L ère du vent
368 pages
Français

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L'ère du vent , livre ebook

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Description

Après une guerre apocalyptique qui a quasi-exterminé la population terrestre et stérilisé la majorité de ses mâles, l’homme a renoncé au progrès et à l’électricité, pour n’utiliser que la force motrice générée par l’air comprimé.


C’est dans le cadre de ce rétrofutur, dans lequel une royauté progressiste lutte contre une théocratie réactionnaire, que quelques humains aux personnalités ambigües vont s’entredéchirer. Mêlant leurs frustrations et leurs revanches, leurs ambitions et leurs intérêts, leur désir de justice ou leur soif de puissance, ils vont lutter pour un autre avenir.


Plongez-vous dans le monde du Royaume des Iles Unies et laissez-vous emporter dans l’Ère du Vent, en méditant philosophiquement sur la nature profonde de l’âme humaine.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 7
EAN13 9791090931084
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Pierre BAMEUL
L'ÈRE DU VENT
(extrait)
Éditions ARMADA www.editions-armada.com
Pour ma fille Flora qui m'a poussé à reprendre l'écriture.
Avertissement de l'auteur
Les noms des lieux cités dans cet ouvrage ont été b ien souvent écrits dans leur langue locale usuelle et contemporaine. C'est le cas notamment des noms des îles anglo-normandes, où se passe une grande pa rtie du roman et qui conservent leur graphie et leur nom anglais. Ainsi : Guernsey = Guernesey en français. Alderney = Aurigny en français. Sark = Sercq en français. Jersey, Herm, Brecqhou, Burhou, Les Ecréhous et Les Minquiers sont dénommés identiquement dans les deux langues. Les a ccents en moins en anglais. Le but de l'auteur est d'accentuer ainsi la couleur locale dans une société devenue bilingue. Il en est de même avec les phrase s laissées en anglais sans traduction. En ce qui concerne ces dernières, le se ns en est facilement compréhensible par les lecteurs non anglophones, grâce aux phrases françaises qui les précédent ou les suivent. Le processus est identique avec les phrases en dialecte normand. Les noms des pays celtiques sont également cités da ns leurs langues celtiques. Les Goublins : graphie normande des lutins du folkl ore du Cotentin — Goblins en anglais — conservent aussi leur appell ation cotentinoise et sont passés de l'imaginaire populaire à la « réalité » d e la science-fiction.
1 - Le Royaume desÎles Unies
A generation which ignores History has no past and no future. Robert A. Heinlein
Un vent de nord-ouest, venu des steppes glacées du Groenland, balayait les landes de La Hague. Les genêts se penchaient sous s es rafales comme se courbaient les échines des rudes gens du Cotentin. Avec la nuit tombante, les paysans s'empressaient de regagner leurs demeures. Mieux valait retrouver la protection d'un foyer, avant que les Goublins ne fu ssent sortis de leurs Tanières creusées près du Cimetière Lumineux. Jay Vaast s'obstinait à marcher la tête haute, resp irant à pleins poumons cet air vivifiant. N'appartenait-il pas, désormais, aux hautes castes qui régentaient un monde ressuscité après le Grand Suicide ? C'étai t un homme fier d'appartenir à une élite. À vingt-cinq ans, il jouissait pleinem ent de ses privilèges qu'il considérait comme un dû. Que lui importaient le ven t, la pluie, les ténèbres et les dangers, il se sentait invulnérable et immortel . Physiquement il ne différait guère des habitants de s Îles Unies : sixfeet de haut, des cheveux châtain roux, des yeux bleus déla vés, une peau tannée par les embruns et parsemée de tâches de rousseur. N'eû t été son habillement recherché, il aurait pu passer pour un pêcheur de c