Dissimulations
92 pages
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Dissimulations , livre ebook

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Description

Depuis sa plus tendre enfance, Cassandre Ascari dissimule sa féminité afin d’intégrer la chevalerie au service de son protecteur Eugène d’Ambroise.
Sous le prénom de Guillaume, sa première mission consiste à escorter une rançon dans le but de délivrer Frénégonde Bailly, retenue en otage par le vil Bryan du Loch.
Au cours de son expédition, les péripéties se multiplient, tout comme les rencontres avec le mystérieux Jasper, personnage charismatique qui semble la suivre et, lui aussi, dissimuler un sombre secret.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 06 mars 2019
Nombre de lectures 1
EAN13 9782372270694
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0011€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Dissimulations
1. Cassandre
Novella de
Véro-Lyse Marcq

Couverture de
Karen Nadine
« Chacun dissimule quelque chose à quelqu’un,
et chacun, quelque chose à soi-même.
Il y a donc deux versants de sincérité. »
Paul Valéry
Chapitre 1
La cérémonie qui l’unirait à Eugène allait avoir lieu le lendemain.
Dans la solitude la plus totale, Cassandre prenait un bain purificateur. Cette tradition, qui était suivie à la lettre, l’arrangeait bien, car personne ne devait se rendre compte de ce qu’Eugène et elle cachaient depuis des années. Il leur avait fallu, et il leur faudrait encore taire leur secret. Plus d’une fois, ils avaient failli être découverts, à se chamailler et à discutailler de tout.
Eugène appréciait sa détermination et elle, de son côté, aimait son ouverture d’esprit et sa bonhomie.
Cassandre stagnait au beau milieu d’un cuvier gigantesque, à réfléchir encore à sa volonté farouche d’épouser une vie qui s’annonçait tellement particulière. Son corps frissonnait-il de désir face à ce qui l’attendait demain ? Ou ne faisait-il que répondre violemment à l’agression de cette eau fraîche ?
Après s’être essuyée, elle revêtit une tunique ample d’un blanc laiteux. C’est à partir de là que commença son jeûne.
Sans un mot, on l’amena ensuite à l’église dans laquelle elle passa la nuit : de quoi réfléchir longuement à cet engagement qui, une fois pris, n’admet aucun retour.
Depuis son enfance et encore plus aujourd’hui, sa volonté était mise à rude épreuve, néanmoins elle ne plierait pas : toutes ces années de préparation lui permettaient enfin d’approcher du but.
Tôt le lendemain, la messe fut dite après sa confession. Puis les fidèles l’accompagnèrent jusqu’au château. À l’entrée de la grande salle, son cœur se mit à battre la chamade. Il ne restait que quelques minutes d’attente avant de faire partie intégrante d’une belle et noble famille, celle qu’elle côtoyait depuis tant d’années : la chevalerie.
Les portes s’ouvrirent en grand pour lui offrir une entrée digne de ce titre qu’elle s’apprêtait à porter. Elle avançait dans ce couloir formé de part et d’autre par ses voisins, ses futurs compagnons d’armes et parents afin de rejoindre son seigneur.
À son passage, son père lui adressa un sourire d’encouragement. Sa mère et ses sœurs la regardaient, béates d’admiration. Elle se plaça face à l’homme qu’elle souhaitait servir du mieux possible, celui qui croyait en elle comme aucun autre, celui qui osait vouloir de sa présence dans ses rangs, celui qui l’appelait depuis des années Guillaume afin qu’elle puisse devenir chevalier.
Elle posa un genou au sol. L’évêque saisit son épée pour la bénir, puis demanda :
— Pour quelles raisons désires-tu entrer dans la chevalerie ? Si tu recherches la richesse ou les honneurs, tu n’en es pas digne !
Elle récita alors l’engagement auquel elle avait pensé cette nuit. Elle libéra ses mots avec force et détermination, de façon à ce que tout le monde les entende :
— Moi, Guillaume Ascari, fils de Charles Ascari, je fais serment de fidélité à Eugène d’Ambroise, seigneur des Salines. Je défendrai les faibles et ne fuirai jamais devant l’ennemi. Je combattrai les infidèles et remplirai mes devoirs féodaux. Je jure de servir toute ma vie le droit et le bien.
D’un signe de main du châtelain, on l’aida à revêtir son haubert, son tabard noir, ses brassards et éperons dorés. Le seigneur d’Ambroise se leva alors. Il prit l’épée bénie précédemment et la tapa à plat trois fois sur l’épaule de son ancien page.
— Moi, Eugène d’Ambroise, seigneur des Salines, au nom de Dieu, je te fais chevalier. Sois vaillant, loyal et généreux. Chevalier Guillaume Ascari, tu peux te redresser.
Eugène était un homme assez particulier en ce qui concernait l’étiquette, la bienséance, et toutes ces « manières ridicules » qui d’après lui gangrenaient le quotidien. Alors qu’en dehors du royaume la vie paraissait dure, il faisait bon vivre sur ses terres. Il donna donc sans retenue une accolade franche à Cassandre, ce qui constitua un moment particulièrement émouvant de cette cérémonie.
