Les millions de la princesse
49 pages
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Les millions de la princesse , livre ebook

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Description

Thédore ROUMA, le célèbre cambrioleur, n’avait pas prévu de s’éprendre de la propriétaire de la banque qu’il s’apprête à dévaliser !


Il n’entrait pas dans ses plans, non plus, d’ajouter un acte patriotique à son palmarès !


Mais quand le hasard se mêle à votre existence, il peut aussi bien vous pousser d’un toit et vous jeter dans les bras d’un puissant amour...

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Informations

Publié par
Nombre de lectures 0
EAN13 9791070033784
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LES MILLIONS DE LA PRINCESSE

Par
Jean d’AUFFARGIS
CHAPITRE PREMIER
Panique au Ministère
 
Il n'y avait pas, pour un ministre des Finances, de problème plus exaspérant et plus angoissant que celui qui se posait à M. Louchard, tenant du titre et du portefeuille.
— Combien, cette semaine ? demanda-t-il, l'air excédé, au caissier principal de la Banque de France, sec comme un sarment et les gestes fébriles.
— Seize cent mille francs, répondit rapidement l'homme dont la signature s'étalait sur toutes les coupures de notre établissement national d'émissions.
M. Louchard était un personnage proconsulaire de la République – neuf fois ministre – soigné, une belle tête d'empereur romain, glabre et chauve. Sa voix avait la tonalité rocailleuse de l'Avignonnais. Il repoussa le sous-main en cuir marocain – un hommage du Sultan – qui ornait son bureau de style Louis quatorzième et se tourna, le regard interrogatif, vers un gros homme à l'embonpoint avantageux, décoré d'ordres si nombreux qu'ils s'étalaient en éventail à la boutonnière de son veston. Le Gouverneur de la Banque de France s'inclina, autant que son ventre le lui permit, signifiant par là qu'il confirmait les dires de son caissier et qu'il n'y pouvait ajouter aucune parole consolante.
Le regard du ministre se fixa derechef sur une quatrième personne qui se tenait debout dans l'angle de la fenêtre, semblant considérer avec une feinte attention ce qui se passait dans le jardin du Louvre.
— Alors, Daubier ?
M. Onésime Hippolyte Daubier, O. H., comme l'appelaient les amis de son groupe, détenait dans la combinaison Flambant le portefeuille de l'Intérieur. D'ordinaire jovial, haut en couleur, il arborait ce jour-là une mine renfrognée.
— Eh bien, insista Louchard au bord de la colère, tu ne dis rien, toi ! La Banque encaisse chaque mois pour six ou sept millions de billets de la Sainte Farce, cela dure déjà depuis quatre mois et tes services ne sont seulement pas parvenus à arrêter un seul faussaire ! Au train où vont les choses, je me demande ce qu'il va en advenir du crédit de l'État !
L'air ennuyé de Daubier sembla se dissiper sous l'effet d'une pensée intime. Et même O. H. se mit à rire, comme si l'exaspération de son collègue l'amusait vraiment.
— Mais, dis donc, Étienne, articula-t-il avec détachement, il y aurait un moyen très simple de protéger le crédit de l'État : refuser tous les faux billets que l'on présente à vos guichets.
— C'est malin, en effet, ce que tu viens de dire, fit Étienne Louchard avec un sourire crispé. Seulement, ces coupures, es-tu certain de n'en avoir toi-même quelques-unes dans tes poches ? L'imitation est telle que le plus averti de nos caissiers s'y trompe. Papier, encrage, dessin, impression sont exactement semblables à nos propres émissions. Et tu le sais aussi bien que moi. Fais-nous donc grâce de tes boutades.
— Calme-toi, Étienne. Nul plus que moi ne prend cette histoire au sérieux, j'espère que tu n'en doutes pas. Mais comment veux-tu que ma police voie clair dans une affaire où tes experts sont aveugles ? Attendu, en l'espèce, que rien ne ressemble plus à un vrai billet de mille francs qu'un faux et que seul un examen chimique, minutieux, permet, et encore ! de déceler la falsification, comment, je le répète, t'y prendrais-tu à ma place pour faire surgir une piste ? Nous sommes à proprement parler ligotés par la perfection du travail des faussaires. Ces maudites vignettes vont et viennent, circulent dans le public, passent les guichets des banques et les tiens propres sans éveiller le soupçon. Vous êtes bien de mon avis, monsieur le préfet ? Et vous, commissaire ?
Ainsi interpellés par leur ministre, le Préfet de Police et le divisionnaire Larbart se lancèrent des regards de détresse. En somme, tout allait retomber sur leurs épaules. Puissant, massif comme une armoire normande, la face congestionnée, Larbart lut une invitation dans les yeux de son chef. Il avala sa salive, discourir n'était pas son fort et que pouvait-il ajouter aux paroles du ministre de l'Intérieur ? Mais le Préfet, lui, tenait à dégager sa responsabilité !
— Larbart, dit-il d'un ton suffisant, Larbart, vous ne l'ignorez pas, messieurs, est notre meilleur limier. Il a ma confiance et mon estime, que justifie d'ailleurs pleinement son palmarès. Malheureusement, cette fois, la tâche s'avère plutôt…
Il chercha un qualificatif sans réplique.
— … exceptionnellement ardue.
— Nous vous écoutons, commissaire, fit Louchard, déjà résigné à la perte de son portefeuille. Car lui seul peut-être comprenait que cette situation, que l'on avait jusqu'alors réussi à cacher à la presse, à l'opinion et même aux parlementaires, quand elle serait connue entraînerait infailliblement la chute du cabinet. Le président Flambant ne lui avait-il pas affirmé ce matin : « Il y a maintenant deux inflations en France : celle que pratique le gouvernement et l'autre, la parallèle. C'est au moins une de trop ! Nous sauterons, mon petit Louchard… »
Larbart avait retrouvé un peu de son assurance habituelle. Il exposait le résultat de son enquête, sans chercher à en masquer le néant :
— J'ai repris des dossiers de faussaires, certains vieux de vingt ans… Rien, de la poussière… Les uns sont au bagne, les autres rangés de tout. Des inspecteurs sont rentrés de l'étranger les mains vides. Côté indicateurs, pas le plus mince indice. Depuis quatre mois, mes hommes rôdent à Paris, en province, font le guet, écoutent, interrogent, réfléchissent, cajolent, intimident. Ils ne savent pas plus si les presses à faux billets sont à la Banque de France ou dans la lune. Surveillance des imprimeries, rafles dans les tripots, sur les champs de courses, souricières aux frontières, ports, gares. Rien… rien nulle part, c'est le « gel » absolu. Il semble que les faussaires se soient créé un monde à part, un monde auquel ne touche pas le secteur habituel du crime.
Chacun avait écouté ces explications avec les signes de la plus manifeste attention.
— Les polices métropolitaines et même New York, compléta Daubier, le ministre de l'Intérieur, ont été avisés, avec les précautions d'usage, de la nature de nos… ennuis et de l'état de nos recherches. Quant à présent, leurs réponses sont telles que vous pouvez l'imaginer, négatives : on ne sait rien, on n'a rien trouvé, on avertira, on attend…
— Attendre quoi ? Que le flot des faux millions nous emporte...

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