rustacés, comme on en croisait tant dans l'archipel. Pourtant il possédai t une qualité particulière faite d'un mélange d'obstination, d'entêtement et de conf iance absolue en son destin. Et ce destin s'accomplissait chaque jour. Au milieu de la matinée il avait quitté, par le tra in à vent, le domicile de Cherbourg qu'il partageait avec sa sœur Sally. Vers midi, le train l'avait déposé en gare de Barneville, où il devait rencontrer un i ngénieur responsable du fonctionnement des éoliennes de Sortosville, ainsi que de tout leur complexe énergétique. L'après-midi s'était passé en visites et exposés sur la production croissante du générateur de vent, qui distribuait s on air comprimé dans toute l'île du Cotentin. L'ingénieur Rod Hamel était un passion né de machinisme ; mais ses explications lassaient un peu Jay, issu d'une c orporation différente. Néanmoins, il s'était efforcé de paraître très inté ressé, par simple savoir-vivre envers son interlocuteur. En compensation, la prome nade en voiture à vent, parmi le champ d'éoliennes et son dédale de tuyaux, n'avait pas été pour lui déplaire. Jay s'approchait maintenant à grands pas du port de Barneville, situé dans le quartier de Carteret. Au détour d'une maison à l'éc lairage jaunâtre, le vent le frappa avec violence, l'obligeant à s'arcbouter sur ses deux jambes. Le quai d'embarquement était tout proche maintenant ; prome sse de retrouvailles avec sa bien-aimée. Cela faisait trois mois que les deux amants ne s'étaient pas revus. Travail oblige… Bientôt, ils seraient à nouv eau réunis. Séparés par leur emploi, ce même travail allait finalement rapproche r leur couple. Elle s'appelait Wendy Sarnia et était née dans l'îl e de Guernsey, la plus à l'ouest de l'archipel. C'était une belle femme de v ingt-trois ans à l'opulente chevelure d'un noir bleuté et aux yeux verts, dont la peau naturellement très bronzée lui donnait un je-ne-sais-quoi d'exotique. Elle racontait qu'un de ses
ancêtres était venu de l'autre côté de l'Océan Atla ntique, voici plusieurs siècles. Mais les archives familiales avaient disparu dans l es incendies du Grand Suicide. Il n'en restait que la tradition orale dérivant lentement vers la légende. Jay ne se préoccupait guère dupassé décomposé, comme en plaisantaient souvent les jeunes gens pleins d'avenir. Il préféra it se remémorer le portrait souriant de sa compagne et anticiper mentalement le urs ébats amoureux. Au départ, Wendy ne parlait qu'anglais, alors que Jay avait le français pour langue maternelle. Mais c'était pourtant cette différence d'idiome qui les avait fait se rencontrer. Le Grand Suicide avait considérablement compliqué la vie des humains partout dans le monde ravagé. Alors que la Terre était en voie d'unification autour d'une demi-douzaine de langues véhiculaires, la destruction de quatre-vingt-dix pour cent de l'humanité, et l'i solement géographique des survivants privés des médias antérieurs, avaient ma intenu un grand nombre de parlers vernaculaires, qui restauraient les barrières entre les humains. Rien que dans le Royaume des Îles Unies, on utilisa it quotidiennement deux langages : le français en Cotentin, l'anglais à Gue rnsey, Jersey, Alderney, Sark et Herm. En outre, et bien que leur idiome ne fût p as d'usage courant, de nombreux Celtes venus travailler dans l'archipel s' exprimaient en celtic. Le Grand Suicide avait reconstruit la Tour de Babel. I l en était ainsi partout autour du monde. Les Reines des Îles Unies avaient donc ou vert une série d'écoles regroupant d'excellents élèves doués en langues, qu i étaient formés pour assurer les meilleures communications possibles ent re leurs sujets. Cette Corporation des Traducteurs, indispensable au bon f onctionnement