Comme un intrus
249 pages
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Comme un intrus , livre ebook

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Description

C’est soir de tapis rouge et le cinéaste Marcel Lacroix est sur les rangs pour l’obtention du Jutra du meilleur long-métrage pour son film Comme un intrus, qui raconte un drame familial inspiré de faits vécus. Mais le triomphe peut avoir un goût aigre-doux lorsqu’il s’agit de sa propre vie qui est exposée au grand jour...
Au moment de la sortie de prison de son père, un cinéaste se remémore les événements ayant conduit à son incarcération dans les années 60. Les ennuis commencent lorsque la famille de Paul Lacroix, qui habite dans un modeste appartement de la rue Ontario, doit accepter l’offre d’un membre de la parenté d’habiter à Outremont à la suite d’un incendie. Le petit Marcel, 8 ans, a la grande faculté de se faire oublier des adultes et se retrouve plus souvent qu’autrement, le témoin de plusieurs mystérieuses conversations... Qu’est-il arrivé à la tante Florida, promise à un bel avenir comme chanteuse dans les cabarets de Montréal ? Et qu’est-il advenu de Philippe, ex-joueur de hockey des Blackhawks de Chicago reconverti en hommes d’affaires prospère ? Facile de perdre son innocence et d’être désabusé lorsque les adultes qui nous entourent font du mensonge une spécialité.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 14 août 2012
Nombre de lectures 0
EAN13 9782764417751
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Collection dirigée par Anne-Marie Villeneuve
Comme un intrus
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Ar chives Canada

Charbonneau, Jean
Comme un intrus
(Tous continents)
ISBN 978-2-7644-0944-2 (Version imprimée)
ISBN 978-2-7644-1417-0 (PDF)
ISBN 978-2-7644-1775-1 (EPUB)
I. Titre. II. Collection : Tous continents.

PS8605.H366C65 2011 C843’.6 C2011-940313-7
PS9605.H366C65 2011




Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d’édition.

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Québec Amérique
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Montréal (Québec) Canada H2Y 2E1
Téléphone : 514 499-3000, télécopieur : 514 499-3010

Dépôt légal : 1 er trimestre 2011
Bibliothèque nationale du Québec
Bibliothèque nationale du Canada

Projet dirigé par Isabelle Longpré
Mise en pages : Andréa Joseph [ pagexpress@videotron.ca ]
Révision linguistique : Diane-Monique Daviau et Chantale Landry
Conception graphique : Célia Provencher-Galarneau
Photo en couverture : Photomontage réalisé à partir d’une photographie tirée de Photocase
Conversion au format ePub : Studio C1C4 Pour toute question technique au sujet de ce ePub : service@studioc1c4.com

Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés
www.quebec-amerique.com
Jean Charbonneau
Comme un intrus
roman
Je me suis expliqué aussi la bizarre impression que j’avais d’être de trop, un peu comme un intrus.
Albert Camus, L’Étranger
Pour Adel, I’ll be forever grateful.
[mars 2011]
Les Jutra
L e rouge du tapis me donne le vertige. Ça et le flash des appareils photo des journalistes et des fans. Je me tourne vers Justine, qui me sourit. Ma femme est superbe dans sa robe de gala noire et avec son collier de perles. La pauvre, je lui écrase la main. À croire que je veux qu’elle me sauve de la noyade.
Une rangée de la salle, une des plus près de la scène, a été réservée pour les membres de l’équipe de Comme un intrus . Le producteur de mon film est déjà assis, de même que certains des acteurs, y compris celui qui a incarné mon père, en nomination pour le Jutra du meilleur acteur de soutien. Il ressemble tellement à mon père lorsque celui-ci avait trente ans que durant les auditions je sursautais chaque fois que mes yeux se posaient sur lui.
La cérémonie débute. Je me sens coincé comme une momie dans ce smoking ridicule qu’il faut porter dans ce genre de soirée, et ce damné nœud papillon m’étouffe. La compétition est féroce cette année ; mes chances de remporter le prix du meilleur scénario sont nulles, sans parler de celui du meilleur long métrage…
Une avalanche d’applaudissements déferle sur notre rangée. Le prix du meilleur acteur de soutien est décerné au sosie de mon père, son sourire une réplique exacte de celui de mon paternel. Je tente de me lever aussi, et je lui serre la main, et le voilà qui s’élance vers la scène comme s’il avait le diable au cul, ce qui fait rire la salle. Son copain est aux oiseaux (par amour), tout comme le producteur (Prix Jutra = $).
— Super, non ? me chuchote Justine à l’oreille.
Oui, oui. J’essaie de m’en convaincre. Mais je pense à ma mère qui a été si chamboulée en regardant le film, parce que l’acteur est le portrait de mon père, à cause des souvenirs pénibles que l’histoire a ravivés en elle. Au point où lors de la première elle été incapable de rester devant l’écran jusqu’à la fin de la projection.
Derrière et devant moi, j’aperçois plusieurs des grands noms du cinéma québécois — Denys Arcand, Xavier Dolan, Léa Pool, Denis Villeneuve, Alexis Martin. Certains des réalisateurs ont un film en compétition avec le mien. Qu’est-ce que je fous ici ? Je suis un imposteur…
« Et le Jutra du meilleur film de l’année 2010… Comme un intrus de Marcel Lacroix ! » Le tonnerre d’applaudissements me cloue sur place. Justine m’embrasse. Ses yeux sont remplis de larmes. Elle retire de la poche intérieure de mon smoking une feuille de papier pliée en deux, le discours que la veille j’ai rédigé à contrecœur. « Faut que tu sois préparé, voyons ! » Justine m’a dit. Je n’ai trouvé rien d’autre à écrire que les platitudes d’usage en pareille occasion, des remerciements surtout. J’arrive à m’extirper de mon siège. Le clone de mon père et le producteur du film m’envoient de grandes claques dans le dos. Je me dirige vers la scène.
L’ovation, enfin, cesse. Les projecteurs m’aveuglent. Je jette un coup d’œil au Jutra qu’on vient de me remettre, puis je me rends compte que je n’ai plus mon discours. Faut pourtant que je dise quelque chose…
— Merci. Merci à vous tous. Merci à tous ceux et celles qui ont participé à la création et à la réalisation de Comme un intrus . Malheureusement, vous êtes trop nombreux pour être remerciés individuellement. Merci surtout à Justine, ma femme, même si j’arrive pas à la voir à cause des projecteurs. Je t’aime, Justine…
Une salve d’applaudissements, suivie d’un silence complet. La foule attend la suite.
— Je me retrouve ici ce soir sur une scène, devant moi une salle remplie de créateurs : scénaristes, directeurs, acteurs, producteurs, etc. Pour vous tous j’ai une question : jusqu’où peut-on aller en tant qu’artiste ? Je m’explique. Mon film est une fiction, mais la plupart d’entre vous savez que l’histoire est basée sur certains événements que ma famille et moi avons vécus en 1965. Aussitôt que je me suis mis à écrire le scénario, l’idée de cannibaliser les membres de ma famille m’a rendu mal à l’aise. Plusieurs fois j’ai voulu abandonner le projet pour de bon, mais j’ai persévéré.
« De son propre aveu, l’auteur de polars James Ellroy a passé sa vie d’écrivain à exploiter le meurtre brutal de sa mère qui a eu lieu en 1958, alors qu’il était enfant. Les personnages qu’il a imaginés sont des tueurs, des paranos, des junkies, des mécréants de la pire espèce, des jeunes femmes victimes de la brutalité masculine. Ellroy a dit qu’il avait trouvé la façon de profiter de la mort de sa mère, d’en faire un spectacle pour vendre des livres. Tout ça, c’est de la provocation. Reste que le fond de vérité derrière ces paroles est bien réel. Et dans ses mémoires, l’écrivain britannique Graham Greene raconte que dès son jeune âge il s’est aperçu qu’il était capable de se transformer en observateur imperturbable du malheur des autres, et de l’utiliser comme matériau pour ses propres écrits. Il en est arrivé à la conclusion que chaque écrivain doit avoir un fragment de glace dans le cœur. Excusez mes références littéraires plutôt que cinématographiques, mais les romans ont toujours été aussi importants pour moi que les films. Ce qui est certain, c’est que je sais de quoi Ellroy et Greene parlent. Dans mon cas, en plus, il y a un côté pervers à la chose, en ce sens que j’ai été de façon directe une des victimes du malheur qui est tombé sur ma famille en 1965. Je me suis donc cannibalisé moi-même.
« J’ai rationalisé mon parcours en me disant que c’était une quête de la vérité. Je voulais savoir ce qui était arrivé aux membres de ma famille, ce qui avait mené aux drames. Mon père, mon oncle et ma tante ont joué un rôle de premier plan dans ma vie personnelle et artistique. Ces gens me hantent depuis l’âge de huit ans.
« Je m’en voudrais toutefois terriblement de ne pas m’excuser auprès de ma mère, parce que je sais que mon film lui a fait du mal. Et c’est là où je voulais en venir quand je vous ai posé ma question tout à l’heure. Tout ce que je peux dire en ce moment est : s’il te plaît, pardonne-moi, maman…
« J’ai une dette morale envers ma famille, et c’est pourquoi je lui dédie ce prix que vous m’avez octroyé ce soir. Cet honneur, je le dédie particulièrement à ma tante Florida, elle qui a rêvé de faire carrière dans le show-business. Mon film montre à quel point les rêves parfois se transforment en cauchemars, si vous me passez le cliché…
Je sens le regard de l’auditoire peser sur moi. Tout à coup, je suis à bout de souffle.
— Je… Je sais pas quoi ajouter à tout ça. Je… Merci.
Ça s’est passé en 1965
L es soldats sont déployés sur le divan du salon. La bataille e

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