Eugène, très proche des Ascari, avait souhaité prendre un de leurs enfants sous son aile. Or, nul fils n’était jamais né dans leur foyer. Tempétueuse, Cassandre, la petite dernière, eut tôt fait de tenir une épée. Filiforme, bagarreuse et coura­geuse, elle demanda à Eugène de pouvoir suivre la formation de chevalier. Il la trouva tellement culottée qu’il accéda, avec l’accord de ses parents, à sa requête… à condi­tion que Cassandre cachât sa féminité, car nulle femme ne serait acceptée dans la chevalerie. Depuis cet accord, Cassandre était devenue Guillaume. Seuls les Ascari et Eugène connaissaient la vérité.
Par chance et très rapidement, ses aptitudes physiques s’étaient révélées étonnantes. Son intégration s’était parfaitement déroulée.
— Dites-moi, chevalier Guillaume, comment allez-vous appréhender le monde extérieur si l’on vous envoie dans des contrées inconnues ?
— Sans crainte. J’accomplirai ma mission, quel qu’en puisse être le prix, dès que mon seigneur l’aura décidé.
Satisfait de sa réponse, ce magistrat d’Eugène retourna reprendre de cette charmante tourte aux figues disposée parmi des mets plus succulents les uns que les autres.
Maxime d’Urcay, un nouveau compagnon d’armes, lança :
— Ne sois pas si pressé, Guillaume. Nous allons fêter d’abord ta venue dans ce cercle prestigieux.
Eugène claqua énergiquement des mains. Musiciens, jongleurs et acrobates envahirent la salle. Cassandre ôta sa cotte de mailles afin de festoyer avec les autres. Par contre, elle laissa ses brassards en place : un phœnix orangé, brodé sur fond noir, symbolisait son appartenance à la chevalerie de ce royaume.
Ce jour était le sien. Un sourire de bonheur ne quittait pas ses lèvres. Son choix semblait le bon. Non, en fait, il l’était.
— Chevalier Guillaume, à votre santé !
Cette réussite, elle avait dû aller la chercher, se battre pour l’obtenir. Pourtant, c’était à celui qui lui avait donné sa chance qu’elle pensait.
À l’extérieur, chacun cherchait l’extension de ses terres et cela sentait le conflit à venir dans les territoires encore habités. Dans chaque recoin augmentaient la trahison, les batailles de pouvoir et, inexorablement, le nombre de morts.
Serait-ce la dernière fois qu’elle verrait son seigneur ?
Allait-on l’envoyer avec les autres pour guerroyer ou négocier ?
Eugène connaissait la grande force et la combativité de Cassandre tout comme il appréciait sa fraîcheur et son humanité. À ses yeux, en tout cas, elle était unique.
La soirée était bien avancée quand son seigneur la héla :
— Chevalier Guillaume ! Peux-tu m’accompagner jusqu’à mes appartements ?
— Seigneur d’Ambroise, je vous suis.
— Tu pourras retourner ripailler avec les autres rapidement après cela, n’aie crainte.
Ils progressaient de concert le long des couloirs.
— Je souhaitais juste te conseiller de prendre le temps d’embrasser les tiens avant de partir. La mission que je pense te confier risque de t’emmener loin, et pour un bon moment hors de ce royaume.
Ils avançaient tous deux lentement, comme pour profiter encore quelques instants de la présence de l’autre.
— Ah, nous voici déjà arrivés, constata-t-il. Je t’attends demain matin, dans mes quartiers. Avant cela, permets-moi quelque chose ce soir…
— Faites, je vous en prie.
Il la serra dans ses bras. Pas une accolade franche et musclée. Non, il s’agissait d’un témoignage sincère d’appréciation, d’une tendresse infinie. Le sourire qu’il lui adressa ensuite parut mélancolique. Elle osa penser qu’elle lui manquerait.
À son retour dans la salle, on l’embarqua dans une ritournelle, puis plus tard, une fois dans sa chambre et le vin aidant, Cassandre s’endormit la tête à peine posée sur l’oreiller.
Chapitre 2
Les Salines formaient avec deux autres contrées les seuls endroits épargnés par le malheur. Tout autour d’elles, le chaos sévissait et le bilan en pertes humaines pesait. En deux années, pas loin des trois quarts des habitants hors de ces zones privilégiées avaient péri.
Les épidémies semblaient encercler géographiquement une ligne particulière allant du Territoire des Roches aux Salines en passant par les Terres Rouges.
Quant aux autres régions frappées de plein fouet, personne ne souhaitait découvrir ce qu’il en restait. Ceux qui s’y étaient rendus afin d’obtenir quelque réponse n’en étaient pas revenus.
La situation entre les trois territoires commençait à se tendre. Qui de l’est ou de l’ouest allait gagner les terres centrales ? Telle s’énonçait la véritable question, car c’était là que se trouvait la majorité des ressources, depuis que l’extérieur pourrissait, gangrené par le mal.
Alors que l’enjeu s’avérait de taille, la solution dépendait uniquement d’une femme, héritière des Terres Rouges. Dotée d’une beauté quelconque, assurément convoitée, Frénégonde, la fille d’Arthur Bailly, pouvait prétendre au mariage.
Dame capricieuse qui inspirait beaucoup les troubadours moqueurs, Frénégonde avait choisi Eugène. Celui-ci n’ayant eu aucune courtisane à ses côtés jusqu’à présent, la jeune femme souhaita alors s’unir à lui, croyant naïvement en la pureté de cette alliance.
La date des festivités avait été fixée au printemps sur les Salines. Eugène n’en semblait pas le moins du monde charmé. Il trouvait malgré tout alléchant d’asseoir son royaume sans avoir à guerroyer. Le fait d’éviter d’aller au combat et épargner des vies justifiait amplement de supporter les humeurs de sa future épouse.
Bryan du Loch, son ennemi juré du Territoire...

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