Treize éléphants noirs
52 pages
Français

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Treize éléphants noirs , livre ebook

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Description

Existe-t-il un « fou aux éléphants » qui écume la ville comme le clament les journalistes après l’agression de quatre personnes pour leur arracher une tirelire en forme de pachyderme noir achetée au Nouveau Bazar ?


Sans doute, se dit le patron de ladite boutique en constatant le lendemain matin que son échoppe a été cambriolée durant la nuit pour lui voler huit autres bibelots similaires !


Assurément, pensent les policiers chargés d’élucider le meurtre de l’antiquaire Joumard, dont on a défoncé le crâne pour lui subtiliser la 13e breloque du lot.


Mais l’inspecteur MACHARD à qui l’affaire échoit est du genre à réfléchir différemment.


Pour lui, il n’y a point de détraqué, cependant, il est certain qu’il se cache un grand mystère derrière cette histoire des « treize éléphants noirs »...

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 1
EAN13 9791070035344
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LES ENQUÊTES
DE
L'INSPECTEUR MACHARD

TREIZE ÉLÉPHANTS NOIRS
Récit policier

Maurice LAMBERT
I
UNE ÉTRANGE CHASSE À L'ÉLÉPHANT
 
C'était une vieille femme du genre trotte-menu, un peu ridicule avec son chapeau à fleurs d'une autre époque et ses mitaines de filoselle grise. À l'employé du Nouveau Bazar, elle avait déclaré sur un ton de confidence :
— Je voudrais une tirelire… C'est pour mon petit-fils, il va avoir neuf ans et je tiens à lui donner le goût de l'épargne.
On lui avait présenté un petit éléphant en porcelaine noire auquel l'artisan avait su communiquer une amusante expression et elle s'était mise à rire en le retournant entre ses doigts noueux.
— Je prends ça. Ce qu'il va être content, mon Robert !
Puis, soudain inquiète :
— Ce, n'est pas trop cher, au moins ?
— 9 francs 75.
Maintenant, elle foulait de son pas chancelant, mais étonnamment rapide de grand-mère alerte le trottoir désert de la provinciale rue Vandamme, serrant sur son cœur le sac dans lequel elle avait fourré son acquisition. Un sourire édenté tiraillait son visage : dans quelques minutes un garçonnet se jetterait à son cou, tout rose de surprise et de contentement, et cette perspective réjouissait le vieux cœur de la bonne femme aux mitaines.
L'homme qui la suivait depuis sa sortie du bazar ne souriait pas, lui, bien au contraire. Les mâchoires contractées, les sourcils froncés, il paraissait torturé par des pensées encore plus sombres que le feutre foncé rabattu sur ses yeux. Nerveusement, il jetait de brefs regards autour de lui, comme s'il redoutait l'apparition subite de quelque danger. Un dernier coup d'œil par-dessus l'épaule le rassura ; le plus proche passant flânait devant un étalage à cinquante mètres en avant.
Alors, l'homme accéléra son allure, dépassa la bonne vieille, fit une brusque volte-face. Avant que la grand-mère de Robert ait eu le temps de prononcer un mot, il proféra à mi-voix, portant la main à son chapeau en un geste dont il dut comprendre l'absurdité en une telle occasion, car il ne l'acheva pas :
— L'éléphant, vite !... Et ne criez pas, ou gare !
Terrorisée, la vieille n'eut même pas la force de tenter un appel au secours. Elle restait là, grelottante et rigoureusement immobile, croyant sans doute vivre sa dernière seconde.
— Allons, vite, je ne plaisante pas… répéta l'homme d'un ton menaçant.
Parbleu, cela se voyait qu'il ne plaisantait pas ! À grand-peine, car ses mains s'embrouillaient, la bonne femme tendit son sac à l'agresseur.
— Prenez, parvint-elle à bredouiller, prenez mon sac, mon argent est dedans, mais je vous en supplie, ne me faites pas de mal. Je suis une pauvre bougresse…
L'autre ne l'écoutait pas. Il fouillait dans l'archaïque réticule au cuir éclaté, en retirait l'éléphant noir qu'il glissait dans la poche de son pardessus, lançait le sac dans les bras de sa victime, marmonnait :
— Gardez votre argent, je n'en ai pas besoin.
Ayant ainsi fait montre d'une surprenante magnanimité, il détala sans plus attendre, laissant la vieille affolée, mais stupéfaite de s'en tirer à si bon compte.
L'incident s'était déroulé en quelques secondes, dix secondes au plus, et était passé inaperçu. À tel point que le personnage qui admirait toujours sa vitrine un peu plus loin ne comprit qu'au bout d'un certain temps que la femme qui vociférait et gesticulait là-bas se livrait à cette manœuvre exténuante dans le seul but d'attirer son attention, à lui Dubois Eugène, receveur à la T.C.R.P., et ce, sans aucun doute, parce qu'il arrivait quelque chose de fâcheux à cette malheureuse.
Dix minutes plus tard, le secrétaire du commissariat de la rue Delambre accueillait dans son bureau Héloïse Moreau, ancienne couturière, présentement parée de la qualité de victime, et Dubois Eugène, un témoin qui, à l'instar de tous les témoins qui se respectent, n'avait rien vu.
On était au début de l'après-midi et, comme toujours à cette heure, le calme régnait dans les bureaux fleurant la paperasse et l'encre à tampon, cette odeur insupportable que l'on retrouve dans tous les locaux officiels, qu'ils abritent des gens de police, des postiers ou des percepteurs. Attiré par les jérémiades d'Héloïse Moreau, le commissaire, qui n'avait rien de mieux à faire, vint l'entendre raconter son histoire.
— Et votre agresseur ne vous a pas réclamé d'argent ? s'étonna-t-il.
— Puisque je vous le dis ! C'est mon éléphant qu'il voulait.
— Il vous avait donc vue l'acheter ?
— Probable.
Le commissaire haussa les épaules.
— C'est une farce, grogna-t-il, une farce idiote…
— Je vous jure que non ; il ne plaisantait pas, le bandit. Il m'aurait bien tuée si j'avais résisté…
— N'exagérons rien… Je parie que vous avez été dévalisée par un gamin sans le sou à qui votre éléphant faisait envie.
— Un gamin ! un homme de quarante ans !
— Si vous êtes capable de lui donner un âge, c'est que vous l'avez regardé, vous allez pouvoir me fournir un signalement.
La vieille se recueillit.
— Il est grand, dit-elle enfin, il porte un chapeau bleu foncé ou noir, un pardessus gris. C'est tout ce que j'ai vu de lui… Ah ! j'oubliais : « il fait distingué »… pour sûr que ce n'est pas un « criminel » ordinaire !
Une nouvelle fois, le commissaire haussa les épaules. Il n'était pas loin de soupçonner le bon équilibre mental d'Héloïse Moreau. Il se pencha sur son secrétaire.
— Établissez un procès-verbal de plainte que vous lui ferez signer, ça lui fera plaisir, et puis… Compris ?
« Et puis… », cela voulait dire « occupez-vous de choses plus sérieuses ». S'il fallait prendre en considération les histoires de toutes les vieilles folles qui hantent les postes de police, chaque commissariat deviendrait une annexe de Charenton !
...

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