social, formait une élite qui avait tendance à tirer un gra nd profit de cette situation historique. Jay et Wendy en faisaient partie. Leur corporation étendait son action dans toutes les castes et constituait leur indispen sable lien. Les deux jeunes gens étaient fraîchement sortis de l'École des Traducteurs et parlaient couramment anglais et français. De plu s, sans s'être concertés, ils avaient aussi postulé pour étudier le celtic dès qu 'un nouveau stage leur serait offert. Ils avaient l'avenir devant eux et voulaien t croquer le monde… Les rues de Barneville se remplissaient de travaill eurs de la mer pressés de s'octroyer un peu de bon temps après leur labeur qu otidien. Ils se regroupaient dans les pubs et, le cidre aidant, chantaient de vi eilles chansons dans l'une ou l'autre des langues locales. La joie de vivre repre nait son cours, il en était ainsi de la nature humaine. Peu de voitures circulaient d ans les rues à cette heure avancée. C'était à peine si l'on entendait les pas d'un cheval ou le sifflement de l'air déprimé s'échappant d'une automobile. Jay reg arda derrière lui… Personne ne paraissait le suivre. Son regard accrocha le com plexe industriel de Sortosville qui se détachait sur le ciel assombri. Les grandes éoliennes tournaient à plein régime, comprimant l'air atmosphérique dans de giga ntesques cylindres de la taille des silos à blé. Enfant, il avait peur de s' approcher de ces impressionnantes constructions. L'âge avançant, il avait surmonté cette peur ; mais il en conservait encore quelques séquelles psy chologiques. Arrivé le long du quai principal de Carteret, rehau ssé pour compenser la montée des océans, il chercha son traversier parmi les nombreux bateaux à l'amarrage. Il regarda encore en arrière… Rien de s uspect. Pourquoi alors ressentait-il cette inquiétude qu'aucune raison ne semblait justifier ? Il n'en savait rien ; mais il pressentait confusément que l a phrase sibylline, murmurée en normand à son oreille par son ami Carl Mouchel, en était en partie la cause.
Une phrase qu'il devait répéter à la Reine, qu'il d evait rencontrer bientôt, lors de la remise des ordres de mission de sa promotion. Il la répéta mentalement : — J'cré qu'not nyit va bétôt finin. Ces mots exprimés en normand – un vieux dialecte ma intenant éteint – n'avaient aucun sens. Il évoqua encore cette phrase , en anglais cette fois : — I believe that our night will be finished soon. Ridicule ! — Je crois que notre nuit sera bientôt terminée. En français également, cela n'était pas plus explic ite. Alors qu'était-ce ? Une information codée, probablement, qu'il devait trans mettre discrètement à la Reine. Pourquoi ? Ce mystère fleurait bon l'aventure et cela n'était pas pour déplaire à Jay qui s'ennuyait quelque peu dans sa routine quotidienne et son univers trop étroit à son gré. Il aperçutLeGoéland Bleuse dirigea vers lui. C'était un traversier et standard construit en série dans plusieurs chantier s navals de l'archipel, pour satisfaire aux besoins maritimes croissants du Roya ume des Îles Unies. Il consulta sa montre-bracelet : un coûteux chef-d'œuv re de mécanique récompensant son diplôme de Traducteur. Encore un q uart d'heure avant l'appareillage. Un garde en uniforme bleu marine co ntrôla son billet sur la passerelle d'embarquement. La marée était haute. Le s phares illuminaient l'horizon. Bientôt, la nuit serait tombée. Il s'assit confortablement sur un banc rembourré oc cupant la grande salle des passagers située sur le pont principal. Abrité du v ent par le vitrage, il ouvrit sa veste verte imperméable ornée de l'écusson des Trad ucteurs figurant une bouche stylisée surmontée de deux oreilles. Les pas sagers étaient au complet et se répartissaient sur