La chanceuse
276 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

La chanceuse , livre ebook

-
illustré par

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
276 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Après avoir été vendue au roi d’Orvbel, Deirane a intégré le harem. Elle est devenue une chanceuse selon le jargon local. Mais le harem n’est pas l’endroit clos et merveilleux chanté dans les poèmes des aèdes. C’est un monde qui regorge de dangers. Si certaines concubines sont des artistes réputées, d’autres rivalisent d’ingéniosité allant jusqu’à recourir au meurtre pour obtenir du pouvoir et s’attirer les faveurs du roi Brun. Ce dernier attise les connivences et les jalousies pour mieux les piéger afin de s’assurer leur fidélité.


Mais c’est aussi l’endroit idéal pour permettre à Deirane de forger ses armes pour se venger de ceux qui ont détruit sa vie et l’ont réduite en esclavage.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 décembre 2021
Nombre de lectures 29
EAN13 9782955971482
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0041€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Laurent Delépine


La Chanceuse


La malédiction des joyaux – Livre 3




 
Prologue
La porte s’était refermée sur Deirane. Elle ne s’en était pas aperçu. La seule chose qui lui venait à l’esprit était qu’on lui avait menti. Elle s’était laissée capturer docilement parce qu’on lui avait promis qu’elle retrouverait son fils. Mais il était mort, comme l’étaient ceux sur lesquels elle comptait pour venir à son secours.
Maintenant, elle savait. Elle n’avait plus rien à attendre de l’extérieur. Si elle voulait s’en sortir, elle allait devoir se débrouiller seule. Elle était si petite et si faible, elle ignorait encore comment elle allait pouvoir faire. Elle avait un atout cependant : son prix. Ces pierres précieuses que le drow lui avait greffées dans la peau étaient à l’origine de son malheur. Mais elles la rendaient unique. Jamais son propriétaire ne prendrait le risque de l’endommager. De toute façon, elle n’avait plus rien à perdre, alors pourquoi s’en soucier ?
Toutefois, ces fils d’or et ces diamants ne lui serviraient à rien si elle n’apprenait pas à les utiliser. Elle était si ignorante. Elle allait devoir s’instruire. Les leçons que lui avait prodiguées Ard – son mentor pendant le voyage qui l’avait menée ici – étaient intéressantes. Elles lui permettraient de briller en société, mais elles ne seraient d’aucune utilité pour ses objectifs. Non, ce dont elle avait besoin, c’était d’apprendre à se servir de ce corps que la nature lui avait donné. Elle était belle, bien plus que la moyenne. Et les autres femmes ne disposaient pas de ce tatouage invraisemblable à base de pierres précieuses et de fils d’or.
Elle se trouvait dans un harem, l’endroit idéal pour s’initier à utiliser un corps tel que le sien. Elle y était entourée d’une multitude de prisonnières prêtes à l’aider si on leur offrait l’occasion de reprendre leur liberté. Il ne lui restait plus qu’à se jeter dans le bain.
Deirane était résolue. Ils l’avaient arrachée aux siens. Ils avaient tué son fils, son fiancé, ainsi que son amie qui s’était lancée à sa poursuite pour tenter de la sauver.

Ils allaient le regretter.

I L’Arrivée
Les trois premiers jours, Deirane refusa de manger.

On lui apportait la nourriture dans un plat en carton ciré. Beaucoup de nouvelles venues avaient tenté d’utiliser la vaisselle traditionnelle comme une arme, pour agresser leurs geôliers ou pour se suicider.

