modifié drastiquement son rythme de vie : nouvelle voiture, voyages de luxe, grands crus bordelais, bijoux, et il ne s’était pas privé pour inonder son entourage d’innombrables cadeaux. Le temps passait, les dettes s’accumulaient, la promotion espérée avait été reportée aux calendes grecques. Il avait dû travailler près de soixante-dix heures par semaine pour éviter la faillite personnelle.
Aujourd’hui, le jeune professionnel de quarante ans se rendait, lui aussi, au travail avec le sourire. Il avait retrouvé un rythme normal qui lui permettait enfin de profiter pleinement de ce qu’il avait acquis au cours des dernières années. Il trouvait fantastique d’avoir été en mesure de bonifier son salaire de manière importante en très peu de temps. Le transfuge ayant réussi à amener avec lui une partie de ses clients, Investissements Baker et Associés lui avait offert la liberté d’action qu’il désirait et il avait enfin la possibilité de négocier avec des clients majeurs.
Depuis deux mois, Peter MacAdam était l’étoile montante de la société. Pour la huitième semaine consécutive, il avait doublé ses ventes et se voyait devenir le courtier le plus important de la société, devançant ainsi son confrère, Marc Dupuis.
Il ne se voyait pas comme un simple employé, mais plutôt comme le seul du groupe pouvant aspirer à la succession de Paul Baker ou, du moins, à un poste de vice-président. L’avenir était rose.
Peter MacAdam savait déjà que le boni qu’il recevrait bientôt serait plus gros que l’ensemble des bonis obtenus au cours des dernières années.
* * *
Marie Cadorette était secrétaire administrative au sein de la société Investissements Baker et Associés depuis maintenant trois ans. Elle en était d’ailleurs la première employée.
— Cet emploi m’a sauvé la vie, racontait souvent Marie Cadorette. Lorsque mon mari m’a quittée en me laissant les trois enfants, je me suis retrouvée fauchée et je devais retourner sur le marché du travail rapidement et Investissements Baker et Associés a vraiment été ma bouée de sauvetage. Ce qu’elle ne disait pas, c’est que son expérience de secrétariat remontait à plus de quinze ans, c’est-à-dire avant qu’elle ait des enfants et qu’à l’exception d’une maîtrise de l’anglais acquise au cours de son adolescence passée dans l’Ouest canadien, elle était sous-qualifiée pour un poste de secrétariat. Cela avait été confirmé par les nombreuses demandes d’emploi demeurées vaines. Elle ne disait pas non plus que seul l’instinct de survie lui avait fait accepter l’offre d’emploi à un salair

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