les rangées de bancs dispo sés transversalement. Il regarda les marins qui déconnectaient les conduites souples d'air comprimé et les lovaient sur le quai. Le dernier d'entre eux la rgua les amarres et, lentement, Le Goéland Bleus'éloigna de l'appontement en actionnant sa sirène . Une traversée du Passage de la Déroute ne s'effectu ait jamais sans risques. Le fond de la mer séparant les Îles Unies était un véritable cimetière de navires accumulés au long des siècles, des tempêtes et des guerres. C'était aussi une source de matière première pour les Récupérateurs. Cette nuit-là, la mer serait encore grosse, au grand dam de Jay qui n'avait jama is eu le pied marin.Le Goéland Bleumoteurl'embouchure du chenal. Le barreur coupa le  quitta pneumatique et escamota l'hélice pour réduire la tr aînée. Les gabiers hissèrent les voiles et le traversier s'inclina en remontant au vent. Il ne fallut pas longtemps à son estomac pour expri mer sa réprobation. Le navire tanguait et roulait de plus en plus, et Jay se sentit pâlir. Il leva son regard pour ne plus voir la crête des vagues. La Lune appa rut entre deux nuages. La Lune !… Que ne racontait-on pas sur elle ! D'aucuns affirmaient que, voici plusieurs siècles, des humains y avaient débarqué e t construit des cités pour y vivre en permanence. Il doutait qu'une telle histoi re fût vraie, les légendes embellissent toujours les faits historiques et les souvenirs. Mais, après tout, peut-être y avait-il du vrai dans ces assertions : les humains de l'Ancien Temps étaient tellement puissants !… Le Grand Suicide ava it fait régresser considérablement l'humanité.Parce qu'elle avait trop péché,les affirmaient Prêtres de la Foi Salvatrice… Jay eut une nausée. E tait-ce le mal de mer ou l'évocation du clergé qui en était la cause ? Il dé testait ces récupérateurs de
l'angoisse humaine, qui continuaient à tirer les pe uples en arrière. Pressé d'arriver à Saint Peter Port, il regarda sa montre… Encore un peu plus d'une heure de souffrance… Quelques passagers vomissaient dans des poteries que des matelots vidaient par-dessus bord, un sourire n arquois aux lèvres. Il essayait de dominer son mal de mer, mais sa pâleur s'accentuait… La nuit recouvrait maintenant la mer qui n'était pl us éclairée que par les balises et les clignotements des tours à Morse. Jay n'avait pu supporter longtemps la forte houle. À plusieurs reprises, il avait vomi dans une poterie qu'un homme d'équipage goguenard lui avait tendue. À la vue de son écusson, le marin, trop heureux d'humilier un intellectuel, n'avait pu s'empêcher de murmurer : — Les poissons nourrissent les cerveaux, il est jus te que les cerveaux alimentent à leur tour les poissons. Jay lui avait lancé un regard furieux. À présent, i l regardait les feux de Saint Peter Port qui grossissaient dans la nuit. Il se le va et alla se laver la bouche dans les toilettes, puis il se mit à sucer un bonbo n à la sève de pin sorti d'une petite boîte que, prévoyant, il avait emportée dans une poche. Le port de Saint Peter formait un havre de lumière dans la nuit balayée par le vent marin. Les phares tournants qui l'encadraient éclairaient rythmiquement la Vieille Église nichée au bas de la ville. Malgré l' heure tardive, de nombreuses maisons brillaient encore sur ses hauteurs. LesAnesavaient la réputation d'être des couche-tard.Le Goéland Bleuhabillement, usant de son moteur accosta pneumatique pour affiner la manœuvre. Une fois le t raversier amarré, les passagers commencèrent à débarquer… Wendy Sarnia se tenait sur le quai, à l'écart de la foule, bien visible dans la lumière d'un réverbère à acétylène. Elle portait so n ensemble rouge qui lui seyait à merveille, sous un imperméable beige orné de l'écusson des Traducteurs. Jay bondit vers elle. — Wendy !… Elle sursauta et courut vers lui… Ils tombèrent dan s les bras l'un de l'autre. — Hi, pretty Donkey ! — Hello, handsome Claws ! rétorqua-t-elle. Les habitants de chaque île se désignaient par un s obriquet issu d'une longue histoire. Les natifs de Guernsey étaient desAnes, ceux de Jersey des Crapauds.Les gens d'Alderney étaient desLapins, ceux de Sark desCorbeaux. Quant aux autochtones du Cotentin, ils se surnommai ent lesCrochus. Nul ne savait plus pourquoi. Peut-être étaient-ce de loint aines références totémiques tribales ?… Un érudit avait prétendu que les gens d u Cotentin devaient leur sobriquet deCrochusleur avarice légendaire. Mais qu'importaient ces à surnoms aux deux amoureux qui partageaient maintena nt un long baiser. — Heureusement pour moi, j'aime la sève de pin. Tu as encore eu le mal de mer… Elle avait parlé français. — Je n'ai pas ta chance, ma chérie. — Les hommes sont vraiment des êtres aux capacités limitées. Nous pourrons peut-être nous en passer un jour. — En ce qui te concerne, j'en doute. Tu aimes tropça ! Tout comme elle l'aimait, ainsi que l'avait montré son changement courtois de langue. Ils se dirigèrent vers un taxi que tirait u n âne gris et montèrent dans la
minuscule calèche. — Hauteville Street, just in front of Hugo's House, please. — Well, Madam, you'll have to pay fifty pence. Le cocher émit un raclement de gorge et l‘âne démar ra. Jay chercha de la monnaie dans sa poche… Ils s'éloignèrent du port au pas tranquille du baudet. Une musique joyeuse s'élevait d'un pub. Des cyclist es et des cavaliers se promenaient encore à cette heure tardive ; beaucoup rejoignant les pubs répartis le long du port. La ville basse, abritée d es vents d'ouest, semblait un havre de confort. Ils s'arrêtèrent un instant pour laisser passer un tramway à vent qui desservait le pourtour de l'île. La rue Ha uteville montait vers les quartiers réservés aux hautes castes. Ils atteignir ent le domicile de Wendy, Jay paya les cinquantepencedemandés et remercia le cocher. Avant d'entrer, il jeta un coup d'œil vers Hugo's House où avait logé, plus ieurs siècles auparavant, un illustre écrivain de langue française. La façade bl anche contrastait avec le sombre intérieur et le lugubre mobilier de la maiso n. Pour Jay cette demeure ressemblait à un repère de fantômes. Une pluie fine commençant à tomber, ils s'empressèrent d'entrer. La maison de Wendy était ô combien plus accueillant e, avec ses meubles modernes faits de bois teinté de couleurs vives et de polymères récupérés sur les fonds marins. Un reste de feu rougeoyait dans l a cheminée du vivoir. La pièce, bien isolée, avait conservé une douce chaleu r. Wendy alluma les lampes à acétylène, sortit des bûches d'un banc-coffre et réactiva le feu. Un miaulement détourna son attention… Magpie, sontuxedo cat, sortit de la cuisine et vint se frotter contre ses jambes. Elle le caressa un insta nt. Satisfait, le chat alla s'installer dans un panier placé près de l'âtre et commença à ronronner. Elle rangea son tisonnier et se retourna vers son amant qu'elle embrassa amoureusement. Quand leurs lèvres se séparèrent ell e lui demanda : — Veux-tu une tasse de thé ? — With pleasure, my darling ! Le thé coûtait cher, à moins que ce ne fût un succé dané produit par les Sorciers du terroir local et vendu sous le manteau. C'était interdit, mais les autorités fermaient les yeux depuis longtemps, afin de lubrifier les rouages économiques du Royaume des Îles Unies. Le thé était bon, avec un léger goût de pomme. Mieu x valait ne pas en connaître la recette… Ils grignotèrent des biscuits de seigle en guise de souper. Aucune importance, Jay n'avait pas faim, pas de cette faim-là en tous cas… Leur frugal repas terminé, Wendy pris Jay par le br as et, sans ambigüité, l'entraîna dans sa chambre. Elle alluma la lampe de chevet et commença à le déshabiller. Elle semblait particulièrement pressée , ce qui n'était pas pour déplaire à son partenaire qui n'avait cessé de pens er à de langoureuses étreintes en buvant son thé… Quand il fut nu, il s' allongea sur le lit et attendit pour respecter la coutume. Seul son pénis pointant vers midi trahissait son désir. Wendy se déshabillait lentement en un strip- tease langoureux… Quand elle fut aussi nue que son amant, elle s'assit lent ement sur le sexe dressé en y ajustant bien le sien, tandis que Jay lui caressait les seins. En ces temps de matriarcat, la tradition voulait que l'initiative f ût laissée à la femme. C'était une règle de bienséance admise par tous et en particuli er par les gentlemen. Les fantaisies et fioritures suivraient, au gré des deu x partenaires. Et la nuit passant, les deux amants ne s'en privèrent pas, toutes tradi tions laissées de côté, la
rareté des naissances ayant largement réduit l'usag e de la contraception. Tard le matin suivant, ce fut la sonnerie du tube p ostal qui réveilla les amants passionnés. Jay regarda sa montre : dix heures déjà ! Wendy sauta du lit et ouvrit l'embouchure du tube pneumatique pour en ext raire le cylindre à courrier. Elle déroula le message à l'en-tête de l'administra tion royale et en lut le bref contenu à haute voix : « Friday December 13th 2492 AD Bailiff Kate Bailey, Manager of the Royal Teaching School, invites Translators Wendy Sarnia and Jay Vaast to join The House of Par liament to receive their new orders of mission today at 3 p.m. By the Will of Her Majesty Betty IV, Queen of the United Islands. Her Representative : Bailiff Kate Bailey » Jay siffla entre ses dents. Ellessavaient que j'étais chez toi hier soir !! Le malaise qu'il avait ressenti avant d'embarquer s ur leGoéland Bleu ressurgit et le réveilla complètement. Wendy lui ré pondit : Elles sont toujours très bien renseignées.God is watching you everywhere ! C'était la devise officielle du Service de Renseign ements du Royaume des Îles Unies, qui avait été fondé par le clergé de la Foi Salvatrice après le Grand Suicide : une devise quelque peu ambiguë. — Even our sexual entertainment ? — Why not. It is often said that they're many voyeu rs among them. — You're joking. They aren't able to use electricity to watch… ElectricitéL'énergie proscrite ! Il interrompit sa phrase. Il venait de !… prononcer un mot obscène qu'aucun gentleman digne d e ce nom n'osait murmurer, surtout en présence d'une dame. Une rouge ur apparut sur le visage de Wendy, en dépit de son teint coloré. Jay sentit qu'il avait manqué de tact. — Excuse-moi, mais j'ai l'habitude d'appeler un cha t : un chat, un cul : un cul et… Il bafouillait, cherchant un euphémisme…the power... l'énergie. Enfin… Le normand le tira de son embarras…l'courant… C'était bizarre, mais dans l'ancien dialecte local, naguère parlé dans tout l'archipel, le mot semblait moins choquant. Il ajou ta : Tredan ! Ce tic. Il est vrai quemot figurait parmi son succinct vocabulaire cel ce sont toujours les grossièretés que l'on retient le plus facilement dans une langue. Il changea de sujet. — Bon, ne traînons pas, tu as gardé ma tenue de cérémonie, j'espère ? Elle affecta un air interrogatif. I'm not sure of that…Euh, voyons… je l'ai peut-être prêtée à un étalon de passage. Jay grinça des dents. Certes, les femmes étaient ma intenant libres de gérer leur mode de vie à leur guise. Mais, ce matin-là, i l n'avait pas envie d'être renseigné sur les activités sexuelles de sa dulciné e durant les mois passés. Un
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