Le premier jour, elle resta prostrée dans son coin, assise par terre dans un angle du mur. Elle avait ignoré la couchette qui semblait confortable avec son matelas rebondi, en laine certainement, et des draps qui brillaient comme elle n’en avait jamais vu auparavant. C’était peut-être de la soie. Elle n’avait pas cherché à l’atteindre. Un siècle plus tôt, ou juste la veille, elle ne savait plus trop, elle avait compris que son fils était mort. On lui avait fait miroiter leurs retrouvailles prochaines, alors qu’en fait il n’était déjà plus de ce monde. Sur le moment, cela avait déclenché en elle une rage profonde, nourrie par une haine pour tous ces gens. Son fils mort. Ils en étaient responsables. Il était si jeune. Son enfant qu’elle avait porté en son sein. Son enfant qu’elle avait allaité. Hester. Plus jamais il ne poserait la main sur sa joue en levant ses yeux bleus vers elle. Plus jamais il ne lui adresserait ses sourires. Elle ne le verrait jamais faire ses premiers pas. À cause de ces monstres. Biluan ! Jevin ! Brun ! Tous ! Elle voulait les voir morts. Elle voulait les faire souffrir autant qu’ils avaient souffert, Hester et elle. Puis elle avait appris la mort de son amie. Et avec, ses espoirs de quitter un jour cet endroit s’étaient envolés. Cette nouvelle l’avait anéantie. Elle était restée longtemps là où elle était tombée, sur le tapis bien épais, avant de se traîner dans un coin où elle passa la nuit. Les lieux étaient luxueux, totalement différents de ce qu’elle avait connu dans les cellules de Biluan – le trafiquant d’esclave qui l’avait capturée et revendu au roi Brun d’Orvbel – mais elle ne le remarqua pas.
Le second jour, elle prit conscience de l’entrée du geôlier. Et elle réagit. Elle balança le plateau à travers sa chambre. Il eut juste le temps de refermer la porte derrière lui pour éviter de le prendre en pleine figure. La jeune femme visait bien, le projectile s’écrasa contre l’huis exactement là où se trouvait son visage un instant plus tôt.
Le troisième jour, elle attendait son visiteur. Il était si prévisible à toujours passer à des horaires fixes, quatre fois par jour. Dans sa chambre, il n’y avait rien qui aurait pu servir d’arme à une personne aussi frêle qu’elle. Il n’y avait même pas un miroir qu’elle aurait pu casser, ou une planche à arracher. La fenêtre ? Peut-être si elle avait possédé de quoi fracasser sa vitre. Le fauteuil qui trônait dans un coin pesait beaucoup trop pour une personne à peine haute d’une perche un quart. Ses solides brodequins de fermière qu’elle portait quand elle travaillait aux champs n’étaient plus qu’un lointain souvenir. Depuis qu’elle était montée à bord de ce bateau maudit, elle mettait le plus souvent des mules en soie. Elle résolut de passer en force. Le gardien qui lui apportait son repas ne s’attendrait certainement pas à ce qu’une femme de sa corpulence tente de s’enfuir de cette façon. Elle se plaça juste à côté de la porte, de façon à pouvoir saisir sa chance dès qu’elle s’ouvrirait. Et elle patienta.
L’homme s’y attendait. Elle aurait dû s’en douter, elle n’était pas la première prisonnière qu’il surveillait. Il avait dû voir toutes les méthodes possibles et imaginables que les captives avaient mises au point au cours de ses années de services. Quand Deirane essaya de s’enfuir, il l’intercepta avec le plateau qui se répandit sur elle. La chaleur du velouté lui arracha un cri de douleur. Comme chaque fois depuis qu’on le lui avait infligé, son tatouage la protégea des atteintes physiques. Il la protégeait de tout, sauf de la souffrance. Une fois de plus, Deirane se retrouva à jeun, maintenant elle était en plus sale et endolorie.

Le quatrième jour marqua un changement. Ce ne fut pas son geôlier habituel qui lui apporta à manger. L’homme lui était totalement inconnu. Intriguée, elle le suivit du regard quand il traversa la chambre. Grand et musclé, il avait le teint jaune des habitants du Shacand, les yeux bridés, les cheveux noirs rassemblés en une tresse épaisse dans le dos et une moustache fine et tombante. Il portait la tenue en variation de rouge caractéristique des domestiques du palais, un pantalon bouffant en soie retenu par une cordelette argentée, une tunique écarlate au col droit, brodée de motifs gris argent, et des babouches d’une couleur pâle presque blanche. Il ne portait pour seul bijou qu’une chaîne en argent à gros maillons qui soutenait un pendentif représentant un soleil stylisé. De toute évidence, il jouait un rôle important en ces lieux.
En entrant, il repoussa la porte du pied. Au lieu de donner le plateau à Deirane, il le posa sur la commode devant la fenêtre. Puis il alla s’asseoir sur le fauteuil. Il ne dit rien, se contentant de regarder la jeune femme aux vêtements tachés. Ses yeux parcouraient son visage, détaillant le rubis sur son front, les diamants de ses joues. Puis il passa aux mains, couvertes de pierres. Le reste de son corps n’était pas visible, caché par les habits. Cela changerait bientôt. De son côté, Deirane l’examinait également, son intérêt avait été éveillé par ce visage inconnu qui, sans être aussi vieux qu’Ard – cet esclave qui avait été son mentor ces dernières semaines –, avait l’âge d’être son père.
Il fut le premier à prendre la parole.
— On m’a dit que tu ne voulais pas manger, dit-il en yriani.
— Qui êtes-vous ?
— Je suis Chenlow, et toi tu es Deirane.
Ce n’était qu’un nom. Cela ne répondait pas à la question de la jeune femme. Elle ignorait la fonction de son interlocuteur. Elle se doutait qu’il n’était pas un sous-fifre. C’était un individu important, occupant un poste élevé dans la hiérarchie. À quel point et selon quelle hiérarchie ? Chenlow le comprit, il

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents